Prologue - One Summer Day
C'était une soirée d'été banale.
L'air étouffant et lourd, un ciel trouble annonciateur d'orage. Loki aurait du savoir que la pluie allait tomber, tôt ou tard. Ça ne l'avait pas empêché de sortir en trombe du bar, sa paire de cuissarde à la main. Hela était probablement en train de descendre une autre bouteille de vodka avec Amora. Les deux filles n'allaient pas remarquer son absence avant l'aube. Quelle idée d'avoir suivit son aînée la dedans, franchement !
C'était marrant lorsque sa grande sœur lui prêtait de l'attention et le pomponnait à coup d'eye liner et de noir à lèvre. Une fois qu'elle se mettait à boire et draguer l'entièreté du club, l'ambiance ne lui plaisait plus autant. Loki restait dans son coin à subir le regard curieux des vieux types qui se demandaient ce qu'il avait sous sa jupe. Sa perruque le grattait et le mascara piquait ses yeux. Le temps passait et il se sentait ridicule. De retour devant son miroir à la maison, il se sentait invincible, beau, belle.
Face à la réalité, Loki avait l'impression d'être un imposteur. Quand il s'était approché d'Hela pour lui faire comprendre qu'un sale gars n'arrêtait pas de le mater de haut en bas, que les talons pétaient ses chevilles et qu'il ne respirait plus dans ce corset de malheur, elle se contenta de ricaner. Loki comprit à ce moment là qu'il ne tirerait rien de son aînée et décida de s'en aller.
La pluie s'abattit sur lui et il maudit ce foutu maquillage. On aurait pu croire qu'il marchait tout droit vers un cirque.
Le jeune homme avança, pied nu, vers la station de métro la plus proche. Hors de question d'appeler un taxi ; il était à court d'argent, puis ses parents surveillaient ses moindres relevés bancaires. Et Loki n'était vraiment vraiment pas sensé se trouver hors de sa chambre, à l'heure actuelle. Encore moins habillé de cette manière.
En déambulant dans les quartiers bondés d'étudiants, longeants restaurants, clubs, bars et boîtes de nuit, une ruelle sombre interpella Loki. Pas pour ses murs crasseux où les déchets étalés sur son trottoir. Mais pour l'étrange personnage qui y était recroquevillé.
Loki pensa d'abord à un SDF. Il lui suffit de s'approcher davantage pour réaliser que, non, un SDF ne porterait pas du Prada sur mesure. Un pas de plus, puis trois, et il réalisa que cet inconnu, non SDF, était nul autre que Tony Stark en personne.
Tony Stark étalé dans une ruelle.
Tony Stark en larmes dans une ruelle.
Loki n'était pas un grand buveur, mais il eut peur d'avoir trop forcé sur le whisky, ce soir là. Il cligna plusieurs fois des yeux pour chasser une possible hallucination, avant de réaliser qu'il ne rêvait pas.
Il ne s'agissait pas seulement de Tony Stark, fils du multi milliardaire Howard Stark, jeune génie, playboy etc etc etc. Non. Pour Loki, il était ce gamin arrogant qui traînait avec Thor et ses amis idiots dans des soirées friquées. Ce gamin qui lui ressemblait plus que personne, malgré leurs différences. Celui qui osait lui tenir tête et répondre à ses insultes cinglantes. Celui qui sortait du lot et qui ne traitait pas Loki comme « le simple petit frère de Thor ».
Oh, Tony Stark était horrible avec lui. Méchant. Sarcastique à en mourir. Mais Loki aimait cela. Il aimait être traité à sa juste valeur. Non pas comme un enfant perturbé qui avait sa place dans un asile.
« Tu es dans un état bien pitoyable. Qu'est ce que tu as encore fait? » demanda t'il en se plantant face à lui.
Vu son expression, le jeune homme ne semblait pas l'avoir reconnu. Loki remercia intérieurement le peu de maquillage restant sur sa face.
« Il y avait trop de lumières à l'intérieur. J'ai cru que ça allait me tuer. Je voyais plus rien. Et ils criaient. Ils crient trop. Ils peuvent pas juste s'arrêter, cinq minutes? Ma tête tourne.»
« T'es défoncé. » remarqua-Loki, moqueur.
Stark releva la tête vers lui et fixa ses longues jambes.
« T'es pieds nu. » remarqua t'il, encore plus moqueur.
Loki s'agenouilla près de lui. Ses pupilles dilatées et la pâleur surprenante de sa peau confirmèrent ses doutes. Le bon vieux Tony Stark n'avait pas dit adieux à ses mauvaises habitudes.
Le tonnerre gronda.
« T'es d'ici ? demanda le jeune milliardaire. T'aurais pas un truc, n'importe quoi? Pour faire passer ce putain de mal de crâne. Je te jure que ça va me tuer si je prend rien. Juste un joint, un verre, un truc. N'importe. Du moment que ça s'arrête. »
« J'ai du LEXOMIL. »
« C'est quoi cette merde? Donne. »
Loki fourra sa main dans sa poche, prêt à sortir sa boîte d'anxiolytiques. En temps normal, il aurait filé l'entièreté des médicaments à Stark. Déjà car il détestait prendre ses putains de pilules et qu'il aimerait bien s'en débarrasser. Et aussi parce que c'était fun de le voir dans un état pareil.
Seulement, quelque chose l'arrêta. Le regard désespéré de son interlocuteur. Ses mains tremblantes. Sa voix suppliante.
Il dépendait de ça. Loki ne voulait pas lui faire ce plaisir.
« Je vais plutôt te donner mon téléphone pour que tu appelles quelqu'un. » déclara t'il.
« Désolé chérie, ricana Stark amèrement. J'ai personne à appeler. Mais tu peux me tenir compagnie si tu veux. »
Oh, comme le Loki de quatorze ans jubilait.
Le Loki de dix-sept ans n'était pas du même avis. Les hommes comme Stark, il les connaissait, maintenant. Au premier regard, ils t'impressionnaient, t'intimidaient. Puis ils t'apitoyaient. Un moyen malsain de t'attirer dans leur filet, pour ne plus t'en réchapper. Tony Stark n'était certainement pas à plaindre.
Et Loki ne prétendait certainement pas pouvoir l'aider.
Tout simplement car ils étaient pareils. Loki était lui aussi, cet homme impressionnant, intimidant. Pitoyable. Qui cherchait une grippe sur quelqu'un. Un sauveur.
Près de lui, Stark se mit à trembler de plus belle, presque convulsivement.
« Tu peux pas me filer tes médocs? »
« Je sais pas, t'aimes les overdoses ? »
Tony rit légèrement, avant d'hoqueter à répétition. Il enfouit son visage entre ses mains et se tira presque les cheveux pour se calmer.
« Je vois rien, marmonna t'il.. Je vois rien, tout est flou. J'aurais pas du prendre cette merde je savais que ça allait me niquer le cerveau...Je me demande... À quoi tu ressembles ? T'as les cheveux noirs? Bruns ? Putain-J'ai envie de m'arracher les yeux. »
Loki le regarda déblatérer, le sourcil relevé, impassible.
« Ça fait un mal de chien, continua t'il. D'ailleurs ils sont comment tes yeux ? Bleus ? Verts ?»
« Je te laisse imaginer. » répondit calmement Loki.
« C'est un peu excitant. » plaisanta l'autre.
Loki leva les yeux au ciel suite à cette réplique, auquel il n'eut pas le temps de répondre. Stark repartit dans un nouveau monologue plaintif, sur le son répétitif du tonnerre.
« Putain. Il fait froid. Putain de pluie. Putain d'orage. Je sais pas qui t'es mais t'as un sacré courage pour supporter ma connerie avec un temps pareil. Gratuitement en plus. »
« Et tu devrais avoir honte de te trouver ici en premier lieu.. »
« Je sais... Mais je peux pas me relever. Bordel, si ma mère me voyait... Elle doit me voir. Elle voit toujours tout. Putain, je dois aller lui parler demain. Dans cet état. C'est la merde. Je suis vraiment une merde. »
« Oui. » affirma Loki.
« Quoi?! s'indigna t'il. T'es pas sensé approuver quand je m'insulte. »
« Je préfère être honnête. Mentir est la pire des insultes. Crois moi je le sais, c'est ma spécialité. »
Stark ricana. Il saisit sa main manucurée et la serra dans la sienne.
« Je t'aime bien. Tu restes avec moi? »
« ... »
Loki aurait déjà du déguerpir depuis un bout de temps. Cependant, cette situation l'intriguait. Toutes personnes lisant un minimum les journaux connaissait les troubles addictif de Tony Stark. Mais ça, ça, c'était une autre histoire.
Il gisait sous la pluie, comme un pauvre chaton abandonné en manque de poudre blanche. En manque d'attention. D'affection. Stark était ridiculement pitoyable. Et Loki s'en réjouissait.
Néanmoins, traîner ici ne lui apporterait que des problèmes supplémentaires. Il devrait rentrer. Dès maintenant. Mais le laisser en pleine rue... Loki n'était pas un bon samaritain, pas le moins du monde. Pourtant il se surprit à hésiter. Et Stark profita de ce moment d'inattention pour resserrer sa main, appelant à son humanité.
« Est ce que je meurs ? Je me sens comme si je mourais. J'ai jamais pensé que j'allais mourir comme ça. Je m'imaginais entouré d'argent et de femmes. Pleins de femmes. T'es une femme? »
« De temps en temps. »
« Cool alors. Cool cool cool cool. » conclut il en se frottant énergiquement les bras, presque nerveux.
Loki enleva sa veste par réflexe. Il ne cherchait pas non plus à le laisser crever d'hypothermie. Certes, il n'était pas empathique. Sauf qu'un mort sur la conscience, ça pesait ; surtout lorsqu'il était si riche. Loki n'avait pas envie de voir son cadavre au news lorsqu'il mangerait ses céréales le lendemain matin.
« C'est cool? » s'assura t'il en l'enveloppant dans sa veste.
Tony planta ses yeux humides dans les siens.
« Cool. » affirma son interlocuteur.
Stark lui sourit, béatement, et frissonna contre la doudoune. Loki comprit dans son regard qu'il ne le voyait pas. Il était complètement invisible. Sa main moite tenait la sienne comme un dernier ancrage dans la réalité.
La foudre frappa à nouveau.
Le jeune homme semblait être partit dans un état de semi conscience. Loki, immobile, continuait de l'observer sans un mot, avant de scruter les alentours. Les quelques fêtards restant couraient pour s'abriter de l'orage. La plupart semblaient trop bourrés pour réfléchir convenablement.
Merde. Il allait réellement devoir l'abandonner ici ? Loki repensa aux infos diffusant le cadavre de Stark, le lendemain matin, et frissonna.
Soudain, par miracle, un jeune homme à la carrure sportive déboula dans la rue voisine.
Loki ne vit pas son visage ; il portait la veste du campus le plus proche et semblait assez sobre pour prendre la situation en main. Ça lui suffisait. Suivant son intuition, il éleva la voix en sa direction.
« Hey ! Le coureur ! Viens aider une pauvre âme en peine ! »
Ledit coureur n'hésita pas. Presque alerté, il se pointa face à lui en un instant.
« Une âme en peine ? » s'inquiéta t'il.
« Oui, lui répondit Loki. Moi. Je ne peux pas supporter ce type mais il risque de crever. Occupes toi en à ma place ? »
Il s'écarta pour lui designer Stark, assoupit contre le mur. Le sportif fronça les sourcils.
« Hum... Je ne suis pas sûr de com-»
« Merci! » le coupa t'il, sous la confusion totale du jeune étudiant.
Loki lâcha promptement la main de Stark sans un regard pour lui, et passa son chemin. Le sportif s'abaissa immédiatement vers le jeune homme pour prendre son pouls, paniqué. Il fallut quelques minutes à Steve pour réaliser que l'étrange inconnue avait oubliée sa veste près de l'inconscient.
Mais Loki avait déjà disparue de l'allée.
Quelque chose lui disait, qu'il avait prit une bonne décision. Peut-être bien pour la première fois de sa vie.
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