Ses doigts s'enfoncent dans la matière.  Elle ressent un crépitement surprenant mais elle s'y habitue.  Elle fait un autre pas devant et se décide à s'enfoncer : sensation de résine et de vents de montagnes pour le bois ; goût terreux et humidité des pronfondeurs pour les roches de fondation ; étincelles métalliques aux couleurs différentes pour les minéraux formant les bases de murs de plâtre, de la gypse...

Après cette traversée surprenante, elle se retrouve dans une pièce arrondie, éclairée par de vieux vitraux.  La poussière flotte dans les airs sous les rayons lunaires colorés.  Dans les travées de la toiture, des pigeons l'accueillent en roucoulant et en agitant leur plumage en un doux murmure.  Quelques duvets descendent du plafond comme une douce neige.   Elle observe un instant leur comportement : serait-ce possible qu'ils détectent sa présence.  Elle agite la main vers eux et en effet, il semble y avoir un minime changement de comportement de quelques-uns des volatiles.

Dans le pignon froufroutant, elle discerne la petite lueur bleue qui l'a conduite jusqu'ici.  La petite sphère lumineuse exécute une valse entre les poutres puis, en tournoyant légèrement, elle descend vers le sol tout en s'amenuisant.  Elle se dirige ensuite de l'autre côté de la pièce, réalise un vol stationnaire en un point précis avant de se fondre dans l'obscurité, laissant Kalia indécise sur la signification de cette lueur.

Dans la mince clarté de l'orbe mystérieuse, Kalia a pu distinguer davantage de détails du lieu où elle se trouve.  Ainsi, avant qu'elle ne s'éclipse entièrement, elle a permis à l'ange apprenti de discerner une silhouette au sol, inanimée.

Elle s'avance, intimidée, dans la pièce.   Sous ses pieds, le chatouillement du plancher est ténu. Il ne semble pas très solide.  Elle se fait le plus légère possible sous les lumières colorées de la lune qui accompagne son trajet.  Aux deux tiers de la grande salle, elle découvre un homme étendu sur le côté, inanimé, parsemé de plumes de pigeons et de poussières.

Il est vêtu un peu comme le mendiant aux cartes de cet après-midi : vêtements usés et sales, visage arborant une barbe noir de quelques jours, bonnet et foulard sombres.  Il est inconscient et semble dormir, mais un filet de sang s'écoule de côté sur son visage et une blessure sanglante sur sa main droite achève de s'épancher sur la manche de son gilet.  Sa physionomie dénote de sa jeunesse mais un pli amer demeure près de sa bouche endormie, suggérant un esprit soucieux ou triste.   Sa peau est extrêmement blême et un voile de sueur brille dans la pénombre sur son front.  Kalia cherche une trace de sa respiration mais ne discerne rien.  Serait-il mort ?

Par réflexe, elle désire vérifier le pouls sur la carotide.  Elle avance une main hésitante vers le cou de l'homme.  Soudain, elle hésite :  sa main a de grandes chances de passer au travers de la silhouette endormie.  Si elle ne veut pas de pensées indésirables, peut-être devrait-elle retenir son geste ?

Un léger contact entre le bout de ses doigts et la peau de l'homme se fait : un fourmillement intense se diffuse alors dans tout son être...

Un sensation imprévue qui la tétanise.

Un contact !

La vague d'émotions qui la submerge la frappe de plein fouet : marée de sentiments désabusés, de trahison, de pertes, d'abandon ;  dans un flot de rage contenue, de soif de contrôle, de réussite, de performance ;  le tout écumant une grande solitude faite d'abandon et d'incompréhension ;  seules quelques bulles de tendresse et de joies pétillent à la surface.

Incapable d'analyser ce tourbillon exacerbé qui l'envahit, la seule idée cohérente et surprenante qui émerge dans l'esprit de Kalia est :

L'âme perdue c'est lui.

La mission de l'ange commence...

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Voici le point de départ pour la mission de l'ange.

Comment se passera-t-elle ?  Avec de tels sentiments, si noirs et négatifs, comment sauver cette âme ?

Quel tourbillon provoqueriez-vous si un ange vous touchait ?

Vous avez une semaine pour vous interroger...

À bientôt mes petits mortels  😘 

Gaïa ;)