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Je fronce légèrement les sourcils alors qu'un rayon de soleil vient caresser ma joue, sa chaleur douce mais intrusive me tirant de mon sommeil. Je cligne des yeux, éblouie un instant par la lumière du jour. Une fois pleinement réveillée, je m'assieds en inspirant profondément. Encore un nouveau jour, identique aux précédents, qui s'apprête à commencer.
Je ferme les yeux quelques secondes, essayant de repousser la sensation étrange qui me noue l'estomac. Mon esprit erre encore dans les limbes de la nuit. Ce rêve... ma mère. Une chanson douce, la berceuse qu'elle me chantait enfant. Sa voix s'élevait dans l'air, rassurante, presque irréelle, mais il y avait quelque chose de plus, une mélancolie que je ne comprenais pas. Et puis, à un moment, quelque chose a changé. La chanson s'est interrompue, et j'ai vu une silhouette floue s'imposer devant moi. Un visage, vague, flou. Je ne pouvais pas le distinguer clairement, mais il y avait quelque chose de familier dans ce regard. Un regard qui me semblait étrange et réconfortant à la fois. Il semblait me parler, mais ses mots se perdaient dans une brume. Une sensation étrange m'envahit, comme si cet homme était celui que je cherchais sans savoir qui il était. Il murmurait : Viens me chercher.
Je me secoue doucement la tête, cherchant à me libérer de ce rêve qui m'échappe. Je ne sais pas pourquoi, mais je suis certaine que cet homme était important, pourtant, son visage m'est totalement inconnu.
Je me lève enfin, quittant mon lit d'un bond et me dirigeant vers ma salle de bains. Devant le miroir, je scrute mon reflet. Mon visage, pâle comme la neige, semble marqué par la fatigue, et mes yeux vert émeraude trahissent un poids que je ressens chaque jour. Je pousse un soupir en laissant mes doigts effleurer ma chevelure rousse. Elle a toujours été une source de moquerie au sein de ma famille.
Que n'aurais-je donné pour ressembler aux femmes de mon sang, avec leurs cheveux blonds lumineux et leurs yeux dorés, si gracieux et admirés ? Mais l'univers a choisi un autre chemin pour moi, m'imposant ces traits qui m'ont toujours isolée.
Je finis de me préparer, enfilant ma robe avec soin, et avant de quitter ma chambre, un petit livre attira mon attention, posé sur ma table de chevet. C'était un ancien ouvrage, en cuir usé, que j'avais trouvé dans les archives du palais il y a plusieurs semaines. Je l'ouvris lentement, les pages jaunies par le temps, mais les mots toujours lisibles.
L'Histoire des Quatre Royaumes.
Mes yeux glissèrent sur les mots, sur les lignes qui retracent les origines de notre monde, les divisions entre les quatre royaumes et les légendes d'Orian, l'ancien mage qui les avait créés. Je me perds dans la lecture, un souffle léger sur les pages tandis que mon esprit erre entre les récits.
"Les dragons, les plus anciens et les plus puissants, incarnent la force brute. Ils sont les rois des cieux et des terres, inaccessibles et fiers. Leur feu brûle dans leur cœur et leurs veines. Leur royaume est un lieu de pure domination, dirigé par ceux qui ne connaissent ni faiblesse ni pitié."
Je m'arrête un instant, m'imprégnant de l'image de ces créatures imposantes. Puis je tourne la page.
"Les vampires, eux, sont les plus cruels. Ils vivent dans l'ombre, se nourrissant des plus faibles. Leur royaume, caché dans les ténèbres, est régi par des lois impitoyables. Les femmes vampires, cependant, n'existent pas. Leur espèce ne peut se perpétuer autrement que par l'union entre les plus puissants, et c'est ainsi que les générations se succèdent. Une femme vampire serait vouée à mourir de la morsure de son propre venin. La procréation n'est pas dans leur nature."
Je ferme un instant le livre, le regard perdu. Ce passage m'a toujours troublée. Les femmes vampires, inexistantes. Ce fait, presque absurde pour moi, me faisait toujours me sentir comme une étrangère à ma propre existence.
Je repose le livre et quitte ma chambre pour rejoindre la grande salle où tout le monde se réunit. Aujourd'hui, notre roi a une annonce importante à faire, ce qui ajoute un poids supplémentaire à l'atmosphère habituelle.
En traversant les tables, je sens les regards peser sur moi, acérés et méprisants. Les murmures, eux, ne tardent pas à fuser, chaque mot plus cruel que le précédent.
« Une honte ! »
« Enfant du péché ! »
« Sale femme ! »
Ces insultes me parviennent comme elles le font chaque jour, mais je n'y prête pas attention. J'ai appris à les ignorer, à avancer malgré tout. La tête haute, je continue mon chemin jusqu'à ma chaise, déterminée à ne rien laisser transparaître. Une fois assise, je reprends mon souffle, observant la grandeur solennelle de la salle. L'espace est vaste, les plafonds si hauts qu'ils semblent se perdre dans l'ombre, ornés de lustres imposants dont les bougies projettent une lumière tamisée, presque irréelle. Quatre longues tables s'étendent de part et d'autre, chacune pouvant accueillir près de cinquante personnes, leurs chaises alignées avec une précision presque militaire. Ces tables sont le lieu de rassemblement quotidien des membres influents du palais, où petits déjeuners et dîners rythment la vie du château.
Tout droit, au centre du mur opposé, se trouve une table plus petite, mais bien plus imposante par sa symbolique. Elle est positionnée sur une estrade surélevée, accentuant son importance. Quatre sièges majestueux y sont disposés, chacun destiné aux dirigeants de notre société. Et, en leur centre, trône le roi Jack, son siège plus grand, davantage orné, reflétant sa position au sommet de la hiérarchie.
Quand le roi entra dans la salle, tout le monde se leva en silence pour le saluer. Je suivis le mouvement, mes jambes raides et mon esprit déjà alourdi par ce qu'il allait annoncer. Une fois qu'il nous fit signe de nous asseoir, je repris ma place, mais je n'osais croiser son regard.
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