🟠...LES RUNTCYRSBROCS
« Les runtcyrsbrocs — disent les textes des érudits quant à cette espèce étrange — (car c'est ainsi qu'on les appelle ; par moquerie, peut-être ; leur nom originel s'est perdu dans les mémoires) sont de petites créatures inoffensives à l'apparence humanoïde, qui évoquent ce qu'on appelle : « jeune humain », de par la taille et les traits, — ceux probablement d'un enfant de neuf ou dix ans. Ils en diffèrent pourtant en cela qu'ils ont les oreilles pointues — longues et roulées, à pavillon orientable, qui souvent retombent dans leurs cheveux. Elle rappellent celles du jeune lapin, quoiqu'elles se trouvent nettement plus courtes, et totalement dépourvues de poils. Au repos elles sont rarement verticales. Le jeune runtcyrsbroc n'a pas de cornes ; ce caractère apparaît vers ses treize ans, mais n'atteint sa maturité qu'autour de la trentaine. Ces cornes font l'objet d'une grande diversité génétique, quoiqu'en général elles restent très petites et portées haut sur le front. Il est parfois difficile de les distinguer, tant elles disparaissent dans la masse des cheveux. Cette créature dispose en sus d'un odorat fortement développé qui lui sert quotidiennement.
Le runtcyrsbroc moyen est d'un caractère souvent doux et sociable, issu d'une société qui valorise la communauté comme seul vecteur de survie. C'est un animal supportant mal la solitude qui préfère la fuite à l'attaque. Il est peu armé pour cette dernière ; son régime est quasi essentiellement frugivore. Il pratique peu les cultures (mis à part quelques cas d'élevage épisodique, notamment des chèvres et de quelques animaux de compagnie) et survit au gré des aléas de la nature — toutefois il en a une excellente connaissance. On s'accorde à dire qu'il préfère un mode de vie semi-nomade ; son caractère paisible et attaché à sa terre compose avec la disponibilité des ressources. Il préfère souvent un déplacement saisonnier, disposant de deux ou trois territoires raisonnablement éloignés où la colonie se rend cycliquement jusqu'à trois fois dans l'année. On trouvera peu de colonies effectuant plus de déplacements annuels.
Le runtcyrsbroc est ovipare, — c'est-à-dire qu'il peut pondre tout le courant de l'année des œufs d'un peu moins de de vingt centimètres de diamètre, presque totalement sphériques. À la ponte les œufs sont enveloppés dans une membrane souple et extrêmement résistante, ce qui les rend légèrement déformables lors du passage du bassin de l'individu pondeur. En apparence, ils évoquent plus une rogue qu'un œuf d'oiseau, puisqu'ils sont vaguement translucides et gélatineux, sans coquille. L'incubation dure sept mois, au bout desquels il est traditionnel d'aider le bébé à percer la poche. Le système de couvaison développé par cette espèce est particulier puisqu'il repose non pas sur le contact parental mais sur la géothermie — en effet la membrane souple enveloppant le vitellus et l'embryon reste solide, mais trop fragile toutefois pour les techniques de couvaison habituelles. Il est donc d'usage de confier l'œuf à une oothèque troglodyte où sont rassemblés ceux de la colonie entière. Ce lieu est gardé par un runtcyrsbroc particulier et formé dès son enfance à la surveillance de l'incubation.
Les œufs de runtcyrsbrocs sont fort prisés, notamment pour leur goût délicat, — mais aussi pour les jolis reflets irisés et laiteux qui courent à leur surface. Certains spécimens peuvent atteindre jusqu'à trois cent rameaux d'or chez le collectionneurs.
On parle chez cette espèce d'« individu pondeur » et d'« individu donneur » concernant la reproduction car ce qui pourrait ressembler à première vue à du dimorphisme sexuel n'est en réalité qu'une certaine diversité génétique. Si les runtcyrsbrocs ont bel et bien un concept de « féminin » et de « masculin », il est toutefois totalement décorrélé de leurs aptitudes reproductives. Un runtcyrsbroc mâle peut donc très bien être pondeur, et inversement. S'enquérir quant à ce genre de statut sera vu comme hautement irrespectueux.
Le runtcyrsbroc peut aisément engendrer une vingtaine d'enfants au cours d'une vie, mais on en compte en moyenne sept par foyer. Les naissances multiples sont rares, mais légèrement plus courantes que chez les humains. Si les « vrais jumeaux » (deux embryons identiques dans un même œuf) restent inhabituels, la ponte de deux œufs au sein d'une même couvée l'est bien moins (et est d'une prévalence d'environ une ponte sur vingt). Ceci permettait d'augmenter les chances d'au moins un de enfants d'atteindre l'âge adulte à l'époque où les runtcyrsbrocs se situaient tout en bas de l'échelle alimentaire ; aujourd'hui que leurs chances de survie se trouvent nettement augmentées, cela donne simplement un nombre assez élevé de jumeaux au sein de la population. On notera que cette espèce est presque uniquement « monogame vraie », c'est-à-dire qu'il n'est pas rare de voir le survivant se laisser mourir au décès de son, ou sa, partenaire.
La longévité du runtcyrsbroc est d'environ quatre-vingt-dix ans, quoique ses nombreux prédateurs (rapaces, principalement, mais aussi grands carnivores) en diminuent légèrement la durée. Il survit dans des habitations troglodytes souvent creusées à flanc de falaise et aménagées à la façon des abeilles maçonnes, ceci lui permettant un abri sûr et difficilement accessible par les airs, où leurs enfants et leurs chèvres sont en sécurité.
L'alimentation des runtcyrsbrocs repose principalement sur la cueillette et la cuisine d'une plante fibreuse et charnue (la verte-d'argent) qu'ils sont les seuls du Petit Peuple à savoir à la fois récolter et accommoder correctement. La préparation évoque une crème d'azuki ou de soja sucrée. C'est un savoir-faire et une véritable symbiose avec cette plante que nombreux leur envient. Toutefois, ils nourrissent principalement leurs enfants avec un « pain de runtcyrsbroc » compact et cireux, riche en vitamines, issu de la fermentation de cette crème.
Enfin, les runtcyrsbrocs communiquent à l'aide d'un langage complexe qui ne trouve ses racines dans aucun dialecte connu, ce qui résulte qu'entendre un runtcyrsbroc parler ne permet qu'une compréhension — par corrélations étymologiques — extrêmement réduite du discours. De même, ces créatures connaissent parfois une difficulté notable pour entendre les langues proches et communes du pays. Néanmoins leur intégration récente parmi les communautés humaines leur impose un bilinguisme quasi parfait — un atout, puisque personne d'autre que les runtcyrsbrocs ne tient à étudier leur langue. »
Je pense que tout est dit. Les runtcyrsbrocs sont franchement sympathiques et pacifiques. Ils vivent traditionnellement dans des habitats troglodytiques, mais depuis quelques années ont fait le pas de se déplacer dans des villages un peu reculés, — où ils sont souvent (quoi qu'inexplicablement) taverniers ou aubergistes, probablement du fait de leur grande amabilité. Ils sont généralement de confiance et d'excellents amis. Au niveau de leurs capacités, ils sont légèrement au-dessus de l'humain au niveau de la maîtrise de la magie, mais ça se joue à très peu — en effet ils y sont plus sensibles de nature, communiquent traditionnellement avec la terre et les plantes, et sont capables de jeter quelques petits sorts basiques (se cantonnant toutefois à allumer un feu ou à quelques hasards étranges. Les runtcyrsbrocs sont souvent considérés comme « bénis des Dieux » car ils semblent parfois disposer d'une chance qui confine au surnaturel. Un pacte avec leur bonté, probablement.)
Autrement, s'ils peuvent « contrôler la magie » quasi instinctivement (et presque sans enseignements, contrairement aux humains) ils peuvent tout à fait augmenter leurs capacités magiques par injection de sang de mage (cf chapitre sur les humains).
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