Jeudi 1er août 2019

3H du matin.

Je sais, j'ai encore fait le mur. Mais je suis là, ça y est. J'ai enfin trouvé le courage de venir. Est-ce que tu peux me voir ? Je suis assis à côté de ta tombe. En réalité je suis là depuis bientôt deux heures. Je suis resté un long moment devant le portail du cimetière, j'ai cru que je n'allais pas être capable d'entrer, j'ai failli faire demi-tour. J'ai dû lutter contre moi-même pour ne pas m'en aller, mais je ne voulais pas te décevoir.

Je ne savais pas où tu étais, ça aussi c'était dur. Chercher ta tombe au milieu de plein d'autres tombes. Te chercher, au milieu de plein d'autres personnes mortes. J'ai eu quelques flashs du jour de ton enterrement, ils m'ont un peu guidé. Je t'ai trouvé et là c'était encore plus difficile de ne pas m'enfuir. Lire ton nom et l'inscription gravée dans le marbre.

Railey Pascal Styles
01/02/2002 - 01/10/2018
« À tout jamais dans nos coeurs. »

J'ai cru m'effondrer, j'étais incapable de respirer tellement c'était douloureux. Une avalanche de douleur. Je crois que je suis resté longtemps debout, immobile, à ventiler pour respirer. À chercher l'air pour ne pas m'évanouir.

Je tremble encore, tu peux le voir à mon écriture. C'est dur Railey. Vraiment dur. Mais je suis venu, je suis là. J'ai envie de mourir, je ne le ferai pas, mais je le ressens.

C'est affreux d'être ici, de savoir que ton corps est juste là. J'ai mal. J'aimerais mourir, là maintenant, pour ne plus ressentir ça. C'est juste horrible. C'est trop dur. Je veux partir, mais j'ai peur de me lever et tomber. Si je m'en vais, j'ai peur de ne plus jamais revenir. Je t'aime et je te déteste. J'ai la poitrine complètement serrée. J'ai envie de hurler pour que tu reviennes. Je veux que ce cauchemar s'arrête, ça ne peut pas être vrai. Comment on peut souffrir autant ? Je n'arrive presque plus à respirer tellement j'ai mal.

La pierre, elle est froide. Il y a un ballon de basket gravé dessus. Moi aussi j'ai froid alors qu'il fait chaud. Je t'écris parce que si je ne le fais pas, je vais rester ici sans bouger et je vais me sentir mort.

Comment t'as pu me laisser ? Comment t'as pu mourir ? Comment tu peux être ici ? Dans ce cimetière. Je ne te ressens pas, c'est vide. Vide et froid.

Je n'aurais pas dû venir, c'était une erreur. C'est trop douloureux, ça fait trop mal et tu n'es pas là. Je ne te sens pas. Je ne me sens pas proche de toi, tu n'es pas là. Tu n'es plus là. Tu n'es plus rien. Tu n'existes plus. Tu es mort et moi aussi j'aimerais être mort.

Je m'en vais. Je ne veux plus jamais revenir. Jamais. Jamais. Jamais.