Les papiers cadeaux tapissaient le sol du salon dans une mosaïque multicolore. Quelques cadavres de bouteilles étaient éparpillés sur la table à manger, où les vestiges du repas avaient été abandonnés. La pièce était presque autant en désordre que ne l'était le hall d'entrée. Mais de ce fatras se dégageait une puissante aura d'amour et d'amitié. Cette pièce vivait de cette joyeuse pagaille. Les cinq existences des colocataires se heurtaient, se mélangeaient, s'influençaient, se construisaient ici. L'alliance de leurs caractères s'embrasait régulièrement, entre stress de la vie de tous les jours et préoccupations personnelles. Chacun devait composer avec ses propres démons...

Samuel regrettait son infidélité et luttait à chaque seconde pour supporter l'absence de son fils. Lauralie s'efforçait de ne pas prendre pour elle et tâchait de ne pas penser que sa petite amie avait honte d'elle. Jocelyne souffrait derrière son masque d'assurance d'un grand manque de confiance en elle. Adam résistait difficilement contre le désespoir qu'engendrait la précarité de sa situation professionnelle et s'évertuait à croire qu'il sortirait du chômage pour ouvrir son établissement. Anouk subissait la pression familiale qui voulait faire d'elle un modèle désuet de la femme bien sous tous rapports, mariée et mère.

Alors, bien que le quotidien ne soit pas toujours aussi badin que ce réveillon de Noël, il avait toutefois contribué à consolider les failles de chacun. Stimulés par leurs éclats de rire, liés par leur complicité, encouragés par la présence des autres, les cinq de l'Avenue du Marais en ressortaient avec une nouvelle vigueur.