Savage
La journée se terminait enfin. Soulagée d'en avoir fini avec les trois marmots qui me serviraient d'étudiants pour quelques années, je pris quelques instants pour m'étendre directement sur l'herbe à l'orée d'un arbre. Bras derrière la tête, j'observai distraitement les nuages défiler lentement devant mes yeux, dans un ciel qui prenaient des teintes chaleureuses, un doux mélange entre un rose bonbon et un orange vif. La période estivale s'achevait, et cela se ressentait notamment à la tombée de la nuit, de plus en plus rapide. Les arbres quant à eux se préparaient à sacrifier leur verdure pour lutter contre les températures beaucoup plus froides qui arriveraient bien plus vite qu'on ne le pensait. Je fermais les yeux durant une poignée de seconde, savourant la légère brise qui venait s'échouer sur mon visage.
Ce n'est que lorsqu'une truffe froide se nicha dans mon cou que je les réouvris. Je pris appui sur mes mains pour me relever et me retrouver en position assise. Cela eut pour effet de faire reculer vivement l'être qui se tenait désormais à quelques mètres devant moi, mais qui me regardait tout de même avec une curiosité non dissimulable.
L'endroit où je m'étais arrêtée était désormais désert, silencieux et dépourvu de toute présence. Excepté le propriétaire de ces doux yeux onyx qui me regardaient avec curiosité en penchant de temps à autre la tête sur le côté. Je ne saurai dire combien de temps nous nous étions tous deux dévisagés, les minutes semblaient suspendues dans ses iris captivantes d'une couleur sombre comme la nuit. Tout ce que je pouvais dire, c'est que l'animal semblait attendre patiemment quelque chose dont j'ignorais tout. Pesant le pour et le contre dans mes pensées, je finis par lever prudemment la main droite à sa hauteur et j'attendis. Je pouvais entendre mon cœur tambouriner dans ma cage thoracique alors que le canidé tressailli légèrement et recula d'un pas. Une vague d'amertume m'envahit, pensant que j'avais tout gâché avec ce geste sans doute trop brusque pour une créature sauvage. Néanmoins, je pris le parti de patienter ainsi, immobile, main toujours tendue vers cet animal bien plus grand qu'un de ses banals congénères. Ce dernier observa ma paume avec un mélange de d'attention et de crainte. Lui aussi semblait aussi perdu que moi dans ses actions.
- Tu peux venir, tu sais. Je ne te ferai pas de mal. Je te le promets.
L'être sembla considérer mes paroles, comme s'il les comprenait. Je me faisais certainement des idées en pensant cela, il devait plutôt analyser mon intonation que je m'étais efforcée de rendre la plus douce possible. Finalement, le propriétaire des orbes couleur onyx finit par s'avancer à petit pas pour renifler mes doigts. De longues minutes s'écoulèrent ainsi, où je pouvais sentir sans peine la truffe humide se poser à différents endroits de ma main, semblant la scanner de long en large. Je senti mes muscles s'endolorir face à mon immobilisme et je déglutis difficilement malgré moi, espérant vivement réussir à rentrer dans la grâce de cette créature aussi magnifique que mystérieuse. Finalement, le petit curieux s'arrêta et d'un coup de tête frotta sa longue et douce fourrure blanche contre mes doigts. Surprise, mais heureuse de voir que le carnivore avait bien voulu m'accorder un peu de sa confiance, j'entrepris de gratter doucement mes ongles entre ses deux oreilles pointues. Ses yeux se fermèrent instantanément, alors que de légers halètements sortirent de sa gueule.
J'ignorais pourquoi ce majestueux loup était venu me retrouver, ce jour-là. Mais depuis, je pouvais sans hésitation dire que je m'étais fait un grand ami. Ce dernier me suivait telle une ombre, dans tout ce que je faisais. Je lui avais même trouvé un nom, qu'il avait lui-même approuvé d'un aboiement joyeux.
Yuki.
Je trouvais que cela lui correspondait parfaitement, ne serait-ce qu'avec la couleur de son pelage. Et depuis qu'il était là, je ne m'étais jamais senti aussi heureuse. Peut-être que c'était un cadeau qui m'avait offert face à ma solitude. Je ne pourrai pas dire que je n'étais pas entièrement innocente face à ce choix radical. Faute de trahisons et de disparitions soudaines de personnes que je pensais honnêtes dans mon entourage, je me suis rapidement tournée vers ce mode de vie. Je me contentais juste de faire les tâches qu'on m'incombait, sans pour autant nouer des liens. Pas d'attachement égalait à aucune déception. Et c'était bien mieux aussi.
En dépit de la confiance que le loup m'avait accordée, j'avais pris soin de lui laisser toute la liberté dont il avait besoin. Jamais je ne m'abaissais à l'attacher en laisse, ni le forçait à me suivre. Je ne voulais le contraindre à rien, juste qu'il fasse les choses dont il avait envie. Et si cela supposait de repartir vivre dans la nature pour ne plus revenir, je respecterai ce choix, même si cela pourrait me briser. Car je me rendais compte de jour en jour que je m'étais drôlement attachée à Yuki. Il faisait partie intégrante de ma vie, comme une évidence qui avait toujours existée. C'était comme une renaissance. Comme si je découvrais la vie sous un angle que je n'avais jusqu'alors jamais vu. Et cette simple présence à mes côtés me permettait de penser que je pouvais peut-être savoir ce que c'était, le vrai bonheur.
Le plus douloureux, aussi bien pour Yuki que pour moi, c'était quand je partais en mission un peu plus périlleuse avec mon équipe. Quand cette situation se présentait, je n'avais d'autres choix que de laisser mon compagnon dans mon village. En dépit de ses efforts visibles pour s'adapter à mon métier, mon petit loup n'était malheureusement pas doté de chakra, ce qui le rendait plus que vulnérable en cas d'attaque ennemie.
Et c'est ainsi qu'à l'aube, je faisais mes au revoir à Yuki. Comme quand cela arrivait, je m'accroupissais pour le serrer dans mes bras, baladant mes mains dans ce pelage fourni. De son côté, mon loup posait sa tête sur mon épaule en soupirant tristement.
Ce n'est qu'un au revoir mon ami, je serai bien vite de retour. D'ici quelques jours, nous nous retrouverons.
Les minutes passèrent bien trop vite. Il était l'heure pour moi d'aller retrouver mes étudiants, beaucoup plus impatients que moi à l'idée de quitter les portes de Konoha. Soupirant, j'ébouriffai une dernière fois la petite tête de mon ami, avant de lui tourner le dos, le cœur gros.
Je savais bien que vu le niveau de mes étudiants et le rang de mission, cela ne serait l'affaire que de quelques formalités. Nous avions juste à apporter un parchemin scellé à un village voisin, mais les contraintes d'horaires nous poussaient à partir de bonne heure. Et comme je m'en doutais, les trois adolescents étaient déjà là, tous assis en tailleur par terre à discuter de techniques de combats. Lorsqu'ils me virent et que leur attention se posa sur moi, je les vis soupirer fortement.
- Vous êtes en retard !
Leur ton était teinté de reproche tandis qu'ils croisaient les bras sur la poitrine en me fusillant du regard. Je me contentai d'hausser les épaules. A la vue de l'heure matinale, je n'avais pas vraiment la force ni la motivation de leur donner des explications.
- Nous ne sommes pas à cinq minutes près. Allons-y.
- Vous rigolez Sensei ? Ça fait pas moins d'une demi-heure que nous vous attendons ! S'écria une voix féminine.
- Eh bien, raison de plus pour se mettre en route, Misaki. On risque d'arriver encore plus en retard si on a ce genre de discussion maintenant. Et puis, si vous continuez à parler aussi fort, vous risquez de réveiller tout le village, fis-je avec un large sourire.
Je vis le groupe grommeler avant de se mettre silencieusement en route. Je n'avais pas été très tendre avec eux, mais j'avais à cœur de garder les raisons de mon retard privées. J'avais bien vu que je passais bien trop de temps avec Yuki, mais je n'avais pas eu la force de le quitter plus tôt. Je profitai de notre départ sur un sentier pour expliquer calmement les consignes de sécurité aux trois plus jeunes. Ils étaient assez obéissants dans l'ensemble, excepté peut-être Dai qui était assez intrépide, préférant écouter son instinct que mes conseils. Je ne lui en voulais pas vraiment, j'étais pareil à son âge. Toutefois, je lui avais fait comprendre à plusieurs reprises que cela pouvait être dangereux, surtout à son niveau. Heureusement, Kin compensait l'énergie de son coéquipier, et les deux formaient vraiment un beau duo. J'avais eu l'occasion à plusieurs reprises de remarquer leur complicité lors des entraînements, et j'étais persuadée qu'ils continueraient à travailler ensemble sans difficulté des années plus tard. Misaki avait réussi à se forger une petite place au sein des deux garçons. Elle évoluait en parallèle d'eux, et était du genre prudent. Peut-être un peu trop, à l'inverse de Kin. Néanmoins, j'avais pu constater une belle amélioration au cours des derniers exercices que je lui avais donné. Elle avait presque réussi à me toucher lors de notre dernier affrontement, alors que c'était la plus fuyarde à ses débuts.
En somme, je n'étais pas mécontente de mon équipe, que je trouvais bien équilibrée. Je n'avais pas encore eu l'occasion de les voir à l'œuvre dans un vrai combat, mais j'avais confiance en eux. De toute façon, ils avaient encore le temps avant d'affronter des adversaires, et encore plus pour des coriaces. Et ils pouvaient compter sur moi pour leur apprendre tout ce dont ils auraient besoin de savoir d'ici là. Je savais qu'ils avaient le potentiel pour devenir des shinobi aguerris, certainement bien plus que moi.
Nous voilà maintenant à sauter de branches en branches, nous éloignant de plus en plus de Konoha.
Le soleil était déjà levé depuis plusieurs heures, et la météo s'annonçait clémente pour les prochaines heures. Il n'y avait pas la moindre ombre de perturbation, et je ne ressentais aucun chakra à plusieurs kilomètres à la ronde. Nous étions seuls dans les environs et nous avancions à un rythme soutenu, les trois jeunes voulant à tout prix rattraper le retard. J'ai dû imposer de force une pause pour se restaurer quand des signes de fatigues commencèrent à apparaître. J'étais loin d'avoir envie de devoir jouer une medical-nin, surtout pour une erreur aussi bête qu'une question d'hypoglycémie ou d'hydratation.
Vint le moment de nous arrêter pour établir un campement. Je repérai d'un rapide coup d'œil une zone propice et fis signe à mes élèves de s'arrêter là pour la journée. Etant donnée notre position, cela ne serait l'affaire que de deux petites heures de route le lendemain, et le client recevrait son parchemin en temps et en heure, comme cela était initialement prévu. Les rondes furent établies et la nuit se passa sans encombre, tout comme la remise du document en milieu de matinée.
Notre mission était terminée, et nous nous remettions rapidement en route. Chacun de nous avait hâte de rentrer chez soi pour retrouver son confort. Le lendemain, nous atteignions avec soulagement la dernière forêt qui nous séparait de notre village. Pressant un peu plus le pas, je relâchai mon attention, jusqu'à ce que soudainement une ombre furtive m'effleure l'oreille, provoquant une douleur vive ainsi qu'une sensation de chaud.
Maugréant fortement et me mordant intérieurement les joues, je fis signe à mon équipe de se mettre à l'abri pendant que j'affronte notre présumé adversaire. Je fis un saut dans les airs pour viser avec application la zone d'où venait l'offensive. Quelques secondes me servirent pour confirmer que j'avais vu juste, lorsqu'un Nukenin du village d'Ame surgit devant moi, provoquant quelques cris d'effrois de la part des plus jeunes, cachés dans mon dos.
Il faut dire que ce dernier était assez impressionnant. Propriétaire de cheveux gris et pointus, il se distinguait notamment par la marque de sarcelle verte sur son nez. Il était musclé, robuste, et semblait assez coriace. J'espérais que cela n'était qu'une apparence, car je ne pouvais compter que sur moi-même pour m'en sortir. J'ignorai pourquoi il était aussi prêt du village, sachant que nous n'étions plus qu'à quelques kilomètres des portes.
M'accordant un bref instant de réflexion, j'entrepris d'essayer de désamorcer la situation dans un premier temps.
- Que nous voulez-vous ? Grognai-je.
- Je viens récupérer l'Eau des Héros.
Mes yeux s'écarquillèrent sous l'effet de la surprise. Je ne comprenais pas du tout à quoi il faisait allusion, mais cela n'était certainement pas nous qui avions cela.
- Quoi ?
- Ne faites pas l'innocente, vous savez très bien ce dont il s'agit.
- Vous faites erreur, je ne l'ai pas fis-je en fronçant les sourcils.
- Vous mentez. Je sais qu'un groupe de ninja de Konoha doit l'amener au village de Taki.
Super, c'est qu'il semblait bien têtu en plus.
- Quand bien même je le saurai, je ne vous dirai rien. Toutes nos missions sont confidentielles, vous devriez le savoir avant de déserter votre village si je ne m'abuse ?
Un sourire malsain s'afficha sur son visage.
- Bien, vous voulez jouer à cela. Dans ce cas, vous ne me laissez pas le choix.
Avant que je ne puisse réagir, l'adversaire avait déjà amorcé son attaque.
- Suiton - Fouet du dragon aqueux !
Un fouet se créa et se dirigea à toute vitesse dans ma direction. Laissant échapper un glapissement, je fis un bref écart, avant de poser ma main sur le sol.
- Doton – Le mur de boue !
Un rempart de terre surgit du sol et intercepta la lanière qui se dissipa rapidement, me laissant le temps de répliquer. Sans réfléchir, j'entrepris d'exécuter ma prochaine offensive.
- Doton - Le poing de pierre !
Mes mains se durcirent instantanément, me permettant d'aller au corps à corps de l'homme, qui semblait moins à l'aise dans les mouvements de Taijutsu. C'était une aubaine dont je devais me saisir. J'enchaînai sans relâche des directs, des uppercuts ou encore des mouvements de jambe dans l'espoir réussir à toucher ne serait-ce qu'une fois le Nukenin. Je devais reconnaître l'agilité et la vitesse remarquables de mon adversaire, qui malgré sa carrure, esquissait aisément le moindre de mes coups. Néanmoins, je me disais que cette tactique avait l'avantage de focaliser son attention sur mes mouvements, et donc de ne pas tenter un quelconque ninjutsu à mon encontre. Je pouvais sentir des gouttes de sueur dévaler mes temps sous l'effort que je fournissais. Je me sentais faiblir, et je devais à tout prix reprendre l'avantage au risque de me faire blesser.
J'entrepris de faire un bond en arrière pour m'éloigner de mon adversaire, ne serait-ce que le temps de reprendre mon souffle. Malheureusement, ce dernier fonça aussitôt sur moi armé d'un katana. Mes muscles étaient trop endoloris pour que je puisse contrer cette attaque directe. Je senti mes jambes fléchir, usées et vidées de toute force. Appuyée sur mes genoux, j'eu à peine la force de lever le bras, me doutant bien que cela serait insuffisant et que je vivais là mes derniers instants. La fatigue et mon manque de vigilance auront eu raison de moi, malheureusement. J'espérais au moins que Dai, Kin et Misaki avaient fui pour rejoindre Konoha. Je ne sentais plus leur présence, je présageai donc que cela était le cas. Une douce chaleur agréable m'envahit dans tout mon être en sachant que j'avais accompli mon rôle de Sensei jusqu'au bout. La mission avait été brillamment menée, et mes étudiants étaient en vie, c'était tout ce qui comptait. Ma perte n'était qu'un risque de mon métier.
Les yeux fermés, j'attendais patiemment mon sort, mais rien ne survint. Jusqu'à ce que j'entende un grognement et des coups de crocs qui me firent instantanément réattérir dans la réalité.
- Yuki ! Hurlai-je à pleins poumons. Arrête, tu vas te blesser !
Mais mon ami n'eut cure de mon injonction, préférant écouter son instinct de protection. Il continua à s'attaquer à mon adversaire sans relâche, lui déchirant des bouts de vêtements à toute hâte et plantant à plusieurs reprises ses crocs saillants dans sa chair. Je n'avais jamais vu mon loup agir comme ceci. Il était littéralement dans un état de rage, et je voyais dans son regard encore plus sombre que d'habitude qu'il était prêt à tuer cet homme sans pitié. Mais l'ancien ninja d'Ame avait visiblement plus d'un tour dans son sac. Il profita d'un angle mort du loup pour enfoncer avec ferveur sa lame dans son flanc. Le couinement déchirant qu'émit Yuki me fendit le cœur. Allongé sur le flanc et haletant, je voyais du rouge tâcher sa belle fourrure blanche et s'étendre sur le sol. Je m'apprêtais à me relever, prête à l'aider, lorsqu'une main gantée se posa sur mon épaule pour m'intimer de rester.
Je levai les yeux vers le propriétaire, qui me faisait étrangement penser à mon adversaire par sa couleur de cheveux. Ses cheveux étaient plus longs et désordonnés. Son bandeau frontal penchait nonchalamment sur son œil gauche, alors que la moitié de son visage était camouflé par un masque en tissu. Il était également vêtu de la tenue typique des ninja de haut niveau de Konha. Ce shinobi au physique particulier, j'en avais entendu parler plus d'une fois. Avec sa réputation de ninja copieur, il en avait effrayé bien plus d'un, et était franchement admiré au pays du Feu pour les nombreux exploits qu'il avait accompli. Alors que je dévisageai bouche bée cet homme que je voyais pour la première fois et qui me venait en aide, j'entendis au loin des petites foulées et les essoufflements de mon équipe.
C'étaient eux qui étaient venus chercher de l'aide.
Les larmes me vinrent aux yeux, tout comme un reniflement que je m'efforçai de camoufler aux yeux de tous. Je ne devais pas montrer mes sentiments, et reste neutre quoi qu'il arrive, et ce n'était pas le moment de flancher après tout ce qu'il s'était passé.
Silencieusement, mon allié vint se placer face à mon ancien adversaire. L'avantage, c'est que le précédent affrontement l'avait bien vidé de ses forces, bien que je ne doute en aucun cas des capacités de Kakashi. Ce dernier sortit un assortiment de kunai qu'il lança avec agilité à l'encontre du Nikenin qui esquiva le tout d'un bond vertical. Et je ne pus retenir une expression de stupeur lorsque je vis la silhouette de l'homme masqué bondir à toute vitesse en direction de l'assaillant. Son bandeau était relevé, et des bruits effrayants provenaient de sa main droite qu'il plaqua sans ménage dans le flanc de l'ennemi. Des filets de sang sortirent aussitôt de sa bouche, prouvant que le coup avait bien atteint sa cible. Cette dernière tomba lourdement au sol dans un gémissement, alors que le shinobi atterri avec une agilité impressionnante.
Dotée d'une énergie nouvelle, je profitai du moment de flottement pour courir à toutes jambes vers Yuki qui n'avait pas bougé d'un iota. Il remuait doucement la queue et avait trouvé la force de tourner sa tête vers moi pour me regarder avec ses yeux doux. Je vis rapidement qu'il était très mal en point et qu'il avait à tout prix besoin de soin si je voulais éviter le pire.
Je m'approchai doucement de la silhouette étendue pour glisser mes bras dessous, mais je fus une nouvelle fois arrêtée par le même geste du ninja copieur, qui s'était déplacé bien trop vite pour que je ne le vois venir. Je devinais son injonction silencieuse, mais elle était bien trop difficile à supporter. Je ne pouvais pas rester ainsi, sans rien faire.
- Mais ... Mais si je ne fais, il... il va...
Je ne parvenais pas à m'exprimer plus tant mes lèvres et ma voix tremblaient. Sans mot dire, le Jonin qui avait déjà recouvert son Sharingan s'avança vers le canidé, qui tressaillit aussitôt en le voyant pénétrer dans un rayon aussi proche. Il faut dire qu'il était resté assez sauvage, et évitait tout contact avec les êtres humains. J'étais la seule qu'il tolérait dans son entourage, et il était fort probable que malgré que son état, il préfère fuir le ninja plutôt que de risquer quoi que ce soit.
- Chhhht. Tout va bien. Je ne vais pas te faire de mal, dit-il en s'agenouillant de façon à ce que l'animal puisse le voir sans difficulté.
Kakashi n'avait pas posé de question sur qui était ce loup ni sur ce qu'il faisait là. Il avait vu que je tenais visiblement à lui, et semblait décidé à m'accorder de son temps et de son énergie pour m'aider. Ou peut-être que c'était dans sa nature d'épauler tout être blessé. Mais ce qui me surprit le plus, c'est que Yuki se calma instantanément à l'entente de la voix au timbre grave. Il semblait apaisé. Comme s'il le connaissait déjà. Comme s'il lui faisait confiance. Kakashi entreprit de faire un signe de sa main gauche, et des flammes vertes sortirent de son index et de son majeur, reliés. Il passa le chakra à différentes reprises sur la zone blessée, et progressivement la blessure se referma. Je vis une lueur d'apaisement gagner les iris du loup, qui semblait soulagé d'une douleur intense.
- Et voilà, fit l'homme en se relevant. Il sera rapidement sur pied.
- Merci, articulai-je difficilement sous le coup de l'émotion. Merci pour tout.
Ses yeux se plissèrent pour me sourire.
- Tout va bien pour vous, heu... ?
- (T/p), l'éclairai-je. Et... Heu oui. Je suis simplement fatiguée.
- Bien. Dans ce cas, à bientôt !
Alors qu'il s'apprêtait à me tourner le dos pour repartir, mes paroles dépassèrent mes pensées.
- Attendez !
L'homme se stoppa aussitôt, et tourna sa tête vers moi pour m'interroger du regard.
- Ce loup que vous avez soigné... Vous le connaissiez ?
- Pas le moindre du monde.
Mais dans ce cas, pourquoi Yuki s'était aussitôt calmé en sa présence ? Comment Kakashi avait-il fait pour qu'il se laisse faire de la sorte, alors qu'il m'avait fallu plusieurs mois pour espérer le manipuler de la sorte ?
- Oh. C'est que...
Je me tus quelques instants, cherchant mes paroles, tellement mon esprit était confus.
- Ce que je veux dire, c'est qu'il est assez craintif de nature, repris-je.
- Vous savez, j'ai l'habitude des chiens, me répondit l'argenté en se grattant nerveusement la nuque.
- Mais c'est vraiment étrange, insistai-je malgré moi. On aurait dit... Qu'il vous connaissait. Depuis longtemps. Qu'il a reconnu votre aura et votre voix.
Je savais que ce que je pouvais passer pour quelqu'un qu'il fallait à tout prix interner en disant cela, surtout en parlant d'un animal. Mais je connaissais Yuki par cœur, et je ne pouvais pas croire qu'il avait agi comme ça par hasard. Etrangement, je jurai voir passer une lueur de tristesse passer dans l'œil visible du ninja, qui semblait secoué par mes propos.
- Il est vrai que son regard me rappelle étrangement celui de quelqu'un que je connaissais très bien. Malheureusement, il n'est plus de ce monde.
- Oh. Je suis désolée.
Kakashi balaya ma phrase d'une main.
- Ce n'est rien, c'est du passé. Ça ne sert à rien de se focaliser dessus, au risque d'avoir des regrets.
La véracité de sa phrase me frappa, tant je m'y reconnaissais. Sans doute parlait-il en connaissance de causes...
- Vous avez raison. Je... Hm... Je ne vous retiens pas plus. Merci encore.
Je le vis acquiescer doucement de la tête. Puis, sans plus tarder, le Jonin disparût dans un nuage de fumée, me laissant seule avec mon partenaire à quatre pattes et mes trois élèves qui me fixaient avec intérêt, des étoiles dans les yeux.
- C'est votre chien, Sensei ?
- On dirait que notre Sensei est amoureuse !
Saletés de gosses.
***
Suite à cette petite mésaventure, j'en avais profité pour donner quelques jours de répit à Dai, Kin et Misaki pour qu'ils se remettent aussi bien eux que moi (même si je ne l'avouerai jamais) de nos dernières émotions. Accompagnée de Yuki, je me promenai calmement en périphérie du village, afin d'éviter de croiser trop de personnes. C'était un petit rituel qui s'était naturellement instauré entre le loup et moi, et nous apprécions tout deux ces instants de détente. Le temps était orageux. L'air était électrique, lourd, et les oiseaux, pourtant si bavards, s'étaient tus. Ils volaient à toute vitesse dans le ciel, cherchant probablement un endroit où se mettre à l'abri. Malgré tout, et d'un commun accord silencieux avec le canidé, nous étions sortis de chez moi. C'est ainsi que nous marchions dans des sentiers peu fréquentés. Rapidement, des gouttes se mirent à tomber. D'abord éparses, leur vitesse et leur nombre augmentèrent considérablement en l'espace de quelques minutes. Pourtant, nous n'étions pas plus importunés que cela, profitant plutôt de la fraîcheur apportée au milieu de ces journées chaudes.
Soudain, le carnivore s'arrêta net. Je ne le remarquai que quelques mètres plus tard, en ne sentant plus sa présence à mes côtés. Je me retournai vers lui, étonnée de sa manière d'agir. Jamais il ne s'était comporté de la sorte, et encore moins quand nous étions seuls.
- Yuki ? Viens mon loulou, il ne faut pas trop trainer.
Mais l'animal resta figé. Assis de profil, il semblait regarder un point au loin, comme s'il était captivé par quelque chose. Intriguée, je revins sur mes pas pour me placer à la hauteur du loup blanc. Les gouttes d'eau rendaient difficile la visibilité au loin. Tout ce que je voyais, ce n'était que des amas blanchâtres sur de l'herbe. Yuki avait certainement dû sentir quelque chose qui n'était probablement pas discernable à la distance où nous nous trouvions. Après tout, c'était bien connu que les loups avaient un odorat particulièrement développé.
- Tu veux me montrer ? Demandai-je après un instant de réflexion.
Yuki ne réagit pas de suite, comme obnubilé par ce qui se déroulait sous ses yeux. De longues secondes plus tard, je le vis réagir et tourner la tête en ma direction, comme s'il se reconnectait brusquement à la réalité. Ses yeux revinrent sur sa cible alors qu'il leva son arrière-train pour avancer doucement. Sans plus réfléchir, je le suivi pas à pas. Je plissai les paupières sous les gouttes d'eau qui ruisselaient sur mon visage et qui rendaient ma vision floue, espérant deviner ce qui était sous mes yeux, à quelques mètres à peine. Et je compris rapidement où nous nous trouvions.
Des pierres, dont les tons variaient entre le blanc et le gris, étaient disposées soigneusement en allées. Des caractères étaient gravés sur chacune d'entre elle. Et au loin, l'on pouvait même remarquer un édifice bien particulier, surmonté d'une flamme rouge. Ce lieu, je ne le connaissais que trop bien, même si je me forçais pour m'y recueillir la plus grande majorité du temps. Il me remémorait trop de mauvais souvenirs, de souffrances, affiliées aux personnes qui y reposaient et qui me manquaient tous les jours. Certes, la mort était un risque considérable du métier de shinobi. Mais chez nous, elle était perçue différemment. Le fait de mourir pour protéger notre village donnait une dimension presque honorifique.
Mais on oubliait trop souvent la peine qu'elle causait pour ceux qui nous connaissaient et nous appréciaient un tant soit peu. Cette même peine qui m'avait fait en grande partie me replier sur moi, fuyant toute affection. Car s'attacher, cela signifiait courir droit vers la souffrance. Et j'avais bien assez donné. J'avais longtemps choisi la solitude pour alliée, et cela me convenait amplement. Elle n'était pas pesante, mais plutôt discrète et réconfortante. Et si je précise en grande partie, c'est aussi parce qu'un bon nombre de personne encore vivante m'avaient déçues, à maintes reprises, en bafouant la précieuse confiance que je leur avais bêtement accordée. Voilà pourquoi je paraissais pour une ermite vivant en marge de la société. Il y avait certainement des rumeurs à mon sujet qui courait dans le village, mais je m'en fichais éperdument. Seul Yuki avait réussir à ouvrir une brèche dans la carapace que je m'étais construite au fil des années, et que je jugeais étanche à cent pour cent désormais avec ce mystérieux loup à mes côtés.
Alors que le canidé blanc continuait aisément sa route, je parvenais à distinguer une masse difforme dans un coin de la clôture, à l'écart des taches blanches que je parcourai. Au fur et à mesure que je me rapprochais, je réalisai avec stupeur que c'était une silhouette humaine. Et lorsque je compris qui c'était, mon cœur manqua un battement. Il était tellement méconnaissable, que je me demandais si je n'était pas en train d'halluciner. Sous l'effet de la surprise, je me stoppai net tandis que le loup continua sa route en la direction de l'homme dont la présence était loin de l'incomber. Je le vis glisser sa truffe noire à proximité de la main gantée, dans un premier temps pour la renifler puis pour lui donner des petits coups. Décidément, il semblait adorer ce ninja aux cheveux argentés, qui gardaient leur clarté authentique même s'ils étaient plus que trempés.
Kakashi semblait transit, observant une petite pierre, bien différente des autres, et surtout située à l'écart. Il avait l'air ailleurs et ne réagissait pas aux stimulations du canidé. Cependant, à la vue de la nature du lieu où nous nous trouvions, je préférai laisser l'intimité nécessaire au ninja copieur plutôt que d'écouter ma curiosité qui me poussait à lire l'épitaphe qui était gravée. Je ne saurai dire combien de temps s'écoula avant que le Jonin ne réagisse finalement aux coups de langue de Yuki. Il caressa doucement le haut de son crâne, sans bouger de son emplacement. Finalement, sa tête se tourna lentement en ma direction, me laissant apercevoir son visage, toujours recouvert par son habituel masque qui camoufle une grande partie de ses émotions. Mais la douleur qui était inscrite dans son œil visible, je ne l'oublierai jamais.
J'avais raccompagné Kakashi chez moi, ce soir-là, sans chercher à le questionner sur les raisons de son mal-être. Il ne voudrait certainement pas m'éclairer à ce sujet, et de toute façon, il n'était pas en état de me répondre. Le ninja s'était laissé docilement guider par ma main qui lui tirait doucement les bras à travers les sentiers puis les rues désertes de Konoha. La pluie martelait le sol avec force, et me piquait la peau à travers mes vêtements humides. Yuki marchait à quelques mètres de nous, jetant de temps à autre des regards inquiets sur l'homme que je tenais. Il faut dire qu'il n'avait vraiment par l'air bien, je pouvais même le sentir trembler à travers mes doigts. Mais par-dessus tout, je ne savais pas quoi faire pour lui venir en aide. Par peur de faire un pas de travers, je m'étais contentée de lui prêter une serviette et de l'aider à éponger toute l'eau qui s'était accumulée sur lui. Je l'avais aidé à retirer à retirer sa veste et son chandail pour qu'il soit plus à l'aise, mais je n'avais pu me résoudre à faire plus, par simple pudeur. Je lui avais laissé ma chambre, en prenant soin de laisser en évidence une couverture supplémentaire en cas de besoin. Le loup ne m'avait pas lâché d'une semelle et me regardait faire silencieusement. Il n'était reparti de la chambre que lorsqu'il constata que Kakashi s'était endormi à poings fermés, épuisé. Je pouvais aisément lire le tourment que le canidé éprouvait à travers l'argent. Ses oreilles pointues légèrement vers l'arrière et sa queue basse le trahissaient. C'était comme s'il était réellement affecté de le voir de la sorte. Était-ce parce-qu'il se souvenait de lui en tant que guérisseur ? Même si j'avais appris à comprendre mon ami depuis notre rencontre, il restait hélas de nombreuses zones d'ombres qui flottaient autour de lui. Mais j'avais l'impression que celle-ci cachait autre chose que je n'aurai su dire.
Décidant d'abdiquer dans ma réflexion pour la soirée, je pris la direction du salon pour m'allonger sur le canapé. Yuki grimpa rapidement au niveau de mes pieds, et se blottit en boule, le nez contre sa queue. Je me redressai pour l'embrasser au-dessus de la truffe.
- Bonne nuit, lui murmurai-je, l'esprit déjà embrumé par le sommeil.
***
Le lendemain, je fus réveillée par la franche lumière ambiante qui filtrait à travers ma baie vitrée. Grommelant dans ma barbe, je m'extirpai du sofa pour m'étirer, espérant pouvoir soulager mon dos endolori. Je n'avais pas beaucoup dormi, cherchant en vain une position confortable sur un canapé bien trop usé pour espérer obtenir ce genre de ferveur. Mais je me figeai instantanément en me rappelant les, ou plutôt la raison de ma nuit ici. Prudemment, j'attrapai une veste nonchalamment posée sur une chaise située à proximité pour l'enfiler. Je pris la direction de ma chambre dont la porte était restée fermée pour toquer doucement mais de manière assez audible trois francs coups. Seul le silence me répondit.
- Kakashi ? Demandai-je. Vous êtes là ?
Mais ma question resta sans réponse. Inquiète, j'ouvris la porte avec précaution. Et là, je constatai que la chambre était vide. Le lit avait soigneusement été fait. Les affaires du Jonin n'était plus là. C'était comme si personne n'avait passé la nuit ici précédemment. Seule une légère odeur masculine confirmait que je n'avais pas rêvé de ce qu'il s'était passé il y a quelques heures à peine. Et, sans que je ne comprenne pourquoi, je sentis mon cœur se serrer en constatant son absence. Pourquoi était-il parti sans rien dire ? Avais-je fait quelque chose de mal ? J'avais pourtant donné mon maximum pour ne pas l'importuner...
Ouvrant la porte pour notre sortie matinale avec Yuki, nous marchâmes tranquillement dans les rues encore humides du village. L'air était bien plus frais que ces derniers jours, mais cela n'était pas vraiment contraignant. Au contraire, la baisse des températures apportait un nouveau souffle de vie aux habitants, exténués par la chaleur de ces derniers jours. Tout en me promenant, je feuilletais distraitement mon carnet sur lequel j'inscrivais mes séances d'entraînements. Les dernières séances avaient particulièrement été axées sur le taijutsu, et il était grand temps de remettre à l'ordre du ninjutsu, et notamment le contrôle du chakra qui était le b.a.-ba de tout bon ninja. Je fus une nouvelle fois surprise par l'absence de présence de mon ami à mes côtés et je compris rapidement la raison en me retournant intuitivement. Le loup était posté exactement au même endroit qu'hier, assis sur son postérieur, regardant au loin. Ses oreilles étaient basses et il gémissait doucement, comme si ce qu'il voyait le rendait particulièrement triste. Malgré moi, mon cœur eut un loupé en pensant comprendre la raison de ce comportement. Alors, sans réfléchir, je me postai aux côtés du canidé blanc, portant mon regard là où il avait posé le sien. Et je ne m'étais pas trompée.
Kakashi était là-bas. Exactement là où il était hier sous une pluie diluvienne. Les mains dans ses poches, il avait la tête baissée sur la petite pierre blanche isolée des autres. Et, même si elle était beaucoup moins discernable qu'hier, je pouvais sentir le nuage de tristesse qui flottait autour de lui. Il lui collait littéralement à la peau, à tel point que je pouvais presque le voir sans peine.
Sans prévenir, et avant que je ne puisse l'en empêcher, le canidé alla rejoindre l'homme solitaire.
J'étais tiraillée entre l'envie de le suivre et la volonté de me cacher par peur de déranger. Mais mon corps refusait d'obéir à mon cerveau. Je restai donc plantée la, devant l'entrée du cimetière, à regarder le loup se rapprocher inexorablement du Jonin, pour nicher sa truffe dans sa main. Cette fois-ci, Kakashi réagit aussitôt au stimuli et passa nonchalamment sa main dans les longs poils blancs. Et les deux compères restèrent ainsi de longues minutes durant, jusqu'à ce que Yuki se mette à tirer l'argenté a l'aide de ses crocs en lui agrippant la manche. L'homme se raidit soudainement, surpris par la manœuvre entreprise par l'animal. Cependant, il décida rapidement de se laisser guider par le loup sans n'y opposer quelconque résistance. C'est ainsi que Yuki revint naturellement en ma direction, trainant cet homme mystérieux derrière lui. Ma surprise fut d'autant plus grand en constatant qu'il s'arrêta net à ma hauteur, s'asseyant et en remuant la queue tout en lâchant sa trouvaille devant moi.
Nous nous regardâmes tous deux, confus, avant que je ne daigne dire quelque chose malgré la gêne qui m'envahissait.
- Heu... Excusez-moi pour le désagrément... Je ne sais vraiment pas ce qui lui prend avec vous.
- Ce n'est rien, me rassura-t-il. Je dois empester le chien à des kilomètres à la ronde, c'est pour cela.
- Je ne pense pas. Il n'a jamais été comme ça avec personne. Pour tout vous dire, à part moi, il fuit tout le monde.
L'argenté leva la tête au ciel, silencieux, semblant réfléchir à ce que je lui racontais. Finalement, son œil se reporta sur moi puis sur mon carnet que je tenais.
- Vous lisez ?
- Oh... Non, pas du tout ! Ce sont mes notes pour mes étudiants, je cherche toujours ce que je pourrai leur faire faire.
Mon interlocuteur m'observa puis croisa les bras sur sa poitrine, un air amusé s'affichant sur son visage dissimulé.
- Vous voulez que je vous donne une super méthode qui a fait ses preuves ?
- Honnêtement si vous en avez une qui arrêterait de me faire prendre la tête pour ces trois garnements, ce serait avec plaisir !
- Tout ce que vous avez à faire... C'est de ne rien faire.
Cette réplique eut l'effet d'une douche froide sur moi. J'avais du mal comprendre. Il était impossible qu'un Sensei et qu'un ninja aussi reconnu que Kakashi Hatake agisse de la sorte.
- Pa.. Pardon ? Bégayai-je.
- Vous m'avez bien entendu, dit-il en hochant la tête. Cela ne sert à rien de prévoir en avance vos séances, car elles ne seront jamais parfaitement adaptées à l'évolution de votre équipe, car vous ne pourrez pas les anticiper. Tout ce que vous avez à faire, c'est de travailler sur le dernier point faible que vous avez remarqué. Et vous verrez qu'au fur et à mesure, vous aurez de plus en plus de mal à en trouver. Ce sera signe que votre équipe évolue favorablement.
Effectivement, il n'avait pas tout à fait tord. Même si les premières présentations de sa méthode laissait à désirer.
- Vous devriez plutôt vous tourner vers la lecture de romans, ça vous videra l'esprit et vous serez beaucoup moins sujette au stress de la sorte.
Je devais dire que j'aimais bien sa façon de voir les choses. Je n'avais jusqu'alors jamais connu meilleure évasion que passer des journées durant à parcourir des yeux une multitude de pages pour me plonger dans une multitude d'univers, avec leur propre particularité. Je jetai un furtif coup d'œil vers le livre qui dépassait de la besace légèrement entrouverte du ninja et dont je reconnu la couverture sans grande difficulté, tant sa couleur était criarde.
- Un livre comme ceci ? Rallai-je en désignant l'objet de ma question d'un mouvement de tête.
- Un de mes préférés, approuva t'il d'un ton enjoué.
- Je n'en doute pas, vu comment il vous accompagne, rigolai-je.
Une lueur amusée passa dans l'œil onyx. Se grattant machinalement la tête, il se mit a fuite mon regard, confus.
- Si vous voulez, je peux vous conseiller des ouvrages à lire. En dehors des Paradis du batifolage, je reste tout de même un grand lecteur avec des heures de lecture derrière moi.
- Oh, c'est vrai ? M'enthousiasmai-je. Ce serait avec plaisir, j'adore lire !
- Dans ce cas là, on n'a qu'à se donner rendez-vous ce soir au café au coin de la septième rue, me proposa t'il. En plus, il regorge de livres en tout genre.
Comme s'il comprenait la finalité de notre discussion, Yuki glapit joyeusement, remuant la queue avec force.
- Et bien sûr, tu es aussi de la partie petit bonhomme, fit Kakashi en lui grattant le haut du crâne.
***
Voila maintenant plusieurs fois que nous nous retrouvions avec l'argenté, au même endroit, à discuter de nos lectures autour d'un verre de thé. Kakashi était un homme instruit et remarquablement intelligent, il était clairement impossible de s'ennuyer en sa compagnie. Lui comme moi n'étions pas de grands bavards à l'origine, mais nos discussions animées nous prouvaient que finalement, c'était peut-être parce que nous n'avions jamais trouvé de personnes qui nous correspondaient. Et je devais avouer que j'appréciais de plus en plus nos entrevues. Je le trouvais naturel, amusant, et surtout particulièrement charmeur. Non qu'il jouait dessus, mais sa façon d'être était telle que je pouvais aisément sentir mes joues rougir à de multiples reprises sans que je ne puisse le contrôler. Était-ce par politesse ou par manque de perspicacité à mon égard, Kakashi ne m'en avait jamais fait la remarque. Toujours est-il qu'il mettait un point d'honneur à garder son masque coûte que coûte, y compris pour boire sa boisson. Je ne lui avais jamais demandé, mais j'osais imaginer que cela devait pas mal le gêner dans son quotidien. Quant à mon ami à quatre pattes, il était toujours présent lors de nos rencontres. Il s'allongeaient paresseusement entre nos deux sièges, nous écoutant débattre de lecture puis de sujet divers et variés en tout genre pendant des heures. Et il me semblait ne l'avoir jamais vu aussi heureux depuis que je l'avais rencontré. Et le plus étrange, c'était que Kakashi lui-même semblait en être la raison.
- Je ne vous ai jamais demandé, dis-je au détour d'une conversation.
Kakashi releva aussitôt son œil visible de sa tasse pour me regarder avec intérêt.
- Qu'il y a-t-il ?
Je me trémoussai sur ma chaise, mal à l'aise, avant de trouver la force de reprendre.
- C'est une question sans doute indiscrète et personnelle... et vous n'y êtes nullement obligé d'y répondre bien sûr...
Je parvins à lever les yeux en direction de l'homme qui me regardait, attendant patiemment que je ne crache le morceau.
- Je... Ahem... Je ne vous ai jamais demandé qui était la personne que vous alliez voir aussi souvent au cimetière. J'imagine que c'est quelqu'un qui vous tenait à cœur ?
En réalité, j'avais eu l'occasion de lire le nom du défunt, et il partageait le même que celui de mon interlocuteur. Néanmoins, je ne souhaitais pas exposer ma curiosité, surtout avec le risque de le rendre mal à l'aise. Je sentis le Jonin se rembrunir, visiblement affecté par ma stupide interrogation. De longues minutes passèrent, sans que je ne sache comment rattraper mon erreur.
- Excusez-moi, je n'aurai pas d....
- C'était mon père, me coupa t-il d'un ton rapide.
Mon cœur se comprima dans ma poitrine en comprenant désormais ce qui le taraudait depuis tout ce temps. Kakashi n'était guère plus âgé que moi, et il était pourtant évident que la pierre légèrement émoussée trahissait déjà quelques années de présence. Ainsi, je pouvais aisément supposer qu'il avait perdu son paternel bien trop tôt. Comme s'il comprenait l'émotion qui s'était emprise de l'argenté, Yuki lécha doucement les mains de l'homme avant de poser doucement son museau sur sa cuisse.
- C'est bizarre, finit par dire Kakashi, en m'extirpant de mes pensées.
- Quoi donc ?
- Vous allez certainement me prendre pour un fou... Mais mon père avait exactement le même regard que votre loup...
Il marquait ensuite un bref silence avant de poursuivre.
- On se ressemblait pas mal lui et moi. Il aimait particulièrement les chiens et m'a même appris un sort d'invocation pour une escouade quand j'étais encore gamin. Et... Il possédait une dague... Une très belle dague blanche qu'il m'avait léguée quelques temps avant de... disparaître. Et c'est cette dernière qui lui avait valu son surnom.
- Un surnom ?
- Le Croc blanc de Konoha.
Ce nom était loin de m'être inconnu. C'était l'un des plus valeureux ninja que notre village ait connu. Il paraît même qu'il faisait de l'ombre aux trois sennins qui étaient vus comme les plus puissants du village caché de la feuille.
- Oh, fis-je dans un souffle. J'ignorais qu'il avait un fils.
- Peu de personnes le savaient, m'expliqua l'homme. Je suppose qu'il voulait me préserver de ses relations ennemies.
- Je vois.
Kakashi resta silencieux tout en tournant sa petite cuillère dans la tasse de son thé encore fumant.
- Vous savez, pour être honnête, je ressens quelques regrets vis-à-vis de lui... Je n'ai pas été très correct avec lui quand il n'allait pas bien, avec mon caractère bien trempé de l'époque. Et j'aurais tant souhaité lui parler ne serait-ce qu'une dernière fois.
- Si vous souhaitez, et si ça peut vous libérer... Je peux être une oreille attentive.
L'argenté secoua vivement la tête.
- Excusez-moi, je vous embête avec mes états d'âmes. Changeons de sujet, voulez-vous ?
- Vous ne m'importunez pas du tout ! Me défendis-je. Si vous avez besoin d'en parler , vous pouvez compter sur moi.
Mon interlocuteur me considéra un instant, avant de hausser les épaules.
- Eh bien, je lui dirai tout simplement que je lui ai pardonné d'avoir agit de la sorte. Quand j'étais plus jeune, je n'avais pas eu le recul de comprendre son point de vue. Mais maintenant, j'ai parfaitement compris la valeur qu'avaient nos coéquipiers.
- L'esprit d'équipe est tout aussi important que nos comp... Yuki ! M'écriai-je affolée. Où vas-tu ?
Sans prévenir, le loup avait quitté les lieux à grande course. Laissant promptement un billet sur la table qui réglait amplement l'addition, je pris mes jambes à mon cou pour rattraper le canidé, talonné de près par Kakashi sur mes talons. Mais ce dernier courait bien trop vite pour que nous n'arrivions à le rattraper, et nous distançait à vue d'œil. Heureusement, la terre légèrement humide nous permettait de suivre sans mal les traces de pattes laissées lors de cette course effrénée. Nous nous éloignions à grande vitesse du cœur de ville, nous retrouvant dans les sentiers aux environs. Jusqu'à ce que je reconnaisse sans difficulté les lieux vers lequel Yuki se dirigeait à toute allure, avant de stopper immédiatement sa course à l'orée du lieu sacré où reposaient les âmes esseulées pour l'éternité.
Respectant le calme ambiant, nous nous mîmes en marche avec Kakashi pour retrouver l'animal majestueux, qui regardait calmement la pierre tombale d'un certain Sakumo Hatake, là où l'argenté passait le plus clair de son temps avant que nous n'avions appris à nous connaître. L'animal poussa un bref soupire, jeta un coup d'œil sur le Jonin puis sur moi et s'avança pour poser franchement sa truffe sur l'épitaphe. Aussitôt ce geste fait, je vis le loup étinceler de mille feux, avant qu'il ne disparaisse dans une pluie d'étoiles, nous laissant complètement désemparés avec Kakashi.
Yuki s'en était allé, sans me dire au revoir.
J'avais l'impression qu'une partie de mon âme venait de partir avec lui. Lui, qui avait su m'accorder sa confiance tout comme je lui avait accordé la mienne. Lui, qui avait réussi à m'apprivoiser, moi, une pauvre humaine recluse. Lui, mon plus précieux allié dans ma vie bien monotone.
Je senti des larmes s'accumuler à grande vitesse dans mes yeux, que je ne pu retenir de verser très longtemps. Moi, qui m'étais toujours promise de rester maître de mes émotions, je voyais ma carapace s'effriter et tomber lourdement devant l'Hatake, comme emportées par les flots d'eau qui s'écoulaient sur mes joues. Je senti mes jambes fléchir, jusqu'à ce qu'elles ne supportent plus mon poids. Mais alors que je pensais sentir le sol sur mes genoux, je me sentis happer par un bras au niveau de l'abdomen qui me ramena avec force contre un buste large. Et, sans que je ne comprenne pourquoi, deux bras se mirent derrière mon dos, m'étreignant avec force. Ma tristesse fut tout de suite reléguée au second plan sous l'effet du choc émotionnel que cela me prodiguai. Je restai immobile, ne sachant comme réagir dans les bras de l'homme qui jusqu'alors s'était tenu à côté de moi.
- Merci, murmura Kakashi.
Son souffle chaud se nicha au creux de mon oreille, me provoquant une nuée de frissons. Mon cœur lui s'emballait sans relâche dans ma poitrine, martelant sans ménagement ma cage thoracique, tellement fort que je me demandai s'il n'allait pas en sortir. Je pouvais sentir les effluves de son odeur me chatouiller les narines.
- Merci de quoi ? Questionnai-je, perdue, sans pour autant me défaire de ce doux contact.
- De m'avoir permis de faire la paix avec moi-même. Sans votre loup Yuki, cela n'aurait jamais été possible. Tout est plus clair maintenant.
- Mais Yuki... Il...
Mes larmes affluèrent de nouveau dans mes yeux, me faisant grossièrement renifler. Je ramenai une main vers moi pour tenter de dissiper ces traces d'eau qui menaçaient de s'écouler à tout moment.
- Il n'était là que pour aider, m'expliqua doucement Kakash, sans pour autant s'écarter de moii. Il n'a jamais vraiment existé. Il était sur Terre pour un but bien particulier. Il m'a sauvé moi. Il vous a sauvé vous. Et sitôt sa mission accompli, il est venu se reposer ici, à l'endroit même où repose mon paternel. Vous allez peut-être me prendre pour un fou, mais j'ai comme l'impression que... C'était sa réincarnation. Cela expliquerait toutes nos interrogations à son sujet. Et s'il a pu entendre ce que je souhaitais lui dire, je ne peux être plus heureux. Je me sens soulagé, comme libéré de ce poids aussi lourd qu'un boulet que je trainais sans relâche depuis sa disparition. Et je ne me suis jamais senti aussi bien.
Sa théorie exposée ainsi était plus que plausible. Mais une question subsistait malgré tout dans mon esprit.
- Mais pourquoi m'a-t-il retrouvé moi, si c'était vraiment sa réincarnation ? Je n'ai rien fait de p...
Un index se plaqua avec force sur ma bouche, m'empêchant de poursuivre ma phrase.
- Au contraire. Vous avez fait bien plus que cela. Vous nous avez sauvé tout les deux. Et permettez-moi de vous en remercier, comme j'aurai aimé le faire depuis un long moment déjà.
Je n'eu pas le temps de réagir à cette phrase. Les bras resserrèrent leur prise sur moi, et des lèvres avides et couvertes se plaquèrent sur les miennes dans un baiser passionné, où nos sentiments enfouis se déliaient enfin. C'était comme une évidence.
L'argenté avait raison. Je n'étais plus sauvage et apeurée par les autres, désormais. J'étais libre.
Merci pour tout ce que tu as fait, Yuki. Merci d'avoir mis Kakashi sur mon chemin. Je n'ai jamais été aussi heureuse.
—-
Avec un peu de retard, voici l'OS promis ! 😄 J'espère que votre attente en aura valu la peine ahah ! En tout cas y'aura de quoi lire vu le nombre de mots xD
Je concède que ça s'accélère beaucoup à la fin mais bon on va mettre sur la magie du OS hein ! 😆
N'hésitez pas à me laisser votre avis ! 😇
À bientôt ! 👋🏻
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