Chapitre 2
Il y a quatre ans...
Je ne me suis jamais sentie aussi mal qu'à ce moment. Les poumons en feu, la gorge comme un désert et me tenant à grand peine sur mes jambes flageolantes. Je dois pourtant me ressaisir car dans quelques secondes je devrai repartir pour un dernier tour de piste. Je cours en duo avec Léanora, lorsqu'elle aura atteint la ligne d'arrivée je devrai m'élancer et lui faire honneur. Car nous sommes un duo de « choc » comme nous le rappelle si souvent notre professeur d'athlétisme. Le seul d'ailleurs à nous parler d'égale à égale et qui s'autorise à nous complimenter lorsque nous l'impressionnons réellement. Et nous sommes prêtes à tout pour cela. Léanora se rapproche de moi à une vitesse impressionnante. De nous deux c'est certainement elle la meilleure, elle nous domine toutes dans pratiquement tous les sports sauf en boxe française et en natation où je réussi à lui voler la vedette. Tâche on ne peut plus ardu car elle me talonne sans peine, je me demande même si elle ne me laisse pas être la meilleure pour que l'on puisse partager notre succès. Haletante, je prends place dans mon couloir. Elle n'est pas loin, je commence donc à courir sachant qu'elle va me rattraper dans les secondes qui suivent. J'accélère, tends ma main en arrière, et lorsque je sens le témoin dans ma paume, je referme mes doigts dessus. A peine le témoin en main que je m'élance déjà, j'ai juste le temps de l'entendre me souffler un « Aller Âne fait moi honneur devant le patron ! ». Je n'y fais pas attention et me concentre sur la course. Grâce à Léanora j'ai une avance suffisante pour terminer la course au pas si je le voulais. Mais je suis bien trop compétitive pour ça c'est pourquoi je me vois affublée du surnom d' « âne » depuis plusieurs années, je trouve cela ridicule, je suis bien plus têtue qu'un âne. Je cours donc comme si ma vie en dépendait. Le vent souffle contre ma peau, l'air commence à me manquer mais je me sens légère, plus vivante que jamais. A peine la ligne d'arrivée franchie que je m'étale sur le sol. Léa s'approche de moi et on se tourne vers le tableau qui affiche les temps. Wow je n'ai jamais couru aussi vite, je crois bien que l'on a encore battu un record. En voyant que les autres filles n'ont toujours pas fini la course je croise le regard de Léa et on explose de rire. Je me relève tant bien que mal en prenant appuie sur elle, haletante et j'essaye d'arrêter ce fou rire. Lorsque que ma respiration se rétablit et que mon cœur reprend un rythme normal j'entends Léanora me souffler.
- Tiens toi bien il arrive !
Je ne suis pas sûre de qui elle parle et quand je relève les yeux je me fige.
- Merde ! Mais il a regardé la course ? Je chuchote à Léa.
- Ben oui je t'ai dit de nous faire honneur devant le patron ! D'ailleurs je crois bien que tu n'as jamais couru aussi vite, tu voulais l'impressionner pas vrai ? Finit-elle en remuant ses sourcils d'un air salace.
Je la fusille du regard. Il est vrai que je l'ai souvent observé de loin en me demandant si ses cheveux sont aussi soyeux qu'ils en ont l'air. Si son corps est aussi létal qu'il le semble, avec sa carrure imposante et ses bras musclés que laisse entrevoir son t-shirt tellement bien ajusté sur son torse. Un véritable dieu vivant, enfin c'est un peu tordu à dire parce que c'est tout de même un démon. Un démon hautement sexy oui, mais un démon tout de même. Je ne suis pas une petite chose fragile qui a peur du grand méchant loup mais il faut dire qu'il est franchement impressionnant. Sans parler du fait qu'il est ici pour accomplir une mission, celle de déterminer qui, parmi toutes les filles de l'orphelinat, possède les capacités requises pour une reine des enfers. Je dois avouer que ce n'est pas mon job de rêve. Par ailleurs, ce n'est pas parce que Léa et moi sommes les meilleurs dans la plupart des matières que l'on nous enseigne que nous sommes prioritaire pour ce travail. Et puis, nous n'avons que seize ans, avec un peu de chance une de nos sœurs aura été choisie avant que l'on atteigne la majorité. Avec Léa on a déjà tout prévu, on veut devenir professeur. Elle enseignerais l'athlétisme, moi la natation, et ensemble nous pourrons donner les meilleurs cours d'attaque et de défense de tout l'univers. Oui rien que ça, tout l'univers. Beth et Léa les reines du ring !
Dans mes pensées, je reçois un énorme coup de coude dans les cotes et au moment de rendre la pareille à Léa, une voix nous interpelle :
- Belle course les filles ! Je ne crois pas avoir assisté à un exploit pareil depuis une éternité.
Je dois user de tout mon self contrôle pour ne pas rougir et sauter de joie. Oh mon dieu ! C'est à moi, enfin à nous, qu'il parle ! Il nous adresse la parole ! Je ne dois pas m'évanouir, je ne dois pas m'évanouir, je ne doit pas m'éva...
- T'as perdu ta langue ?
Quoi, pourquoi il ne parle qu'a moi ? Je détourne le regard et m'aperçoit que Léanora s'est éloigné. Oh la lâche ! Je vais lui faire payer ça c'est sûr. Je me reprends et décide d'ignorer sa dernière remarque.
- Léanora est la meilleure coureuse de tous les temps. Sans mentir je pense qu'elle surpasse même la plupart des démons, pour ne pas dire tous. Elle possède vraiment un don, sans parler de ses autres qualités comme le saut en hauteur, la gymnastique, le karaté, le jujitsu. Même en natation et en boxe française elle est très douée, c'est également l'une des meilleurs élèves de toute l'académie, ses notes ne trompent pas d'ailleurs elle...
Je ne peux pas finir ma tirade parce qu'il plaque sa main devant ma bouche. Mauvaise idée, en moins de temps qu'il n'en faux pour le dire il se retrouve face contre terre, les bras dans le dos et mon genoux écrasé entre ses omoplates. Non mais il se prend pour qui ? C'est peut être un démon super sexy mais je ne lui ai jamais permis de me toucher.
- Je ne sais pas où tu as grandi pour être si mal élevé mais ici si on ne veut pas que quelqu'un parle on le lui dit gentiment au lieu de lui plaquer sa grosse main sur sa bouche ! Je fulmine. J'ai craché ses mots comme si je les gardais en moi depuis trop longtemps, il faut que je me calme, c'est vital que je reprenne le contrôle.
Tout en essayant de calmer ma respiration, je sens remuer sous moi. Je me dégage rapidement prête à me confondre en excuses mais me retient. Après tout il n'avait pas à me toucher. Il se met à rire doucement et je ne peux m'empêcher de penser qu'il a un rire absolument charmant. Charmant ? Non mais vraiment reprends toi !
- Désolé, désolé... Mais j'ai vraiment cru que tu ne t'arrêterais jamais. Tu as eu un court circuit ou quelque chose comme ça ? A son sourire en coin, je comprends qu'il plaisante, je décide de rentrer dans son jeu.
- Oui ce sont des choses qui arrivent en présence de crétin, vraiment étrange n'est ce pas ? Je termine avec mon sourire le plus faux et un sourcil levé en guise de provocation.
N'attendant pas sa réponse, je commence à m'éloigner mais il me retient par le bras. Je me retiens de lui en coller une et me retourne doucement pour le fusiller du regard. Sa main sur mon bras me brule presque, j'en ai le ventre noué. Je reste tétanisée un instant, perdue dans le gris de ses yeux. Intense et profond comme le ciel un soir d'orage, j'y perçois également une lueur que j'ai du mal à définir. Un mélange de surprise, d'amusement et... de désir ? Il ne cherche pas à détourner le regard, au contraire, il plonge à son tour dans mes yeux comme s'il pouvait y décrypter mon âme. Après ce qui m'a semblé être la minute la plus longue de ma vie je parviens à souffler un petit « oui ? » pathétique. Son sourire s'agrandit, il a l'air ravi de l'effet qu'il me fait, et ma colère croît. Avant que ne n'ai pu dire quoi que ce soit il se rapproche et me souffle à l'oreille :
- Une grande gueule pour une tout aussi grande fille, j'adore. Ravi de te rencontrer enfin en personne Anna. Je sens que je vais bien m'amuser avec toi.
Je sors de ma stupeur et le fusille du regard. Personne ne m'appelle Anna, je déteste ça, c'est soit âne, mon surnom que je commence à apprécier, soit Beth. Anna et Annabeth ne me correspondent pas du tout. Ça n'irait bien à personne d'ailleurs sauf peut-être à une retraitée centenaire qui aurait vécu plus de guerre que Hadès lui même, mais pas à moi.
- Mes amies m'appellent Beth mais puisque l'on n'est pas amis je te suggère de ne pas m'appeler du tout.
- Oh je dois te siffler alors ?
Je m'éloigne. Mais pour qui se prend il avec ses manières d'homme des cavernes. Il me rattrape en courant et marche à mon coté.
- C'est bon je plaisante, tu n'as pas beaucoup d'humour n'est ce pas ?
Je ne réponds pas.
- Très bien. Donc je connais ton nom, tu ne veux pas connaître le mien, je pense que tu serais surprise.
S'il pense que j'aurais agi différemment en sachant qu'il est le grand Carrihan, démon privilégié et qui existe depuis presque aussi longtemps qu'Hadès lui même, il se trompe énormément.
- Oh mais je sais qui tu es. Je réponds d'un ton las. Il me regarde surpris et confus. Tu es le grand Carrihan ! Messager des enfers et porteur de malheur et donc de terreur.
- Et c'est comme cela que tu m'accueilles ? Dit-il, réellement intrigué et en faisant un geste en direction de là ou nous nous trouvions plus tôt.
- Bon écoute moi bien, le grand méchant loup, je commence en m'arrêtant de marcher et en me tournant vers lui, tu es peut être un dieu sexy et le chouchou de l'altesse mais je ne suis pas là pour te divertir. Donc si tu as quelque chose à dire de constructif sur mes performances ou celle de Léanora, vas-y ! Mais si tu veux juste t'amuser en collant aux basques de la première venue, tu ferais mieux de trouver quelqu'un d'autre parce que je ne suis pas un agneau fragile ! Terminais-je en hurlant.
Il me fixe, ses yeux mercures plantés dans les miens, ils dégagent une certaine confusion, ainsi que de la surprise due au fait qu'il ne doit pas avoir l'habitude qu'on lui parle de cette façon. Je dois avouer que j'en suis plutôt fière. Je n'ai pas ma langue dans ma poche et lorsque je me sens en danger, je peux être très violente. Et puisque je n'ai pas l'intention de régner, autant montrer mon vrai visage, ça m'étonnerait que ce soit ce que cherchent les démons.
Je m'attendais à toutes les réactions possibles de sa part mais pas à ce qu'il me tire violement contre son torse pour capturer mes lèvres des siennes. Je reste un instant paralysée avant de m'écarter et de le gifler. Il pose sa main sur sa joue et me regarde avec incompréhension. Non mais il est sérieux ? Il s'attendait à quoi ? A ce que je réponde à son baisé et que nous finissions notre discussion dans ma chambre ? ARGH ! Mais il n'est pas croyable, je ne pense pas avoir déjà été dans un état pareil. Je fulmine littéralement, j'ai l'impression que l'on peut voir de la fumée s'échapper de mon nez et mes oreilles. Et plus je le regarde, plus je m'énerve. Ses yeux sont implorants, comme s'il se demandait vraiment ce qui m'avait pris de le gifler. Il n'a pas l'air de comprendre qu'il n'avait aucun droit de m'embrasser. Surtout que c'était mon premier baiser. Bon pas réellement, puisque je n'y ai pas répondu (si on considère qu'une gifle n'est pas une réponse adéquate), mais c'était tout de même la première fois que j'étais si proche d'une personne du sexe opposé. Et il m'a volé ce moment qui aurait dû être magique. Je ne vais pas m'attarder sur les sentiments que je découvre, la chaleur qu'ont laissée ses lèvres douces et avides des miennes, son goût qui me donne envie de lécher celles-ci. Je ne m'attarde pas sur tout ça et décide de me la jouer indifférente. Je lève les yeux au ciel en soufflant et m'en vais pour de bon. Je l'entends soupirer dernière moi et je prie les douze dieux pour qu'il ne me suive pas. Et il ne le fait pas. Heureusement car à peine ai-je tourné à l'angle du bâtiment que je sens mes jambes faiblirent et je suis obligée de m'appuyer contre le mur de béton. Bon sang mais qu'est ce que c'était que ça ? C'était plutôt intense, ah ça oui. Et même plutôt dément. Et ce regard dans ses yeux, il avait l'air réellement déçu que je ne l'apprécie pas plus que ça. Avant de m'éloigner j'ai perçu comme une lueur de détermination dans ses iris orageux. Une détermination à s'imposer. Eh bien bonne chance mon gros, tu en auras besoins, car même si je ne suis pas si indifférente à son charme il y a une chose chez moi qu'il ne connait pas et qu'il ne sera pas ravi de découvrir. Ma résistance à la tentation n'a d'égale que ma tête de mule. Et même si je le pense capable de mettre ma détermination à rude épreuve, j'ai assez confiance en moi pour penser que je serais vainqueur à la fin.
Mais je crois que s'il s'attarde à l'orphelinat, cette année risque d'être forte en émotion. Je dois m'endurcir et pour ça je dois d'abord me vider la tête.
Direction la piscine.
__________________________________________________________
Chapitre 2 ! N'hésitez pas à me donner votre avi ^^
Merci de lire mon histoire ! Cela me fait très plaisir :)
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top