Page trente et une
Mercredi 12 décembre 2018
Soixante-treize jours.
Je ne sais plus si je te l'ai dit, mais mon psychologue s'appelle Alan. Je le déteste. Je crois que je n'ai jamais détesté quelqu'un autant que lui. Je n'aime pas beaucoup les gens, tout le monde savait que c'était toi le plus sociable de nous deux, mais lui c'est pire que tous les autres réunis.
Après notre rendez-vous d'aujourd'hui, il a voulu parler avec maman, sans moi. Je suis sorti de son bureau et j'ai écouté à la porte. Il y avait une fille dans la salle d'attente qui me regardait faire, je l'ai ignoré.
Alan a dit n'importe quoi. Il a fait croire à maman que j'étais en dépression. Quel connard putain. Mais ce n'est pas le pire. D'après lui si je ne parle plus, c'est parce que je serais en état de choc et dans le déni. Que je n'accepterais pas ta mort. Je sais très bien que tu es parti et que je ne te reverrai plus jamais. Je ne suis pas stupide. Tu es mort, tu es dans un cercueil, dans un cimetière en train de te faire bouffer par des vers. Je ne vois pas comment tu pourrais revenir.
Il lui a aussi parlé d'une cellule psychologique, un groupe d'entre-aide, uniquement réservé aux jumeaux. Parce que d'après lui, encore une fois, notre deuil serait différent de celui des autres et qu'être en contact avec des personnes qui traversent la même chose que moi, pourrait m'aider.
Je n'ai pas voulu en entendre plus. J'ai été m'asseoir en attendant que maman termine de se faire laver le cerveau. La fille me regardait toujours. J'avais envie de l'envoyer chier, mais comme je ne parle pas, je l'ai juste regardé de travers.
J'ai des médicaments à prendre maintenant. Je n'en veux pas. Je ne suis pas dépressif, je ne suis pas en état de choc, je ne suis pas dans le déni. Je déteste tout le monde, Alan plus que les autres.
— Harry
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