Chapitre VI
--Station LOP-G, Espace, 03/01/2031--
Vladimir n'arrivait pas à trouver le sommeil. À vrai dire, il n'avait jamais dormi depuis qu'il avait vu la Terre... Noire ; coupée d'électricité. Il resta alors sans bouger dans la même position dans sa couchette... Couchette auquelle son ancien propriétaire avait connu une mort tragique, comme à peu près tout l'équipage de Jason... Il n'avait pas su les protéger, voilà ce qu'en pensait Vladimir, un bon commandant prend les bonnes décision pour éviter... Ce genre de choses... Même en cas de crise, il doit avoir l'étoffe d'un chef. Vladimir avait confiance en Marc, il le respectait pour cela.
Hell, what the matter will your head, head, head
L'astronaute russe se redressa, surpris par cette musique de fond. Il balaya de son champ de vision le dortoir ; personne ne se réveilla, tout le monde dormait... Dormait comme si de rien n'était... Comme si le monde n'était pas en train de changer... Comme si l'éventualité l'extinction de la race humaine n'était pas d'actualité... Comme si...
Hell, what the matter will your mind and your sign and a...
Non, il ne devait pas penser à ces choses... Ne pas penser à sa famille, il avait été sélectionné car on savait qu'il ne lâcherait rien... Qu'il ne faiblirait pas... Alors il ne faiblirait pas. Il se leva finalement de sa couchette car de toute façon, ce n'était pas cette nuit qu'il trouverait le sommeil. Une fois debout, il se guida au son de la musique... Il se doutait de qui l'écoutait, il ne manquait qu'une seule personne dans le dortoir. Une seule couchette était vide ; celle de Marc.
Hell, nothin the matter with your head baby find it, come on and find it
Marc était assis, dans la salle des commandes, sur le fauteuil du commandant. Car telle était sa place, Jason était celui de la station mais maintenant il était claire qu'il n'était plus en état, il devait d'abord se remettre de l'horreur qu'il a vécu. Le commandant de la mission Red Earth regarda a travers l'écran panoramique la vue magnifique de l'espace. D'ici, on ne voyait pas la Terre, la station était de l'autre côté de la Lune, d'ici, on était tourné vers l'inconnue, l'immensité de l'espace, les lieux pas encore conquis par l'Homme. Les planètes pas encore souillés, les lieux dit encore "sauvages" mais en réalité les lieux ayant gardés leur nature... Des lieux... Dont Marc n'avait pas encore vu de ses yeux. Il était comme ça, il voulait observer ce que personne avant lui n'avait...
-Mon commandant ?
Marc se retourna ; surpris :
-Vladimir ! Décidément, on ne vous entend pas venir ! Et puis... Appelez-moi Marc, je vous l'ai déjà dit, voyons ! Dit-il d'un sourire.
-La musique, Marc ! Répondit-il simplement. Elle favorise ma discrétion !
-Ah ! Euh, oui, excusez-moi, elle a probablement dû vous réveiller ! Dit-il en coupent le son.
-Oh, non, vous savez, moi... Je ne dors pas... Je ne dors plus... Et puis... elle n'était pas déplaisante ! Musique du XXème siècle, vous aimez les classiques !
Marc se tourna alors vers le tableau de bord, tournant le dos à Vladimir pour lui dire :
-Elle me permet de me rappeler... De me rappeler de ma vie... Avant ça, de me rappeler de ma famille et puis... Plus loin encore...
Constatant qu'un blanc se faisait, le commandant reprit aussitôt en se tournant vers son astronaute :
-Mais je me rend compte que c'est une erreur ! Dit-il d'un sourire forcé. Il faut se concentrer sur... La mission !
-Vous avez raison, Marc.
Celui-ci se retourna pour contempler l'espace et déclara simplement :
-Quand il m'arrive de dormir, je fais des rêves... Ou plutôt des songes.
-Quels genre de songes ?
-Des songes où des hommes en blancs me félicitent, me disent que j'ai réussi le test, que je vais pouvoir aller vers une planète habitable, là... Où il y a de la vie...
-Ce ne serait pas le moment où vous avez remporté le concours pour la mission Red Earth ?
-Non, Vladimir, non. Ce moment là, je m'en souviens clairement. Tandis que dans mon songe, j'ai l'impression d'avoir déjà vécu ça... Que c'est un souvenir, plutôt.
-Mais vous ne vous rappelez pas ce que c'est... Comme souvenir ?
-Non... Justement, c'est... Assez troublant... Je.. Je ne...
Le commandant regarda alors Vladimir et devant son air ajouta aussitôt :
-Je vous promet, je ne suis pas fous !
Vladimir prit alors un rire fort, et le rassura :
-Du moment que vous nous indiquez la bonne direction à suivre, aucun problème sur ce point !
-Je pense en effet vous indiquez la bonne direction, mais... Il n'y a pas que moi, votre avis compte aussi...
Puis Marc regarda l'espace et son regard sembla se perdre dans l'immensité du cosmos. Vladimir prit alors un fauteuil et s'installa derrière son commandant.
-Que regardez-vous, Marc ?
-Cet espace... Qui semble si froid... Ça... Il regarda d'un air désespéré la vitre et ajouta ; Avec les températures sur Terre qui ne font qu'augmenter, je n'ai jamais eu la chance de côtoyer de près le froid... Mais ce que j'aimais par dessus tout... C'était la neige ! Vous vous rappelez de la neige, Vladimir ? Cette neige que nous avions connu étant enfant... À cette époque, si seulement j'aurais sûs que c'était une des dernières fois que je la verrais, cette neige, j'en aurais plus profité... Ces flocons qui tombaient pour tout ensevelir, les routes sales et goudronnées devenaient propres et d'un blanc impérial. Il eut alors un rire bref. Ces batailles de boules de neige auquelles on se livrait étant gamins, tu te souviens Vladimir ? Toi aussi, en Russie, tu l'as connus, la neige... T'as dû plus en profiter que moi... Que de vagues souvenirs de mon enfance... Quand j'ai commencé ma vie d'adulte, la neige avait cessé de tomber, et elle ne tombera probablement plus, maintenant... En tout cas personne ne sera là pour l'admirer..
Marc renifla, souffla un coup puis regarda Vladimir avec un sourire et lui dit :
-Je sais pas pourquoi je te raconte ça... Désolé, c'est juste que...
-Il fallait que ça sorte, l'aida-t-il. Oui, je comprend. Moi aussi j'essaie de refouler mes sentiments au profit de la mission mais... Je dois bien avouer que ce n'est pas toujours si simple !
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