Chapitre 3 : Plagg !!!

Marinette courait dans les rues de Paris. Elle fonçait vers chez elle avec une ardeur peu commune. Son coeur battait follement dans sa poitrine et ses poumons étaient en feu. Enfin, elle aperçut la boulangerie familiale, se précipita à l'intérieur. L'odeur de pain l'assailli, un peu éventée suite à l'absence de ses parents, partis en voyage. Contournant le comptoir, la jeune fille se dirigea vers l'appartement qui se trouvait derrière la boutique.

Une fois arrivée chez elle, Marinette s'effondra contre la porte. Si devant Adrien elle avait fait preuve d'assurance, -du moins, l'espérait-elle-, elle se trouvait en réalité en état de choc.

Adrien était peut-être Chat Noir...

Son Adrien était peut-être son Chat Noir !

La jeune fille gémit et se pris la tête entre les mains. Elle glissa lentement jusqu'au sol. Là, elle enfoui son visage toujours emprisonné de ses doigts dans le creux de ses genoux tandis qu'elle ramenait ses jambes contre elle.

Ses yeux fermés la plongeaient dans une antre d'un noir d'encre. Les battements de son coeur résonnaient dans cette caverne obscure. Le sang qui pulsait dans ses veines était semblable à autant de coups de marteaux et de pioches venant frapper la sombre paroi qui l'entourait. Elle avait l'impression d'être plongée dans un univers sombre, emplit de noirceur et de silence que seuls son rythme cardiaque et la pulsation de son sang venaient troubler.

Les pensées qui cavalaient dans son esprit étaient si incongrues qu'elles lui donnaient la nausée. Elle avait l'impression de tanguer, et l'état dans lequel elle se trouvait ne faisait que renforcer cet effet de son imagination. Elle en avait presque le mal de mer.

Non que, s'il s'avérait vrai, le fait qu'Adrien et Chat Noir ne soient la même personne la répugne. Simplement, la révélation était telle qu'elle en perdait totalement ses moyens et était au bord du malaise.

Le coeur au bord des lèvres, elle repensa à toutes ces fois où elle avait rembarré Chat Noir. A toutes ces fois où elle avait rêvé qu'Adrien ne la prenne dans ses bras...

Un souvenir vint se heurter au reste de ses pensées. Une allergie...Une allergie aux plumes de pigeons étrangement commune aux deux personnages qui hantaient son esprit... Si ce n'était pas une preuve ! Ce souvenir remontait de si loin qu'elle ne savait même pas comment elle faisait pour s'en rappeler encore à ce jour.

Malgré tout, le doute persistait. Peut-être la peur de reconnaître qu'elle était restée aveugle si longtemps... Tout compte fait, si son intuition se confirmait, elle en mourrait sûrement de frustration et de honte. Combien de fois Chat Noir l'avait-il tenue dans ses bras ? Combien de fois l'avait-elle repoussé ? S'il s'avérait que son coéquipier était bien Adrien, l'ironie était telle que Marinette aurait sans doute envie de monter voir l'univers et de lui dire clairement ce qu'elle en pensait.

La caresse d'une minuscule main la tira de sa prostration. Elle releva la tête, clignant des yeux. Des points blancs s'étaient imprimés dans sa rétine, mais elle parvint néanmoins à reconnaître son adorable kwami.

-Ne t'en fais pas Marinette, commença gentiment Tikki. S'il s'avère que Chat Noir et Adrien ne sont qu'en fait une seule et même personne, vous n'en serez que plus proches ! Cela fait tant d'années que vous êtes des camarades de classe. J'ai bien vu la manière dont vous vous êtes rapprochés dernièrement et je peux t'assurer que votre lien n'en sera que renforcé.

Hébétée, Marinette contempla un instant sa minuscule amie qui lui souriait gentiment tout en lui caressant les cheveux. Tikki ne semblait pas avoir perçu la source de son désarroi. Elle s'éclaircit machinalement la gorge.

-Je le sais bien Tikki, seulement...

-Seulement... ? l'encouragea le kwami en voyant que son amie n'avait visiblement pas l'intention de finir sa phrase.

-Seulement, soupira finalement Marinette après un instant de silence, je me demande comment j'ai fait pour ne pas me rendre compte plus tôt des ressemblances qui liaient Adrien et Chat Noir... Ce sont pourtant les deux garçons auxquels je tiens le plus ! Comment ai-je pu me laisser abuser de la sorte ?

-Marinette, reprit tendrement Tikki, amusée, tu sais bien que l'amour rend aveugle ! Tu ne pouvais pas assimiler sciemment ton camarade de classe et ton coéquipier. Leurs caractères sont bien trop divergents. Regarde, tu es d'une maladresse légendaire, et pourtant tu deviens une héroïne intrépide et assurée !

Face à cette dernière phrase, Marinette sourit. Tikki savait parfaitement trouver les mots pour la réconforter. Quoique cette dernière phrase lui laissait un goût aigre-doux sur la langue. D'une maladresse légendaire ? Elle était maladroite, elle n'allait pas le nier, mais d'une maladresse légendaire... ? C'était tout de même assez vexant.

-Et puis, ton inconscient à fait le travail pour toi. Tu as sans doute rassemblé ces deux personnes qui te sont si chères en pensant qu'il s'agissait d'un fantasme non réalisable, alors que ton coeur avait simplement reconnu qu'il s'agissait du même garçon.

Pensive, Marinette laissa ses yeux s'égarer dans le vague. Elle avait toujours ressenti un sentiment de familiarité avec Chat Noir. Peut-être était-ce dû au fait qu'il s'agissait en réalité d'Adrien ?

La jeune fille sursauta. Elle venait d'admettre qu'Adrien et Chat Noir ne formaient qu'un. Elle frémit. De joie, d'excitation et d'appréhension. Car si la révélation qui s'était imposée à elle quelques minutes plus tôt se montrait exacte, cela serait indubitablement synonyme d'innombrables changements dans sa vie...

.oOo.

Adrien grogna. Plagg venait de lui faire remarquer désobligeamment qu'il n'avait pas plus de matière grise qu'un pigeon -oiseau dont il était allergique aux plumes, ce qui était d'autant plus vexant. Les réflexions méprisantes de son kwami le laissaient toujours perplexe. Ce petit compagnon n'était-il pas plutôt censé être un guide, sage et bienveillant ? Au lieu de quoi, le chat miniature se goinfrait de camembert, lâchant de temps à autre de magnifiques rots qui retentissaient dans l'immense chambre du jeune homme, tout en comblant les blancs qui séparaient ses mastications et ses remontées gastriques de commentaires sarcastiques.

-Plagg, siffla Adrien entre ses dents, tu ne m'aides pas beaucoup là...

-Tout simplement parce que ce n'était pas mon intention, répliqua le félin en lui souriant d'un air suffisant, les yeux plissés de plaisir.

Adrien leva les yeux au ciel. Depuis qu'il était rentré chez lui, il essayait de faire le tri parmi toutes les émotions qui l'envahissaient successivement. Joie, incrédulité, doute, crainte... Tout se mêlait dans sa tête en un noeud impossible à défaire.

Poussant un soupir de frustration, Adrien se laissa tomber sur son lit, un bras en travers du visage. Est-ce qu'il se pourrait que Marinette soit...Ladybug ? Elles avaient pourtant des caractères si différents ! Malgré tout, leurs physiques étaient très semblables... Il avait souvent pensé que si l'une des filles de sa classe devait être Ladybug, il s'agirait sans conteste de son amie brune. Malheureusement, Paris était une ville si grande qu'il en avait toujours douté.

-Remarque, je vois pas pourquoi t'as l'air si perdu. Elle est plutôt canon Marinette. Si j'étais toi, je sauterais sur l'occasi...

-PLAAAAAG ! rugit Adrien en se redressant, écarlate.

Il fusilla le kwami du regard, le coeur battant à tout rompre, le visage en feu. Entre lui et Nino, il ne savait pas qui des deux était le pire pour faire ce genre de réflexions déplacées.

-Oh ça va, ronchonna Plagg d'un air vexé, si on peut même plus donner son opinion...En plus, sans vouloir me vanter, je tiens mon propre jugement en très haute estime. Si tu veux mon avis, tu ferais mieux de m'écouter...

Vaincu par tant d'orgueil, Adrien se laissa retomber sur le dos. Qu'avait-il fait au bon Dieu pour s'être vu refiler un comédien pareil ? Désespéré, il se tourna et enfouit son beau visage dans l'un de ses oreillers.

Se doutant qu'il ne pourrait continuer son conciliabule intérieur sans être une nouvelle fois interrompu par Plagg, Adrien finit par se réfugier dans sa salle de bain. Ce même endroit où, quelques années plus tôt, après l'épisode de Volpina, Ladybug avait failli découvrir son alter-ego. Il frissonna à ce souvenir, se dévêtit, puis se laissa aller sous l'eau chaude.

Tandis que l'eau presque brûlante l'aidait à évacuer ses pensées troublées, comme l'aurait fait le soleil emportant les dernières gouttes de rosée sur les pétales des fleurs, il se détendit enfin. Il avait l'impression que les barrières qui entouraient son crâne s'effondraient libérant ses pensées vers le ciel qui commençait à s'obscurcir.

La journée avait été éprouvante, entre son étrange comportement et les paroles lourdes de sous-entendus de Marinette. Le jeune homme soupira. L'eau qui ruisselait le long de son torse finement musclé l'apaisait. C'était comme si une présence réconfortante venait caresser son coeur si éprouvé et que l'organe se mettait à ronronner doucement, enroulé sur lui-même. Ses muscles se décrispaient lentement, tandis qu'une douce sérénité l'envahissait. Les yeux fermés, il écoutait le délicieux martèlement de l'eau contre le sol, tout en luttant contre la torpeur qui menaçait de l'emporter dans les bras de Morphée.

Il resta encore quelques instants sous l'eau, refusant de détruire ce fragile instant de paix, avant de s'enrouler dans une serviette éponge et de sortir affronter son irascible et incorrigible compagnon.

Quand il s'assit sur son lit, il réalisa sans grand étonnement qu'il était si épuisé qu'il n'avait même pas l'envie de dîner. N'ayant la force d'enfiler qu'un boxer, il s'allongea sous sa couverture et ferma les yeux. Il senti Plagg se lover sur son oreiller et sourit. Malgré son caractère belliqueux, le kwami n'en restait pas moins un félin et ses petites habitudes amusaient et attendrissaient grandement Adrien.

Tandis que le jeune homme se roulait en boule, comme l'aurait fait l'animal dont Chat Noir empruntait le nom, ses pensées dérivèrent, bien malgré lui, vers d'immenses yeux bleus, tandis qu'il sentait le sommeil l'engourdir...

.oOo.

Le lendemain, Adrien se leva en pleine forme. Il rejoignit Nino devant le lycée et c'est avec bonne humeur qu'ils se rendirent en cours. Ces derniers filèrent à toute vitesse. Leur journée comptant deux professeurs absents, ils pourraient sortir quelques heures plus tôt.

Entre le cinéma qu'avait fait Chloé parce qu'il ne l'avait pas vu en arrivant et la montagne de devoirs que leur infligèrent les professeurs restant, l'enthousiasme des deux garçons retomba brutalement.

Ils eurent bien quelques instants de rire entre Alya qui avait tenté de convaincre Marinette que les bruns aux yeux marrons étaient les plus mignons parce qu'ils faisaient penser à des gâteaux au chocolat et que la boxe n'était pas un sport de brute, ainsi que la magistrale défaite que se prit Kim après avoir défié Alix. Malgré tout, la journée parue assez éreintante du point de vue d'Adrien qui avait dû résister à l'envie de fusiller du regard tous ceux qui approchaient Marinette et qui parvenaient à la faire rire ainsi qu'à l'irrésistible envie d'embrasser les lèvres roses de son amie quand elle était venue lui dire bonjour. De plus, il avait senti sa présence dans son dos durant toutes les heures de cours et son coeur qui s'amusait à faire un concours de saut en hauteur dans sa poitrine l'avait épuisé. S'il avait été sujet d'un infarctus, il n'aurait été guère étonné. Bref, la journée n'avait pas été de tout repos, malgré la vitesse folle avec laquelle elle était passée.

.oOo.

Après avoir dit au-revoir à ses amis, Marinette marchait paisiblement en direction de son domicile. Elle tentait de se remémorer la recette de cookies de sa grand-mère car Tikki en raffolait et qu'il viendrait bientôt à en manquer. Perdue dans ses pensées, elle se serait pris un panneaux STOP si un grand-père qui passait par là ne l'avait pas prévenue à temps.

Elle marchait donc tranquillement le long de la Seine quand une voix reconnaissable entre mille l'interpela.

-Bonjour Princesse ! Chat va mieux depuis l'autre soir ?

La jeune fille fit volte-face et découvrit Chat Noir adossé à un lampadaire, qui la couvait d'un regard malicieux, manifestement fier de son apparition - et de son jeu de mot par la même occasion. Elle sentit son coeur bondir dans sa poitrine, tandis que l'envie de jouer avec les nerfs de son coéquipier faisait sa route dans son cerveau. Cela tombait bien, elle était d'humeur taquine et avait besoin de se détendre après cette dure journée.

Voyant une lueur inhabituelle apparaitre dans les yeux de son amie, Chat Noir fut pris d'une envie de fuir. Il secoua la tête. Pourquoi Marinette lui faisait-elle peur tout à coup ? Peut -être était-ce ce petit sourire malicieux qui était apparu au coin de ses lèvres ? Ou la manière qu'elle avait de s'avancer vers lui d'un pas sautillant ?

-Oui, on peut dire ça comme ça...répondit-elle intentionnellement évasive.

Chat Noir fronça les sourcils et vint à sa rencontre de son pas félin, presque dansant.

-Qu'est-ce qui te trouble Princesse ? Tu peux tout me dire...Je suis à ton service, ronronna le jeune homme en roulant les « r ».

Levant un sourcil, Marinette réprima un sourire. Il pouvait être si adorable quand l'envie l'en prenait ! Et si exaspérant le reste du temps... Chat Noir la contourna, l'obligeant une nouvelle fois à faire demi-tour. Elle lui fit face en se campant sur ses jambes, les pieds perpendiculaires à ses épaules, bras croisés sur la poitrine.

-Oh c'est seulement que j'ai...

Un silence.

-Que tu as.... ?

-...Un ami qui s'est comporté de façon très étrange hier...

-Vraiment ? Se crispa Chat Noir, devinant la suite.

-Oui, il s'est changé en une espèce de... et bien de Chat Noir, mais version encore plus froide et calculatrice...

Chat Noir porta une main à son coeur, faisant mine d'être blessé -il l'était vraiment en réalité. Reprenant d'une voix dramatique, il murmura :

-Quoi ? Tu me vois vraiment comme quelqu'un de froid et calculateur ? Je suis profondément heurté par tant de méprise...Moi qui ai toujours tout fait pour te satisfaire, Princesse *petit reniflement* je suis désolé de voir que tu ne me porte pas dans ton coeur...

-Non, ce n'est pas ce que je voulais dire, s'empressa de le rassurer Marinette en souriant doucement, seulement, il avait des expressions qui n'étaient pas sans rappeler les tiennes et...

Tentant à son tour de contourner Chat Noir pour poursuivre sa route, la jeune fille se prit les pieds dans la ceinture qui faisait office de queue à Chat Noir, trébucha, et dans son élan pour la retenir, son comparse fut entrainé avec elle dans sa chute. Le choc fit momentanément tourner la tête de Marinette, puis elle se rendit compte que Chat Noir était allongé sur elle. Il se redressa sur ses coudes pour la regarder, puis lui adressa un petit sourire d'excuse. Les yeux plongés dans ceux de son partenaire, la jeune fille mit un instant à réaliser qu'ils étaient en pleine rue. Elle rougit, puis posa la main sur la joue de son ami et lui fit tourner la tête de côté.

A la seconde même, un sentiment d'horreur se manifesta dans ses entrailles. Ce geste qu'elle venait de faire...seule Ladybug aurait réagi ainsi en présence de Chat Noir. Marinette se figea. Elle avait tenté de jouer avec le feu...et elle s'était brûlée les doigts. Elle était bonne pour une nouvelle séance d'auto-flagellation.

Chat Noir, quant à lui, n'en revenait pas non plus. Marinette avait instinctivement réagi comme l'aurait fait sa chère Lady, et pourtant, ce geste lui avait paru si naturel chez elle... Ses soupçons devenaient peu à peu une certitude...

Bredouillant des excuses, les deux acolytes se relevèrent en grimaçant. Marinette était encore un peu sonnée, tandis que Chat Noir avait les genoux en feu, après qu'ils aient violemment heurté le sol.

-Donc...heu...je suis content que tu ailles mieux...Je-je devrais y aller, bredouilla Chat Noir.

Stupéfaite de voir Chat Noir bafouiller, Marinette esquissa un sourire.

-D'accord...Bonne soirée chaton, répondit Marinette espiègle.

L'entendre l'appeler ainsi troublait toujours autant Chat Noir. Elle avait forcément deviné quelque chose la veille. Et lui aussi...

Ils restèrent un instant plantés là, gênés, puis Chat Noir s'élança vers une des toitures environnantes, non sans avoir adresser un petit salut à la brunette.

.oOo.

Ce soir-là, quand Marinette rentra chez elle, elle eut l'agréable surprise de découvrir ses parents, qui avaient décidé de rentrer un jour plus tôt. Des embrassades chaleureuses s'ensuivirent, puis la famille Dupain-Cheng se mit à table, dans une joyeuse ambiance. Le repas passa lentement dans une douce quiétude qui fit sourire de bonheur Marinette. Elle était contente qu'ils soient rentrés. Elle en avait pour tout dire marre d'être obligée de faire son repas tous les soirs, d'autant plus que la cuisine traditionnelle chinoise de sa mère lui manquait. De plus, son esprit légèrement troublé, ces derniers temps, lui avait valu quelques petits accidents...Un fromage rangé dans le placard, le produit vaisselle dans le frigo, une assiette à la poubelle...entre autres.

Quand elle finit par se mettre au lit, elle songea avec anxiété au lendemain. Car comment l'oublier, elle se retrouverait dans sa chambre, avec Adrien, seuls...Pour travailler sur un soi-disant exposer...Soi-disant, car elle doutait fortement d'arriver à se concentrer en sachant que son compagnon d'arme pour qui elle avait le béguin se trouverait à quelques centimètres d'elle, dans la peau de son amour de toujours.

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