Deuxième partie

Le ciel se parsemait des couleurs froides de l'aurore, éclairant les maisonnettes, les bâtiments d'antan ainsi que l'immanquable Tour Effel.

Tel d'innombrables navires célestes, quelques rayons aux belles dorures fuitèrent aux travers les rideaux de la demeure de Scula Drahcuah, forçant sans ménagements l'ouverture de ses paupières.

Celui-ci émit diverses grognements mécontents, gigotant pour faire la trouvaille de la meilleure, donc de la plus confortable, des positions. Sauf que ce n'était pas chose aisée dans le divan sur lequel il s'était abandonné aux ailes de Morphée.

Et des dizaines de secondes plus tard, il dut se résoudre à ouvrir l'œil, le flash des souvenirs de la veille faisant l'objet de sa souvenance.

Il eut un spasme de frousse qui secoua tout son corps, telle une secousse sismique mais en rapport avec l'anatomie humaine de sa personne.

Cette fille... Ce regard... Ce sourire... Ce couteau de cuisine, surtout !

Ça lui donnait la chaire de poule, l'envie subite de se barricader dans son logis sans aucun moyen d'invasion pour les adversaires de l'extérieur. Et son chien, loyal compagnon, serait toujours posté à ses côtés, prêt à défendre son maître au cas où une crise l'exigerait.

Il était donc totalement irréaliste que l'animal en question soit dans le lit de son humain, gentiment en train de roupiller sans même se soucier de son deux pattes donneur de croquettes ainsi que de friandises.

Eqesiezu se releva brusquement, un des coussins de son divan serré tout contre sa poitrine, comme s'il s'agissait d'un bouclier increvable.

Sur le visage du jeune homme se lisait toute la terreur qui étouffait celui-ci, et son regard passait la pièce en revu, de long en large avec une vitesse surréaliste, cherchant avec une pointe d'angoisse son chien.

Sauf qu'il ne le trouvait nul part.

Son cerveau commença à surchauffer, les rouages de son esprit tournant à mille à l'heure, recherchant hâtivement une inspiration miraculeuse qui lui donnerait l'idée divine.

-Aestasis, viens !

Prononcer ses paroles fut ce que ses neurones lui trouvèrent à faire, ou plutôt à lancer, se disant tous que comme début, c'était le meilleur à réaliser.

En boule sur des draps dont la trace de son passage s'exprimait par la nouvelle température des couettes, provenant de la chaleur corporel de la créature, un chien était allongé dans une position confortable.

Les édredons, posés eux-mêmes sur un matelas moelleux, ne pouvait que ralentir l'ouverture des yeux de la belle créature japonaise. Et quand ceci fut chose faite, elle fut réellement faite, car Aestasis bondit avec l'agilité d'un chat avant de rejoindre Scula avec autant de vitesse qu'un lièvre.

Sa truffe avait reniflé dans l'air, le parfum putride et aride de la peur cuisante. Et sa mission lui tenant très à cœur, il rejoignit son maître en quelques foulées.

Scula Drahcuah se massa la tempe, ayant l'impression que quelque chose lui vrillait le crâne, gratouilla Aestasis dans l'encolure de son cou, puis se mit sur ses deux pieds, membres qui étaint la raison du surnom affectif que la petite bête blanche ainsi qu'orangée lui sortait.

Il vit tout d'abord quelques étoiles violettes sur un sombre fond valser face à son regard, avant de s'évaporer dans les airs, jusqu'au delà de l'univers de l'existence elle-même, s'échouant sur les rives galactiques de l'inexistence.

Eqesiezu secoua sèchement sa tête de droite à gauche, puis avança vers la sortie de sa maison, sa conscience lui disant d'aller acheter des coeks aux chocolats car il n'était pas en état de cuisiner quoi que ce soit qui ne l'empoisonnerait pas directement.

Alors il sortit, à pas feutrés pour ne pas se faire peur à lui-même, le moindre bruit le ramenant directement là-bas, dans le parc, quand il regardait son chien foncé sur une fillette...

Il fit un signe d'excuse vers son compagnon avant de s'en aller rencontrer la boulangère qui lui servit, le sourire aux lèvres et sans remarquer le visage maladif de la célébrité, ses petits pains aux chocolats tant voulus.

Sauf qu'en empruntant le chemin du retour, le jeune homme ne put faire autre chose que se figer en plein mouvement, le cœur battant avec tant d'ardeur la chamade que Scula avait l'impression qu'il tentait de prendre la fuite. Lui, un simple cœur, organe vital de son corps, souhaitait s'enfuir.

Il avait en face de lui celle qu'il aurait souhaité ne jamais plus revoir, celle qui aurait été l'objet de son vœu s'il avait aperçu une étoile filante cette nuit-là.

Son visage devint albâtre, ses lèvres s'étaient misent à trembloter, ses jambes à flageoller, ses dents à jouer les castagnettes tout comme ses genoux.

Il était plus grand qu'elle, pourtant.

Ce sourire avait été tellement mesquin qu'il en avait perdu tout ses moyens, mais tout de même... Face à une arme, qu'aurait-il put faire d'autres ?!

Les images de la soirée dernière lui revinrent comme s'il se recevait des boulets de canons tirés par ses ennemis. Et il se recula de trois pas, aussi tremblant que la branche ployant sous le vent et essayant tant bien que mal de résister.

La fille au couteau était tout proche de lui, deux mètres seulement les séparaient.

Elle avait sa main dans celle d'une femme, la tête baissée en direction des pierres pavant le parterre, pour l'adulte, il s'agissait de la mère de la petite selon Scula.

La gamine dut sentir son regard, par son instinct, sans doutes, et tourna ses yeux en direction de la sensation désagréable d'être observée, vers Eqesiezu en conclusion, et ses yeux brillèrent d'une lueur totalement différente à la dernière fois.

Ce n'était aucunement une envie sanguinaire qui scintillait là, mais mille reflets d'excuses ainsi que de prières qui furent prononcées à voix hautes.

-Elle va venir ce soir, tu ne devras pas lui ouvrir la porte ! Je t'en supplie, Eqesiezu, enfermes-toi cette nuit dans ta maison !

La femme qui tenait l'une de ses mains l'entendit, comme il fallait s'attendre, et serra encore plus sa poigne sur son bras avant de se tourner vers Scula, un sourire désolé sur les lèvres.

-Excusez-là, elle ne sait pas ce qu'elle dit, elle n'est pas saine d'esprit.

Le jeune Drahcuah fronça ses sourcils, paralysé de stupeur devant le comportement de l'enfant qui s'était littéralement métamorphosé ainsi que face aux propos qu'elle tenait avec le plus grand sérieux du monde, les yeux suppliant. Cela, avant de se faire tirer brusquement par sa mère, l'éloignant de l'endroit où se tenait un des youtubeurs les plus connus.

Pas saine d'esprit ?

Scula Drahcuah, une fois rentré dans son foyer, était d'autant plus perplexe, à présent, et il essayait de se convaincre, non sans mal, que les predictions de la fillette était fausse comme le clamait sa mère.

Cependant... La femme savait-elle ce que sa descendance faisait la nuit ?

Était-elle au courant que celle qu'elle avait mit au monde se baladait en souriant comme une psychopathe, couteau de boucher en main, prête à tuer sans remords ?

Il n'aimait aucunement cette histoire, et Scula Drahcuah ressentait les sueurs froides de la peur parcourir son dos, incarnant bien la crainte que son instinct éprouvait.

***

Il y eut des éclats semés partout dans l'obscur toile de la nuit, des morceaux d'argents luminescents.

Tel l'avait conseillé la jeune fille aux agissements lunatiques, le youtubeurs s'était cloisonné chez lui, fermant sa porte à double tour et gardant constamment avec lui son propre couteau de cuisine.

Les heures s'écoulaient sans que rien ne se produise, si ce n'était les bruissements du vent dans les feuillages des arbres en face de son habitation.

Le sombre rideau de la nuit s'était refermé sur Paris, ainsi que le silence paisible mêlés aux sons du dehors, de la verdoyante Mère Nature.

Mais la quiétude qui régnait se brisa au bruit peu avenant, en cette sinistre nuit que les astres prophétiques survolaient, d'une sonnette ricochant auprès de toutes les parois de la demeure de Scula Drahcuah jusqu'à atteindre ses oreilles. Lui faisant doucement tourner la tête vers la porte principal de sa maison.

Avec une extrême lenteur, il fit quelques doux pas sans aucunes sonorités en direction de l'entrée de son logis. Il se baissa ensuite pour regarder dans l'œil de la porte, dont la dénomination officiel était juda, et discerna avec horreur la silhouette minuscule de l'enfant.

Il se releva précipitement, fit dos à sa porte, avant de commencer à faire les cent pas en réfléchissant à toute allure. Que devait-il faire qui soit censé ?

La sonnette retentit une deuxième fois, glaçant les veines ainsi que les muscles d'Eqesiezu.

Durant un nombre faramineux de secondes paraissant des heures éternelles, il fut paralysé, tout du long qu'il entendait le son épouvantable de sa sonnette.

Cependant, ses esprits vinrent le bousculer mentalement, lui administrer une baffe spirituel, le forçant ainsi à les reprendre comme il se le devait : Scula Drahcuah devait reprendre ses esprits, c'était essentiel.

Il fit volte-face et se dirigea avec des pas souples vers le juda pour scruter encore une fois les traits se dessinant au dehors. Et il eut un hoquet de peur en ne voyant rien, si ce n'était un œil humain.

Aestasis qui l'avait suivit, crocs sortit, aboya un nombre incalculable de fois, menaçant l'étrangère et lui ordonnant de partir dans sa langue canine. Sauf que ça ne faisait aucun effet à la petite qui commença même à énoncer quelques phrases d'une tonalité de joie mais qui ferait frémir n'importe qui d'une angoisse plus que palpable, se fichant que la scène actuelle soit rocambolesque.

-Eqesiezu, tu joues avec moi ?

Derrière sa porte, bien en sécurité, le youtubeur français fronçait les sourcils, se demandant pourquoi, par tout les shibas de la terre, il accepterait de jouer avec une petite cinglée qui souhaitait sa mort plus qu'un paquet de friandises. Il ne répondit donc rien, restant juste là où il était, bien en sécurité mais tout de même à la porté de ses paroles.

-Allez, joues avec moi ! Ouvres cette porte et joues avec moi, Eqesiezu !

Scula s'assit à même le sol, rassemblant ses bras autour de ses genoux, caressant d'une main son chien qui ne cessait de grogner.

Brave Aestasis, pensa le jeune Drahcuah, avant de prêter une oreille attentive aux phrases qui s'élevaient là, derrière lui.

-Toi aussi, tu as peur de moi, hein...? Personne ne veux jouer avec moi parce qu'ils sont tous terrifiés par moi... Tu crois que je suis un monstre ? Tout le monde le croit... Eqesiezu... J'ai froid... Et je suis trop seule... Trop triste... S'il te plaît... Joues avec moi... Je t'en supplie...

Scula plissa ses paupières, une mine affligée se dessinant sur son visage, manipulant son frond et ses lèvres.

La voix de la jeune fille était si sanglotante et hypnotique, elle lui donnait envie de lui porter secours, d'ouvrir la porte, de la laisser entrer ainsi que de jouer avec elle malgré l'heure tardive. Sauf que quelque chose changea soudain, l'ambiance devint moins lourde, et Scula se retourna afin d'observer à travers le juda la petite.

Son œil regardait au même endroit, en même temps que lui, et le jeune youtubeur vit des larmes perler dans son œil d'un bleu grisonnant.

-Ne lui ouvres pas, par pitié, Eqesiezu, ne lui ouvres p...

Sa voix implorante s'évanouit pour laisser place au silence, et son œil avant chargé de tristesse ainsi que de peur changea pour luire d'une intense fureur. Et cette sombre colère se matérialisa sous la forme de mots aussi tranchant que des lames et aussi glacés que des grêles.

-Elle t'a dit, hein ?! Cette idiote t'a dit !

Scula retira son œil du juda et reprit sa position assise contre le bois de cerisier de sa porte. Il ne comprenait décidément absolument rien.

Une fois, la fillette voulait l'assassiner, une autre fois, elle lui disait de faire attention ce soir même, puis lui rendait visite à son domicile pour lui demander de jouer avec elle, pour après lui dire de ne surtout pas lui ouvrir la porte -ce qui l'aidait aucunement à connaître l'identité du lui- pour après injurier une fille qui lui aurait dit quelque chose. Cette gamine était la plus étrange qu'il n'ait jamais vu, la plus bizarre mais aussi la plus horrifiante.

-Tu ne dois pas faire attention à ce qu'elle dit ! Elle croit des choses fausses ! Elle ne comprend pas que tout ce que je fais, c'est pour la protéger ! Tu dois ouvrir cette porte et jouer avec moi, Eqesiezu ! Tu le dois !

Drahcuah ne voulait plus rien entendre, ça en devenait terriblement flippant. Il émanait de cette fillette une aura si lourde qu'elle l'écrasait de son poids. Le jeune homme se leva en toute hâte, prenant son Shiba dans ses bras, et s'en alla sans même faire attention aux bruits que faisaient ses foulées.

Ce fut au moment même qu'il entendit un son sourd se cognant contre la porte, se répétant plusieurs fois d'affilés. C'était comme un poing, mais en plus gros, en plus lourd, et des couinements de souffrances se faisaient entendre, chaque fois.

Scula ravala sa salive, ne souhaitant même pas imaginer ce que faisait la jeune fille.

Il grimpa des volées de marches afin de se cloîtrer dans sa chambre, draps, coussins, et couteau de cuisine caché, pour enfin cesser d'entendre, à son plus grand bonheur, le bruit que faisait l'enfant.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top