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Assis à son pupitre, Malefoy jouait avec un crayon à papier. Il essayait de le faire tenir en équilibre sur son pouce mais le morceau de bois tombait toujours sur le bureau avec un petit bruit sec qui ne manqua pas d'énerver Rogue.
- Confisqué ! Cinq points de moins pour Serpentard.
Malefoy sursauta violemment et regarda Rogue qui venait de lui prendre le crayon au vol.
- Et avec quoi je vais prendre des notes ? fit le blond, amer.
- Votre tête, rétorqua le professeur en lui donnant un coup d'index sur le front.
Malefoy se renfrogna et Blaise, à côté de lui, pouffa en lui tendant un autre crayon.
Rogue jeta le crayon de papier sur son bureau en passant et retourna faire un tour dans la classe tout en expliquant les principes de base des potions de soins. Soudain la cloche sonna.
- Bien, demain vous n'avez pas cours avec moi et votre prochain cours sera à la rentrée, le deux septembre à neuf heures, fit le sombre professeur en retournant à son bureau. Je veux que pour ce cours-là, vous ayez entièrement lu les deux tomes de la « Nomenclature des Potions et Filtres de soins, du Moyen-âge à nos jours », et que vous ayez fait une synthèse des deux ouvrages. Je veux un parchemin de cinquante centimètres pour les deux volumes que vous trouverez dans toute bonne librairie du Chemin de Traverse. Sur ce, passez de bonnes vacances.
Des remerciements fusèrent de la part des Serpentards qui rejoignirent les Gryffondors déjà dehors. Hermione, elle, fila ventre à terre jusqu'à la bibliothèque pour se procurer en premier les deux livres demandés et Ron regarda Malefoy et Zabini approcher mine de rien. Ils disparurent dans un couloir sombre qui les dissimulait à la vue de tous.
- Qui est le prochain ? demanda Ron.
- Pas moi, fit aussitôt Malefoy, peut-être un peu rapidement.
Blaise et Ron se regardèrent, étonnés.
- Pourtant ça se passe bien avec Potter, non ? fit Zabini. Je suis sûr que tu es le mieux accordé avec lui de nous tous. Enfin ceux qui ont déjà eu le privilège d'être mordus...
- Oh ça va, j'y vais samedi, fit Ron en croisant les bras. Je crois que c'est Turek mercredi et je...
- Messieurs ?
Les trois garçons tressaillirent et se tournèrent d'un bloc vers Rogue qui les regardait un peu de travers.
- Monsieur, nous ne faisons rien de mal, fit Blaise.
- Oh je sais, je venais juste vous chercher... La Directrice souhaite voir les Élus, il y a du changement...
- Ah ?
- Suivez-moi, fit Rogue en se détournant.
Les trois garçons se regardèrent un peu de travers puis suivirent l'homme en noir jusqu'au bureau de McGonagall où ils retrouvèrent les autres Élus des autres maisons.
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- Pourquoi cette convocation entre deux cours ? demanda Malefoy quand ils furent tous entassés dans le petit bureau circulaire.
- Parce qu'il y a du changement, répondit McGonagall.
- Mais encore ?
- Asseyez-vous.
Les jeunes sorciers obéirent et McGonagall reprit :
- J'ai bien réfléchi sur la visite de Monsieur Potter chez la Reine Vampire. Et j'ai pris quelques décisions à ce sujet, même s'il m'en a quelque peu coûté.
- De quel genre ? fit Ron en croisant les bras. Plus de repas, peut-être ?
- Précisément, monsieur Weasley, fit Rogue.
- Pardon ? fit Maths en se redressant brusquement. Mais... Monsieur, les vacances sont dans... c'est demain soir !
- Et alors ? Cela ne gênera en rien votre départ en vacances, fit McGonagall.
- Mais ?
- Je suis perdu, fit Blaise en fronçant les sourcils.
- Moi aussi... fit Turek, assis près de lui. Expliquez-vous, madame...
- Oh c'est simple, à partir de ce soir, Potter aura droit à un repas chaque soir. Un Élu différent à chaque fois, mais un par soir.
- Par soir ! s'exclamèrent plusieurs des jeunes Élus.
Il y eut un terrible brouhaha et Rogue le fit taire en frappant bruyamment dans ses mains. Les sorciers se figèrent et McGonagall remercia son collègue d'un signe de tête.
- Bien, reprit-elle. Vous avez tous parfaitement comprit la nouvelle. Linda estime que Potter étant un jeune vampire, il n'est pas bon pour lui de manger tous les trois jours. Nous pensions agir pour sa propre sécurité mais selon Linda un tel sacrifice pourrait le rendre violent sans que nous n'y ayons vu quoi que ce soit. Et puis j'ai réalisé qu'il y avait plus de chance qu'il tue par mégarde l'un de vous lors d'un repas en prélevant une trop grande quantité de sang, plutôt qu'en étant nourri tous les jours. De plus, il semblerait que Potter désirerait se nourrir uniquement sur Malefoy mais pour sa santé, j'ai refusé.
Elle regarda alors Rogue qui déroula un petit parchemin en disant :
- Ce soir, monsieur Allotis, c'est vous qui vous y collez et demain soir, ce sera monsieur Weasley. Des questions ?
- Moi, fit Malefoy en levant le bras.
- Je vous écoute, répondit McGonagall.
- Vendredi soir c'est les vacances d'été, qui va le nourrir pendant les deux mois qui viennent ?
- Nous aviserons mais Linda m'a déjà proposé quelques-uns de ses « en-cas sur pattes » comme elle les appelle, répondit la Directrice. Ce sont des sorciers consentants qui, faute d'avoir la même substance que vous dans leur sang, auront au moins le mérite de le caler temporairement. Autre chose à présent, sur un tout autre sujet. Ou presque. Professeur, je vous laisse la parole.
Rogue hocha la tête et la vieille Directrice retourna s'asseoir derrière son bureau tandis que le sombre professeur de Potions se mettait à arpenter l'espace entre le bureau et les jeunes sorciers.
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Pendant l'heure qui suivit, Rogue raconta en détails la rencontre entre Harry et Linda, signala la présence de Malefoy et de sa propre personne à cette rencontre et relata ce que le Seigneur Ram avait dit au sujet de Kraek et de la possibilité de faire revenir Harry à une vie plus normale.
Quand il eut terminé son récit, il répondit à de nombreuses questions puis les élèves furent délivrés. McGonagall rappela au Pouffsouffle Ludovic Allotis qu'il était de « corvée » le soi-même et lui demanda de l'attendre, elle, ici-même, dans son bureau, à vingt-et-une heures tapantes.
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- Entrez ?
Harry regarda la porte, surpris. On était jeudi soir, il ne s'attendait à aucune visite avant au moins samedi...
- Bonsoir, monsieur Potter, fit McGonagall en passant la porte. Allons, monsieur Allotis, n'ayez crainte...
Elle tira par l'épaule un jeune homme blond aux cheveux coupés très courts et Rogue apparut à son tour, fermant la porte dans son dos.
- Quelle délégation, fit Harry, assis en tailleur sur son lit. C'est en quel honneur ? On fête quelque chose ?
Il fit un signe de tête vers Ludovic, le Pouffsouffle, qui déglutit.
- Potter, soyez un peu moins acide, vous voulez ? siffla Rogue. Nous avons décidé d'adhérer à la demande de Linda, à savoir un repas chaque soir.
Harry haussa un sourcil.
- La belle affaire, fit-il.
- Plait-il ? répondit McGonagall.
- Ce soir, demain soir... Et que vais-je faire pendant les deux mois d'été ? M'enfermer dans mon cercueil et jeûner ? Vous êtes marrants...
Rogue leva les yeux au plafond. Soudain Ludovic se mit à trembler. Il secoua la tête et recula d'un pas.
- Je suis désolé, Madame, je ne pourrais pas... fit-il en regardant McGonagall.
- Entendu, fit la sorcière. Professeur Rogue, raccompagnez-le dans sa Salle Commune. Et allez me chercher...
- Malefoy, la coupa Harry. Je veux Malefoy.
- Et pourquoi lui ?
- Parce qu'il me fait confiance, fit Harry, les sourcils froncés.
Il n'allait tout de même pas avouer qu'il voulait le revoir...
- Soit... Alors allez chercher Monsieur Malefoy, fit la Directrice à Rogue qui hocha la tête.
- Venez monsieur Allotis... fit Rogue en poussant le jeune sorcier devant lui. Ça va aller...
Ils disparurent derrière la porte puis McGonagall fit face à Harry et ils observèrent un silence pesant jusqu'au retour de Rogue avec un Malefoy visiblement pas très d'accord.
- Monsieur, j'ai trois tonnes de devoirs à faire, gémit le blond en entrant dans la chambre. Je n'ai franchement pas le temps de...
- Vous ferez vos devoirs demain, pendant l'heure de libre que vous avez à dix heures, monsieur Malefoy, répliqua McGonagall.
Elle semblait fâchée et Rogue s'en aperçu. Il jeta un regard à Harry puis les deux adultes s'en allèrent et le silence se fit total dans la chambre.
- Pourquoi moi, Potter ? demanda alors Malefoy. Pourquoi pas Maths ou Blaise ?
- Pourquoi ? Après ce qu'il s'est passé l'autre jour, tu me demandes pourquoi ? répondit Harry.
- Il ne s'est rien passé, Potter, répondit Malefoy en croisant les bras.
- Non, parce que tu me l'a interdit, mais...
- Il n'y a pas de mais, Potter, le coupa le Serpentard. Même si j'apprécie ta compagnie, je te l'ai dit, tant que tu seras un vampire, il n'y aura rien de plus qu'une relation "professionnelle", reprendre tes mots, entre nous.
Malefoy soupira ensuite.
- Aller, dit-il alors. Bouffe, que je m'en aille.
Harry baissa le nez.
- Tu ne pourras pas partir, tu le sais, n'est-ce pas ? dit-il, presque timidement.
- Potter, je t'en prie, ne rend pas les choses encore plus difficiles qu'elles ne le sont déjà, répondit Malefoy. Tu m'as fait venir pour un repas, sers-toi.
Harry se mordit la joue puis il se leva de son lit et s'approcha du Serpentard. Ils se firent face l'espace de quelques secondes puis Malefoy ferma les yeux et pencha la tête pour dégager sa gorge.
- On prendra le temps de parler une autre fois, dit-il.
- Mouais...
Harry était peiné, il le sentait. Sa relation avec Malefoy avait fait un bond énorme en avant depuis qu'ils étaient allés chez la Reine des Vampires, et bien que ce soit en grande partie dû au charme vampirique dont le Gryffondor était doté, cela ne semblait pas déranger Malefoy qui profitait d'être "envoûté" pour trouver une solution à leur inimitié. Mais bien sûr, le charme vampirique avait un revers de médaille, et ce revers, c'était une attirant charnelle exacerbée qui les poussait l'un vers l'autre, du moins qui poussait Harry vers Malefoy, et si celui-ci ne semblait pas réticent à une relation plus poussée avec son ancienne Némésis, il refusait tout net de se laisser séduire tant qu'il sera un vampire...
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Harry était assis dans son fauteuil. Il regardait Malefoy qui se reposait sur le lit. Rassasié, le Gryffondor avait les idées plus claires et il repensait à leur discussion, une semaine plus tôt. Ils allaient devoir en parler sérieusement, s'ouvrir l'un à l'autre, mettre les choses à plat, sinon leur fragile amitié allait voler en éclat sans qu'ils y prennent gare...
Malefoy remua soudain et Harry se redressa légèrement.
- Ça tourne un peu ? demanda-t-il.
Malefoy se releva sur un coude et hocha la tête. Il avisa alors un morceau de chocolat et le prit pour le grignoter, les sourcils froncés.
- Drago...
- Pas maintenant, s'il te plaît, répondit le concerné. J'ai envie de dégueuler, je vois tout trouble, alors je t'en prie, Potter, pas maintenant.
Harry déglutit et hocha la tête.
- Dis-moi... dit-il alors. Demain soir, c'est les vacances d'été, est-ce que tu sais qui...
- A priori, des sous-fifres de la Reine vampire, répondit le blond en s'asseyant au bord du lit.
Il secoua doucement la tête, une main sur le crâne, puis regarda Harry. Lorsque le brun croisa son regard, il sentit quelque chose et secoua la tête.
- Non, dit-il. Je ne passerai pas les vacances d'été ici pour te nourrir.
- Malefoy... Linda a dit que je ne devais avoir qu'un seul donneur, pour ma santé mentale...
Harry dodelina de la tête.
- J'aime le goût de ton sang, reprit-il. Contrairement à ce que tu affiches, il est doux et sucré...
- Arrête.
- Malefoy, je... S'il te plaît. On pourrait en profiter pour discuter tranquillement, sans la pression des cours, des professeurs, de nos amis...
- Parce que tu crois que ça ne va pas leur paraître bizarre à nos amis, que je décide brusquement de rester ici pendant deux mois ?
- Ils sont au courant... répondit Harry en haussant les épaules.
Malefoy resta silencieux. Il tenta de se lever mais renonça et Harry souffla par le nez.
- Reste dormir ici, dit-il en se levant. Tu crains quoi, que je te saute dessus en pleine nuit ? Je croyais que tu me faisais confiance, pourtant.
- Pour ne pas me déchirer la gorge, oui, pour contenir tes empressements, non, répondit Malefoy. J'ai besoin d'une douche.
Harry indiqua la salle de bains de la main et Malefoy se leva et tituba jusqu'à la porte. Harry le regarda disparaître derrière puis il soupira profondément. Plus les heures passaient et plus il sentait qu'il avait envie du Serpentard, mais il savait que ce n'était lui, mais son vampire qui provoquait cette envie... Il devait résister, il le devait, pour sauvegarder sa fragile amitié avec Malefoy, mais il savait aussi que si celui-ci continuait de lutter aussi énergiquement contre le charme vampire, il risquait de s'épuiser inutilement et cela pourrait être dangereux...
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Quand Malefoy sortit de la salle de bains, habillé de frais, son regard tomba sur Harry qui se mettait en pyjama. En voyant son ancienne Némésis à moitié vêtu, le blond sentit quelque chose se tordre dans son ventre. De là où il était, il pouvait voir le dos pâle du Gryffondor, sans aucune marque, aucune cicatrice, musclé par le Quidditch...
Sentant le rouge lui chauffer les joues, Malefoy recula et referma la porte de la salle de bains. Il posa son front contre le carrelage froid et se mordit la lèvre jusqu'à avoir mal. Non... Non, il ne devait pas céder, il devait tenir tête à la magie du Gryffondor qui se diffusait en lui comme un doux alcool qui l'empêchait de voir Harry Potter tel qu'il était vraiment, soit un monstre assoiffé de sang...
Serrant le poing jusqu'à enfoncer ses ongles dans sa paume, Malefoy parvint à reprendre le contrôle sur lui-même. Il quitta ensuite la salle de bains et découvrit Harry assis au bord de son lit, apparemment pensif.
Le Gryffondor leva les yeux à son approche et ils s'interrogèrent du regard un moment avant qui'Harry ne secoue la tête.
- Non, je... Rien, répondit-il. Viens, couchons-nous, il est tard et tu dois être fatigué...
- Ça va mieux, répondit Malefoy en s'approchant.
Il se tut un instant puis grimaça.
- J'ai bien réfléchi pendant que je me douchais, dit-il alors. Je... Je suis conscient que je t'en demande beaucoup en t'interdisant d'être proche avec moi, mais...
- Je sais, répondit Harry. La situation est difficile à accepter pour toi, tu es un homme à femmes et j'imagine que tu n'as jamais pensé, une seule seconde, qu'un garçon puisse être attiré par toi.
Malefoy plissa le nez.
- Si, je me suis déjà posé la question, mais ce n'est pas dans ma nature donc pour moi, ça ne représente rien...
- Sympa...
Malefoy décida de ne pas relever la dernière phrase de Harry. A la place, il s'approcha et Harry leva la tête vers lui.
- Tu as peur, dit-il. Je le sens, tout ton être pulse la peur, mais je t'ai fais la promesse que je ne te ferais jamais de mal, Malefoy, que ce soir physiquement ou psychologiquement...
- Potter, tu as beau avoir l'apparence du garçon de Gryffondor avec qui j'ai grandit, tu n'es plus lui, plus vraiment, dit Malefoy. Tu es mort...
Harry baissa le nez. C'était la vérité. Il était mort, il n'avait plus besoin de respirer, plus besoin de cligner des yeux, plus besoin de... Le brun regarda alors le Serpentard puis se leva et ils se retrouvèrent à moins de trente centimètres l'un de l'autre.
- Potter, qu'est-ce que...
- Tu as peur de moi parce que je suis un vampire, dit le Gryffondor. Mais je peux faire en sorte que tu ne le vois plus, ce vampire, que tu me voies moi, Harry Potter, comme tu m'as toujours connu...
- Tu... Tu pourrais faire ça ?
Harry inclina le menton. Malefoy déglutit et Harry leva une main et lui effleura l'arrête de la mâchoire, puis la tempe.
- Souviens-toi de moi comme j'étais avant, dit-il.
Malefoy ferma les yeux puis fronça les sourcils un instant avant de les rouvrir. Ses yeux s'agrandirent aussitôt et il esquissa un sourire.
- Tu m'as... envoûté ? demanda-t-il.
- En quelque sorte.
Harry caressa alors la joue du Serpentard et passa son pouce sur sa lèvre inférieure. Malefoy ferma les yeux et recula alors le menton.
- Viens... dit alors Harry en l'entraînant vers le lit. Je te l'ai promis, je ne te ferais jamais de mal...
Malefoy, qui ne voyait désormais plus Harry avec son teint grisâtre, mais bel et bien avec ses lunettes, ses cheveux noirs et sa peau pâle, hésita. Il avait été envoûté pour voir Harry tel qu'il était avant de mourir et il le savait, mais en même temps, le charme du Gryffondor faisait son effet et il sentait qu'il lâchait prise...
- Viens... souffla Harry.
Cette fois-ci, Malefoy fit un pas en avant...
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