Chapitre16
Jarek
J'écoute attentivement Emilio, qui a eu des informations concernant l'accident du restaurant.
― Le conducteur a enfin parlé, m'apprend-il.
― Et puis ?
― Tu ne vas pas aimer ça...
Je lâche un soupir d'impatience.
― Te souviens-tu de Frank Lavigne ?
Ce nom seul suffit à me faire serrer les poings. Emilio avait raison ; je sens que je vais détester la suite.
― Figure-toi qu'il a payé le conducteur pour créer cet accident.
― Dans quel but ?
― Dans le but de te faire peur, et encore mieux, de te blesser. Je crois qu'il a une dent contre toi.
― Vraiment ? Je ne l'avais pas deviné, réponds-je sarcastiquement.
Frank Lavigne est mon pire ennemi, et c'est peu dire. Il est la raison pour laquelle j'ai dû fuir mon ancienne vie. Ce type a, pendant longtemps, été mon pire cauchemar, celui qui m'a fait plongé dans les problèmes, la fraude et qui me tenait poings liés. J'étais son larbin et je faisais tout ce qu'il me demandait (et c'était souvent illégal). Si j'étais resté à Ste-Lucie, j'aurais assurément fini mes jours en taule...ou sous terre.
Frank ne m'aurait jamais laissé partir s'il avait connu mon plan, alors je me suis enfui tel un évadé de prison...mais en compagnie de Ray. Je n'avais pas prévu qu'elle m'accompagne, mais je ne pouvais pas la laisser là-bas...pas après cette fameuse soirée où je suis rentré plus tôt que prévu.
— A-t-il dit autre chose ? interrogé-je.
— Non, et nous ne pouvions pas « insister » davantage à cause des infirmières qui se trouvaient à côté....
— Essayez quand même. Je veux connaître les projets de Frank en ce qui me concerne. Il...
Un cri provenant de la chambre de Ray m'alerte et je m'y précipite. Je repère immédiatement la jeune femme, étalée sur le plancher à côté de son lit ainsi que l'infirmière, qui tient un couteau à beurre dans sa main. Je n'ai pas besoin de dessin pour comprendre que Ray est en danger. Je me dirige vers son assaillante et évite l'arme de fortune qu'elle essaie de m'enfoncer dans l'abdomen, mais son coup de pied au plexus me projette contre le mur. Cette femme semble entraînée à se battre, alors je réalise qu'elle n'est pas réellement une infirmière. On a dû l'engager pour blesser ma protégée.
Je reprends mon souffle rapidement et fonce la fausse infirmière, mais cette fois-ci, je suis prêt. Je pare son coup de poing et lui envoie à mon tour et coup de pied qui la désarme. Moi aussi, j'ai quelques tours dans ma poche...
La femme cherche une autre arme, et s'empare d'une seringue.
— Qui t'a engagée ? lui demandé-je d'une voix d'apparence calme, mais qui bouillonne de colère.
— Vous allez mourir, répond-elle dans un rictus. Il va s'assurer que toi et ta pute ayez ce que vous méritez.
— Bon...je suppose que c'est Frank, soupiré-je, même si je m'en doutais déjà.
J'espérais qu'elle m'en apprendrait plus, mais elle ne semble pas disposée à parler. Au lieu de cela, elle m'envoie une série de coups que je pare avec facilité même si je dois avouer qu'elle est douée au combat. Toutefois, j'ai également appris cet art et je riposte avec assurance. L'un de nous va certainement se fatiguer, mais les minutes comptent. J'enchaîne plusieurs coups d'affilés et l'envoie finalement valdinguer de l'autre côté du lit. Ray, elle, se trouve toujours par terre et essaie de se redresser, gémissant de douleur.
― Ça va, Ray ? lui demandé-je en m'agenouillant près d'elle.
Elle hoche la tête, mais grimace, signe qu'elle souffre.
― Il faut partir, lui annoncé-je en la prenant dans mes bras.
J'essaie de ne pas faire de geste brusque, mais c'est difficile, car je dois me dépêcher. Elle n'est pas en sécurité, ici. Pas depuis que Frank a retrouvé ma trace. Et moi qui pensais que mon ancienne vie était derrière moi. Il faut croire que, peu importe où j'irai, il y aura toujours des squelettes dans mon placard.
Je croise Emilio dans le corridor et lui fais un signe de tête. Il se dirige immédiatement vers la chambre où j'y ai laissé l'infirmière.
Nous passons devant le bureau d'accueil et l'une des préposées m'interpelle :
― Monsieur, vous ne pouvez pas l'emmener tout de suite. Elle n'a pas eu son autorisation de sortie.
Je ne réponds rien et fonce vers l'ascenseur.
― Où m'emmènes-tu ? me demande Ray, toujours dans mes bras.
― En lieu sûr.
― Pourquoi voulait-elle me tuer ?
― Chut, pas ici. Il y a des caméras.
Elle se tait jusqu'à ce que nous arrivions dans le hall de l'hôpital. Alex m'attend à la sortie et j'aperçois ma voiture garée devant la porte.
― Je peux marcher, avise Ray.
Je lui jette un regard dubitatif.
― Avec un peu d'aide...termine-t-elle.
― Il faut se dépêcher, alors tu feras ton orgueilleuse plus tard, lui dis-je en ouvrant la portière de la voiture.
Je la dépose sur le siège arrière, puis m'installe à la place du conducteur.
― Qu'est-ce qu'on fait, maintenant ? me demande Alex.
― Allons à la planque. Suis-moi avec ta voiture au cas où on nous poursuivrait.
Il hoche la tête, un air grave sur le visage. Il sait qu'on ne joue pas et que des vies sont en jeu.
― Depuis quand as-tu une planque ? interroge Ray.
Depuis la semaine passée. Je me suis dit que ça pourrait servir.
― J'ai toujours un plan B, lui réponds-je seulement.
― J'aurais dû m'en douter. Les personnes dans ton genre doivent toujours s'attendre au pire.
Dans mon genre ? Que veut-elle insinuer au juste ? Ou plutôt, que sait-elle de moi ? J'ai l'impression que ses petits sous-entendus dissimulent un sujet qu'elle ne veut pas aborder.
― Dans mon genre ? répété-je en essayant de garder un air détaché.
Je ne dois pas lui montrer ma facette sombre, qu'elle commence d'ailleurs à soupçonner.
Ou qu'elle soupçonne depuis notre adolescence.
― Ouais, le genre qui parie son garage pour une simple course.
Je me détends instantanément ; elle ne faisait pas référence à mon penchant pour les pièces d'auto volées.
― Nous devons passer à mon appartement afin de récupérer mes effets personnels, précise Ray en changeant subitement de sujet.
― C'est trop risqué pour le moment. Emilio y retournera plus tard pour les récupérer.
― Il est hors de question qu'il fouille dans mes dessous, argue-t-elle en se croisant les bras.
Je pousse un long soupir. Pourquoi est-ce toujours si compliqué avec elle ?
― Je te signale qu'il a une copine et que ce n'est pas la première fois qu'il voit des sous-vêtements féminins.
Je suis toutefois curieux de savoir si elle porte des strings ou plutôt des tangas.
Je secoue la tête afin de chasser cette pensée. Je ne peux m'autoriser à avoir des rapprochements avec Ray car elle n'est pas l'une de ces femmes que je saute afin de satisfaire mes envies.
― Il n'y a pas que ça, fait-elle en se croisant les bras comme si elle boudait.
Je lui jette un regard amusé.
― Aurais-tu peur qu'il découvre tes jouets sexuels ? la taquiné-je.
Aussitôt ces mots prononcés, elle se ferme comme une huître. Je comprends que je viens d'aborder un sujet épineux. Elle s'est fait agressée durant son enfance, alors je suppose qu'il y a certains blocages chez elle sur le plan sexuel.
― Absolument pas, répond-elle en faisant la moue.
― Donc, tu n'as jamais essayé de...
― Ce n'est pas de tes affaires.
― Peut-être pas, mais je peux t'aider à...
― À quoi, Jarek ? Tu te proposes pour m'aider à me détendre ?
J'avoue que la conversation a un peu trop dévié à mon goût. Je l'imagine soudain étendue sur son lit en train de se donner du plaisir. Je m'éclaircis la gorge.
― À te conseiller, terminé-je.
― Je n'ai pas besoin de tes conseils, crache-t-elle.
― En es-tu certaine ? Parce que tu sembles un peu frustrée sexuellement.
Elle tourne la tête vers moi et son regard orageux me transperce.
― Je n'ai pas besoin de sexe comme toi pour me détendre. J'ai d'autres façons plus efficaces comme la lecture ou écouter de la musique Et en passant, je ne suis pas frustrée sexuellement, juste... traumatisée.
Sa voix se casse et je regrette maintenant d'avoir abordée le sujet.
― Justement...il est peut-être temps de tourner la page. Je comprends que tu n'as pas gardé un bon souvenir de cet acte, mais je t'assure que ça peut être plaisant. Essaie et tu verras.
― Mais certainement. Je vais prendre du bon temps dans mon lit, ironise-t-elle.
Je lui jette un rapide coup d'œil et remarque que son visage est devenu écarlate. Je n'ai jamais abordé ce sujet de discussion avec elle, mais je crois qu'il est grand temps.
― Des tas de filles ont des jouets sexuels, il n'y a aucune honte à en utiliser.
― Peut-être, mais même si j'en avais, je ne saurais pas comment m'en servir.
― Ce n'est pas bien compliqué...
Si je la respectais moins, je lui proposerais mon aide avec grand plaisir. Je sens mon membre durcir juste à l'idée de lui montrer tout ce que je sais à ce sujet. Néanmoins, elle est trop innocente pour que je m'occupe de son cas. Je la briserais...et je ne veux pas la traumatiser davantage. J'aime les actes brutaux...et Ray n'est pas le genre de fille avec qui je m'adonnerais à ces...activités.
― Bien sûr. Je suis certaine qu'un type comme toi est supeeeeer expérimenté.
C'est en train de déraper....et je ne parle pas de ma voiture, qui vient de s'engager dans une rue à l'extérieur de la ville. Ray est en train de me pousser à bout. Qu'essaie-t-elle de faire ? On dirait qu'elle veut vraiment que je lui montre de quoi je suis capable.
― Tu ne devrais pas faire ça, l'avertis-je en fixant la route.
Nous sommes sur le point d'arriver à la planque.
― Quoi donc ? feint-elle d'un air innocent.
― De me mettre au défi.
― Pas besoin de te mettre au défi de baiser une femme par jour. Tu le fais déjà.
Je serre mes mains autour du volant en crispant la mâchoire. J'ai envie de l'étendre sur la baquette arrière afin de lui montrer ce qu'est le plaisir. Je me retiens néanmoins, car je ne veux absolument pas la brusquer. Et c'est certainement ce que je vais faire si elle continue de me provoquer.
Nous avons heureusement à destination. Alex se stationne juste derrière moi dans une ruelle mal éclairée.
― Où sommes-nous ? demande Ray en examinant la vieille bâtisse délabrée.
― À la planque, lui réponds-je en sortant du véhicule.
Elle fait de même, tout en dévisageant les vieilles briques devenues noircies de la devanture du bâtiment.
― J'aurais dû m'y attendre, marmonne-t-elle pour elle-même. Il a un goût de chiotte pour les femmes, alors pourquoi faire différent pour ses « planques » ?
Elle s'imagine que je suis sourd ou quoi ? Je m'approche d'elle si rapidement qu'elle sursaute et lui glisse à l'oreille.
― Arrête de te rabaisser.
J'ai juste le temps d'apercevoir son air interrogateur avant de me retourner, un sourire en coin. Ray croit que j'ai mauvais goût pour les femmes, mais elle ignore à quel point je la trouve attirante... jusqu'à présent. Si elle est un tant soit peu intelligente, elle aura compris le sous-entendu...
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