03.2 :: 𝙉uages noirs au-dessus de Tokyo
nda - head empty, pas d'idée pour cette nda- je vous laisse juste avec le chapitre du coup, c'est le moment où il faut s'accrocher à la chronologie pour se souvenir de ce qui va se passer (:
prochain chapitre le 29 janvier! bonne lecture <3
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CHAPITRE DEUX - NUAGES NOIRS AU-DESSUS DE TOKYO
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« Inspecteur Asahi ! »
La voix de Nishinoya vrilla les oreilles du susnommé, qui avait appuyé le front contre le métal de son bureau dans l'espoir de faire passer la vilaine migraine qu'il ressentait depuis le début de la journée. Il avait eu beau prendre le traitement habituellement prescrit aux adultes souffrant de migraines, impossible de la chasser. Le manque de sommeil et les affaires qu'ils enchaînaient ne devaient pas aider non plus ― le directeur Omizu leur avait promis la création d'une nouvelle unité si les résultats au test d'aptitudes étaient assez probants, et Asahi l'attendait avec impatience car leur sous-effectif commençait à peser lourd sur leur santé.
« Oui, Nishinoya ? » répondit malgré tout le brun en se redressant. Les lumières artificielles lui vrillèrent le crâne et il grimaça légèrement dans le même mouvement.
« Woah, vous avez mauvaise mine ! » fit remarquer l'exécuteur en se plantant devant lui. Le concerné eut un petit sourire contrit.
« Une vilaine migraine. On a besoin de moi ?
― L'inspecteur Suga est déjà parti avec les exécuteurs en service gérer un problème de psycho-syndrome collectif. Je venais vous demander si vous vouliez vous entraîner avec moi ! » Asahi haussa un sourcil devant la proposition étonnante.
« Avec toi ?
― Oui. D'habitude je m'entraîne avec Kyotani, mais il est en service là, et Hyakuzawa se repose aussi, vu qu'il s'est tordu la cheville la dernière fois. » Comme quoi, on avait beau faire deux mètres, on était sujet aux mêmes blessures que les autres ― Asahi s'avouait un peu jaloux de la grande taille de son subordonné.
« Je veux bien, s'il n'y a pas d'urgence. » finit-il par répondre. Sa migraine était toujours là, mais un peu d'exercice loin de tout l'informatique de leur bureau serait toujours utile. Nishinoya l'observa en fronçant les sourcils.
« Vous n'êtes même pas en service. Laissez l'inspecteur Suga s'en charger ! » Asahi le dévisagea quelques instants avant d'esquisser un petit sourire.
« Toi aussi tu l'appelles Suga.
― C'est lui qui m'a dit de le faire, se défendit immédiatement Nishinoya.
― Ça ne m'étonne pas de lui. »
Sugawara mettait un point d'honneur à essayer de mettre en place une atmosphère agréable entre les exécuteurs et eux, et si cela pouvait passer par un surnom... eh bien, cela ne le dérangeait pas. Asahi admirait sa façon de penser aussi légère et aussi le fait qu'il se faisait respecter de tous malgré tout. Ils l'appelaient peut-être « Suga », mais les exécuteurs n'auraient jamais le cran de désobéir à un de ses ordres pour autant.
« Vous venez ? »
Nishinoya était déjà sur le pas de la porte de leur bureau, et Asahi se redressa tant bien que mal pour le suivre. Ils avancèrent en silence vers la salle d'entraînement située quelques étages plus haut, qui était vide à cette heure de l'après-midi. Tout le monde devait être en service, ou simplement occupé ailleurs ― si beaucoup d'exécuteurs venaient passer leur temps libre à s'entraîner, d'autres préféraient le calme de leurs appartements.
Asahi était plus proche de leur état d'esprit, même si à leur différence, il avait son propre appartement en dehors des locaux de la SP. Il était donc d'autant plus justifié qu'il vienne peu s'entraîner, même si la salle de sport de la Sécurité Publique était incontestablement aussi, voire plus sophistiquée que les salles de sport accessibles au grand public.
Nul doute néanmoins que Nishinoya était un habitué : à peine changé, il était déjà en train de paramétrer les modules d'entraînement afin qu'ils soient adaptés à ses désirs. Asahi ne savait pas trop ce qu'il comptait faire ― il n'avait jamais vu son subordonné s'entraîner avant ce jour. D'ordinaire, il s'entraînait avec Sugawara et éventuellement Aone, l'inspecteur de la troisième unité, pas avec les exécuteurs.
Néanmoins, il se prêta vite au jeu lorsqu'ils commencèrent un un contre un, poussé par l'enthousiasme enfantin de Nishinoya ; et il découvrit avec surprise, après quelques minutes de défi au corps à corps, que l'exécuteur compensait sans mal sa petite taille par une vitesse et une précision étonnante. Asahi avait du mal à prendre le dessus malgré sa supériorité de taille et de force.
« Tu es très rapide, le complimenta-t-il au passage après avoir évité un mauvais coup.
― Vous aussi, inspecteur ! Vous vous débrouillez bien ! »
Il dit cela, mais moins d'une minute plus tard, Asahi était au sol avec une clé de bras et le rire de Nishinoya emplissait la pièce. Il avait réellement une jovialité qui se communiquait à tous, songea l'inspecteur. Sans doute était-ce pour ça qu'il constituait une essence essentielle de leur équipe, un pilier que tout le monde appréciait, même l'impulsif Kyotani, le taciturne Hyakuzawa ou l'indifférente Shirofuku.
Ils s'entrainèrent un bon moment, principalement au corps à corps en diversifiant les arts martiaux. Nishinoya en connaissait un nombre impressionnant, même si ce n'était parfois que quelques mouvements disparates. Asahi, qui n'avait suivi que les remises à niveau nécessaires pour devenir inspecteur, fut vite dépassé par son cadet.
Ils firent finalement une pause après une bonne heure de pratique et de transpiration ; Asahi ne sentait plus ses membres, mais au moins en allait-il de même pour sa vilaine migraine. Qui aurait cru qu'un simple entraînement au cours duquel il dépassait ses capacités aurait un tel effet réparateur sur son mal de crâne ? Il allait peut-être faire breveter l'idée, cela coûterait moins cher aux gens que les médicaments prescrits.
« C'était super ! » Si Asahi était complètement vanné, il n'en allait vraisemblablement pas de même pour Nishinoya, qui continuait de sautiller sur place. Ses réserves d'énergie semblaient inépuisables.
« Tu es vraiment rapide et précis, soupira le jeune inspecteur. Je suis admiratif.
― Vous aussi vous pourriez l'être ! Il faut que vous pensiez moins à ce que vous allez faire. Vous perdez du temps en cogitant. »
Le jeune inspecteur fit légèrement la moue. L'argument était recevable, il savait qu'il n'était pas très naturel en combattant, car il perdait trop de temps à se demander comment faire pour paraître le moins agressif, pour faire le moins de mal, etc. Il détestait fondamentalement la violence et les combats, et restreignait ses entraînements au minimum pour ne pas oublier les enseignements reçus pendant sa formation. Néanmoins il estimait aussi qu'il était trop grand pour être aussi précis que son interlocuteur, bien plus petit que lui ― mais il n'était pas assez fou pour le dire ouvertement. Au lycée, il avait joué au volley avec un central de petite taille très talentueux qui détestait néanmoins qu'on le lui fasse remarquer, et il supposait qu'il en allait de même avec Nishinoya.
« Kyotani arrive à te battre ? demanda-t-il plutôt, puisque l'autre avait mentionné qu'ils s'entraînaient ensemble habituellement.
― Oui, parfois. On est actuellement à une égalité parfaite avec quarante-sept victoires chacun. J'ai bien l'intention de lui repasser devant au plus vite ! » Asahi esquissa un petit sourire amusé.
« Je vais te laisser accomplir ce but seul, je crains de ne pas avoir votre endurance.
― Vous pouvez vous reposer sur nous, admit Nishinoya, mais n'oubliez pas qu'il vaut que vous sachiez vous défendre aussi ! Sinon, les choses pourraient tourner au vinaigre. »
A l'entendre parler, Asahi se douta qu'il parlait de vécu, aussi ne protesta-t-il pas, se contentant d'opiner à son intention avec un petit sourire. Il lui assura qu'il ne négligeait rien avant de retourner à son poste ― son service n'avait pas encore officiellement commencé, mais il était curieux de savoir si Suga, Kyotani et Shirofuku étaient de retour après l'affaire de psycho-syndrome. Celles-ci n'étaient généralement pas très longues, il s'agissait souvent simplement d'accidents ou d'autres déconvenues qui occasionnaient beaucoup de stress dans une zone rapprochée et alertait les capteurs.
Parfois, il s'agissait de véritables crimes ― dans ces moments-là, tout était plus épineux.
« Rien de grave, lâcha justement Sugawara lorsqu'il entra dans le bureau de leur section où le jeune homme aux cheveux gris attendait avec Shirofuku et Kyotani la fin de leur service, il s'agissait juste d'une mauvaise chute d'un ouvrier. Il s'est brisé la jambe, mais il a été transféré à l'hôpital rapidement, alors tout est rentré dans l'ordre.
― C'est un soulagement, opina Asahi. J'espère qu'il se remettra vite. Vous avez vérifié les structures de travail au cas où ? »
Il pouvait aussi bien s'agir d'un simple accident dû à une maladresse du travailleur que d'un problème dans l'infrastructure sur laquelle il travaillait... voire d'un véritable crime si jamais il avait été poussé, mais si personne n'avait été identifié comme ayant un facteur criminel en augmentation, cela semblait bien peu envisageable.
« Oui, apparemment il a juste trébuché sur un outil abandonné par un autre ouvrier. Celui-ci est parti en thérapie car très secoué par l'idée de sa responsabilité, mais je crois que tout va bien sinon. »
Sugawara retira sa veste bleue qui permettait de l'identifier et se laissa tomber sur la chaise de son bureau. Asahi en fit de même ― leurs deux bureaux étaient situés côtes à côtes et leur donnaient une vision plongeante sur les quatre postes d'exécuteurs. Kyotani et Shirofuku pianotaient tous deux sur leurs ordinateurs ― chaque incident nécessitait un rapport détaillé, même les plus insignifiants.
« Au fait, tu as parlé aux Kageyama récemment ? » s'enquit Sugawara en farfouillant dans son bureau pour en sortir un post-it. Asahi, qui avait ouvert sa boîte mail pour vérifier qu'il n'avait rien reçu d'urgent, répondit :
« Non, pourquoi ?
― J'ai croisé Takahiro tout à l'heure, il avait l'air soucieux et il semblait se disputer avec Futakuchi. Je sais que Futakuchi est parfois un peu insupportable, mais c'est rare qu'il s'emporte contre lui. » Asahi médita sur cette information quelques secondes.
« Il est peut-être sur une affaire compliquée ? Ou alors les sections une et deux se sont retrouvées à empiéter sur les platebandes des autres. Cela arrive parfois, même avec des enquêtes différentes. » Suga opina distraitement.
« Oui, c'est possible. Mais je me demandais si ça avait un rapport avec Kageyama. »
Le jeune homme aux cheveux bruns lui décocha une œillade surprise. Un rapport avec Kageyama ? Il avait du mal à voir sous quel angle il pouvait y en avoir un... sauf si son ami faisait référence l'attitude quelque peu étrange de leur cadet lors du dernier match de sa saison. Eux qui l'avaient toujours connu sous le plus grand sérieux quand il faisait des passes avaient été très surpris de le voir enchaîner des passes un peu plus moyennes que d'habitude. Et puis, la défaite les avait surpris en général parce qu'au début, Karasuno avait eu toutes ses chances de gagner.
« Peut-être qu'il n'était juste pas dans son assiette, hasarda-t-il.
― Oui, mais je trouve cet enchaînement étrange. J'aimerais bien en toucher un mot à Takahiro, mais je ne suis pas sûr qu'il accepte de me répondre. » L'inspecteur aux cheveux gris parut s'absorber dans ses pensées quelques instants, laissant Asahi également avec les siennes. Alors qu'il s'apprêtait à reprendre la parole, une soudaine alarme résonna dans tout leur bâtiment.
« Noon, gémit Shirofuku, notre service termine dans vingt minutes. Avec ça, on est bons pour des heures sup'.
― Je peux vous donner un coup de main, proposa Asahi. Vous irez plus vite.
― Regardons déjà de quoi il s'agit... » Sugawara alluma sa montre pour regarder les alertes récentes de la Sécurité Publique, tandis qua la voix désarticulée de Sybille le devançait :
« Alerte de niveau 3. Deux criminels sont suspectés d'avoir pris la fuite. Tous les inspecteurs et exécuteurs sont requis. Alerte de niveau 3... »
La voix poursuivit sa déclaration monotone pendant quelques instants, tandis que tous les inspecteurs et exécuteurs échangeaient des regards stupéfaits.
« Tous les inspecteurs et exécuteurs ? » répéta Sugawara en se redressant. Il attrapa sa veste en observant son ami et collègue. « C'est du sérieux là.
― Je me demande ce qu'il se passe, opina Asahi. Les alertes de niveau 3 sont extrêmement rares. » Il fallait que la société même soit en grand danger pour qu'elles soient déclenchées normalement. Asahi imaginait déjà des situations critiques jamais vues jusqu'alors. Un danger qui menaçait toute la population japonaise ? Une catastrophe naturelle ?
« Tout le monde se rassemble dans la salle de réunion, vint les informer Nishinoya en rejoignant la salle de la première unité. Il paraît que ce sont les inspecteurs de l'unité trois qui vont faire un point.
― Pas le directeur ? s'étonna Sugawara. Si quelque chose de si grave est en train de se passer...
― J'ai croisé Lev, de leur unité, tout à l'heure. Je crois que c'était originellement une de leurs missions, ce qui explique que ce soit eux qui nous fassent un récapitulatif. »
Une opération de l'unité trois ? C'était en effet possible que ce soit de leur ressort, Asahi avait entendu dire qu'ils avaient une nouvelle affaire importante et confidentielle qui leur prenait tout leur temps ― pour être exact, il avait entendu des exécuteurs s'en plaindre autour d'un repas dans la cafeteria.
Les deux inspecteurs et les trois exécuteurs prirent finalement la direction de la grande salle de réunion pour ne pas se faire attendre. Hyakuzawa les rejoignit devant la porte ; il n'avait pas à le faire normalement, il était blessé et incapable de participer à une opération périlleuse tant qu'il n'aurait pas reposé un minimum son pied, mais sans doute avait-il tenu à savoir de quoi il retournait.
Le petit groupe s'installa ensuite sur une rangée du grand amphithéâtre, avant de saluer de légers gestes de la main et de mouvements de tête les autres inspecteurs et exécuteurs. Les Kageyama étaient installés à leur gauche, entourés par leurs quatre exécuteurs ; l'équipe trois, elle, occupait toutes les premières places, à l'exception de l'inspecteur Yaku qui se tenait sur l'estrade. Le directeur Omizu était installé sur le côté également, attentif à ce qui se produisait.
L'amphithéâtre était loin d'être rempli, songea Asahi en attendant qu'ils commencent le briefing. Quand ils n'étaient qu'entre inspecteurs de la brigade criminelle, on constatait à quel point ils étaient peu nombreux. Le directeur avait beau être en train de planifier la création d'une nouvelle équipe par rapport aux résultats du test d'aptitudes, il ignorait ce qu'il en était présentement.
« Merci à tous d'être venus, s'exprima soudainement Yaku. La situation exige que nous passions assez rapidement à l'action, et plus nous serons, mieux ce sera.
― De quoi s'agit-il ? » La voix d'un des exécuteurs de l'unité deux, un grand jeune homme aux cheveux bruns et blonds, s'éleva dans la salle.
« Hier, l'unité trois a reçu la mission de retrouver un lycéen qui a disparu le jour du test d'aptitudes. » L'écran derrière Yaku s'illumina, laissant apparaître le visage d'Hinata. Asahi manqua de s'étouffer sous la surprise, et Suga ouvrit de grands yeux à ses côtés.
« Qu'est-ce que..., murmura-t-il, vraisemblablement sous le choc.
― Néanmoins, une conversation avec les parents de Shôyô Hinata, notre disparu, nous a prouvé qu'il était probablement parti de son plein gré, avec sa petite sœur Natsu Hinata. Leurs motivations sont pour le moment inconnues. En revanche, il est certain que nous devons agir, et vite.
― Pourquoi ? » Une autre voix s'éleva, perplexe. Rien ne semblait en effet justifier un tel branlebas de combat qui nécessiterait toutes les unités.
« Parce qu'il est probable qu'ils se trouvent en danger et entraînent le reste de nos citoyens dans ce même danger. »
L'intervention pour la première fois du directeur Omizu fit sursauter tous les agents de la Sécurité Publique. Il avait parlé sur sa voix basse mais ferme qu'il utilisait quand il donnait ses ordres pour les missions de la plus haute importance. Tout le monde se raidit et observa un silence respectueux, tandis que les rouages de leurs cerveaux tournaient à toute allure pour comprendre ce qu'il disait. Puisque Yaku lui-même restait désormais silencieux, le quadragénaire aux cheveux noirs impeccablement ordonnés se redressa et vint prendre la parole devant le micro.
« Je pense que vous n'êtes pas sans ignorer l'existence du réseau Eitpheil, commença-t-il, car plusieurs inspecteurs ont déjà eu affaire à leurs méthodes. Ils se croient tout permis sous le prétexte qu'ils sont des criminels dormants qui ont échappé à la surveillance de Sybille, et viennent fréquemment en aide à d'autres individus du même acabit. Ils ont pris de l'importance ces dernières années, et sont de plus en plus nombreux. Il est fort probable qu'ils approchent à leur tour Shôyô et Natsu Hinata, soit pour les recruter, soit au moins pour les duper en leur proposant leur aide.
― Je pensais que le réseau faisait réellement sortir les criminels. » Takahiro Kageyama prit soudainement la parole, attirant toute l'attention sur lui. D'autres marmonnèrent des assentiments ― Asahi en savait peu sur le réseau Eitpheil personnellement, lui-même n'y avait jamais été confronté, mais en avait entendu parler et approuvait aussi ce qu'il venait de dire.
« Nous n'en savons rien. » répondit gravement Omizu. Sa réponse résonna solennellement dans la salle. « Telle est la triste vérité : nous ignorons ce qu'il advient de ceux qui sont emmenés par le réseau. L'hypothèse la plus probable est, bien sûr, qu'ils les fassent sortir en effet. Mais nous ne pouvons pas nous en assurer : il nous faudrait contacter tous les services de renseignement du monde pour en avoir le cœur net. »
Et hors de question d'affirmer à tous les pays en question que des gens fuyaient Sybille, songea Asahi. Lui-même trouvait cela absolument inenvisageable. Ils étaient bien lotis dans ce Japon moderne. Ils n'avaient pas à prendre des décisions dès leur plus jeune âge concernant leur avenir, et n'avaient pas à se lancer dans des voies hasardeuses sur la base de leur simple intuition. A peine sortis des bancs de l'école, ils avaient un travail et une certaine stabilité. Avaient-ils besoin de plus que cela ? Selon le jeune homme aux cheveux bruns, non. Il appréciait ce confort. Lui qui avait des difficultés à prendre les décisions les plus simples était soulagé de ne pas porter sa vie entière et sa réussite future sur ses épaules.
C'était peut-être lâche ― mais il était heureux ainsi.
« Même en mettant ceci de côté, reprit Omizu, le danger est tout autre. Que pensez-vous de gens qui entretiennent l'idée que les thérapies ne servent à rien et qui encouragent des citoyens modèles à quitter le pays ? C'est le chaos qui nous guette tous si nous laissons le réseau Eitpheil répandre ce genre d'idées. Pour l'instant, personne n'a eu vent de leurs actions. Mais que se passera-t-il dans le futur, s'ils décident de se présenter comme des héros ? J'ai foi en le discernement de nos citoyens, mais nous ne pouvons pas exclure la possibilité d'un vent d'angoisse et de panique causé par leur représentation déformée de la réalité de Sybille. » Il marqua une longue pause, avant de reprendre fermement : « Il faut retrouver Shôyô et Natsu Hinata, et laisser Sybille s'occuper de leur avenir. Quant au réseau Eitpheil, il devient de plus en plus important de les arrêter. Concentrez toutes vos forces à remplir ces deux missions. Le temps presse, et il est de notre devoir de protéger nos citoyens ! »
Ses derniers mots, prononcés alors qu'il haussait soudainement la voix, eurent un effet galvaniseur sur tous ceux qui les entouraient, qui se mirent à applaudir et se redressèrent tous de concert pour le saluer. On aurait plutôt cru qu'ils venaient d'assister à un quelconque discours de politicien plutôt qu'à un briefing de la Sécurité Publique. Tout ceci mettait l'inspecteur un peu mal à l'aise ; ce n'était pas le genre du directeur Omizu d'en faire autant.
« Je l'ai rarement vu aussi remonté, commenta Suga à voix basse à côté de lui. Le réseau Eitpheil doit être une sacrée menace.
― Il n'a pas présenté Hinata et sa sœur comme des criminels, pour une fois, fit observer Asahi. Ceux qui fuient sont pourtant considérés par le système comme tels, non ? » Sugawara haussa les épaules.
« Va savoir. On n'a jamais pris part à une poursuite d'un autre côté. Et puis, il a accusé le réseau de mensonges, peut-être que c'est à cause d'eux qu'Hinata a pris la fuite. Je ne vois pas pourquoi il aurait fait ça autrement. »
L'ancien champion de Karasuno opina. Lui non plus ne comprenait pas pourquoi leur cadet avait pris la fuite, juste après le fameux test d'aptitudes qui allait pourtant lui confier un avenir. C'était incompréhensible : Hinata n'avait jamais remis en cause quoi que ce soit de Sybille. Asahi ne connaissait personne qui le faisait d'ailleurs.
Les deux inspecteurs s'intéressèrent ensuite de nouveau aux dires de Yaku qui répartissait les missions. Traçages des téléphones et appareils numériques, passage en revue des scanners de rue pour essayer de les repérer, tout y passerait. Une unité allait se charger de s'occuper de tout cela avec leur analyste, tandis qu'une autre allait passer en revue les environs de la ville au cas où ils seraient encore à la périphérie. Une dernière s'occuperait de parler aux proches d'Hinata pour essayer de comprendre d'où lui venait cette idée saugrenue de fuite. En entendant cela, Takahiro reprit la parole :
« Je crois que mon fils est dans la même équipe que lui, je peux lui poser des questions. » Asahi n'était pas certain que Kageyama serait le mieux placé pour lui répondre vu l'animosité qui l'opposait à Hinata, mais il ne se permit aucun commentaire ― pas sûr qu'il soit écouté dans tous les cas. Néanmoins, il observa ensuite très nettement le visage de Takahiro blêmir alors qu'il réfléchissait, puis il reprit : « Attendez. Hier soir, il a reçu un coup de fil, puis il est parti sans crier gare chez un de ses amis chez qui il voulait soudainement passer la nuit.
― Hier soir ? releva Yaku avec intérêt. Ça concorde avec la disparition de Shôyô Hinata.
― On a un suspect plus vite que prévu, railla Daishou, un des exécuteurs de la troisième unité, avachi sur un siège.
― Il n'a rien à voir avec ça, le défendit Takahiro.
― Pourtant, ton instinct d'inspecteur te souffle que c'est bizarre. » s'amusa l'exécuteur aux cheveux verts.
Asahi décrocha pendant quelques secondes de la conversation, trop intrigué par cette information ― Kageyama et Hinata, ensemble pour fuir le pays ? Ou alors, Kageyama membre secret du réseau Eitpheil ? Rien ne faisait sens dans ces hypothèses, il fallait le dire. Jamais le jeune homme aux cheveux noirs n'aurait pris de telles décisions. Quand il s'intéressa de nouveau à ce qui se disait, Sugawara s'adressait à lui.
« Yaku veut qu'on s'occupe d'interroger les proches d'Hinata, puisqu'on les connaît assez bien tous. On va commencer par les membres de l'équipe, ils sont mieux placés et n'ont pas encore été interrogés, contrairement aux parents de Hinata. »
Asahi opina distraitement, toujours confus vis-à-vis de toute cette histoire. Les esprits s'étaient échauffés après le discours du directeur, qui les observait se mettre à la tâche avec une satisfaction non dissimulée tout en pianotant sur son portable ― une urgence sans doute. Une part de lui avait néanmoins la désagréable impression que tout ceci était légèrement exagéré. Y avait-il réellement un si grand danger qui menaçait le Japon juste à cause d'un groupe de rebelles ?
« Inspecteur ! » La voix de Nishinoya le tira de ses pensées. L'exécuteur semblait avoir des pensées bien plus simples que les siennes. « L'inspecteur Suga veut que nous allions rencontrer les autres camarades de Shôyô Hinata. » Il agita un bout de papier avec deux adresses ; Asahi y lut les noms de Tsukishima et Yamaguchi. « Il a aussi ajouté qu'on pouvait peut-être parler à Tooru Oikawa et Hajime Iwaizumi, puisqu'ils sont des amis d'enfance de Tobio Kageyama, mais il faut attendre confirmation sur le fait que Tobio Kageyama est bien complice. »
Asahi hocha mécaniquement la tête. Tout ceci ― soupçonner des personnes qu'il connaissait bien ― lui donnait le tournis. Jamais en intégrant la SP il n'aurait pensé enquêter sur des individus qui étaient plus que des noms ou des dossiers pour lui. Bien sûr, nul Homme n'était à l'abri de ce genre d'incident... Mais il était dans la nature humaine de s'imaginer que tous les drames ne touchent que les autres, et jamais nous-mêmes.
« Nous y allons tous les deux ? demanda-t-il après une seconde de réflexion.
― Hyakuzawa vient avec nous, répondit Nishinoya. Shirofuku et Kyotani vont avec l'inspecteur Suga pour interroger les membres de l'équipe. »
Sans doute Suga voulait-il tempérer l'agressivité et le manque d'empathie de Kyotani avec sa propre attitude confiante et le côté bon enfant de Shirofuku. De son côté, même si Hyakuzawa était quelque peu effrayant par sa grande taille, lui et Nishinoya ne devraient avoir aucun problème à mettre leurs interlocuteurs en confiance. Surtout compte tenu du fait qu'ils allaient parler à Tsukishima... Cela n'allait sans doute pas grandement l'impressionner.
Avant de quitter la salle de réunion avec les deux exécuteurs, le regard d'Asahi s'arrêta sur la carte mentale interactive que Yaku et l'inspecteur Aone, son collègue de l'unité trois, étaient en train de réaliser pour faire un résumé de tout ce qu'ils savaient. Plusieurs noms et localisations apparaissaient au fur et à mesure que les deux inspecteurs la remplissaient, et il aperçut une colonne rassemblant les informations sur les membres du réseau Eitpheil qu'ils connaissaient déjà.
La liste était bien courte, songea-t-il ― il était admis que le réseau était de grande ampleur, vu ce qu'ils parvenaient à réaliser, et il ne voyait ici qu'une poignée de noms de code sans queue ni tête. Capensis. Albus. Orru.
Qui étaient ces individus qui bravaient à ce point l'ordre parfait de leur société ? Que cherchaient-ils à accomplir ? Voulaient-ils revenir à la société d'avant, du siècle précédent, formée de mille et une questions et doutes ? Celle où les crimes survenaient tous les jours, et où les morts violentes s'enchaînaient, tandis que la police et la justice avaient toutes les peines du monde à condamner les coupables ? Asahi ignorait ce qu'il y avait d'attirant dans cette vision.
Il poussa un petit soupir en songeant que sol travail qui avait été plutôt tranquille jusqu'à présent se couvrait doucement de nuages noirs. Il espérait que le directeur Omizu avait volontairement grossi le trait pour les pousser à agir avec toutes leurs forces, et non qu'Hinata et leur nation couraient réellement un grave danger.
Après tout, il ne se sentait pas capable de porter autant de poids sur ses épaules...
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