Chapitre 24 (spécial) : Sur la piste de Léonard


§Alys§

Les deux dernières semaines sont passées si vite. Aujourd'hui nous repartons vers Cieti-Bourg, et je n'ai pas assez avancé dans mes recherches. Ma seule découverte, je la dois à la femme de l'auberge qui se souvient d'un voyage similaire. Il y'a des années, un groupe de Cieti-Bourg est venu étudier les mythes de sorcellerie allemands. Mais elle n'avait plus le registre des noms, il avait été volé. Je sais donc à présent qu'un ancien élève de Mouvants a initié ce voyage pour faire les mêmes recherches que moi. Mais dans quel but ?

Alors que je prépare mon sac, je jette un oeil nostalgique à la petite étagère du salon : Et si... Non je ne peux pas, ce serait tout bonnement immoral. Bewegung siège toujours parmi les vieux bouquins usés, protégeant le message de Léonard. 

Une main sur mon épaule me fait sursauter. Sam à déjà finit de ranger ses affaires et me tend un bretzel. Je souris en me demandant comment a-t-il pu tenir des semaines sans s'en lasser. Notre professeur de langue apparait dans l'encadrement de la porte.

"- S'il vous plait ne trainez pas, le car est déjà là."

Un étrange sentiment m'envahi alors : j'ai manqué quelque chose. Les histoires de sorcières ne manquaient pas dans ce que j'ai lu, mais aucun détail ne m'a sauté aux yeux. Et ce pour la simple raison que je n'ai pas assez prêté attention au message de Léonard. Il était peut-être venu étudier les sorcières mais lui avait fait le lien entre l'une d'elles et Mouvants, et plus particulièrement avec les chiens errants qui y trainaient. Que n'avais-je pas vu ? Quel lien puis-je faire entre les chiens qui rodent dans la rue Long-Château et Léonard. En rentrant je devrais retrouver sa trace. Il habitait à Mouvants, il doit il y avoir quelque chose sur lui.

Une pensée me traverse : Alek ne m'a pas recontactée depuis que je me suis écartée de son chemin. Je m'apprête à fermer mon sac en me demandant s'il m'en veux de quelque chose, lorsque le professeur revient à la charge dans le salon désormais presque désert.

"- Gardez de quoi faire des photos, nous faisons un détour par Rottweil !"

Rottweil ! C'était évident pourquoi n'y avais-je pas pensé plus tôt ? Je récupère un carnet dans mon sac pour prendre des notes et me tourne vers Sam qui me sourit un peu béatement.

"- Tu me garde une place dans le bus ? Je cherche mon chargeur et j'arrive."

Sam engloutit une poignée de bretzels et tourne les talon en postillonnant.

"- Ja Madam' ! "

Je laisse échapper un petit rire malgré moi. Son accent qui s'était pourtant amélioré est réduit en miettes, au sens propre du terme.

Alors qu'il quitte le salon, je me retrouve seule et sort rapidement mon chargeur qui n'était qu'un prétexte. C'est immoral mais curieusement je n'ai plus de scrupules, seulement une boule dans le ventre. Et si quelqu'un me voyait ? Non je suis seule. Furtive, je saisi la thèse contenant le message de Léonard et la glisse au milieu d'une pile de vêtements. Je ferme mon sac et inspire longtemps. En regardant l'étagère, je remarque que les livres sont un peu bancals. Cela pourrait ne choquer personne, mais je ne vois que ça : le vide laissé par celui que je viens de voler. Alors que je sors du salon les jambes flageolantes, la femme de l'auberge m'alpague. Tout sourire, elle me dit avec son accent allemand.

"- Ma petite, j'ai vu que tu lisais beaucoup ces dernières semaines. Prends donc un de ces livres. Personne ne les ouvre ici."

Je reste figée un instant et retourne dans le salon pour ne pas paraitre louche. Je sors la thèse et retrouve la femme. J'ai les joues en feu, et honte d'avoir un karma aussi étrange.

"- Celui-ci ? je peux ? dis-je

- Bien sûr ma petite ! Je sais qu'il servira !"

L'aubergiste me serre dans ses bras et m'accompagne jusqu'au car. Je la salue en montant et retrouve Sam qui sourit en voyant le livre sous mon bras.

"- Tu n'as pas pu t'en séparer ? se moque-t-il."

Je lève les yeux au ciel et me laisse choir sur le siège à coté de lui. Je sers le livre contre moi laissant mes émotions redescendre à un niveau normal, et me tourne vers Sam.

"- Au lieu de rire de mon dévouement à la physique, donnes-moi des bretzels."

Sam se fend d'un nouveau sourire et me tend son paquet. Je ne sais pas s'il a acheté des souvenir, mais il a en tout cas un stock impressionnant de ces petits gâteaux.

"- Je vais t'appeler comme ça à partir de maintenant : Bretzel."

Sam fait semblant d'avoir une moue vexée avant de s'esclaffer. Le car tremble en démarrant, et je regarde l'auberge s'éloigner. Je ferme les yeux et me laisse sombrer dans le sommeil.

***

Sam me secoue doucement lorsque nous nous arrêtons à Rottweil. La première chose que j'aperçois par la fenêtre est une statue de chien. Le même chien que ceux qui errent dans ma rue : un rottweiler. Je dégaine mon téléphone et le mitraille de photos. Je suis enfin sur la piste de Léonard. L'Allemagne est le siège des légendes de sorcellerie et de créatures, et est aussi le berceau du rottweiler. Voilà la connexion dont j'avais besoin pour avancer. A présent je dois comprendre comment tout ça s'est retrouvé à Mouvants. Je mène à présent seule mon enquête, en secret, et cela est grisant. Je sors du car, le livre à la main. Je dois chercher le plus de détails coïncidents possibles. Je m'approche de la statue et l'effleure par une pulsion inexpliquée. Un picotement électrique me parcours la main et me fait tressaillir. Alors que je regarde avec plus d'attention le rottweiler, il me semble voir passer un étrange reflet dans ses yeux. Malgré moi je touche à nouveau le chien qui se dresse fièrement sur son socle. Et comme des murmures lancinants me parviennent aux oreilles.

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