Chapitre 20 : Solutions parallèles.
Je ne peux pas y croire.
J’avais trouvé comment prendre contact avec Pan. Du moins je l’espérais.
Manquerait plus que ce ne soit qu’une mauvaise blague.
Pour une fois, les choses semblaient enfin me sourire.
Ce n’est pas trop tôt.
La marque des damnés est ce qui me relie à l’enfer où je suis attendu, et donc à l’émissaire que doit m’y conduire, Pan.
C’est donc grâce à celle-ci que j’allais pouvoir le contacter et peut-être le convaincre de m’aider. Pourtant, même si je savais grâce à quoi je pourrais le joindre, je ne savais pas comment le contacter.
Il faut déjà sûrement que je retire le talisman de protection d’Orphée. Sans plus attendre, je m’exécutais, faisant passer le collier par-dessus ma tête et le posant sur le bureau, près de moi. Je fis quelques pas dans ma petite chambre d’internat, et fut pris de vertiges, m’obligeant à m’assoir à même le sol, la tête entre mes mains. Ma blessure me brûlait et ma vision se troublait. Je rouvris les yeux après les avoir fermés un instant, ahurit et effrayé de voir, au moment où je jetais un œil par la fenêtre, les gens dans la rue entourés d’auras parfois éclatantes de lumière et parfois sombres de noirceur mais le plus souvent d’un mélange de ses deux teintes, plus ou moins équitable. Ce qui m’horrifia le plus fut de distinguer des créatures que je ne connaissais même pas se faufiler dans les foules, sans que personne le les voit. Il y avait des sortes de serpents qui s’immisçaient entre les jambes de ces passants pressés et parfois même montaient en eux pour venir souffler à leur oreille, obscurcissant considérablement leur aura, me faisant détourner les yeux, paniqué. Puis tout se calma, ma vision redevint normale, me laissant déboussolé, seul au milieu de ma chambre.
Rapidement une idée germa dans mon esprit, si je suis damné l’émissaire viendra forcément au moment de ma mort pour m’emmener, alors il faut que je meure pour qu’il vienne au plus vite, car je n’ai évidemment pas le temps d’attendre qu’il vienne de lui-même quand il aura compris que je ne porte plus le talisman de protection.
Sans plus réfléchir à ce qui est certainement la plus mauvaise idée de ma vie, je me saisis du premier objet tranchant à ma portée, une simple paire de ciseaux et les approche de mon avant-bras. Puis je suis pris de doutes, est-ce réellement le seul moyen de parvenir à joindre Pan ? Sans doute pas, mais ais-je réellement le choix ?
Je ne sais même pas si je serai capable de le faire.
Je pose les ciseaux un instant, la tête emplie de questions. Je retire mon t-shirt et défait le pansement sur ma plaie, observant ma chair meurtrie qui ne veux pas guérir. De toute façon, cette marque signifie que je vais mourir ou bien devenir fou alors je n’ai pas grand-chose à perdre, pour moi l’issue restera la même mais pour Orphée tout peut encore changer. Déterminé, je reprends les ciseaux en main et pose la lame perpendiculairement à mon bras. Je prends une grande inspiration et détournais le regard avant d’exercer une pression importante sur celle-ci, la faisant glisser sur mon poignet, dans un gémissement de douleur. Quand je reposais mes yeux sur mon bras, je n’y vu qu’un simple tracé écarlate duquel ne perlait que quelques gouttes de sang. Pas assez profond.
Je ne peux pas faire ça, j’en suis incapable.
Je regardais le glissement hypnotique et atroce d’une goutte de sang qui roula lentement de mon bras puis tomba de celui-ci. Elle finit sa course sur la hanche me faisant serrer les dents quand elle s’écrasa sur ma blessure découverte. Soudain l’atmosphère changea, s’alourdissant considérablement. Une présence dans mon dos me surprit. Je m’empressais d’enfiler un sweat pour cacher et ma blessure à la hanche et celle au poignet, puis me tournais vers le nouvel arrivant, effaré de trouver Nolahn dans ma chambre.
« Nolahn, je suis désolé mais j’ai des choses à faire, tu ne voudrais pas repasser genre demain ? »
« Le genre de chose qui implique un émissaire nommé Pan et une marque des damnés ? »
Je le regardais, hébété, ne sachant que dire.
Comment peut-il être au courant ?
« Aller, Mahé, tu es intelligeant, tu devrais avoir compris maintenant. »
« Compris quoi ? » Soufflais-je, incertain et surtout terrifié de ce que je refusais d’entrevoir.
« A ton avis ? Quand as-tu reçut l’appel étrange d’un émissaire ? »
Je restais sans voix, refusant ce qui semblait être l’évidence.
« Je vais t’aider, tu as reçu cet appel juste après être venu chez nous accompagné de cet ange déchu qui n’a rien à faire sur terre, pas plus que toi désormais. »
« Mais et le cannabis, comment… »
« Comment j’ai pu savoir tout cela et en alerter le proviseur de ton lycée ? C’est assez simple, cette histoire fut une vraie aubaine pour moi, je n’avais rien prévu de tout cela, je me suis contenté de me servir de ce qui venait à moi. J’ai retrouvé la trace du déchu par hasard quand, complétement stone, ton copain a choisi d’enlever son talisman de protection. J’ai simplement profité des événements cherchant à l’éloigner de toi. Je savais que maman te renverrais à l’internat et je pensais que tu en voudrais au déchu et t’éloignerais de lui. Je cherchais à te protéger. Mais quelques jours plus tard, quand tu es venu à la maison, j’ai su que c’était trop tard pour toi, tu étais déjà damné alors je t’ai appelé pour que lui et toi vous vous rendiez, mais à la place de cela, vous m’avez ignoré et vous vous êtes mis à chercher des solutions à un problème qui n’en est pas un, pour lequel il vous suffit de me suivre. »
« Non, je ne re crois pas, tu ne peux pas être Pan, tu es mon frère, tu ne peux pas me condamner à une vie de misère et de douleur. »
« Je n’ai pas le choix ! Et si tu ne veux pas croire ce que je te dis, tu croiras peut-être ce que tu verras. »
Tout en disant ça, il s’approcha de moi d’un pas, baissant la tête. L’air se fit plus lourd encore quand ils se mit à changer d’apparence, de longues cornes tortueuses sortant de ses cheveux tandis qu’il lâcha un râle de douleur, une queue de chèvre prenant également place entre ses reins. Les larmes me montèrent aux yeux, sans que je ne fasse rien pour les en empêcher.
« Non, tu es mon frère, je te connais, tu n’es pas quelqu’un de mauvais, tu ne peux pas être un émissaire de l’enfer, aimant se repaitre de la douleur. »
« Ce n’est pas un choix de ma part, au temps jadis, j’étais un dieu. Puis les croyances ont changé, mon image a été associée à celle du diable, ne me laissant pas d’autre choix que de me plier aux exigences que l’on a pour moi. Je n’ai jamais souhaité guider les âmes damnées en enfer, et je ne me repais pas de leurs souffrances comme les autres émissaires le font. Mais c’est à moi que l’on s’en prend si le travail n’est pas fait convenablement. L’humour douteux du diable et de l’Eternel a voulu qu’il soit fait de moi le bouc-émissaire en cas d’inachèvement des tâches, quoi de mieux qu’un émissaire à l’apparence d’une chèvre pour servir de bouc-émissaire ? »
Je ne savais plus quoi dire, Nolahn ne mentait pas, il était forcé de faire cela, il n’avait pas d’autre alternatives mais pourtant, je voyais que s’il avait pu, il aurait agi autrement. Je ne savais pas si je devais lui en vouloir de vouloir m’emmener aux enfers, moi, son propre frère, ou bien le plaindre de sa triste condition. Puis, je repensais à la raison qui m’a poussé à l’appeler.
« Nolahn, il faut que tu m’aide, je te laisserai emmener mon âme sans opposer de résistance si tu m’aide à rendre ses ailes à Orphée. De cette façon, je serai le seul de nous deux que tu devras emmener et tu auras accompli ton devoir. »
Il resta un moment interdit, la peur brillant dans ses yeux. Il hésitait, c’est déjà un début.
« Je… je ne peux pas te sacrifier pour sauver un autre, tu l’as dit, nous sommes frères. »
« Et tu m’as dit l’autre jour que tu m’épaulerais toujours, que tu serais pour moi d’un soutient sans failles. »
Je vis à son regard qu’il était perdu, chose que je n’aurais jamais cru voir dans ses yeux. A ce que l’on dit, Pan était un dieu ambivalent, il est donc compliqué mais en même temps pas tellement, c’est juste qu’il ne se soucie pas des convenances ou autre, ce qu’il fait c’est suivre son ambition, pour lui il n’y a pas de différence entre le bien et le mal, entre détruire et créer, entre aimer et haïr. Pan est un paradoxe. Pan est une contradiction, une invraisemblance.
Il allait m’aider, j’en ai la certitude.
Parallèlement, dans une des salles de la Boite de pandore, lieu dont le nom commence ironiquement par les trois même lettres qui constituent le nom de l’émissaire, Orphée écoutait attentivement les mots d’Akihiko GASTEL, buvant ses paroles. Mais comprenant rapidement que rien de ce qu’il obtiendrait de celui-ci ne serait gratuit.
« Si tu veux plus d’informations, rejoins-moi chez moi demain soir, je te montrerais des choses qui pourrons surement t’aider, et n’oublie pas de prendre ce que nous avons convenus ensembles, pas de payement, pas d’aide, c’est aussi simple que ça. Après tout, tout travail mérite salaire. En attendant, il faut que j’y aille, Helory m’attends depuis suffisamment longtemps, si tu veux bien m’excuser. »
Il laissa son adresse à Orphée et parti, un air légèrement supérieur, sans pourtant être hautain, sur le visage, se souciant bien plus du jeune homme qui attendais dans sa voiture que du déchu qui requérait son aide.
Orphée soupira, accablé de ne pas avoir de réponses plus claires dans l’immédiat mais ayant cerné la personnalité d’Akihiko. Il ne veut pas aider, il veut juste tirer profit de la situation. Il est opportuniste, sait manipuler à la perfection et doué d’une palabre sans équivalence. L’homme politique idéal, parfaitement faux et hypocrite. Il devrait songer à en faire son métier, plutôt que son rôle de V.I.P plein aux as dans une boîte de nuit, il gagnerait à être connu. De plus il est également très charismatique, et doté d’un charme certain. En même temps, quand on est sur terre depuis plus de deux-cent ans, on commence à savoir sur quelles ficelles tirer tour que nous désirs deviennent réalité.
« J’ai au moins appris qu’il y avait un moyen de sauver Mahé et j’avais trouvé un appui pour m’y aider, bien que le prix à payer soit relativement élevé. » Soupira-t-il pour lui-même, cherchant à se remonter un tant soit peu le moral.
Puis il sorti de la boite de nuit, levant les au ciel, apercevant quelques étoiles dans le ciel, espérant voir les choses s’arranger bientôt, se m’étant en route vers l’internat du lycée de St Laurent.
De mon côté, ignorant tout des activités d’Orphée, quand je vis Nolahn sortir de ma chambre, je pris à peine le temps de retirer mes vêtements et me couchais. Nolahn -ou Pan- allait m’aider, je le savais. Je l’ai vu dans ses yeux, au moment où je lui ai expliqué comment je comptais faire. Il va revenir bientôt, il reviendra pour m’aider.
Perdu dans mes pensées, j’entendis à peine la porte s’ouvrir et sursautais au moment où je senti Orphée se glisser sous les couvertures tout contre moi.
« Tu dors Crevette ? »
« Je dormais. »
« Désolé, je ne voulais pas te réveiller. »
« Ce n’est rien, où tu étais ? »
« J’ai été rencontrer Akihiko GASTEL, il va nous aider. »
« Oh… »
Cela remettait un peu en cause mes projets. Je ne sais si je dois lui parler de ce que j’ai découvert, à propos de Nolahn, que c’est lui l’émissaire. Le lui cacher sera des plus difficile -d’autant plus qu’il peut lire dans mes pensées- et la confiance est la base d’une relation solide -quelle que soit la nature de cette relation-. Il faut que je lui dise, même si je ne lui explique pas tout, parce qu’un mensonge par omission n’est est pas vraiment un, n’est-ce pas ?
« Orphée ? »
« Quoi, pourquoi tu ne me laisses pas dormir, tu es cruel parfois, tout le temps même. » Bougonna-t-il, à moitié endormis.
« J’ai quelque chose à te dire. Mais avant j’aimerais que tu me promettes de ne pas te mettre en colère. J’ai ta parole ? »
« Quoi ? Mais qu’est-ce que tu as encore fait ? »
« Je vais te le dire mais promet moi d’abords. »
« Ouais, je te donne ma parole, maintenant explique moi. »
« Il se pourrait que je sache qui est l’émissaire. Que je l’ai invoqué et que je lui ai parlé. »
Devant l’air interdit d’Orphée, je continuais mes explications :
« J’ai pas fait exprès, enfin je veux dire je voulais l’invoquer, le faire venir pour lui parler mais j’savais pas comment faire. Et j’ai pas fait exprès d’y arriver, de faire ce qu’il fallait faire pour que ça se fasse. »
Je m’embrouille.
« Enfin bref, j’ai découvert un truc qui est capital, l’émissaire est en fait rattaché au dieu Pan, qui protégeait les bergers et guidais les troupeaux. La mauvaise nouvelle, c’est qu’il s’agit aussi de mon demi-frère. L’émissaire est Nolahn… »
« Tu veux rire ? Non, ce n’est pas possible, je l’aurai forcément remarqué j’aurais vu son aura. »
« Pas si tu es devenu trop faible pour ça, tu l’as dit toi-même, le sang angélique dans tes veines faibli, tu deviens humain. Et je crois que je sais comment empêcher ça. »
« Comment ? » Demanda immédiatement Orphée, comprenant que je lui offrais un moyen de recouvrer ses précieuses ailes.
« Avec un sacrifice rituel. »
« Quoi ? Mais je ne veux sacrifier personne ! »
« Ce n’est pas un sacrifice si l’offrande consent à être offerte, mais cela te permettra tout de même de récupérer tes ailes, c’est ce qui compte non ? »
« Je… Oui mais… Attends, quand tu parles d’offrande, tu ne parles quand même pas de toi ? »
Ça c’est la partie que je devais omettre de dire. Il n’était pas censé deviner.
Mon silence parla pour moi, il comprit bien vite que c’est ce que j’avais en tête.
« Non Mahé, c’est hors de question ! »
« Pourquoi ? Regard la vérité en face, il n’y a pas d’autre choix, nous sommes deux et il faut que l’un se sacrifie pour sauver l’autre. Nous sommes dans une impasse et puis rends-toi à l’évidence, tout ce que j’ai aujourd’hui, les amis, la joie, l’amour aussi je crois, c’est grâce à toi. C’est pour cela que c’est moi qui doit donner ma vie pour la tienne. Ces derniers mois ont été les plus beaux de toute ma vie, parce que tu étais là près de moi. Sans toi mon existence sera toujours aussi monotone et d’un ennui mortel. »
« Au moins tu ne seras pas en danger. »
« Arrête avec ça Orphée. De toute façon, je ne voudrais moi-même pas qu’il en soit autrement et tu le sais. »
Soudain, quelque chose me frappa, une chose à laquelle je n’avais jamais songé avant. Comment avais-je pu passer à côté de quelque chose d’aussi énorme ? Sans doute est-ce vrai quand l’on dit qu’il faut savoir prendre du recul, ne pas garder le nez au cœur du problème si l’on veut en trouver la solution. Tous les éléments étaient réunis depuis le début et voilà seulement que je m’en rends compte, dépassé depuis longtemps par la situation.
« Putain Orphée je crois que je viens de tout comprendre ! »
« De quoi tu parles Mahé. »
« Lève-toi, on va à la bibliothèque. Aller, debout, maintenant ! J’ai quelque chose à te monter, ou plutôt une histoire à te raconter. »
___________
Avec amour et dévotion,
ParadoxalementParadoxale.
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