Chapitre 15

Une affreuse douleur au crâne et dans le cou m'extrait de mon sommeil, du moins c'est ce que je comprends après ouvert les yeux. Petit à petit, le léger filtre de brume s'évapore de mon champ de vision et retrouve la sensibilité de mes membres. Je suis assis sur une chaise. Jusque-là, je dirais que ça va. Je lève légèrement la tête et c'est à cet instant que tout part en vrille. Je me rends compte que celle-ci est enfermée dans une sorte de cage, de boîte en fer. Je ne peux donc pas voir à travers, hormis la plaque en plexiglass qui m'entoure jusqu'à la base de mon cou.

Mon cœur s'emballe. Je lève la tête au-dessus de moi, mais je n'y vois qu'un conduit qui ne me parait pas très net. Mon souffle s'accélère, résonne et frappe le métal de la boîte. Je décide alors de contracter tous mes muscles pour faire bouger les choses : mes jambes sont attachées à la chaise qui est elle-même fixée au sol. Je grogne dans l'effort, je tâte les parois de la cage avec mes mains qui sont, elles, bien libres et plonge mes ongles dans les jointures de fer mais ça ne bouge pas d'un poil. Tout ce que viennent faire bouger mes doigts, c'est un cadenas. Énorme. Verrouillé contre la boîte. Il me faut une clé pour le détacher, mais j'ai pourtant le réflexe loin d'être perspicace, de tirer dessus, au cas où il cèderait sous ma poigne de fer. Mais évidemment, il reste à sa place et ne fond pas comme j'aurais voulu qu'il le fasse. Alors que je tente de me sortir de cette situation, j'entends une voix très familière me surprendre :

- Kai, Kai, Kai... Mon vieux, tu me feras décidément toujours rire...

Cette voix c'est celle de Jake. Ça y est je me souviens ! Je descendais les marches avec Nathan, j'ai ouvert la porte et on m'a sauté dessus... C'était lui... La piqûre qui m'a engourdi tout entier, puis le noir complet.

Mon regard s'assombrit alors. Mes poings se crispent. Je suis sûr que chacune de mes phalanges sont blanchies.

- Jake... Espèce de salop ! Qu'est-ce que tu as fait de moi ?! C'est comme ça que tu accueilles ton ancien coloc' et meilleur pote ? Sale psychopathe, tu me dégoûte...

J'entends des pas, il est là tout près, mais je ne peux le voir. Seulement son ombre à travers le plexiglass. J'essaie alors d'abattre mes poings sur ce que j'espérais au début la gueule de ce type que je ne reconnais plus. Mais mes doigts parfaitement fermés et serrés dans ma paume ne font que frapper l'air. Encore enfourmillé par le sédatif, je suis vite à bout de force rapidement et détends mes poings, dont je suis certain d'avoir les traces de mes ongles en leur centre.

- Bla bla bla... Garde ta salive et ton énergie pour ce qui va suivre. Écoute un peu ce que j'ai à te dire.

- Plutôt crever Jake ! dis-je en frappant la boîte, m'infligeant involontairement une migraine.

Je l'entends roder autour de moi, comme un prédateur tourne autour de sa proie.

- Oh mais Kai est décidément très en colère ! Bouhh !

- Sors-moi de là !

- Oh que non, tu devras te débrouiller tout seul pour le coup...

- Où est Nathan ?!

Ma rage emplie ma voix.

- Le handicapé est malheureusement trop loin pour t'entendre...

Il a dit cette phrase en tapant avec ses phalanges en rythme la boîte métallique. Jake reprend :

- Tu as 15 minutes pour le sauver et le sortir de sa situation... embourbée, c'est le cas de le dire...

- Pourquoi tu fais tout ça, putain ?!

- Pourquoi ? Euh... Laisse-moi réfléchir... Oh mais dis donc ! Je n'en sais foutrement rien !

- Je suis maintenant sûr que c'est toi qui a fait disparaître ton supérieur, ton patron et ta collègue !

- Eh bien tu as complètement raison, mon cher ami ! Mais rassure-toi, ils ne sont plus là pour me dénoncer.

- Et que vas-tu faire de moi ? Me tuer ?

- Ohh mais tu poses beaucoup trop de questions Kai-Choupinou. Disons... que c'est à toi de choisir, dit-il avant de pouffer d'un rire sombre et rauque. Laisse-moi t'expliquer les règles du jeu...

- Un jeu ?! Tu es complètement taré mon pauvre... lui coupai-je.

- Tu es dans mon univers, c'est moi qui décide et...

- Laisse-moi plutôt sortir d'ici, bordel !

Je l'ai encore interrompu. Il laisse en suspens ma phrase pendant quelques interminables secondes. Je l'entends encore me tourner autour puis finit par enfin rouvrir sa gueule :

- Tu sais quoi Kai ? Je vais te laisser trouver tout seul la solution au problème et... et voilà, rien d'autre à ajouter...

- Sors-moi de là, merde ! criai-je.

- Tu n'avais qu'à pas me couper la parole deux fois de suite, Kai.

- Espèce de fou furieux ! Psychopathe !

- Je te préviens juste que tu as un temps limité pour te sortir, et sortir Nathan de là, ne l'oublie pas, alors ferme-la et... Bon vent !

Je le sens qu'il s'éloigne de moi et ouvre ce qui s'avère être une porte.

- Et au passage, merci pour le compliment.

Puis un claquement vient succéder le passage de Jake. Enfin, un tintement retentit et je peux entendre des « tic-tac » répétitifs : « Le compte-à-rebours... Il ne rigolait pas, j'ai bien une limite de temps pour sauver mes fesses et au passage celles de Nathan. Mon Dieu, j'ose à peine imaginer dans quelle situation il se trouve au moment où mon « épreuve » commence. »

Décidément, j'ai de plus en plus l'impression d'être dans l'un des pièges de ce type, dont je ne suis pas sûr du nom... JohnSaw ? Bref. Tout le monde parlait de ce type il y a quelques temps.

Paniqué, j'entends du mouvement dans le tuyau au-dessus de moi. Je balade mes mains un peu en espérant trouver quelque chose, quand un truc vient tomber sur moi, sur ma tête. Je sursaute sur le coup : « Ah ! » criai-je un bref instant.

Je secoue la tête pour tenter de retirer cette chose, mais c'est étonnamment lourd. Je tente alors de le détailler malgré l'éclairage réduit : ça bouge, ça pèse lourd, c'est un peu luisant, tout en longueur...

O mon Dieu...

Un sifflement vient me chatouiller les oreilles, j'écarquille grand les yeux : un serpent. Il y a un putain de serpent enfermé avec moi dans une putain de boîte dont je ne trouve pas la putain de solution pour en sortir. Mon cœur s'emballe un cran encore au-dessus.

- Au secours !

Bon, je me doute que personne ne pas me répondre, mais instinct de survie, j'ai pas pu m'en empêcher. Le serpent bouge encore.

Merde... Mais qu'est-ce que je fais ?!

Mes doigts rencontrent à nouveau le cadenas.

La clé...

J'essaie d'analyser un peu – et surtout comme je peux – le mécanisme. C'est bien ça. À l'endroit où le cadenas est fermé, il y a une jointure tout le long.

Il me faut cette clé... La solution est là.

Et c'est à cet instant que la situation qui était jusqu'à présent paniquant, passe au stade d'enfer véritable. La bête s'enroule autour de mon cou, de plus en plus vite, et par-dessus tout, de plus en plus fort. Par réflexe, je tente de porter mes mains à mon cou, mais évidemment elles se heurtent contre le métal. Ma trachée est de plus en plus compressée, je manque d'air. Il faut que je me sorte d'ici, et vite... Sinon je risque de ne pas faire long feu et de finir étranglé.

Je prends une grande inspiration avant de ne plus pouvoir respirer du tout. En apnée totale. Le reptile siffle mais ne mord pas, tandis que moi, j'ai peur et je ne respire pas. Si mes voies respiratoires sont bloquées ainsi encore quelques dizaines de secondes supplémentaires, je ne vais pas tenir longtemps. Mes yeux se plissent et mes doigts tapotent maladroitement sur tous les côtés de la boîte, sans jamais rien trouver.

Je sens mon sang affluer dans ma tête. Je dois sérieusement commencer à rougir. Quand j'essaie de baisser la tête, à la fois l'étau se resserre et la bête m'empêche de voir. Mon sens visuel est donc réduit à néant. Je lève alors mes bras vers le tuyau d'où est apparue la bête, ce que je n'ai pas fait avant. Tandis que je longe le cylindre creux, je commence à avoir des étoiles dans les yeux.

Vite...

C'est alors que je sens entre mes doigts une chaînette au bout de laquelle pend un petit objet.

La putain de clé ! Enfin !

Je tire sur la chaîne, libère la clé et cherche tant bien que mal la serrure du foutu cadenas. J'enfonce enfin la pièce métallique, la tourne et enlève le bazar à la vitesse de l'éclair. Je le jette par terre. Je dois avoir le visage écarlate, car je le sens surchauffer et mon audition est presque nulle. J'ouvre la boîte avec fracas et la première chose que je vois, c'est un couteau. Très affuté. Je me baisse aussitôt pour le ramasser à mes pieds, tandis qu'avec ma main droite j'attrape la tête du serpent. Quand j'ai en main l'arme, je n'hésite plus seconde. Alors mes yeux révulsent, je mets mes dernières forces en œuvre en coupant la tête de la bête. Les écailles craquent, la chair se déchire, les os se brisent et l'étau se desserre enfin. Je laisse tomber le bout par terre, la paume rougie par le sang et enlève cette lourde et asphyxiante écharpe d'écailles. La bouche grande ouverte, je me redresse sur le dossier en métal de ma chaise et savoure l'oxygène qui peut enfin aller et venir dans mes poumons sans encombre.

« Dans ton cul, Jake ! », tentai-je de hurler, mais ce n'est qu'un couinement qui en sort.

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