Chapitre 49

- Et mon oncle? je m'écrie, épouvantée. Et Dallas, Jace et Boyd? Qu'est-ce qu'ils vont faire?

Mon cœur se tait un instant quand je réalise qu'ils sont en ville en plein cyclone tropical, puis repart de plus belle. Je commence à hyperventiler et tout mon sang quitte mon visage quand j'imagine que je pourrais encore perdre quelqu'un. Je ne peux plus... ça ne peut pas m'arriver encore!

- Relax, la môme, lâche Royce d'une voix apaisante qui contraste avec son ton habituel. On est sur une île tropicale, les gens ont l'habitude et y a des safe-rooms partout en ville. Rassure-moi, tu vas pas tomber dans les pommes?

Je secoue faiblement la tête, légèrement rassurée mais m'empare aussitôt de mon téléphone pour contacter Chris et être certaine qu'il va bien. Je presse plusieurs fois le bouton de démarrage mais rien. L'écran reste noir. Plus de batterie. C'est pas vrai! Pourquoi faut-t-il que ce genre de chose m'arrive tout le temps ? 

Je me cogne la tête contre le mur de dépit.

- Mon portable est chargé, annonce Royce contre toute attente. Mais c'est très probable que ton oncle n'ait pas de réseau.

Je n'écoute pas son avertissement et me glisse aussitôt vers lui avec un regard de chien battu -enfin, j'espère- en fixant l'appareil qu'il tient entre ses mains.

- Est-ce que tu peux essayer de l'app...

Je n'ai pas le temps de terminer ma supplique parce que son téléphone se met à vibrer, signalant un appel entrant. Il le tourne dans ma direction avec un air ironique pour que je puisse voir le nom qui s'affiche sur l'écran, avant de répondre.

Un immense soulagement s'abat sur moi en entendant la voix de mon oncle, même atténuée. Je ne parviens pas à comprendre ce qu'il dit mais j'écoute les réponses de Royce.

- Ouais... elle va bien... non... oui, elle a insisté pour les mettre à l'abri, j'ai rien pu faire, se marre-t-il presque. Ok, je te la passe.

Il me tend son portable que je porte aussitôt à mon oreille.

- Chris?

- Lily! Tout va bien pour vous?

- Oui, oui ça va. Et vous? je m'inquiète.

- T'en fais pas pour ça, on s'est barricadés chez un collègue à moi.

- Et...

- Dallas et les autres vont bien, me coupe-t-il en anticipant ma prochaine question. Je viens de les avoir au téléphone. Ils sont dans les safe rooms du refuge pour chevaux de l'île.

Je soupire de soulagement.

- Lily? Écoute-moi. Il y a une radio quelque part dans les étagères, allumez-la pour suivre les directives des autorités. Et fais tout ce que Walters te dira, je ne plaisante pas sur ce coup, d'accord? Je ne veux pas d'accident.

Je déglutis mais répond par l'affirmative.

- Oui.

- Très bien, je vais raccrocher pour ne pas gaspiller votre batterie. Tenez moi au courant si il y a un problème.

Je n'ai pas le temps de relever qu'il a déjà raccroché. Du Chris tout craché. Pour lui, le temps est une valeur précieuse, je songe plus amusée qu'offusquée.

Quand je pivote vers Royce pour lui rendre son portable, il est déjà en train de démarrer une vieille radio à piles qu'il a récupérée au milieu des boîtes de conserves. L'appareil émet d'abord un grésillement qui me fait penser aux émetteurs utilisés pendant la seconde guerre mondiale en Angleterre, puis les commentaires d'un journaliste américain emplissent la pièce. Il est surtout en train de rassurer la population, nous intimant d'éviter les mouvements de panique, et liste en boucle les mesures à prendre que l'on connaît déjà, mais je bois tout de même la moindre de ses paroles alors que Royce s'assied à côté de moi.

Je suis presque détendue quand le pire arrive. L'électricité saute dans un claquement retentissant et toutes les lumières s'éteignent de concert. Je sursaute en laissant échapper un glapissement involontaire et ma peau se recouvre d'une désagréable chair de poule.

Non. Non. Non. Tout mais pas ça!

L'obscurité m'écrase, m'étouffe et glisse ses tentacules noires partout sur moi. Mes mains se mettent à trembler, de même que mon souffle alors que tous mes repères s'effacent. Je n'y vois rien mais je sens mille présences grimpantes, partout autour de moi. Sans réfléchir, je cale ma tête entre mes genoux.

- Royce? murmure quelqu'un d'une voix tremblante.

Je crois que c'est moi qui ai parlé. Des pas se font entendre dans la pièce et je plisse les paupières. Bruit de bric-à-brac. Puis un jet de lumière, faible mais bien présent, éclaire l'espace dans ma direction. Je redresse la tête. C'est Royce qui pointe une lampe torche qu'il vient de récupérer vers moi. Son regard sur ma personne est impénétrable, je renonce à le déchiffrer.

Il s'assied en face de moi sans un mot et me tend la lampe que j'accepte avec un hochement de tête reconnaissant. Je la serre comme un talisman. Le silence s'étend et je ressasse la dernière heure écoulée dans ma tête sans parvenir à croire que tout cela est vraiment arrivé. Le cyclone, le déluge, les chevaux. La culpabilité m'envahit soudain quand je repense à la manière dont j'ai échappé à mon protecteur il y a une demi-heure.

- Désolée de t'avoir donné un coup de pied tout à l'heure, je m'excuse, penaude.

Il hausse les épaules avec un léger tressaillement de lèvres qui m'emplit de chaleur.

- C'est vrai que je ne m'y attendais pas, marmonne-t-il.

- J'ai pris des cours d'autodéfense au lycée.

Je regrette aussitôt ces paroles en remarquant son regard scrutateur. Je ne dois pas en révéler autant. À personne.

Détournant les yeux, je change de sujet.

- C'est censé durer combien de temps? Le cyclone.

- Je suis pas météorologue. Quelques heures ou quelques jours, estime-t-il à ma grande horreur.

- Quelques jours? Mais... ils doivent sûrement en parler aux infos internationales!

Nouveau haussement d'épaules décontracté.

- Possible.

Consternée, je sors par réflexe mon portable pour vérifier que je n'ai pas reçu de messages affolés de Londres, puis me souviens qu'il est déchargé.

Sans un mot, mon colocataire temporaire me tend le sien. J'hésite un instant mais l'idée d'un Nathan affolé me pousse à le prendre. Je le remercie avant de composer le bon numéro sur les touches.

- Oui allô? répond presque aussitôt la voix neutre et professionnelle de mon meilleur ami.

Je suis un instant déstabilisée par son ton impersonnel, puis me souviens qu'il ne sait pas que c'est moi qui l'appelle, il a simplement vu un numéro inconnu.

- Nathan, c'est moi, je précise.

Sa voix change du tout au tout.

- Lily! Bordel! J'étais mort d'inquiétude! Tu vas bien? On a vu les infos... et ta mère est en train de péter un câble! Je suis chez elle avec mon père et on arrivait pas à te joindre! D'ailleurs, avec quoi tu m'appelles, là?

Il a lâché toutes ces phrases décousues sans reprendre sa respiration et je ris légèrement, soulagée de l'entendre.

- Du calme Nate! Laisse moi répondre, je ris. Oui, ça va pour moi, et pour les autres aussi, je crois. On est confinés dans des espèces de pièces secrètes, tu savais qu'il y en avait une dans le salon hanté?

- Non, répond-t-il, surpris, en comprenant sans difficultés de quelle pièce je parle.

- C'est fou. En tout cas, je ne sais pas pour combien de temps on est bloqué ici. Dis à ma mère que ça va, je lâche d'un ton acide tout en étant surprise par son inquiétude. Je ne peux pas te parler longtemps, ce n'est pas mon portable et on doit économiser la batterie.

- Ah. C'est le portable de qui? Avec qui est-ce que tu es confinée? veut-il savoir.

J'hésite un instant et jette un coup d'œil à Royce qui m'observe en silence avec l'air d'analyser la moindre de mes expressions.

- Avec euh... un ami de Chris qui était à la maison à ce moment là.

Je ne sais pas si je mens -un peu- pour ne pas prononcer le mot "employé" devant Royce ou parce que je ne suis pas prête à parler de ce dernier à mon ami.

- Un ami de Chris? s'étonne Nathan. Un ami de quel âge?

Je me tourne vers Royce, gênée et certaine qu'il a entendu la question. D'ailleurs je ne comprend pas pourquoi Nathan l'a posée. C'est plutôt hors de propos.

- Euh... je ne sais pas, qu'est-ce que ça peut faire?

Un silence s'étend pendant presque une minute avant que mon ami ne réponde.

- Rien, c'était juste une question en l'air, laisse tomber. Bon, je vais te laisser et éviter de vider votre batterie. Tiens moi au courant s'il y a des ennuis. Et fais attention a toi.

- Oui, ne t'inquiètes pas.

- À plus ma belle.

- Salut Nate.

Je le laisse raccrocher et rend son téléphone à Royce en essayant d'éviter son regard perçant. Le seul bruit qui nuance le silence dans cette pièce faiblement éclairée est la voix légèrement étouffée du commentateur qui s'échappe de la radio. 

J'essaye de me concentrer sur elle le plus longtemps possible mais mes yeux finissent par retourner vers notre mécanicien. Ses vêtements sont encore mouillés et il doit mourir de froid mais il ne laisse rien paraître. Son jean s'égoutte lentement sur le carrelage et son T-shirt est plaqué sur son torse, révélant le moindre des ses muscles qui serpentent de manière hypnotique sous sa peau. Comment est-ce que j'ai fait pour passer à côté de ce genre de chose? Jusqu'à présent, les hommes ne m'avaient jamais paru aussi attirant. Au mieux je les considérait comme de simples personnes aux corps étranges et sans intérêt, au pire comme des menaces.

Pourtant, je n'arrive pas à détourner mes yeux, qui sont à présent fixés sur son sternum prononcé. Mes doigts me picotent étrangement et j'aimerais pouvoir le toucher. Cette pensée, stupéfiante et légèrement effrayante, surgit de nulle part mais s'implante en moi comme une faim sombre...

- Je rêve où t'es en train de me mater? demande la voix rauque de Royce, m'obligeant à relever les yeux.

Je suis sûre que la semi pénombre ne m'est d'aucune utilité tellement mes joues chauffent. Bon sang! Depuis combien de temps est-ce que je lui reluquais le torse? Sûrement trop longtemps pour que ça paraisse normal. Je n'aurais même pas dû commencer!

Terriblement gênée, je fixe le sol sans rien dire. Autant ne pas m'enfoncer un peu plus en niant l'évidence. Royce se penche alors en avant, les bras appuyés sur ses genoux, et étend ses longues jambes de part et d'autres des miennes. Je suis obligée de relever la tête. Son regard d'ordinaire éteint est animé d'une lueur prédatrice.

- Alors, c'est vraiment ce que t'étais en train de faire? demande-t-il d'une voix qui mêle incrédulité et amusement.

Je détourne les yeux vers la radio et tente de l'ignorer en me mordant les lèvres.

- Détend-toi, c'est pas un crime, raille-t-il finalement.

Je hausse les épaules, toujours mal-à-l'aise. Je sais bien que ce n'est pas un crime. Ce n'est juste pas mon genre, voilà tout.

- Je peux te poser une question? je demande tout à trac, parce que je veux changer de sujet mais aussi pour assouvir la monstrueuse curiosité que je nourris à son égard depuis le jour où j'ai posé les yeux sur lui.

Il se raidit aussitôt et son visage se ferme.

- Qu'est-ce que j'y gagne?

Je me tais, légèrement déboussolée. Je ne vois pas du tout ce que je pourrais lui donner en échange.

- Euh... je ne sais pas. Qu'est-ce que tu voudrais?

- Donnant donnant, une question pour une question, se contente-t-il de répondre.

Je le dévisage avec surprise. Je ne conçois pas qu'il trouve des informations me concernant assez intéressante pour les échanger contre un morceau de puzzle du mystère Walters qui m'obsède. Je hoche la tête sans réfléchir.

- D'accord, vas-y.

Je me tend, m'attendant à des interrogations sur la mort de mon père ou ma famille mais sa question est à des kilomètres.

- C'est qui ce Nathan?

- C'est mon meilleur ami, je répond du tac au tac.

Il n'y a rien de secret là-dedans.

- Ami avec avantages en nature? raille-t-il sans joie.

- Pardon?

Je ne comprend vraiment pas ce qu'il veut dire. Avantages en nature? Qu'est-ce que c'est que ça?

- Est-ce que tu couches avec? précise-t-il froidement à ma grande horreur.

Je suis sûre que mes yeux sont sortis de mes orbites. Je ne serais pas surprise de les voir rouler au sol. Enfin, techniquement, je n'en serai plus capable mais passons.

- Bien sur que non! je m'écrie une fois que j'arrive à raccrocher ma mâchoire. Ce n'est pas comme ça entre nous.

Ses muscles semblent soudainement se détendre et je n'avais même pas remarqué qu'ils étaient contractés.

- Peut-être pas pour toi, lâche-t-il.

- Qu'est-ce que c'est censé vouloir dire?

- Je donnerais ma main droite à couper que ce gars rêve de te sauter.

Je ne réagis presque pas au sobriquet, je commence à y être habituée ici mais ce qu'il insinue est complètement absurde. Nathan et moi nous connaissons depuis le berceau. Je fixe mon interlocuteur les sourcils froncé et adopte une posture défensive, bras croisés sur ma poitrine.

- Comment est-ce que tu peux dire ça? Tu ne l'as même jamais vu!

- Non. Mais je t'ai vue toi.

Je réfléchis au sens de ses paroles alors que plusieurs alarmes se mettent à sonner dans mon cerveau. Il m'a vue moi. D'accord, et en quoi cela peut vouloir dire que Nathan voudrait... Est-ce que cela pourrait vouloir dire que...Non.

Quelque part, je sens que ma cervelle élabore une hypothèse absurde mais je refuse de prendre ce chemin aussi terrifiant qu'attirant en surinterprétant sa réplique.

Royce a l'air de s'amuser de mon indécision, ses yeux joueurs ne quittent pas mon visage et me font penser à ceux d'un faucon analysant sa proie. Est-ce que je suis censée jouer le rôle de cette dernière? Sûrement pas.

- De toute façon, ça ne te regarde pas, je rétorque en redressant le menton sans toutefois parvenir à le regarder bien en face.

Royce se penche un peu plus vers moi, ses jambes emprisonnant toujours les miennes, un air curieux remplaçant son expression morne habituelle.

La question suivante fuse sans préambule et me désarçonne complètement.

- Est-ce que t'es vierge?

Quoi? Mais... il a vraiment osé? Ça ne devrait pas me surprendre tant que cela, finalement. Inutile de préciser la couleur actuelle de mon visage. Je me braque sur le champs.

- Au risque de me répéter, cela ne te regarde pas, j'énonce avec les dernières sources de répondant qu'il me reste.

- Donc tu l'es, lâche-t-il l'air pensif. Ou alors non et tu flippes juste à l'idée que j'en parle à ton oncle.

Cette simple pensée me donne envie de plonger sous terre et d'y rester. Profondément. Longtemps.

- Et pour faire ça, tu serais obligé de lui révéler les questions indiscrètes et totalement inappropriées que tu viens de me poser. Il te virerait sur le champs, je rétorque fière de mon argument.

- Peut-être que ça m'est égal.

Je le fixe, essayant de déterminer s'il bluffe où s'il est vraiment sérieux. Il n'irait jamais voir mon oncle lui parler de ça, ça n'a aucun sens. Si?

- Et qu'est-ce que tu lui dirais? Ta nièce ne m'a rien dit mais je penses qu'il y a une chance qu'elle ne soit plus... enfin, tu vois?

Un sourire discret étire lentement un coin de ses lèvres beaucoup trop proches et j'essaye de toute mes forces de ne pas lorgner dessus. Ses yeux, emplis d'une curiosité que je préférerai finalement voir disparaître, ne lâchent pas mon visage.

- T'es même pas capable de prononcer le mot, c'est sûr que t'es vierge. Alors? insiste-t-il.

- Je pensais que tu étais sûr de toi, je rétorque d'une voix acerbe.

- Ouais, c'est juste pour une confirmation.

- Qu'est-ce que ça peut te faire?

- Simple curiosité mal placée.

- Si je te répond, est-ce que tu vas laisser tomber le sujet?

Il hoche simplement la tête.

- Oui, dis-je alors en fixant le plafond blanc peu éclairé.

Je n'arrive pas à croire que j'ai dit ça à voix haute. Je ne crois pas avoir déjà avoué cette vérité à quelqu'un. Pas même à Nathan, mais lui s'en doute sûrement.

Comme personne ne dit rien et que je ne supporte pas le silence, je suis forcée de baisser les yeux vers Royce.

Son regard est braqué sur moi et je ne parviens pas à le décrypter. Il semble rempli d'interrogations muettes mais il n'est pas question que je réponde à une seule d'entre elles. Je ne comprends pas pourquoi il a cette expression surprise, il avait l'air plutôt sûr de la réponse. En plus, je suis encore jeune, je ne dois pas être la seule dans cette situation, même si dans mon cas, elle risque de s'éterniser encore pour un bon bout de temps.

Mon trouble semble plus l'amuser qu'autre chose et ravive son envie de m'embêter.

- Alors personne n'est jamais allé par ici, souffle-t-il en tapotant de deux doigts l'intérieur de ma cuisse, à la lisière de mon short trop court.

Mon corps réagit brutalement à son toucher. Un frisson violent me traverse alors que mon sang semble se mettre à bouillonner dans mes veines avec la même ardeur que l'eau dans une casserole brûlante. Mais cela ne dure qu'une fraction de seconde parce que ses paroles finissent par pénétrer mon cerveau embrumé.

Sa question, qu'il voulait surement taquine, prend une toute autre signification pour moi. Parce que la réponse est positive et qu'elle me répugne. Le reptile qui a élu domicile dans mon ventre depuis un moment déjà se réveille et je me sens pâlir.

Gênée par le regard perplexe de Royce, je me détourne aussitôt, terrifiée à l'idée de ce qu'il pourrait lire sur les traits de mon visage.

- Arrête de parler de ça. Ça me met mal-à-l'aise.

- J'avais pas remarqué.

- En tout cas, je lance après avoir repris contenance, c'est mon tour de poser une question.

Si je lui avais versé un seau de glaçons sur la tête, je ne pense pas que son expression aurait été différente. Son regard se ferme et il redresse le buste, s'éloignant physiquement de moi sans toutefois retirer ses jambes.

- Vas-y, lâche-t-il d'une voix qui a retrouvé sa froideur habituelle.

Je prend une légère inspiration comme avant un concours d'apnée et lâche la question qui n'a pas quitté mon esprit depuis ce matin.

- Est-ce que tu as tué l'oncle de Matt?


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