Prologue

Il existe des lieux qui semblent avoir une âme. Des lieux si chargés d'histoire, de secrets et de souvenirs qu'ils finissent par absorber quelque chose des âmes qui les traversent. Je n'aurais jamais cru en des idées aussi romantiques, à vrai dire. Jusqu'à mon arrivée ici.

L'université se dresse, sombre et majestueuse, au cœur de collines boisées, coupée du monde par ses propres murs de pierre ancienne. Les bâtiments portent les marques d'un autre temps ; des statues de pierre aux visages rongés par les années surveillent les couloirs, comme des témoins silencieux. Les fenêtres, étroites et profondes, laissent passer un jour blafard qui s'étire sur le sol et les murs, projetant des ombres indéfinissables, comme autant de fragments de secrets éparpillés.

On m'avait prévenu : cet endroit n'était pas comme les autres. On dit que ceux qui franchissent ses portes n'en ressortent jamais tout à fait indemnes. Que l'université se referme sur vous, comme un labyrinthe sans sortie, où chaque couloir devient une énigme et chaque porte, une nouvelle épreuve.

Dès le premier jour, j'ai senti ce poids invisible. Ce n'était pas seulement l'histoire des lieux, ni l'atmosphère oppressante qui semblait envelopper chaque mur, chaque salle de classe. Non, c'était autre chose, quelque chose de vivant, quelque chose qui m'observait. Je pensais que c'était l'effet d'un nouvel environnement, de nouvelles responsabilités. Et puis je l'ai vue.

Elle s'est assise au fond de l'auditorium, à l'ombre des projecteurs, me fixant de ses yeux sombres et perçants. Elle m'a écouté sans rien dire, le visage impassible, presque sévère, mais ses yeux... Il y avait dans son regard quelque chose d'intrigant, quelque chose d'insondable. Ce n'était pas de la simple curiosité académique. Non, il y avait dans ses yeux quelque chose qui me glaça le sang, comme si elle savait déjà. Comme si elle m'attendait.

Je n'aurais pas dû lui accorder cette attention. Pourtant, sans même m'en rendre compte, elle est devenue une pensée qui refuse de s'effacer, une présence qui s'immisce dans mes journées et qui hante mes nuits. Les questions ont commencé à se multiplier dans mon esprit, et peu importe combien j'essaie d'ignorer son existence, elle est toujours là, au fond de la salle, silencieuse mais omniprésente.

Je n'avais aucune idée, à ce moment-là, que cette rencontre allait marquer le début d'un voyage aux confins du réel et de l'interdit. Je n'aurais jamais pu imaginer tout ce que j'étais sur le point de découvrir. Ni jusqu'où cette quête de vérité allait me mener.

Car ici, dans cette université figée dans le temps, les murs parlent. Et moi, je commence seulement à comprendre le langage des ombres.