Сђลρأŧг๛1| Les autres
N/A
Rose Noire est ma première histoire. J'espère qu'elle vous plaira.
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01
L E S A U T R E S
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Cela n'était pas arrivé depuis des mois. Pourtant, d'une manière intense, Zoey avait revécu ce moment.
C'était comme si, après tout ce temps, les vestiges du passé ne l'avaient jamais quittée.
C'était le cas. Ses souvenirs étaient intacts.
Elle pouvait encore sentir le goût métallique du sang sur ses lèvres et la peur brûlant vicieusement au creux de son ventre. La nuit la plus éprouvante de son existence. Celle qui la chamboula au point qu'elle en trahisse son clan.
Et ce, de la façon la plus inavouable.
Elle avait encore fait ce cauchemar.
Au point culminant, le son criard d'un sifflement bourdonnant à ses oreilles l'avait fait sortir de sa torpeur et elle s'était réveillée en sursaut, le corps moite de sueur et les sens aux aguets. Les souvenirs douloureux affluaient, faisant émerger diverses émotions toutes plus intenses les unes que les autres.
En prenant conscience de son environnement calme et sans danger, elle avait lentement relâché la pression de ses doigts sur son matelas, dans lequel ses ongles s'étaient enfoncés. Puis son pouls avait fini par ralentir pour reprendre un rythme relativement normal.
Elle se trouvait dans la chambre de son hôtel.
Assise sur son drap, elle observa la pièce. Il y faisait presque nuit noire et il y régnait un calme de mort.
Zoey tendit le bras vers la commode adjacente à son lit et alluma l'écran de son portable.
A peine deux heures trente du matin.
— Fait chier, grogna-t'elle en s'affalant sur son oreiller.
Selon ses plans, elle aurait pu dormir au moins un demi-heure de plus.
Mais elle était plus qu'éveillée et au vu de la montée de stress qu'elle venait de subir, autant abandonner tout de suite l'espoir de fermer l'oeil à nouveau.
Elle se glissa hors du lit.
Dans la salle de bain, elle passa de l'eau sur son visage avant d'enfiler rapidement la pile de vêtements posés près du lavabo.
Elle rassembla le reste de ses affaires en quelques minutes puis se dirigea vers le seul grand placard de la chambre pour y extirper sa valise déjà pleine à craquer.
Lorsqu'elle la referma pour la dernière fois et que le bruit du zip de la fermeture retentit, un calme nouveau recouvrit la pièce.
Zoey laissa échapper un soupir de soulagement... avant de se rendre subitement compte de la tournure qu'était sur le point de prendre les évènements.
Elle s'assit sur la moquette du sol, contre le rebord de son lit. Mille pensées inondèrent sa tête.
Cela faisait maintenant plus d'un an qu'Estelle l'avait emmenée loin de chez elle. Ou plutôt, qu'elle l'avait aidé à oublier.
Ici, elle menait une vie tranquille et ne faisait aucune vague. Les résultats de ses examens universitaires étaient corrects. Et elle avait même sympathisé avec quelques personnes.
Des personnes dramatiquement normales.
Tout allait bien.
Pourtant demain, elle serait de retour à Tokyo.
Elle rentrait chez elle. Mais était loin d'être envahie par ce sentiment de joie immense, celui que chacun connait lors d'un retour vers sa patrie.
Elle sentait les muscles de ses abdominaux se contracter doucement. Ses pensées de la veille, dissoutes par le biais du sommeil, lui revinrent naturellement en mémoire. Elle serra les poings, anxieuse.
Elle ne pensait qu'à une chose. Les autres.
Tous ces gens qu'elle avait laissés derrière elle, sans un mot. Elle n'avait pas eu le courage d'affronter leurs réactions. Ni même le regard de Corinna et les larmes de Bridget.
Zoey avait simplement fui, du jour au lendemain, et elle savait qu'on ne lui pardonnerait pas son acte... de lâcheté.
Pourtant, elle était convaincue que lorsqu'elle décida de tout quitter, ce fut la plus sage décision qu'elle eut prise en une vie.
Elle devait partir. Ce jour-là, elle s'était sentie trahie et bafouée. Mais par-dessus tout, elle avait trop peur qu'on découvre ce qu'elle avait fait.
Ces dernières années lui avaient coûté beaucoup.
Empreinte d'un sentiment d'amertume, elle songea à ce stress écrasant et continu à en perdre le sommeil, au mensonge à n'importe quel prix et à cette angoisse, celle qui l'avait toujours consumée. Assister à la mort d'un être cher, impuissante.
Mais plus que tout... elles lui avaient pris l'homme qu'elle aimait.
Elle se souvenait encore de ses derniers mots envers elle. Ses mots si durs et brutaux.
L'amertume qu'elle ressentit s'envola pendant un instant et son cœur se serra. Un an après, ce souvenir la faisait toujours souffrir.
C'est vrai, cette vie elle n'en voulait pas et n'en avait jamais voulu. Elle n'avait pas eu le choix. Toutes ces souffrances lui avaient été imposées. Eliott les lui avait imposées.
Eliott, songea-t-elle en fixant le sol.
Elle visualisait parfaitement ses traits.
Elle sentait déjà le regard pénétrant et plein de mépris qu'il poserait sur elle le jour où elle réapparaîtrait. Il avait toujours été intransigeant, cela même quand elle perdait pied.
Zoey enfouie les mains dans ses cheveux, tentant de se calmer.
Il fallait qu'elle s'aère un peu la tête. Elle se leva sans un bruit pour rejoindre le balcon de sa chambre.
L'air était frais et s'insinuait partout sous ses vêtements, la faisant frissonner. De légères brises de vent balayaient les quelques mèches rougeâtres tombant devant ses yeux.
Elle croisa les bras tout en les appuyant sur la balustrade, puis observa de ses yeux auburn la ville endormie.
Washington semblait être le reflet du ciel. La ville plongée dans le noir était parsemée d'une multitude de lumières étincelantes.
— Ma vie a tellement changé, lâcha-t-elle dans le silence de la nuit, sa propre voix comme seule confidente.
Elle avait convaincu Estelle de l'emmener avec elle lors de sa tournée promotionnelle. Si cette dernière était plusieurs fois repartie à Tokyo sur la demande d'Eliott, Zoey avait fait le choix de ne jamais rentrer.
Elle s'était même appliquée à éviter tout contact avec son ancienne équipe.
Ce n'était pas de la méchanceté. Ils n'auraient simplement pas pu comprendre car elle n'aurait su quoi leur dire. Ils auraient tenter de la convaincre de revenir, évoquant son devoir, rappelant l'importance de ses pouvoirs, parlant de son instinct... En vain.
Il lui avait donc semblé plus sage d'éviter toute confrontation.
Quoi qu'il en soit, tout ça c'était terminé pour elle. Cela faisait plus d'un an qu'elle ne s'était pas transformée et elle ne le ferait plus jamais.
Les seules personnes de son ancienne vie avec lesquelles elle avait gardé contact étaient ses parents. Estelle mise à part, c'était même les seuls qu'elle avait pris la peine d'informer de sa décision. Elle avait prétendu vouloir continuer ses études universitaires à l'étranger pour accroitre sa connaissance du monde et des langues. Et après des semaines de négociation, elle avait pu avoir leur accord.
La laisser partir ayant été un déchirement pour eux, elle les appelait régulièrement depuis son départ. A vrai dire, ils lui manquaient énormément.
Néanmoins, son excuse n'était pas totalement fausse. Elle avait pu suivre des cours à l'université pendant environs sept mois, entre les concerts et les défilés d'Estelle. Elle s'était même découvert un intérêt particulier pour la langue anglaise. Estelle, parfaitement bilingue, se libérait régulièrement pour l'encadrer.
Ce temps passé ensemble lui avait permis de découvrir celle qu'on surnommait " la louve solitaire ".
Même si elle s'était toujours sentie profondément liée à elle, Zoey n'avait jamais vraiment bien connu Estelle.
Elle avait toujours été exigeante envers les autres comme avec elle-même.
La perfection, c'était sa ligne directrice.
Mis à part sa beauté dérangeante, c'est sûrement ce qui la rendait si populaire et admirée à travers les continents.
Zoey savait maintenant que derrière son attitude autoritaire et stricte se cachait une étrange bienveillance. Elle avait également décelé chez elle une grande empathie.
D'ailleurs, depuis leur arrivée, jamais Estelle n'avait tenté de la raisonner concernant sa décision. De nombreuses nuits, elle l'avait laissée pleurer de rage et de tristesse tout contre elle, sans dire un mot, laissant Zoey lui partager ses lourds secrets, la gorge serrée. Elle avait compris que les mots étaient inutiles pour soigner certaines douleurs.
Zoey sursauta brusquement et oublia toute ses pensées. On venait de frapper.
Elle fit volte-face pour fixer la porte qui s'ouvrait. Dans l'entrebâillement, elle vit apparaitre une familière et longue chevelure de la couleur de l'améthyste.
— Tu as fini de faire tes bagages ? On part dans quinze minutes.
A chaque fois qu'elle la voyait, elle ne pouvait que constater sa beauté époustouflante. Estelle et son doux parfum de jasmin. Tout en elle était synonyme de grâce. De ses battements de cils à sa démarche animale. Elle était imposante, comme une louve traversant le centre d'un troupeau de bêtes.
— Oui, je suis prête, déclara Zoey après une très longue inspiration.
Estelle avait un verre d'alcool à la main - un Mojito, lui sembla-t'il. Une paille violette flottait à l'intérieur.
— Tu bois de si bonne heure ? la questionna-t'elle, un sourcil levé.
Estelle la fixa avec insistance.
— Et toi, qu'est ce qui te rend si inquiète ? dit-elle en s'asseyant sur le lit avec sa grâce habituelle.
— Qu'est-ce que tu racontes, mentit maladroitement Zoey, troublée par sa question. Ça va.
— Oui bien-sûr, dit-elle sur le ton de l'ennui. D'où ta mine renfrognée de dépressive. Tu mens mal, Zoey.
Estelle sirota tranquillement son cocktail, sondant le visage de son amie.
Gênée, Zoey garda le silence quelques secondes avant de finalement demander:
— Est-ce que des fois... ils te parlent de moi ?
— Zoey... commença Estelle.
— Réponds simplement, s'il te plait, la coupa Zoey avec empressement.
— La réponse est évidente, non ? lui répondit-elle, sévèrement. Tu es partie sans prévenir et tu n'as jamais donné de nouvelles.
Zoey connaissait assez Estelle pour savoir que ce n'était pas un reproche, mais rien d'autre que l'exposition d'un fait.
— Est-ce qu'ils m'en veulent ?
Estelle déposa son verre sur la table basse. Après un moment, elle lui dit calmement:
— Tu n'as jamais cherché à savoir ce qui se passait là-bas. Alors pourquoi maintenant ?
Zoey se mit à gratter son épaule gauche nerveusement.
— Je ne sais pas trop, déclara-t'elle en s'installant elle aussi sur le lit. Ont-ils même l'envie de me voir après tout ce temps...
Estelle poussa un soupir.
— Et toi, qu'est-ce que tu veux ?
— Qu'ils m'accueillent à bras ouvert, j'imagine ! lança-t-elle sur un ton sarcastique.
— Je te le demande sérieusement. Qu'est-ce que tu veux ? insista plus fermement Estelle, faisant tomber le sourire de Zoey.
Prise de cours, elle ne lui laissa qu'un long silence en guise de réponse.
Zoey répéta cette question dans sa tête. Elle fronça les sourcils et son regard se perdit dans le vide. Elle se remémora les évènements passés, lui revenant comme des flashbacks.
D'abord Bridget, riante, un sourire radieux sur le visage, lui faisant des confidences.
Puis elle-même, courant à pleine vitesse, ses poumons se contractant sous un besoin vital d'air, tentant d'atteindre Corinna - son corps couvert de plaies et le visage déformé par la peur.
Marc et la lueur froide dans ses yeux.
Et elle vit Dren... se rapprochant dangereusement d'elle, son regard de feu, son sourire narquois...
Sa respiration se coupa net.
— Je voudrais qu'ils me pardonnent.
D'abord étonnée par sa réponse, Estelle resta muette. Mais elle devina rapidement ce qui se passait dans la tête de son amie. Etant elle-même dans la confidence, elle savait plus que quiconque ce qui la rongeait.
— Mais je ne veux pas qu'ils attendent de moi que je fasse de nouveau partie du projet. Je ne veux plus jamais avoir à me battre.
Estelle posa sur elle un regard perçant.
— Que tu le veuilles ou non, tu en fera toujours partie.
Zoey ne releva pas sa déclaration.
— Tu leur as dit, n'est-ce pas, que je rentrais aujourd'hui ?
— Oui, lors de mon dernier voyage.
— Comment ont-ils réagi ? s'enquit-elle.
— Bridget était folle de joie. Quant à Kikki... le mot « hystérie » prend tout son sens avec elle.
Un demi-sourire se dessina sur son visage.
Cette déclaration ravie Zoey, mais la joie fut de courte durée.
— Corinna n'a absolument rien dit.
— Quoi ? dit Zoey d'une voix blanche.
— C'est la vérité.
— Elliot ? questionna-t'elle, sur le même ton.
— Il est resté d'un calme impassible, comme à son habitude.
Zoey remonta ses jambes prêt d'elle et passa les bras autour de ses genoux.
— Ils m'en veulent terriblement...
— Ils t'en ont voulu dans le passé, mais c'était il y a un an.
— Donc j'ai raison, conclut Zoey.
— Tu n'en sais rien.
— Ah oui ? lui lança-t-elle, agacée. Alors comment tu expliques ça ?
— Corinna a une excellente maitrise d'elle-même. C'est son éducation et tu le sais. Concernant Eliott, tu as l'air d'avoir oublié qu'il n'est pas du genre à s'étendre. Même Wesley a des fois du mal à le comprendre.
— Ça ne prouve absolument rien, marmonna Zoey.
— Cesse de te lamenter.
— Je ne me lamente pas ! bougonna-t-elle.
— Alors laisse-moi profiter de mon cocktail en paix, argua Estelle en reprenant son verre.
Zoey se mura dans le silence.
D'un côté, elle s'impatientait de voir ses anciennes amies. En plus de leur forte amitié, le lien unique existant entre elles la forçait à ressentir un terrible manque.
Elle se rassura le mieux qu'elle pouvait, se disant qu'au fond de leurs cœurs, elles ressentaient ce même sentiment.
De l'autre, elle redoutait leurs retrouvailles.
Zoey avait la sensation d'être différente. Ou plutôt, le sentiment d'avoir muri. Du haut de ses 20 ans, elle avait de la prestance. Si dans son adolescence elle était plutôt de nature excentrique, en faisant des tonnes, aujourd'hui elle s'était assagie. Cela n'avait pas empiété sur sa joie de vivre, son coté rêveur et optimiste, mais elle avait davantage les pieds sur terre.
Alors de leur côté, les filles ont surement changé, elles aussi.
Mais de quelle façon ? Elle se demanda si une fois réunies, la complicité qu'elles partageaient dans le passé serait toujours la même. La rancœur n'allait-elle pas tout altérer ?
Zoey ferma les yeux. Elle sentait la fatigue prendre le dessus sur ses questionnements sans réponses.
Il faut vraiment que j'arrête de penser.
Ce fut son dernier songe avant qu'Estelle ne dépose son verre vide sur la table basse. Elle se leva.
— Il est temps de partir, déclara-t'elle en faisant signe à quelqu'un dans le couloir.
Un homme en uniforme entra pour saisir la valise de Zoey.
Cette dernière attrapa son sac à dos puis ferma la porte du balcon avant de rejoindre Estelle dans le couloir.
Et elles quittèrent l'hôtel pour rejoindre l'aéroport.
❦
Fin du chapitre.
J'espère qu'il vous a plu.
N'oubliez pas de voter si c'est le cas :)
Merci
❤️
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