« 2 octobre 2015, 23h56.

J'ai toujours aimé dîner chez Seth. Sa maison est grande, chaleureuse, et Seth a ce don inné pour nous concocter des plats à combler mes papilles. Les meilleurs, ce sont ses desserts, il sait toujours quoi me préparer après une longue semaine pour me réconforter. Comme quoi, se goinfrer avec du sucre aide bel et bien au moral.

Mais ce que je préfère, c'est son toit.

On y accède facilement depuis sa chambre, à condition d'être apte à faire quelques acrobaties, mais la vue imprenable sur la ville en vaut vraiment le coup. Dans la nuit, on peut apercevoir les fenêtres des pavillons qui s'éclairent peu à peu, comme des petites boîtes imbriquées qui s'illuminent dans l'obscurité. Ce sont les fenêtres de milliers de maisons de poupées à travers lesquelles j'entrevois une infime part de la vie et l'intimité de milliers d'histoires différentes. J'aime m'imaginer les aventures de chacun ; par exemple, ce soir, à l'étage de la maison jaune, il y avait une fille qui dansait frénétiquement sur une chanson à laquelle j'étais sourde.

"Peut-être qu'elle vient de recevoir le message qu'elle attendait depuis des semaines ?" a proposé Seth.

"Peut-être qu'on lui a dit que son nouveau pull lui allait bien, et qu'elle était très jolie." j'ai imaginé.

Seth m'a regardée en fronçant les sourcils, avec toutefois son sourire espiègle qui creusait ses joues.

"En quoi ça lui aurait donné envie de danser ?"

"Parce que ça lui a fait plaisir. Ca me ferait plaisir. Ce me donnerait envie de danser."

"Ah, bah alors retiens-toi parce que ton pull est vraiment pas terrible."

J'ai ri, lui aussi, j'ai voulu le bousculer, mais je me suis rappelée que nous étions sur ton toit, et qu'il risquerait une chute de plusieurs mètres. Je l'ai traité de connard, et je me suis replongée dans mes récits en passant de fenêtre en fenêtre.

Je portais le pull de Liz. »