11
Je suis cet homme dans la pénombre, le cœur battant à tout rompre. Chaque pas me rapproche d'un inconnu qui semble maîtriser une situation qui m'échappe complètement. Pourquoi je le suis ? Je ne sais pas. Peut-être parce que j'ai besoin de réponses, ou parce qu'il m'a déjà prouvé qu'il était bien plus fort et plus rapide que moi. À quoi bon fuir ?
Son allure m'intimide. Il marche avec une confiance presque insolente, et je ne peux m'empêcher de sentir qu'il a un avantage sur moi dans tous les sens du terme. Mes pensées se bousculent. Qui est-il vraiment ? Pourquoi s'intéresse-t-il à moi ? Et, surtout, que va-t-il me faire ?
Je finis par briser le silence oppressant. « Je peux savoir comment tu t'appelles, au moins ? »
Il s'arrête net et tourne légèrement la tête, un sourire en coin éclairant son visage dans l'ombre. Ses yeux bleus me transpercent, déroutants et captivants.
« Elias », répond-il simplement. Sa voix grave et posée semble presque caresser l'air. « Et toi ? »
« Crystal », murmuré-je presque malgré moi, un peu décontenancée par la façon dont il me regarde.
Nous avançons encore quelques minutes avant que quelque chose n'attire mon attention. Devant nous, à quelques mètres, se dresse un portail imposant.
Il ressemble à une mer de brouillard, s'élevant dans l'air comme s'il cherchait à avaler tout ce qui s'approcherait de lui. Ce n'est pas un portail au sens classique du terme, avec des colonnes ou des décorations ; non, c'est une entité vivante. Un cercle parfait de fumée et de lumière mouvante, vibrant à un rythme qui me glace les os. À chaque pulsation, il semble se contracter, émettant une lueur argentée suivie d'un éclat rouge sombre, presque sanguin.
Je sens une peur viscérale monter en moi. Ce n'est pas un simple passage. C'est une arme, une barrière impitoyable.
« Qu'est-ce que t'as, Crystal ? » demande Elias, sa voix calme, mais légèrement agacée.
Je détourne mon regard du portail pour le fixer, les yeux écarquillés. « Je ne peux pas... je risque de mourir ! »
Il arque un sourcil, clairement amusé par ma panique. Mais pour moi, ce n'est pas un jeu.
Je désigne le portail d'un geste tremblant. « Les portails sont mortels pour les vivants. Les seuls qui peuvent les traverser sans l'accord des rois sont les morts, ou plutôt les morts-vivants comme toi. »
Ces portails ne sont pas là pour protéger. Ils sont faits pour détruire. Les rois des différents royaumes les ont créés pour empêcher quiconque de passer sans leur autorisation. Si une personne vivante traverse sans être officiellement reconnue, elle est désintégrée sur-le-champ. Il n'y a pas de seconde chance, pas de rattrapage. On disparaît.
C'est pour ça que les autres royaumes évitent la guerre avec les vampires. Ils sont les seuls à pouvoir ignorer ces règles. Ces portails ne les affectent pas parce qu'ils sont déjà morts. Mais moi, je suis bien vivante. Si je traverse, je meurs.
Elias arque un sourcil, visiblement amusé. « Non, tu ne risques rien. Les portails n'ont aucun effet sur les vampires. »
Je laisse échapper un rire nerveux. « Mais je ne suis pas un vampire ! »
Il croise les bras, son expression mi-sérieuse, mi-moqueuse. « Fais-moi confiance, traverse-le avec moi. »
« Et si je meurs ? »
Son sourire s'élargit, révélant des dents parfaitement blanches, presque trop parfaites. « Eh bien, au moins, tu auras eu l'honneur de rencontrer un vampire superbe avant de mourir. »
Je secoue la tête, désespérée. « Je ne vais pas faire ça. Je ne veux pas mourir. »
Je commence à reculer, prête à tourner les talons, mais il est plus rapide. Avant que je ne puisse esquisser le moindre mouvement, ses mains froides comme la pierre se referment autour de mes bras.
« Non ! » hurlé-je, mais tout bascule.
C'est comme si le sol disparaissait sous mes pieds. Une force écrasante me compresse, m'étouffe. Mon champ de vision devient flou, brouillé par une lumière aveuglante et des ombres dansantes. J'entends un bourdonnement sourd, qui s'intensifie jusqu'à devenir un rugissement assourdissant.
Puis, aussi soudainement que cela a commencé, tout s'arrête.
Je vacille, désorientée. L'air autour de moi est différent, plus lourd, chargé d'une odeur étrange de terre humide et de fer. Je cligne des yeux pour ajuster ma vision.
Nous ne sommes plus là où nous étions.
Le paysage a changé. Une vaste étendue s'ouvre devant moi, baignée dans une lumière crépusculaire. Le ciel est teinté de nuances de pourpre et de gris, et l'horizon est parsemé de montagnes sombres aux sommets effilés. La végétation ici semble différente, comme si elle appartenait à un autre monde, des arbres tordus aux feuilles sombres et des fleurs lumineuses qui pulsent doucement dans l'ombre.
Je reste figée, incapable de croire ce que je vois. Je suis passée. Je suis encore en vie.
« Tu vois ? » dit Elias, sa voix teintée de satisfaction. « On est de l'autre côté. Je suis toujours superbe, et toi toujours en vie. »
Je me retourne vers lui, les yeux écarquillés, incapable de contenir ma colère. « Tu aurais pu me tuer ! »
Il hausse les épaules, imperturbable. « Non. »
« Comment ça, non ? »
Il me regarde, son expression sérieuse. « Parce que je suis l'un des rois du pays des vampires, et je t'ai autorisé à traverser ce portail. »
Je reste bouche bée, incapable de prononcer un mot. Un roi ? Tout cela n'a aucun sens.
« Tu... tu m'as menti ! » finis-je par dire, ma voix tremblante d'indignation.
« Oui », répond-il calmement, comme si cela n'avait aucune importance.
« Pourquoi ? »
« M'aurais-tu suivie si je t'avais dit la vérité ? »
Je ris nerveusement, incrédule. « Non, mais tu m'aurais obligée de toute façon ! »
Son regard se durcit légèrement, et sa voix se fait plus grave. « Si je t'avais forcée à me suivre, ton peuple aurait découvert la vérité. Cela aurait signifié la guerre entre nos royaumes. Et, crois-moi, tu ne veux pas que mon frère sache qui tu es. »
Je fronce les sourcils, confuse. « Pourquoi ? »
Il détourne légèrement les yeux avant de répondre. « Parce qu'il ferait de toi une bête de foire, un trophée à exhiber. Et les autres royaumes demanderaient sûrement ton exécution. »
Je sens mon cœur se serrer. Une bête de foire ? Une condamnation à mort ? Tout cela pour un secret que je ne comprends même pas encore pleinement ?
« Tu veux dire que tu ne vas pas me livrer ? »
Elias me regarde avec intensité, et pour la première fois, je perçois une lueur de sincérité dans ses yeux. « Non. Je ne sais pas pourquoi, mais j'ai l'impression que tu dois rester en vie. »
Je reste plantée là, le regard fixé sur lui, encore sous le choc de tout ce que je viens d'apprendre.
Il finit par rompre le silence en esquissant un sourire. « Maintenant, suis-moi. Je vais te présenter notre spécialité culinaire... »
Je fronce les sourcils, suspicieuse. « Si c'est une blague sur le sang, je ne veux même pas en entendre parler. »
Il éclate de rire, un son si inattendu qu'il me déstabilise presque. Mais je ne suis pas prête à baisser ma garde.
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