10) Deux sur l'herbe perlée
Genius trip
Théodore.
Je me promenais dans le jardin immense et négligé dissimulé derrière le médiocre hôpital.
Dire que j'avais réussi semer mon accompagnateur en quatre minutes et trente-sept secondes, alors qu'il faisait timidement jour et que le jardin était une étendue plane et déserte.
Merde, mes parents et moi étions assez riches pour me permettre d'aller dans une clinique chic, luxueuse, et j'étais ici ! Pas que j'en demande autant mais le problème c'est que j'étais sûr que mes parents n'avaient pas eu leur mot à dire.
Ce qui signifiait par extension qu'ils avaient été jugés irresponsables.
J'arrêtai mes réflexions apercevant une forme sombre au loin sur l'herbe broussailleuse, et m'en rapprochai à pas lents. Je frissonnai, reconnaissant une silhouette féminine, qui se précisait toujours plus. Pitié faites qu'elle soit juste assoupie! Je m'accroupis et essayais de chercher le pouls de la jeune fille en écartant ses locks colorées.
Je ne le trouvai pas, seulement parce qu'avant que je puisse toucher sa peau tannée, la douce endormie avait attrapé mes doigts et les avait violemment retournés.
J'étais tordu de douleur et tombai à terre, tandis qu'elle se levait prestement; Afin de m'administrer un coup de pied dans les reins. La fille croisa enfin mon regard et sourit, un air dément plaqué sur sa figure d'indienne.
Et je restais maintenu douloureusement à ses pieds, sous son oeil de plus en plus torve. J'avais vécu assez de choses flippantes ces derniers jours pour toute une vie mais il fallait croire que le destin s'acharnait.
Soudain, la folle me lâcha et cracha, comme à regret;
-M'appelle Mack, le morveux...Désolée de l'accueil mais j'ai cru que t'étais un médecin..
-Et après? T'as bien dus voir qu'on avait la même tenue, répliquais-je.
Elle répondit avec une lueur sournoise, tout en s'asseyant en tailleur dans un amas d'herbe humide.
- Ouais, mais c'était marrant de te faire peur. Jamais vu une mauviette pareille dans un corps de presque-homme-dont-je -ne -connais - toujours-pas-le -nom-!
Je me relevai sur mes coudes et me présentai, non sans un gémissement plaintif. Mack émit un ricanement moqueur. C'était un son rauque, un peu cassé, sûrement éprouvé par la cigarette, malgré qu'elle semble être encore mineure -mais de peu.
- Et ne te détrompes pas; je ne suis pas une dingue.
Elle reprit, après quelques instants de méditation ;
- Enfin, je le suis peut-être mais à ma manière. Je ne devrais pas être dans ce trou.
Il n'y' eut plus que le silence. Je commençais à me demander si elle n'était pas...comme moi.
Je murmurai, incertain;
- Moi non plus. C'est juste...Trop étrange.
Nous nous regardâmes longuement tandis que nos doutes s'estompaient.
Souriants doucement, nous nous allongeâmes sur le dos, côtes à côtes. Apaisés; ou juste..contents de ne pas être fous.
*
-Bon, c'est pas que je m'ennuie, mais j'aimerais qu'on ait le temps de parler un peu de notre situation avant que des médecins ne rappliquent.
- Tu sais, je suis aussi perdu que toi, dis-je.
Elle soupira.
-Bah, alors on a qu'à comparer nos expériences, trouver les similitudes et en tirer des conclusions.
Je m'esclaffai nerveusement sans raisons apparentes et Mack grogna, soudain redevenue agressive;
-Quoi? J'ai pas le droit de parler correctement?
- Non! C'est pas ça ! J'étais en train de penser...Et si on ne parlait pas de la même chose depuis le début?!
Nous rîmes à en pleurer. Pas que ce soit particulièrement drôle; Mais ça faisait du bien, d'être à deux dans les problèmes jusqu'au cou. D'être à deux sur l'herbe perlée par la rosée du matin.
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