-Alex ! Cria t-elle avant un long soupire.

Après avoir roulé de l'autre côté du lit, elle vint se coller contre moi, la main sur mon torse. Toutes les nuits se ressemblaient sans que je ne puisses me sortir de la tête son nom. Taylor White.

-A quoi tu penses ? Me demanda la blonde mes côtés.

Sans dire un mot, je me levais et me dirigeais vers la salle de bain.

-Habille toi et fout le camp. Lui disais-je sur un ton autoritaire avant de fermer la porte derrière moi.

Elle jura et m'insulta – ce que je ne lui en voulais pas.

Touts les soirs une fille, des orgasmes à répétitions et puis le vide. Un vide douloureux. La perte de celui qui m'a aidé à sortir de la misère. Marlon Davis.

J'avais 17ans lorsqu'il m'a recueilli chez lui un soir de Décembre. Je venais de m'en fuir de l'orphelinat. Perdu dans les rues de New York, et gelé jusqu'aux os, je m'étais assis à même le sol dans une impasse étroite, tentant d'échapper au vent sifflant entre les buildings. La seule chose que je me souvienne ensuite est de mettre réveillé dans un lit. Personne n'avait cherché à me retrouver, sûrement car quelques jours plu tard mon anniversaire officialiserait ma majorité.

Que dirait-il s'il me voyait aujourd'hui ?

Depuis un mois que sa lettre reposait au même endroit, cramponnée au rebord du miroir. Elle me narguait.

« Taylor White – 246 Third Avenue , New York »

Je relisais les mêmes mots, chaque jour en passant devant. Il m'a confié une mission, mais je ne pouvais me résoudre à lui obéir.

J'étais le meilleur dans mon domaine. Stupéfiants, délinquants, criminels... on m'appellait, on me donnait une tâche, j'y allais et je l'accomplissais avec succès. Je n'étais pas seul. On était six – sept autrefois – dans le groupe, et c'était les seuls personnes avec lesquelles je communiquais. Vous vous demandez pourquoi ? Mon job. Je ne pouvais pas me permettre de mettre la vie de quelqu'un en jeu. C'était risqué, car je pouvais parfois faire les frais de vengeance.

Alors pourquoi m'avait-il confié sa fille ?

« Protège ma fille, Alex ! »

Il était celui qui me connaissait le mieux. Qu'est-ce qui était passé par la tête de ce putain de Marlon ? ! Son dernier souhait avant de crever était-il celui que sa fille meurt ? Qu'elle soit tuée par ma faute d'une balle dans la tête ?

Je tendis le bras et arrachais ce bout de papier.

-Qu'est-ce que je vais faire de toi, Mademoiselle White ?

Un mois. 30 jours entiers à ne penser qu'à une seule personne. J'en deviennais dingue, à un point que je pensais – presque – être atteint de schizophrénie. Sans m'en rendre compte, je me mis à taper du pied,                         tant dis que mon index commençait à gratter frénétiquement un coin de la feuille.

-Okay Taylor, à nous deux.

J'ouvris la porte. Un petit bout de tissue était posé au milieu du lit. Une petite culotte en dentelle rose fushia sur laquelle trônait un post-it « Je ne pensais pas ce que je t'ai dis. Appelle-moi, Irina ».  Un grognement raisonna dans la chambre. Baxter, un Dogue Allemand, entra en reniflant la pièce.

-Qu'est-ce que tu en pense, Baxter ? Bonne ou mauvaise pioche ?

Il pencha la tête et un jappement sortit de sa gorge.

-Ouais, moi aussi.

Je jetais le papier en soupirant. A quoi bon prendre deux fois quelque chose quand on peut en avoir une nouvelle... dans l'urgence, peut-être.

Je m'asseyais à mon bureau et ouvris mon plus gros dossier, celui sur Taylor. Encore jamais ouvert, il était resté au même  endroit depuis le soir de la mort de Marlon. De multiples informations la concernant étaient empilées les unes sur les autres. Fiches d'identités, des certificats de naissance, listes complètes des lieux qu'elle fréquentait... Je sortis un porte document, dont une feuille s'échappa, en l'ouvrant,  et glissa au sol.

Il s'agissait d'une photographie. Une petite fille souriait timidement à l'objectif, dévoilant de petites dents – certaines absentes. Les mains derrière le dos et ses pied croisés montraient qu'on l'avait forcé à la prendre en photo. Elle était belle, même avec son petit serre tête ridicule décoré de deux drapeaux américains.

Je la retournais et lisais ce qu'il était inscrit au dos « Pour Marlon, ta fille Taylor – 4 Juillet 2004 ».

Son acte de naissance m'informait qu'elle était né en 1995, elle devait donc avoir 9ans. Je fouillais pour observer les autres photographies, mais aucunes d'entre elles ne la montraient plus âgé. Étrange. Qu'était-elle devenu aujourd'hui ?

Je faisais défiler les pages, jusqu'à le partie « Job ». Marlon était son père je veux bien le concevoir, mais de là à établir la biographie de sa fille, il ne faut pas abuser ! Il avait répertorier les écoles qu'elle avait fréquenté – dont deux années à Columbia University pour une licence de droit – des stages, et du bénévolat. Cette fille était-elle parfaite ?

En regardant de plus près, j'appris qu'elle travaillais depuis deux mois comme serveuse le soir dans un café, nommé « Glady's » sur Brooklyn.

-Qu'est ce que tu fous dans un bar, Taylor ?

Je ne connaissais personne qui travaillait comme serveur, mais qui à côté possédait des diplômes dans les plus grandes écoles privées.

Une recherche Google pour me renseigner sur l'heure de la fermeture de ce fameux « Glady's ». Dans deux heures. En retirant les embouteillages et la traversé de New York, j'avais au moins une bonne heure devant moi.

Quelques minutes plus tard, au volant de ma Camaro, je me dirigeais vers mon principal problème, bien décidé à régler cette affaire et à reprendre le contrôle de mon esprit, peu importe les conséquences. Après tout, c'est Marlon qui l'avait voulu... se serait de sa faute.
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