Prologue
Ecosse, Jardins de la demeure impériale-
La pluie tombait sur le paysage. Elle créait une musique sinistre en s'écrasant sur les parapluies noirs qui couvraient le jardin. Tous semblaient se serrer autour d'un espace: un trou dans la terre qui ne demandait qu'à être comblé. Sous un arbre deux femmes, toutes deux de noir vêtue regardaient la scène avec intérêt.
- Regardez ma chère, le voilà qui arrive.
Les deux femmes tendirent le cou pour apercevoir un ouvrage de chêne finement sculpté qui traversait la foule en silence. Lentement les porteurs laissèrent la boite ouvragée dans le trou et s'éloignèrent. Dans un silence seul troublé par la pluie qui battait sur les parapluies une femme vêtue d'une longue robe noire et d'un voile s'avança vers le fossé.
Sans rien dire elle sortit un poignard des plis de sa robe, et elle laissa la lame lui entailler profondément la peau de sa main. Un long filet de sang jaillit alors de cette source au sang si pur pour venir rencontrer le bois du cercueil: c'était là le rituel du dernier repas. Le défunt recevait alors de son aimée une gerbe de sang pour que sa soif ne soit jamais réveillée et qu'il puisse à jamais reposer en paix.
Les porteurs commencèrent à ensevelir le corps tandis que les prestigieux invités s'éloignaient un à un dans le bruissement de la soie de leurs vêtements et de leurs souliers de satin dans la boue du parc Impérial.
- Regardez ma chère, tout le monde part. Allons-y. fit une des femmes sous l'arbre.
- Non. Regardez.
La vampiresse tendit le regards vers la femme à la main ensanglantée. Elle était immobile, seul près du fossé. Pourtant la vampiresse sentait une odeur rare et délicate à travers la pluie qui provenait de cette silhouette noire.
- Des larmes ?
- Oui ma chère. Des larmes. Je peux vous l'assurez: voir une Princesse de Sang Pur pleurer en public est un spectacle rare et d'une extrême valeur.
La Vampiresse accueillit ces renseignements dans un profond silence. Il était vrai que jamais de mémoire de vampire elle n'avait vu un Noble de Sang Pur verser des larmes. Et même si elle ne pouvait voir les gouttes salés couler sur les joues à cause du voile noire de la Sang Pur, elle pouvait les sentir. Sa voisine regardait toujours la scène avec un intérêt presque obscène, comme fascinée de voir ces larmes.
- Je me demande bien comment le Prince a pu en arriver à se planter une dague de sureau dans le cur.
- Surtout je ne comprend pas comment il a pu laisser son âme sur seule, à quelques semaines du mariage seulement.
- L'Empereur doit être accablé par la douleur. Je sais ce que cela fait de perdre son fils unique, croyez moi.
La vampiresse ne répondit pas. Fixant toujours la silhouette de la princesse parmi les quelques personnes restantes. Puis elle ajouta avec un ton plein d'empathie que sa compagne ne lui connaissait pas:
- Celle qui doit vraiment souffrir à cet instant c'est la Princesse de la maison Tréïde. Je ne sait pas comment elle peut encore tenir debout. Je sais que moi à sa place je me serait enfoncé un pieux dans le cur pour mourir avec mon aimé.
- Elle ne tiens pas tant le coup que ça vous savez ma chère !
La vampiresse tourna alors brusquement la tête vers la Comtesse de la maison Racrohk qui dissimulait un sourire mesquin sous son éventail.
- Figurez-vous, ma chère amie, que la Princesse a tué sa demoiselle d'honneur pas plus tard qu'hier soir. Alors que celle-ci était à son service depuis des années ! Pour ne pas dire des siècles !
- Allons ! Que me racontez-vous là ?!
- Je vous assure. Il paraît que cette donzelle avait dit du mal sur notre défunt Prince de la maison Berhart.
- Quelle imprudence.
- Je ne vous le fait pas dire Comtesse de la Pierre.
La Comtesse observa le cimetière du palais des Berharts. Il n'y avait désormais plus personne à part la Princesse. Et même si la Princesse n'avait pas le visage tourné vers elles, la vampiresse sentit son regard sur elles. Un frisson lui parcourut l'échine, prenant alors conscience du danger qu'elles couraient si elles restaient plus longtemps ici.
- Venez, Adélaïde. Notre présence ici est devenue indécente.
Les deux Comtesses s'éloignèrent en silence sous l'attention de la vampiresse de Sang Pur. Il faudra que je pense à tuer cette Comtesse de la Pierre un jour, pensa-t-elle. Cette femme là lui semblait un peu trop sûre de sa personne. Mais là n'était pas le sujet. Une fois totalement seule la Princesse donna libre court à ses larmes silencieuses. Elle pleurait pour son aimé, mais quelque part elle pleurait aussi pour son avenir, qui était devenu plus sombre que jamais.
Pieter... Pourquoi m'as-tu laissé ?
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