8 ; the chameleon
what are we made of but hunger and rage ?
Baelor savait quand on l'observait, il avait passé une grande partie de sa vie à être épié à la cour. Il pouvait aisément sentir l'arrière de sa nuque brûlée, ses poils s'hérisser sur tout son corps. En alerte.
Dans cette crevasse, quelque chose d'autre vivait et avait ses yeux rivés sur lui. La nuit commençait à tomber, les quelques filées de lumière qui éclairaient le chemin exiguë n'étaient plus suffisant. Il s'était fixé comme objectif de voler l'une des barques une fois la nuit tombée s'il n'avait pas mis la main sur ce mystère. Le temps lui échappait, à mesure qu'il sentait des gouttes de sueurs roulaient dans son dos.
Le jeune prince avait forcé Criston Cole à remonter à bord du bateau, après qu'il ait trouvé un nid et prit l'un des œufs. Le chevalier avait tenté de résonner Baelor sur cette poursuite de quelque chose que ni l'un ni l'autre n'avait clairement aperçu.
Mais on ne pouvait pas arrêter Baelor.
C'était par bref instant qu'il pouvait entrevoir des mouvements dans sa vision périphérique, rien que le vent ou l'obscurité ne pourraient faire croire à ses yeux. Quelque chose bougeait avec lui sous terre, quelque chose qui ne pouvait être clairement vu.
Baelor faisait tourner sa courte épée entre ses doigts, il ne pouvait nier l'adrénaline qui l'éprenait, à la fois proie et chasseur. C'était comme déjà sentir des crocs autour de sa gorge et les siens autour de sa chair.
Le soleil était à la limite de la mer, au loin, et éclairait alors toute la partie inférieure de la crevasse d'un filée orangé de lumière. Baelor était baigné par les derniers instants de clarté. Il arrêta d'avancer, fixa solidement ses pieds. Il laissa lentement glisser son œil gauche à la limite de sa vision.
Il le vit, accroché au mur, prenant toute la surface. Il ne pourrait le décrire à la perfection, mais il pouvait le voir.
Ses écailles étaient grisâtres, légèrement plus foncée que la pierre. Il devait être aussi long que Sunfyre, mais pas aussi imposant. Si deux grandes ailes n'étaient pas repliées sur ses flancs, on aurait pu croire à un immense lézard.
Baelor comprit finalement, alors qu'il penchait plus encore la tête vers la chose, et qu'il la vit disparaître de son regard, sans pourtant qu'elle n'ait bougé.
Le dragon était toujours là, contre la pierre, et alors Baelor se tourna pour faire face au vide qui n'en était pas. Comme un caméléon, le dragon était sauvage, sans aucun doute. Provenant d'un nid habitué à se camoufler dans le tréfonds des crevasses, à l'abri des regards.
Mais Baelor était là, et l'épiait maintenant autant qu'il l'avait fait tout le long de cette journée. L'excitation le trahit dans un sourire en entrevoyant la bête durant un instant.
Maintenant qu'il l'avait vu, Baelor n'était plus aveugle à tout ce qu'il avait perçu. Le grincement sur les parois, les brèves bourrasques de vent derrière lui, la présence d'autre chose. D'autre chose qui le pourchassait autant qu'il le faisait.
Il fit un pas de plus, la main resserrée autour de son épée. Il avait eu des dizaines de discussions avec Aemond sur le lien avec un dragon depuis qu'il montait Vhagar. Des tonnes de morale sur l'importance d'un mutuel respect. Que le lien entre un dragon ne doive pas être forcé, il ne doit pas être question de soumission.
Il balayait déjà toutes ses belles paroles depuis des années mais il les piétina entièrement à ce moment-là. Baelor approcha un peu plus, forçant le dragon à se reconnaître vu, à sortir de son camouflage, à se rendre.
S'il y avait mutualité, c'était dans leur volonté de dominer l'autre. Une mutuelle violence, une mutuelle poursuite. Une mutuelle faim.
« Le dragon est le reflet de soi », avait dit son père, et avait hanté Baelor après l'avènement de son œuf. Mais il plongea dans cette pensée.
Il leva sa main armée vers la bête accrochée au mur, toujours invisible à un œil inattentif. Baelor savait qu'il serait tué si elle ne se soumettait pas. Mais elle le ferait.
Elle l'avait déjà fait en le poursuivant toute cette journée, cherchant à être vue, cherchant à être tuée ou à être vaincue.
Le dragon se défit de son camouflage, apparaissant entièrement à l'œil avide de Baelor. Ses serres se détachèrent du mur, lentement et il vint à sa rencontre, juste devant lui. La tête du dragon à quelques centimètres de la pointe de son épée.
Baelor la laissa tombée pour approcher. Lorsque sa main rentra en contact avec la surface écaillée du dragon, le prince Targaryen sourit de plus bel. La touche n'était pas délicate, elle était possessive, ses doigts agrippaient la chose, incapable de penser à la laisser partir.
Baelor laissa glisser ses ongles avides sur les écailles, les sentant trembler sous sa main à mesure qu'il contournait la tête du dragon. Il n'y avait aucune échelle ou selle pour gravir la bête. Il se hissa alors, de toutes ses forces, s'aidant des ailes du dragon.
Une fois assis, Baelor s'agrippa à son dragon, partout là où des écailles le lui permettaient. Il frappa le flanc droit de son pied et finalement, il prit son envol. Traversant en quelques secondes les centaines de mètres qui les séparaient de l'extérieur de la crevasse.
Découvrant le monde d'une autre manière, découvrant finalement le monde comme il aurait dû le faire depuis toujours, à la faible lumière de la lune, Baelor laissait la bête découvrir la mer et le ciel autant que lui, délivré du poids de ne pas être vu, de ne pas être choisi.
S'il pouvait enfuir ses mains dans la chair du dragon pour sentir la chaleur qui bouillonnait sous lui, Baelor le ferait. Pour sentir le feu de son dragon. Sentir sa propre puissance vibrer sous sa paume.
Il approchait lentement les nuages, et ne s'était jamais senti aussi puissant de toute sa vie. De cette hauteur, il apercevait aisément les côtes, et l'architecture de sa capitale qui brillait sous la lumière de la lune.
Cela dura une heure, à voler dans le ciel, à laissant lentement couler sur lui hors de lui la première source de sa rage.
Baelor détaillait la baie de la Néra qui s'étendait sous ses yeux, jusqu'à ce qu'il ne remarque un bateau, naviguant en direction de la capitale, en pleine nuit. Il laissa court à sa plus grande paranoïa et se pencha sur son dragon pour le faire piquer en direction de la capitale.
La vitesse qu'il pouvait atteindre par son manque de largeur le prit de court, Baelor contournât les tourelles de surveillance de la capitale, et atterrit sur le flanc de montagne où lui et Cole venaient s'entraîner.
Le haut valyrien ne lui serait d'aucune utilité avec un dragon sauvage, Baelor lui indique de rester cacher ici et la bête se coucha aussi tôt, attendant le retour de son maître. Le prince traversa le tunnel secret et très vite les couloirs du Donjon Rouge pour rejoindre le port.
Mais sa mère se tenait à la porte du château, ayant sûrement été avertie par les veilleurs d'un bateau en direction de la ville et rejoignant le port. Alicent fut alertée par les pas précipités derrière elle et le tout premier regard qu'elle lui lança fut empli de déception, alors même qu'elle ignorait ses agissements. Et le dragon qui l'attendait aux abords de la ville ne pourrait sûrement pas effacé cela.
- Où étais-tu ? Ne me mens pas, s'écria Alicent, détaillant la crasse qui recouvrait le visage de Baelor.
- Cela n'a pas d'importance, lança-t-il, aussi froid qu'il put.
Mais sa nonchalance ne réussirait pas à atténuer la colère d'Alicent qui rebondit aussitôt :
- Tu es resté à Dragonstone, pas vrai ? Je savais que je n'aurais jamais dû te laisser accompagner Darla, imagine si tu avais été vu ! Quelle idée ahurie t'a poussé à faire ça, Baelor ?
Sa mâchoire se resserra sous la crainte de prononcer des paroles trop virulentes à sa propre mère, il prit sur lui, lentement.
- J'ai simplement été prendre ce qui me revenait de droit.
Alicent connaissait bien trop ses paroles, cette étincelle de fierté dans les yeux de son fils. Elle fut ramenée brutalement en arrière, à Driftmark, tenant son fils éborgné contre elle.
- Tu as volé un dragon ? murmura-t-elle, avec effroi en imaginant les conséquences que cela pouvait avoir.
Alicent laissa son regard balancé entre son fils et le port lointain. Elle ne pouvait voir le bateau mais elle ne pouvait imaginer que rétribution allait être demandé pour le vol de son fils. Baelor répondit pourtant, d'un ton calme, mais froid :
- On ne peut voler de dragon. J'ai volé un œuf, ceci dit, corrigea-t-il avec un sourire, et trouvé un dragon.
À quel autre prix cette fois ci ? Quelle dette allait devoir être payé pour rétribuer l'appétit constant de pouvoir qu'elle avait mis au monde ?
Alicent ne dit plus rien et monta avec son fils dans la diligence vers le port.
Alicent alla directement vers le lord qu'elle savait représentant la princesse, en ordonnant à son fils de se tenir hors de la discussion. Baelor resta statique, n'ayant aucune envie de diminuer l'autorité de sa mère devant un des hommes de Rhaenyra.
Ses veines pulsaient de tentation et de paranoïa. Il essayait d'étudier les réactions de sa mère et de l'homme et leurs mimiques. Lui semblait perturbé, Alicent médusée.
Baelor vit la main droite de sa mère cherchée le confort du symbole des Sept autour de son cou, avant de porter cette même main à sa bouche. Il regardait partout autour d'eux, aucune trace de Darla.
Pourquoi était-il là et pas Darla ? Où était sa femme ?
Un rugissement de dragon retenti aux abords de la ville, aigu et strident, perçant les oreilles de beaucoup. Il ne tenu plus longtemps et fondit sur l'homme.
- Où est Darla ? cracha Baelor, en s'approchant dangereusement.
Il était encore un adolescent, et sans l'avoir vu combattre, il ne paraissait encore qu'un parmi d'autres. Un haussement de sourcil négligeant fut entrepris par le Lord, surpris de l'attitude bestiale du prince. Il ne lui répondit pas, retournant son attention à sa mère avec une dernière parole :
- Je ne doute pas que vous pensiez que Lady Lannister soit innocente dans ce terrible crime, mais il y a un coupable, il marqua une pause, un regard insistant sur Baelor, et le tribunal du roi aura le dernier mot à ce propos.
Après cela, le lord fit son chemin vers une diligence préparée, escorté par des gardes inconnus, par une force ennemie. Baelor garda quelques instants le silence, bousculé par l'incompréhension et par sa colère.
- Où est-elle ? De quel crime est-ce que cet abruti parlait ? Et pourquoi requérir au tribunal royal ? s'exclamait violemment le prince, attirant l'attention des âmes qui veillaient la nuit à Port-Réal
- Calme-toi, Baelor.
- Réponds-moi alors, répliqua-t-il aussi virulent.
Sa mère lui fit comprendre qu'ils ne pouvaient poursuivre cette discussion en public. Une fois la porte de leur diligence close, Baelor réitéra sa demande. Sa jambe tremblait sans arrêt et il avait l'impression que sa mâchoire allait céder sous sa propre pression.
- Aegon, le fils de de Rhaenyra et Daemon, a été pris de violentes crises respiratoires, de gonflements, et d'une fièvre terrible, explique-t-elle, triturant avec violence ses ongles déjà rouges et suintant.
L'esprit de Baelor fut vif et il s'indigna aussitôt :
- Il l'accuse de l'avoir empoisonné ?
Le dégoût et le mépris planaient sur son visage, Rhaenyra et son chien de mari trouveraient tout pour mettre le tort sur leur famille. Même sur Darla, alors même qu'elle l'avait déjà vu s'excuser auprès d'un garde qui l'avait bousculé.
Il rirait de l'idiotie de l'accusation si l'idée que sa femme était coincée seule à Dragonstone ne le hantait pas. Il ne pouvait qu'imaginer les sales pates de Daemon ou des bâtards de Rhaenyra prêts d'elles. Qu'elle ait peur, pas comme avec lui, mais qu'elle ait vraiment peur, terrorisée. Si sa mère n'était pas là, Baelor aurait déjà rejoint son dragon et Dragonstone pour la réclamer.
Cela peut être n'importe quoi, une allergie, une crise qui se déclenche, exprima-t-il en resserrant de plus en plus ses poings que l'entaille sur ses paumes ne le calme, en vain. Tout exclut ma femme de ces stupides accusations.
- Elle aurait passé la journée à le tenir dans ses bras, tout les pousse à croire que-
- Darla n'est pas une meurtrière, dit-il, vindicatif, et tu le sais très bien.
- Évidemment...Mais notre avis n'aura aucune valeur, Baelor. Elle sera entendue seule demain, comme Rhaenyra, devant le roi.
Alicent ne pouvait cesser de se torturer à imaginer l'état actuel de Darla, accusée d'avoir attenté à la vie d'un si jeune enfant. Et Alicent se torturait d'autant plus à imaginer les évènements à venir. Tout Driftmark se répétait, encore.
Qu'allaient-ils perdre cette fois-ci ?
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je poste en avance parce que mon amie m'a réclamé un chapitre ! il est bien plus court que d'habitude mais c'est pour équilibrer avec un long chapitre qui arrive !
j'espère que l'histoire vous plait jusque là et n'hésitez pas à me donner votre avis en commentaire !
merci d'avoir lu, à très vite !!
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