Le Tournoi

        Les épreuves avaient commencé depuis la veille. Pour l'heure, il y avait des phases éliminatoires qui se tenaient sur le pont intermédiaire afin que les habitants puissent les voir depuis les marches supérieures de la cité. L'estrade lacustre était quand à elle chargée d'un grand nombre de notables installés confortablement.

         Les forgerons étaient pour l'heure un peu désœuvré car rares étaient les combattants ayant besoin d'entretenir leurs armes et armures. Mais à la vue de l'intensité des combats, cela ne saurait tarder car malgré la distance et les bruits de la cataracte laissant passer l'excès d'eau du barrage, il était possible d'entendre le bruit du métal frappant contre métal. Des centaines de combattants s'affrontaient en duel jusqu'à ce que l'un des deux soit vaincu. Ce dernier s'écartait du pont vers la ville basse alors que le vainqueur se dirigeait vers la ville haute. Quand suffisamment de place était disponible, une nouvelle série de combattants s'avançaient. Plus d'un milliers de guerriers allaient s'affronter ainsi, aussi bien guerriers professionnels que simples aventuriers en quête de gloire et fortune. La prime au champion de 55.000 dragons d'or attisait bien des convoitises. De plus le vainqueur pouvait espérer devenir garde du roi Achus Astruspure.

         La plupart des combattants éliminés le premier jour n'étaient que des aventuriers sans le sous dont les armes ne résistèrent pas aux armes de qualités des soldats professionnels caparaçonnés dans des armures. Ceux qui avaient de la chance n'avaient que leurs armes qui volaient en éclat. Les autres ne quittaient pas la zone de combat sur leurs jambes. C'est alors que les pages entraient en action. Ils étaient vêtus de noir avec un blason écarlate afin d'être facilement identifiable par les combattants. Ils portaient avec eux un brancard et transportaient les blessés jusqu'à leurs aires respectives où se trouvaient des soigneurs ou des fossoyeurs...

         Le soir venu, la moitié des participants avaient déjà été éliminés. Une poignée d'aventuriers avaient réussi à éliminer leurs adversaires en les frappant aux niveaux des jointures de leurs armures et les paris les concernant allaient bon train. A partir du lendemain, le tournoi n'aurait lieu que l'après-midi afin que les combattants puissent entretenir leur matériel. Les forgerons seraient ainsi très sollicités dans les heures à venir.

        Quin se leva tôt ce jour là, elle commença par aviver les flammes de la forge afin qu'elle ne s'éteigne puis parti en quête de l'eau et du charbon nécessaire à son fonctionnement. Quand elle fut de retour, son maître s'absenta à son tour en quête de nourriture et de clients.

         Les forgerons de bordure furent rapidement assaillis de clients fortunés prêts à engager les meilleurs pour préparer leur matériel pour la phase suivante. Quin veillait son feu quand un apprenti forgeron d'un emplacement voisin fit tomber l'épée d'un des aventuriers sur l'enclume de son maître ébréchant ainsi la lame. L'aventurier réagit violemment à cette mésaventure. L'échauffourée déborda sur les autres emplacements. Dans la bousculade, l'épée fut oubliée par les combattants. La garde fut appelée pour arrêter les combats alors que les armes commençaient à être tirées. Pendant ce temps, Quin se rendit sur l'emplacement dévastée et ramassa la lame. Elle en éprouva le fil, prit son petit maillet et en tapota la lame écoutant son chant. Elle fit une moue.

         La garde arriva enfin. Les blessés furent évacués alors que ceux qui le pouvait avait déjà filés au loin à leur approche. L'aventurier revint quelques instants plus tard en quête de son arme perdue.

- Pardonnez-moi messire, je crois que ceci est à vous.

- Je ne suis pas noble.

- Pardon, je ne comprends pas.

- Je ne suis pas noble donc ne me dites pas messire. Je ne suis qu'un mercenaire.

- Cette lame est bien vôtre, n'est ce pas ?

- En effet.

- C'est une belle lame. Dommage qu'elle ait été si malmenée.

- Comment cela ?

- C'est un bon acier Araknéen forgé par un maître si j'en juge la qualité du métal mais elle a été endommagée au cours de nombreux affrontements ce qui lui laisse des fractures de fatigue. Ceci explique qu'elle se soit abimée en frappant l'enclume.

- Comment pouvez-vous... ?

- La lame est feuilletée, on en voit la trame sur la lame, ce qui est la signature de l'acier Araknéen. La marque du forgeron est partiellement effacée au dessus de la garde. Si on la déshabillait, je pense qu'on trouverait la même mais en bon état au dessous. Quant aux fractures, je les ai entendus en sondant la lame.

- Seriez-vous donc un chanteur de lames ?

- Non, messire, mais, mon maître, qui est un forgeron fort sage, m'a enseigné son art. Je n'ai pour l'heure pas passé l'épreuve de maître.

- Je vois, serait il possible de parler à votre maître ?

- Pour l'heure, il est parti au ravitaillement...

- N'est pas ce plutôt le travail d'un apprenti ?

- Si, mais mon maître a perdu un de ses bras, et m'a enseigné tout son art pour reprendre le flambeau. Maintenant, si vous voulez patienter qu'il revienne, c'est tout à fait possible. Mais, je pense qu'il vous dira la même chose que moi. A savoir, que la lame est très abimée, il est possible de la chauffer et de la travailler pour la renforcer mais il vaudrait mieux la reforger au risque de perdre le travail de l'artisan...

- Ce qui serait bien dommage, mon jeune apprenti, dit une voix derrière Quin, car elle a été forgée par maître Qur, le chanteur de lames et ancien forgeron royal. Je pensais que ses œuvres avaient toutes disparues en dehors de ses grandes lames : les lames de SangDragon...

- Maître ! dit Quin sous l'effet de la surprise, Vous voulez dire que cette lame est...

- ... l'oeuvre du dernier maître SangDragon connu, en effet. C'est une lame de prestige. Il y a peut être une solution pour la sauver mais j'ignore si vous en avez les moyens.

- Vraiment ! Et comment feriez-vous ?

- Pate de poudre d'écailles de SangDragon et charbon appliquées sur les plus gros défauts devrait renforcer la lame mais, ce ne sera jamais une SangDragon.

- Combien ?

- 100 dragons d'or au minimum. Il faudrait que je vois l'étendue des dégâts auparavant...

- ... Vous plaisantez avec ça je pourrais me payer des dizaines d'épées de bonne facture...

- Certes mais ce ne ce serait pas de l'acier Araknéen. Sans compter que les écailles de SangDragon sont extrêmement rares et donc chers.

- Laissez-tomber je chercherais un autre forgeron moins rapiat...

- Comme vous le désirez mais prenez garde, car si mon élève dit vrai, votre lame ne résistera pas bien longtemps aux combats.

         Une fois le client parti :

- Quin, ton analyse était bonne. Ta perception du chant s'est encore améliorée. Quel dommage qu'il n'est pas accepté de faire réparer sa lame... Cela risque d'être une grande perte...

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