L’auberge est comble. La journée tire à sa fin à Ballird Vague. Un voyageur aux habits usés boit, las, sa Grabo. Il consomme lentement le mélange de céréales et d’algues fermentées. Il a pris de la première qualité malgré son aspect miteux. De la vrai Grabo Nosse d’Ines produite comme le dit son nom par le Brasseur Nosse de la cité la plus au sud du continent : Ines. Entre deux gorgées, les rares personnes qui l’observent ont l’impression que ses gestes ont la lenteur non pas de celui qui déguste sa boisson mais de celui qui a vu trop de choses. De celui qui aurait connu l’enfer et y aurait perdu son âme... Rares sont ceux qui osent l’approcher. Quelque chose, dans sa physionomie, est inquiétante. Et puis pourquoi porte-t-il une large capuche à l’intérieur...

    Un nouvel arrivant, c’est un jeune homme portant une tenue criarde et alourdi de bijoux hors de prix. Les discussions s’arrêtent. Tout le monde en dehors de l’étranger le salue avec révérence. Il s’agit du fils du bailli. Il arrive au bar jurant :

   - Putain d’Aurstien... Putain de lâches et d’incompétents de la coalition... Je suis sûr que si j’avais été à la place de ces putains d’officiers nous aurions pu gagner cette putain de guerre...

   - Pendant toute cette tirade les habitants opinent du chef et approuvent le jeune homme... à l’exception d’un homme, assis à côte de l’âtre où cuit le repas du soir, le regard vide...