Chapitre 2 : Mikaël (4/4) [V2]

— Pas besoin, j'arrive de l'extérieur, moi aussi !

Cette révélation laissa Mikaël bouche bée. Katrina sourit avec satisfaction et se pencha une nouvelle fois sur la ruelle.

— Dans quel genre de château isolé viviez-vous avant de déménager ici ? rit nerveusement le jeune homme.

Katrina ne répondit pas. Ses yeux étaient fixés sur le réservoir d'eau, à quelques mètres de là. Elle s'en approcha sans plus accorder la moindre attention à Mikaël.

Cinq lettres. D'une couleur sale virant sur le brun.

— « Sânge », murmura le jeune homme quand il l'eut rejointe.

Elle roula des yeux. Pour la prononciation, elle repasserait.

— Ça veut dire « sang » en roumain, crut-il bon d'ajouter.

— Nan, sans blague ?

Mikaël lui répondit par un silence vexé. Elle l'ignora et observa les lettres. Ces dernières semblaient avoir été tracées à la hâte, dans une rage presque sauvage. Leur côté sinistre était d'autant plus renforcé que la nature du liquide utilisé ne laissait pas la moindre place au doute. Beaucoup de liquide, à en juger par les gouttes qui avaient coulé avant que le mot ne sèche.

— Du sang... C'est quoi, ça, une blague de mauvais goût ? ricana Katrina.

La situation ne la faisait pourtant pas rire. Non seulement le meurtrier l'avait-il mêlée à ses histoires, mais il laissait en plus des messages ensanglantés sinistres. Quel genre d'esprit tordu pouvait bien agir ainsi ?

— C'est donc bel et bien le quatrième... murmura pensivement Mikaël dans son dos.

Elle se retourna et le fixa droit dans les yeux. Le jeune homme se mit à balayer les alentours d'un regard affolé et embarrassé. Ces quelques mots lui avaient vraisemblablement échappé. Tant pis pour lui.

— Le quatrième quoi ? le pressa-t-elle.

Mikaël sembla hésiter un instant, mais les yeux assassins de Katrina le convainquirent de ne pas tergiverser trop longtemps. Il finit par baisser la tête avec résignation, soupira et avoua :

— Le quatrième meurtre à proximité duquel nous retrouvons cette inscription. Nous sommes à peu près certains qu'il s'agit d'un tueur en série.

— Un vampire tueur en série ? Formidable...

Si un vampire goûtait au sang humain une seule fois dans sa vie, il développait pour la substance une dépendance absolue qui décuplait ses forces et lui faisait perdre la raison, donnant ainsi naissance à une machine à tuer incontrôlable. La folie meurtrière du coupable qu'elle lisait dans ces cinq lettres trouvait là une parfaite explication.

— On ignore encore s'il s'agit ou non d'un vampire ! cria presque Mikaël. Nous pourrions avoir affaire à l'un de ces extrémistes qui contestent l'origine même de Prémices ! Ou à un agent étranger arrivé illégalement sur notre territoire pour y semer le chaos de l'intérieur ! Nous aurions tort d'accuser les vampires sans preuves...

Katrina le fixa un instant, bouche bée. Pourquoi tant d'ardeur ? Pour qui se prenait ce bon Samaritain ? Le super-héros des vampires ? Alors qu'il n'était pas fichu de sauter trois mètres ?

— Ton nom, c'est Lhom, non ? se rappela-t-elle. Un rapport avec le président... Machin... Lhom, le fondateur de Prémices ?

— Je suis l'un de ses descendants, souffla-t-il en se passant une main derrière la nuque.

Mais c'est qu'il rougissait de fierté et d'embarras, ce con !

Ainsi, Katrina avait devant elle un fervent défenseur de la cause familiale. Quant à savoir si cette dernière avait vraiment pour but d'aider les vampires ou s'il s'agissait d'un simple crédo pour gagner quelques votes dans une prochaine carrière politique, elle ne savait trop quoi en penser. Pourtant, il ne lui semblait pas nécessaire d'aller chercher trop loin dans le cas de Mikaël : il avait l'air beaucoup trop gentil, niais et malléable pour son propre bien.

Finalement, quelles que soient les raisons de son altruisme, Katrina n'en avait que faire. Ces préoccupations lui passaient bien au-dessus de la tête. Tout ce qu'elle voulait, c'était qu'on lui fiche la paix. Elle n'eut donc pas le moindre remord en détruisant les petites théories conspirationnistes de l'agent des forces de l'ordre.

— Désolée, Saint Kaël, mais le coupable de ce meurtre-là est un vampire. J'ai bien vu ses yeux rouges, on n'en fait pas des faux comme ça.

La fierté déserta le visage du jeune homme, remplacée par l'horreur. Visiblement, même s'il ne voulait pas y croire, il avait quand même réfléchi à ce qu'impliquait cette hypothèse. Il s'étrangla :

— Mais alors...

— Un addict se balade en ville, confirma Katrina.

La nouvelle sembla atteindre Mikaël en plein cœur. Il avait dû finir par se convaincre lui-même que ses suppositions étaient correctes.

— Pourquoi ne pas nous avoir prévenus que vous aviez vu le meurtrier ? finit par se reprendre Mikaël. Nous vous aurions considérée comme témoin et non comme suspecte ! Vous n'auriez pas été placée sous surveillance !

Katrina ricana. Maladivement gentil, niais et malléable. Ce qui l'arrangeait bien, finalement. Elle préférait être suivie par un bon toutou apprivoisable plutôt que par une mule bornée.

— Vous croyez sérieusement que votre copain Farein aurait été du même avis ? Il voulait un suspect et il était heureux d'en trouver un. D'ailleurs, si vous ne m'avez pas arrêtée hier, c'est parce que je n'ai pas une tête d'addicte et que vous me croyez plutôt complice de ce meurtre, non ? Vous espérez que je vous mène au véritable coupable, j'ai bon ?

Ce fut au tour de Mikaël de la regarder bouche bée.

Bingo, songea Katrina.

— Et puis je préfère autant passer du statut de « suspecte » à « innocente » plutôt que de me farcir le rôle de témoin pendant des mois, voire des années.

Sans laisser à Mikaël le temps de rebondir sur ses propos, elle sortit son téléphone portable et composa un numéro.

— C'est moi. Ramène-toi au lieu derendez-vous habituel dans dix minutes.

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