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- Il est temps, fit McGonagall.

- Il fait jour...

- Apparemment, vous ne craignez pas le soleil, fit la vieille sorcière. Ou plutôt disons que vous ne risquez pas d'être réduit en cendres au moindre rayon... Sans doute un « cadeau » de votre père vampire...

- Sans me montrer téméraire, le soleil me ferait quoi ?

- Brûlures très douloureuses, j'imagine, simplement. Aller, allons-y, profitons que les élèves sont en cours.

Harry hocha la tête. Il se leva de son lit où il s'était assis pour enfiler ses chaussures et prit soudain une inspiration. Il avait d'ailleurs appris à respirer régulièrement...

- Professeur, au fait... fit-il.

- Oui ?

La Directrice prit les anses du sac de voyage du brun et se retourna à demi.

- Qu'y a-t-il ?

- Qui va être mon premier repas ?

- Ah, le choix a été rude, fit McGonagall en se redressant. Mais monsieur Malefoy l'a emporté.

- Malefoy ? Ah bon ?

- Oui, cela m'a étonnée aussi quand lui et monsieur Weasley ont tous les deux dit d'une même voix qu'ils étaient volontaires quand je leur ai posé la question. C'est très noble de sa part, vous savez ? Il prend énormément sur lui pour ne pas être désagréable depuis que vous avez été transformé.

- Je tâcherais de le remercier convenablement dans ce cas.

McGonagall pinça soudain les lèvres et Harry la questionna du regard.

- Non, dit-elle. Je pensais simplement à un détail que je suis apparemment la seule à avoir mémorisé...

- C'est-à-dire ? Quel genre de détail ?

- Pendant votre coma, je me suis énormément documentée sur les vampires, comment les traiter au mieux pour minimiser les risques d'attaques sournoises et, au cours de la lecture d'un parchemin que je ne conseillerais à personne...

- Trop gore ? fit Harry avec un sourire.

- On va dire ça... Au cours de cette lecture donc, je me suis attardée sur les appétits divers et variés du vampire. Il y avait une description pour l'appétit classique, pour se nourrir, les diverses nourritures qui conviennent à tel ou tel type de vampire, mais aussi un appétit auquel je n'avais pas pensé...

- Hum, fit Harry. Je crois savoir de quoi vous parlez. Appétit sexuel, n'est-ce pas ? Mais pourquoi pensez-vous à ça ? demanda-t-il comme le professeur hochait la tête.

- C'est en vous entendant dire que vous remercierez monsieur Malefoy comme il se doit que cela m'est revenu en mémoire...

Harry haussa les sourcils puis sourit.

- Professeur, voyons... fit-il. Je ne suis pas...

- Vous ne l'étiez pas, rectifia la femme. Votre vie d'avant n'existe plus, Potter... De tout ce que vous faisiez avant, vous ne pourrez en refaire que très peu dorénavant, mais vous allez peu à peu découvrir d'autres choses que nous autres mortels ne connaîtrons jamais. Pour peu que vous vous intéressiez à votre nouvelle vie, vous verrez, vous deviendrez rapidement le plus gentleman de tous les vampires d'Angleterre, j'en suis certaine.

Harry eut un petit sourire. Il secoua la tête puis prit le sac des mains de McGonagall qui tira sa baguette magique et invoqua une cheminée temporaire dans la chambre. Ils s'y glissèrent et disparurent en tourbillonnant.

.

La nouvelle demeure du Gryffondor était pour le moins spartiate. Un vieux lit branlant, une table et deux chaises, un vieux tapis élimé, et une cheminée vide et froide.

- Ce n'est pas très élégant, je l'avoue, mais je vous fais confiance pour arranger tout cela.

- Je crois que je vais confier ce travail à Hermione... fit le brun en plissant le nez. En tous cas, ce n'est pas ce qui manque question bougies, on y voit aussi clair qu'en plein jour avec ce lustre...

- Je l'ai fait installer exprès, il porte quatre-vingt bougies éternelles qui ne coulent pas, fit McGonagall. Je vous ferais apporter tout le nécessaire pour ne pas vous ennuyer durant les prochaines semaines, livres, mannequins d'entraînement pour la pratique magique, jeux. Vous êtes libre de faire autant de bruit que vous désirez, l'appartement est entièrement insonorisé. La porte de l'appartement est protégée par un sort qui vous empêche de sortir seul, par mesure de sécurité. Si un soir vous voulez aller prendre l'air, vous n'aurez qu'à appeler un professeur et il vous accompagnera. Vous comprenez, tant que vous n'êtes pas parfaitement conscient de votre nouveau corps, il est hors de question que nous prenions le risque de vous laisser déambuler seul dans le château.

Harry hocha la tête et McGonagall ajouta :

- S'il vous manque la moindre chose, appelez un Elfe. Ils ont ordre de vous obéir mais uniquement pour les demandes matérielles ou concernant une quelconque nourriture solide.

- Je peux en manger ?

- Oui mais elle ne vous rassasiera pas. De même que les premiers temps, vous risquez de souffrir d'un manque de goût, ça passera. Il faut que vous refassiez la connexion entre vos souvenirs et les différentes odeurs ou les goûts.

- Pour ce qui est des odeurs, je ne pense pas avoir de gros problèmes de ce côté-là. Je sens le moindre battement de votre cœur, professeur...

- Monsieur Potter, je vous en prie... N'ayez pas ce genre de pensées envers moi, je ne vous serais d'aucune utilité.

- Ah bon ?

- Mon sang est bien trop vieux pour que vous y trouviez une quelconque sustentation. Et je parlais des odeurs comme la bouse de Dragon ou le parfum...

- Alors c'est pour ça qu'il n'y a pas de professeurs dans les élus ? fit en ignorant les dernières paroles de la Directrice.

- Entre autres. Mais ceux qui en faisaient partie ont préféré renoncer afin de devenir vos gardiens. En tant que sorciers puissants et sages, nous sommes les plus à même de vous protéger ou, le cas échéant, de vous...

- Sacrifier, termina Harry. Et vous avez carte blanche, ajouta-t-il. Si jamais je perds le contrôle, de quelle façon que cela soit, vous avez l'autorisation de me neutraliser, radicalement ou non.

- Je ferais passer le mot, fit la vieille sorcière. Bien, je vais vous laisser à présent. Ah, une dernière chose. Tournez-vous dos à moi et gardez vos mains devant vous.

- Pourquoi ? demanda le brun en obéissant quand même. Ah oui, j'ai compris, ajouta-t-il en sentant que la Directrice lui penchait la tête en avant avec milles précautions.

- Dès que j'aurais retiré cet objet magique que je vais soigneusement garder et remettre à chaque personne qui accompagnera vos repas, vous ressentirez votre faim très violemment. Je vous conseille de rester calme, au moins le temps que je m'en aille. Je n'ai pas peur de vous, simplement vous pourriez me blesser et vous blesser.

- Entendu... Allez-y puis sauvez-vous vite.

McGonagall jeta un regard vers la porte ouverte dans son dos. Elle se retourna et prit l'objet noir et brillant entre le pouce et l'index. Elle tira alors d'un coup sec et Harry laissa échapper un faible cri. McGonagall recula ensuite prestement et quitta la chambre. Elle referma soigneusement la porte à double-tour et jeta aussitôt les charmes de protection dessus.

Soupirant, elle regarda l'objet serré dans sa main. Il ressemblait à s'y méprendre à une pierre noire qu'on aurait poli mais, si elle était bel et bien en pierre, elle n'avait rien d'un vulgaire caillou. En fait, c'était une sorte de crustacé qu'on ne trouvait qu'au fond de la mer, dans les recoins les plus sombres et évidemment les moins accessibles. Les Aurors du Ministère avaient passé plus de trois semaines à sonder la mer du nord et l'océan atlantique de l'autre côté de l'Angleterre.

Quand ils l'avaient présenté à McGonagall, elle était restée sceptique et avait pris le Ministre pour un fou mais un Medicomage spécialiste dans les transformations non souhaitées avait dissipé les doutes de la Directrice en montrant sous cet espèce de crabe, deux grosses pinces, comme les mandibules d'une araignée, qui dépassaient du ventre mou et gris de la bestiole. Le Medicomage avait alors assuré que les pinces, enfoncées sous le crâne de la personne transformée, neutralisaient la majorité des sens comme la douleur, la faim, la soif. Cet objet semblait souvent utilisé sur des Loups-garous et autres personnes victimes de sortilèges qui altéraient leur personnalité. Il était même parfois renforcé de sortilèges pour assurer une efficacité accrue.

- Bien, aller... fit la sorcière en tapotant l'objet dans le creux de sa main.

Elle soupira puis se rendit à son bureau, fit venir Rogue, lui demanda d'aller faire chercher Malefoy par un Préfet, et de lui dire de la rejoindre dans le couloir de l'aile Est du sixième étage.

.

Harry ferma les yeux. Assis en tailleur sur son lit, il s'efforçait de ne plus sentir son ventre creux qui le torturait. Depuis que McGonagall lui avait retiré l'objet noir, il souffrait de la faim à un point tel que même quand il était enfant et que les Dursley le privaient de nourriture pendant plusieurs jours, il n'avait pas souffert à ce point.

Cela faisait un peu moins d'une demi-heure que McGonagall était partie et le brun avait profité de ce laps de temps, sachant qu'elle allait revenir avec son premier repas, en l'occurrence avec Malefoy, pour fouiller dans sa nouvelle mémoire et chercher le mode d'emploi pour faire taire les gargouillis de son ventre.

Soudain la porte brilla et un fin liseré doré la balaya. Harry tourna la tête et s'efforça de ne pas bouger. Il ne put s'empêcher de saliver cependant car l'odeur du sang chaud des deux sorciers qui se trouvaient de l'autre côté de la porte eurent pour lui l'odeur du plus merveilleux des repas.

- Restez près de la porte, monsieur Malefoy, fit la voix de McGonagall. Où êtes-vous Potter ?

- Sur mon lit, répondit le brun. Je n'en bougerais pas, vous avez ma parole.

- Entendu. Entrons alors.

La porte s'ouvrit en grand et Harry inspira profondément. L'odeur du sang se répandit dans ses entrailles et un gargouillement lui contracta douloureusement le ventre.

- À ce que j'entends, vous avez terriblement faim, fit McGonagall en refermant la porte dans son dos.

- Vous ne pouvez même pas imaginer à quel point, répondit Harry en dépliant ses jambes.

Malefoy eut un léger mouvement de recul et Harry le regarda.

- Tu n'as aucune crainte à avoir, lui fit-il. Je suis parfaitement calme...

- Facile à dire... Tu sais ce que tu fais au moins ?

- Oui. C'est d'instinct. Tu ne souffriras pas, tu as ma parole.

Le Serpentard déglutit. Harry jeta un regard à McGonagall qui hocha la tête.

- Je serais dans le couloir, je laisse la porte entrouverte. Au moindre bruit suspect, j'entre et je vous neutralise, monsieur Potter, dit-elle.

Harry hocha la tête en retour. La sorcière recula ensuite, et sortit dans le couloir en laissant la porte entrebâillée.

- Viens, approche-toi, fit soudain le brun.

Malefoy eut un bref sursaut puis soupira.

- Tu m'excuseras de ne pas avoir totalement confiance... fit-il sur un léger ton railleur mais en approchant tout de même. Je dois ressembler à une dinde farcie bien juteuse...

Harry eut un sourire. Il tendit alors une main et Malefoy hésita. Ses doigts se serrèrent, il se mordit la lèvre inférieure puis souffla longuement et prit la main du brun qui l'attira à lui.

- N'ai pas peur, fit Harry en lui caressant la joue de son autre main.

- Je n'ai pas peur... Je suis simplement... anxieux.

- C'est normal. Ce n'est pas facile... Pour moi non plus, crois-moi.

Il le prit alors dans ses bras et Malefoy sembla se détendre. Étrangement, il ne repoussa pas le Gryffondor mais recula de lui-même en soupirant brièvement.

- Ça va aller ? demanda Harry. Tu sais, je peux encore attendre un peu...

Malefoy hocha la tête et regarda le brun dans les yeux.

- Ça va aller, fit-il.

Il eut un léger sourire et Harry lui caressa la joue.

- Merci...

- Vas-y maintenant... avant que je change d'avis.

Harry hocha la tête puis fit revenir le professeur McGonagall qui resta près de la porte, sa baguette magique dans une main et dans l'autre la pierre noire. Elle fit un signe de tête vers Harry et le brun regarda Malefoy.

- Surtout, ne bouge pas, lui fit-il. Je vais mordre dans la grosse veine qui est là, si jamais tu bouges, je pourrais la déchirer et cela te sera fatal.

Malefoy déglutit et frissonna quand Harry passa son doigt le long de sa gorge.

- Vous devriez aller sur le lit, fit alors McGonagall. Monsieur Malefoy risque de s'évanouir...

- Je... Je tiendrais bon, professeur, assura le blond, très mal à l'aise.

- Comme vous voudrez, je suis là de toute façon. Quand vous voulez, Harry.

Le Gryffondor passa sa langue sur ses lèvres exsangues puis il passa un bras sur la taille du blond et l'attira contre lui. Malefoy s'agrippa à son pull et ferma les yeux. Lentement, il sentit Harry ouvrir la bouche et son souffle lui brûla la peau.

Fronçant les sourcils, McGonagall observa la scène. Elle vit clairement Harry ouvrir la bouche bien grande et elle sentit un frisson la parcourir quand elle distingua les canines du Gryffondor qui s'allongeaient presque démesurément. Elle eut un haut-le-cœur quand les dents disparurent dans le cou que Harry avait dégagé en basculant la tête du Serpentard de l'autre côté. Du sang glissa alors sur l'épaule du blond et imbiba sa chemise blanche.

Malefoy resserra sa prise sur Harry qui grogna et un bruit écœurant se fit entendre quand les canines percèrent l'épaisse carotide du Serpentard. McGonagall regarda alors sa montre. Elle avait prévu de séparer Harry de son repas au bout d'une seule petite minute pour commencer et, méticuleusement, elle regarda cliqueter la trotteuse de sa montre de gousset en argent.

Soudain, elle pointa sa baguette magique sur Harry et lui lança un sortilège électrisant qui le fit grogner sans toutefois lâcher prise. Néanmoins, la douleur le submergea rapidement il finit par libérer Malefoy qui recula, trébucha et s'écroula sur le tapis. Harry, lui, recula en se tenant la tête et fila soudain se planquer derrière son lit.

McGonagall s'approcha alors et s'agenouilla près du blond.

- Ça va aller, professeur... fit alors Malefoy en s'asseyant.

- Allez-y doucement, fit la femme.

- Pourquoi m'avez-vous repoussé ? demanda alors Harry depuis sa cachette, d'une voix tremblante.

- J'ai préféré procéder par étapes, répondit la sorcière. J'ai pensé que cela serait moins traumatisant pour les jeunes sorciers...

- Ah... Je... D'accord mais le sortilège...?

- Je suis désolée... Votre appétit s'est calmé ?

- Un peu...

Malefoy se releva alors en portant sa main à son cou et il déglutit en voyant le sang. McGonagall lui tendit un mouchoir pour qu'il s'essuie.

- Il n'y a plus de blessure... s'étonna-t-il. Comment... ?

- Monsieur Malefoy, tenez...

La Directrice lui donna un gros morceau de Chocolat puis elle l'aida à se relever et l'emmena s'asseoir dans un fauteuil. Harry se releva également observa la scène, encore choqué d'avoir été électrocute.

- Je n'ai pas eu le temps de refermer les plaies... dit alors Harry. Pourquoi il ne saigne pas ?

- Votre salive est cicatrisante, Potter, répondit McGonagall. Les plaies se refermeront d'elles-mêmes si la personne est encore en vie.

Harry hocha la tête et s'approcha alors prudemment. Il passa son index sur le cou du Serpentard, encore souillé de sang, mais où il n'y avait aucune plaie visible.

- J'ai du mal à y croire... dit-il.

Malefoy ferma alors les yeux et dodelina de la tête.

- Restez avec nous, Drago, dit McGonagall.

- Conduisons-le sur mon lit, il a besoin de repos, fit alors Harry. C'est une épreuve... éprouvante.

McGonagall hésita puis finit par accepter, un peu à contrecœur.

- Très bien. Mais je vais devoir vous abandonner, j'ai une réunion avec les professeurs, fit alors la sorcière. Tournez-vous...

Harry fit la moue mais obéit et il grogna quand les pinces de la pierre noire se frayèrent un passage dans ses chairs. Aussitôt, la faim qui le tenaillait toujours disparu et il soupira.

- Je serais de retour dans deux heures, d'ici-là veillez sur monsieur Malefoy et quand il aura retrouvé ses esprits, appelez un professeur pour qu'il vienne le chercher.

Harry hocha la tête et la femme s'en alla. Le brun regarda alors le blond étendu sur son lit. Il s'était endormi.

Avec un soupir, Harry se rendit dans sa salle de bains pour faire un brin de toilette, un peu secoué par ce tout premier repas qui avait été bien trop bref à son goût.

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