- 23 -
À vingt heures, le soir même, dans le dortoir des septièmes années de Gryffondor.
- On va manger, vous venez ?
- Dans une minute, fit Harry, assis sur son lit, plongé dans un livre de Potions.
Neville hocha la tête puis il emboita le pas à Dean et Seamus et ferma la porte de la chambre. Ron ferma alors brutalement son livre, révisant lui aussi, et se tourna vers Harry qui se redressa.
- Alors ! Raconte ! fit le rouquin.
Le brun se mordit la lèvre inférieure en souriant puis il dit :
- Si tu savais... J'ai bien vu que tu comptais les nuages toi aussi, mais j'ai embarqué Malefoy pour m'aider à porter les provisions...
- T'avais une petite envie pressante ?
- Si on veut... Je te rappelle qu'on ne sort pas ensemble, donc logiquement, il n'y a pas « d'envies pressantes » entre nous.
- Ouais mais quand même, quand vous êtes revenu, j'ai senti un drôle de truc...
- Quand on a quitté les cuisines avec la nourriture, je l'ai plaqué contre le mur pour l'embrasser mais il m'a repoussé en disant qu'on était dans le couloir des Serdaigles et que donc on risquait d'être surpris. Ça fait trois semaines que je me tiens à distance pour ne pas le bousculer, j'en pouvais plus...
- Normal... Et ?
- Il a alors vu une porte et on y est allés. C'était un garde-manger. Impressionnant le truc... Bref. Là j'ai posé le panier et je ne te détaille pas la partie de bécotage qui a suivi. C'était chaud...
- Vous avez...
- Ron... Je ne suis pas un lapin, je mets pas cinq minutes...
- Désolé, fit le rouquin en lui tirant la langue. Et donc ?
- Bah j'ai tout de suite pensé que ça allait mal finir, enfin tu vois quoi... Ben non même pas. Quand je l'ai repoussé, je n'étais même pas excité, rien, niet, que dalle...
- Et lui ?
- Rien du tout au niveau falzar...
- Comment ça se fait ?
- Je ne sais pas, on était aussi surpris l'un que l'autre... M'enfin je ne vais pas me plaindre, je peux aller apparemment très loin avec lui sans risquer de lui faire peur en bandant devant lui...
- Avoue que c'est quand même troublant.
- Ça oui... J'étais persuadé de finir sur le sol du garde-manger, mais rien...
- Est-ce que tu crois que ton corps sait malgré tout que Malefoy ne t'aime pas comme toi tu l'aimes ?
- Possible... Il n'empêche qu'une telle étreinte aurait fait bander même le plus étriqué des hétéros... On ne pouvait pas passer une feuille de papier entre nous...
- Épargne-moi les détails, fit Ron en grimaçant.
Harry sourit. Il ferma alors son livre et tous deux allèrent diner. A leur grande surprise Hermione ne se pointa pas dans la Grande Salle. Se regardant, les deux Gryffondors haussèrent les épaules et se tournèrent vers la table des professeurs. Rogue était là ce qui voulait dire qu'Hermione ne dinait pas avec lui.
- Elle doit finir de réviser les Potions pour demain, fit Ron. Elle va nous rejoindre.
Mais la Gryffondor n'était pas en train de réviser. Non, elle se préparait pour sortir, ignorant son estomac qui protestait tant et plus à chaque minute écoulée.
A vingt heures trente, elle quitta Gryffondor et se faufila hors du château en passant par la cour intérieure. Elle longea le lac, passa derrière la maison de Hagrid puis se glissa entre les grilles du domaine. Elle s'assit alors dans l'ombre des arbres et attendit en regardant sa montre.
A trente-cinq, Rogue se pointa à l'entrée du château avec McGonagall. Ils discutèrent une minute puis l'homme s'enroula dans sa cape, un sac en toile en travers du torse, et se dirigea à grands pas vers la grille du domaine. Il la franchi sans s'arrêter et Hermione le suivit en restant sous le couvert des arbres. Elle ne le rejoignit que quand ils furent hors de vue d'aucune fenêtre du château.
- Je meurs de faim, fit la jeune femme.
- Allons diner alors.
- Tu n'as pas mangé ? Je t'ai vu aller dans la Grande Salle...
- Il fallait bien que je donne le change... Et j'ai prétexté que je mangerais en arrivant à Londres...
- A Londres ? Ne me dis pas que tu va m'emmener à Londres ?
- Pourquoi pas ? Ici nos visages sont connus comme le loup blanc...
- Hum, tu as raison... Allons à Londres alors. Tu m'emmènes ?
L'homme sourit légèrement – sourire n'était sa discipline favorite, même avec Hermione –, puis il prit la jeune femme par le bras et transplana jusqu'à Londres. Là ils se dénichèrent un petit restaurant familial dans le monde sorcier et y passèrent la soirée.
- Vous avez vu Hermione ce soir ?
- Elle m'a dit qu'elle révisait avec le professeur McGonagall, fit Parvati en regardant Harry par-dessus le livre posé debout devant elle. Elle coince sur je ne sais quel truc d'Arithmancie...
Tout le monde était dans la Salle Commune de Gryffondor et les longues tables avaient été prises d'assaut par ceux qui révisaient. Les septièmes années à un bout, les cinquièmes à l'autre.
- Ah bon. Merci, répondit Harry. Je vais prendre l'air Ron, dit-il ensuite.
- Yep... Rentre pas trop tard, tu ne vas pas te lever demain sinon...
- T'inquiète...
Harry sourit. C'était sa façon à Ron de lui dire de ne pas batifoler trop longtemps avec Malefoy au risque de, effectivement, ne pas pouvoir se lever le lendemain matin.
Mais Harry doutait tomber par hasard sur le Serpentard. Ce serait trop gros comme coïncidence. Tomber sur Rogue par contre, était plus que probable... Bien qu'il ignorait que celui-ci était en ce moment-même avec Hermione à la terrasse d'un café sorcier...
Soupirant, Harry s'assit sur le rebord d'une fenêtre. La nuit était tombée depuis une heure environ et il était à peu près dix heures et demie mais le brun n'avait pas spécialement envie de rentrer à Gryffondor, surtout pour réviser...
Perdu dans ses pensées, il entendit soudain des bruits de pas rapides. Son oreille se dressa, en alerte maximale professeur, et il regarda autour de lui en se rencognant dans le coin de la fenêtre. Il n'y avait personne. L'ombre fantomatique de la Dame Grise de Serdaigle passa au bout du couloir en silence et Harry essayait de se concentrer pour savoir d'où venaient les bruits de pas qu'il entendait lorsqu'ils se modifièrent.
- Il ou elle descend des escaliers, fit le brun à mi-voix. Très vite... Trop vite...
La tenture près de lui vola soudain et une masse noire en jaillit en roulant sur elle-même.
- Bon sang ! fit le brun en se ruant sur la masse noire. Hey, ça va ? dit-il.
Le garçon, que Harry reconnu comme celui qu'il avait apostrophé si familièrement le jour-même, s'agrippa à son bras et recula contre le mur, paniqué.
- Potter, tires-toi... dit-il en plantant ses ongles dans le bras du Gryffondor. Tires-toi, ils arrivent, faut pas que tu restes ici... Ils vont te massacrer...
- Ils ? Qui « ils » ? fit Harry. Il n'y a...
- Nous peut-être ?
Harry se retourna et le garçon qu'il avait près de lui se planqua aussitôt derrière lui en poussant un cri.
- Des Serpentards ? fit Harry en plissant les yeux.
Trois armoires à glace étaient plantées devant eux. Ils avaient des bras comme des jambons, un cou de taureau et une figure de veau pas frais.
- Qu'est-ce que vous lui voulez ? siffla le brun en se relevant. A trois contre un, c'est du joli !
- Un ? Où est-ce que tu vois un mec ici ? Hein les gars ? Moi je veux vois que deux gonzesses...
- Ok, fit alors Harry. J'ai pigé... Vous devriez avoir honte de vous en prendre aux homos... Qu'est-ce qu'on vous a fait, hein ?
- Mais rien voyons... Votre simple vue nous dégoute ! grogna celui qui semblait être le chef de la bande. Vous faites honte à votre genre, on devrait vous couper les couilles et vous les attacher autour du cou en guise de pancarte...
- Si nous faisons honte à notre genre, fit Harry. Vous, vous êtes la honte des Serpentards ! De quel droit vous vous en prenez à nous ? Vous devriez être contents plutôt ! Nous sommes beaux et gentils, et nous ne nous intéressons pas aux filles ! Bien qu'avec votre tronche, j'imagine que vous n'avez pas de copine...
- Arrête de nous insulter, tapette ! vociféra le chef en serrant les poings.
Ses phalanges craquèrent et Harry pinça les lèvres. Malgré tout le courage dont il disposait, il n'avait aucune chance face à ces trois montagnes de muscles... même avec la magie. Quoique...
- Viens, tirons-nous d'ici... fit alors Harry en ignorant la dernière solution, ne voulant pas se faire coller si près des vacances.
- Oh, oh, les fillettes veulent se sauver... Vous avez vu les gars ? De vraies femmelettes qui se tirent à la moindre contrariété ! ricana l'un des Serpentards.
Les deux autres s'esclaffèrent comme des gorets et Harry sentit soudain une présence familière.
- Hey vous trois... fit une voix trainante. Vous en faites un bordel là...
Le brun et son protégé regardèrent dans la direction de la voix et Harry sentit un soulagement lui étreindre le cœur. Malefoy, Pansy et Blaise se tenaient dans le couloir, intrigués.
- Qu'est-ce qui se passe ici ? fit Blaise en approchant. Potter ? Steffens ? Qu'est-ce que vous foutez-là ?
- Potter ?
Malefoy s'approcAh et Harry le regarda. Soudain le blond comprit.
- Okay, j'ai saisi, dit-il. Vous vous en prenez à deux homos en pleine nuit... Quelle lâcheté...
- C'est ça alors ? fit Pansy en s'approchant des trois costauds, les bras croisés.
- Fait gaffe, Parkinson... fit Harry.
- Quoi ? Tu crois qu'ils oseraient cogner une fille ?
- S'ils font ça, ils auront quatre mecs sur le dos pour leur en faire passer l'envie, siffla Blaise.
- Où vois-tu quatre mecs, Zabini ? J'en vois que deux et trois gonzesses...
- Ca suffit ! s'exclama soudain Harry. Je ne sais pas pourquoi vous vous en prenez à nous, mais disparaissez maintenant et fichez-nous la paix ! On ne vous a rien fait !
- Encore heureux ! Aller les gars, on se tire, les profs vont débarquer avec tout ce bordel...
Les deux autres hochèrent la tête puis ils mirent les voiles et Steffens s'effondra contre le mur. Harry s'agenouilla devant lui.
- Ca va aller ? Ils t'on frappé on dirait... dit-il, inquiet.
- C'est rien, je vais avoir un bel œil au beurre noir demain...
- Faut aller voir McGonagall, fit alors Blaise. Je les connais ces trois gus... Ce n'est pas la première fois qu'ils s'en prennent à plus faible qu'eux mais en général ce sont des premières années leurs victimes...
- T'as leurs noms ? demanda Harry.
- Yep, monsieur...
- Alors va chez elle, elle ne doit pas être couchée encore... fit Malefoy. Potter, tu accompagnes Steffens à l'Infirmerie. Pansy, viens avec moi, on va suivre ces trois crétins.
- Volontiers. Je pourrais utiliser ma baguette ?
- Peut-être...
Pansy sourit en battant des mains. Elle faisait la gamine et cela fit sourire Harry qui passa un bras de Steffens sur sa nuque et l'aida à se relever.
- Argh ! fit soudain le Serdaigle.
Harry l'aida à se rasseoir et lui tâta les côtes.
- Côtes cassées, dit-il. Ils t'ont tabassé ?
- Je ne sais pas... Je ne me souviens pas bien...
- C'est ta chute dans l'escalier qui t'a sonné, fit alors le brun. Aller viens...
Steffens se hissa sur le dos d'Harry. Celui-ci se tourna vers Malefoy. Blaise avait déjà filé et Pansy avait commencé la traque toute seule. Harry attendit qu'elle ait tourné au coin d'un couloir pour regarder Malefoy.
- Vas-y, fit le blond. Ne t'inquiète pas.
- Fais quand même gaffe à toi, ce sont des brutes...
Le blond hocAh la tête. Harry l'embrassa sur la joue puis le Serpentard s'en alla et Steffens souffla à Harry :
- Ca fait combien de temps ?
- On n'est pas ensemble, répondit le brun.
- Ok... Alors dans ce cas, tu ne vois pas d'inconvénients à passer la nuit avec moi...
- Je ne suis pas certain que tu sois en forme pour faire quoi que ce soit d'autre que dormir cette nuit, fit Harry en souriant.
- T'es un monstre Potter... se renfrogna l'autre. Promet-moi, quand j'irais mieux alors.
Harry serra les mâchoires. D'un côté cette invitation était fichtrement tentante. Il n'avait pas retrouvé un compagnon d'un soir depuis des mois... Finalement, il hocAh la tête. Steffens sourit puis posa son menton sur l'épaule d'Harry qui le conduisit l'Infirmerie.
- Merlin tout puissant ! s'exclama Pomfresh en les voyant débarquer. Monsieur Potter, monsieur Steffens, mais que s'est-il passé ?
- Il a été passé à tabac par des Serpentards homophobes, fit Harry en déposant son fardeau sur un lit. Je crois qu'il a des côtes cassées...
Steffens grinça de douleur et Pomfresh lui tâta les côtes. Elle fronça les sourcils, regarda son œil poché puis dit :
- Pouss'os pour les côtes, pommade pour l'œil, demain vous serez comme neuf.
- Potter, oublie pas, fit alors Steffens.
- Qu'est-ce que vous mijotez tous les deux ? fit Pomfresh en souriant.
- J'ai eut le malheur de lui promettre une nuit... se renfrogna Harry. Quand il irait mieux...
- Hé, hé, rigola l'Infirmière. Allons monsieur Potter, vous savez qu'avec les sorciers, il faut faire attention à ce que l'on promet.
- Mouais... La prochaine fois je m'en souviendrais...
- Allez, rentrez à Gryffondor, fit alors Pomfresh. Vous avez des examens à passer je vous rappelle.
Harry hocAh la tête. Il fit un clin d'œil à Steffens puis tourna les talons. Il retourna à Gryffondor les mains dans les poches et il allait pour descendre dans le hall d'entrée quand deux mains le saisirent par la taille.
- Lâch... commença-t-il.
- Chut, chut, c'est moi, fit Malefoy en lui plaquant une main sur la bouche.
- Oh Malefoy ! Nom d'un dragon, ne me refait plus jamais ça ! s'exclama le brun en lui sautant au cou.
- Ca va, excuses-moi, répondit le blond. T'es sur les dents on dirait... Ils ne t'ont pas touché, si ?
- Non, non, vous êtes arrivés à temps... répondit Harry en reculant.
Le Gryffondor soupira alors profondément et retourna se blottir dans les bras de son compagnon en disant :
- Steffens a deux côtes cassées et un œil poché...
- Il sera remit sur ses pieds demain, fit le blond en caressant le dos de Harry. Tu rentrais à Gryffondor ?
- Mhm... Tu viens avec moi ?
- Là-bas ? Ca va bien ?
- Alors restes avec moi cette nuit...
- Potter... Demain on a un examen de Potions à neuf heures... et jusqu'à midi...
Harry grommela. Il se redressa et lissa la chemise de Malefoy sur son torse. Le blond frissonna.
- Aller, rentre à Gryffondor maintenant... dit-il doucement.
- Malefoy...
- Fais pas ton gosse, tu veux ?
- Peuh !
Le blond lui prit le visage entre ses mains et Harry le regarda. Il l'embrassa doucement puis tourna les talons en soupirant. Malefoy sentit alors une présence dans son dos.
- Dray...
Le Serpentard ferma les yeux.
- Je suis désolé de t'avoir menti, Pansy...
- Ce n'est rien... Tu te protégeais, c'est normal...
Malefoy se retourna alors et regarda son amie, droit dans les yeux.
- Demain tu enverras une lettre à tes parents pour leur dire que tu ne veux pas m'épouser à notre sortie de Poudlard...
- J'y suis contrainte ?
- J'en ai peur...
- Pourtant tu n'es pas comme lui, Drake...
- Je ne suis pas comme lui mais il est en train de me grignoter le cœur...
- Tu es en train de tomber amoureux d'un mec ?
- Je ne sais pas... Tout ce dont je suis certain c'est que ce soir, j'ai eut très peur que ces trois brutes lui aient fait du mal...
Pansy baissa les yeux, terriblement triste. Elle soupira puis Malefoy passa un bras sur ses épaules et l'embrassa sur la tempe.
- Rentrons à Serpentard, dit-il en l'entrainant.
Elle hocAh la tête et les deux sorciers s'éloignèrent. Harry, lui, adossé à un mur d'angle non loin, soupira. Pansy aurait du épouser Malefoy à leur sortie de Poudlard mais le blond ne voulait plus. Qu'est-ce que cela voulait dire ? Était-il en train de tomber amoureux du Gryffondor alors qu'il est hétéro ? Est-ce possible ça ?
Harry secoua la tête et retourna pour de bon à Gryffondor. Il passa quelques minutes avec ses amis dans la Salle Commune puis monta se coucher, éreinté.
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