Ce n'avait commencé qu'avec quelques touchers lors d'entraînements. Rapidement, ils se transformèrent en désir. Sakura ressentait le besoin d'effleurer, à chaque occasion qu'elle avait, Hinata. Peu à peu, les effleurements se transformèrent en caresse. Rien de sexuel. Des fois, ce ne pouvait qu'être de dégager le front de la Hyuuga quand des cheveux gênaient sa vision. Pourtant, la nuit, seule dans le noir, la vingtenaire repassait ces moments de tendresse. Elle chérissait l'expression que l'autre kunoichi arborait à chaque nouvelle initiative. Sans même que le duo ne le sache, il vivait leurs plus beaux instants.

La première fois qu'elles s'embrassèrent, le soleil tapait sur le terrain d'entraînement. Une chaleur humide était suspendue dans l'air. Cependant, la température étouffante disparut de leur esprit dès le moment où leurs lèvres se rencontrèrent. Ce n'était pas comme tous ces autres baisers qu'elles avaient perdus au jeu de la bouteille. Celui-ci signifiait quelque chose. Il promettait une aventure. Une aventure dans laquelle elles plongeaient avec délectation, ne se doutant pas que bientôt elles remonteraient à la surface pour éviter de se noyer.

Elles se cachaient sous l'ombre d'un cerisier pour se voler quelques baisers. Elles se consumaient pour l'autre, mais la peur les paralysait d'afficher leur relation. La majorité de la population de Konoha n'était pas très ouverte aux relations homosexuelles. Elle l'avait démontrée avec sa réaction face au couple que formaient Sasuke et Naruto. Alors, elles n'osaient pas imaginer ce qu'il arriverait si deux femmes s'officialisaient dans ce monde sexiste. Non, mieux valait continuer à rester dans l'ombre rassurante de l'arbre. Hinata et Sakura ne savaient pas encore que ce ne suffirait pas à les protéger de cet univers cruel.

Ce aurait dû être un autre de ces après-midi chauds où les lèvres de Sakura auraient tracé un chemin sur la gorge d'Hinata. À la place de la bouche de la ninja, des larmes roulaient. Des billes d'eau qui ne semblaient pas à la hauteur du désespoir des deux jeunes adultes. Front contre front, les joues humides se déformaient dans des cris silencieux. Une douleur leur dévorait le ventre. Elles cherchaient leur souffle dans celui de l'autre. Leur cerveau tournait à plein régime tentant de trouver une solution au problème qu'Hinata avait annoncé quelques minutes plus tôt. Le couple ne savait pas qu'il n'y en avait aucune. Les femmes l'apprendraient bien plus tard.

Le jour où Hinata enfila sa bague de mariage, Sakura était présente. La douleur qui l'avait habitée lors de l'annonce des années plus tôt continuait de l'habiter. Cette souffrance était devenue ce qui permettait à la ninja de se raccrocher à des souvenirs d'un temps heureux. La kunoichi sut que c'était également le cas pour la Hyuuga lorsqu'elle vit une larme briller alors que l'anneau roulait sur son doigt. Plus jeune, Sakura aurait vu cela comme un signe que leur amour triompherait. Maintenant, une bague ornait également son annulaire et le mauvais bras enserrait sa taille. Il n'y avait jamais eu de futur pour leur relation, elle le savait dorénavant, Hinata aussi.

Quand le ventre de Sakura s'arrondit, elle pleura. Son mari prit ses larmes pour celles de joie, mais l'accablement l'envahissait. Elle pleura ces enfants aux cheveux roses et yeux lavandes qu'elle n'aurait jamais. La femme n'était pas au courant qu'une situation similaire se passait quelques rues plus loin dans le domaine des Hyuugas.

Lorsque de grands yeux bruns la regardèrent curieusement, elle ne put s'empêcher de commencer à paniquer. Ce n'était pas la bonne couleur. Ils auraient dû être mauves pâles. Le sang des Hyuugas aurait dû couler dans le corps de ce bébé aux cheveux roses, pas celui d'un vulgaire marchand. Son visage aurait dû être plus arrondi, pas aussi carré. Le souffle de l'adulte s'accéléra tandis qu'une réalisation la frappa. Des larmes tachèrent la couverture entourant la nouvelle-née. Sakura détestait son bébé et elle s'haïssait de se sentir ainsi. Ne savait-elle pas qu'une semaine plus tard, une autre couverture porterait des traces de larmes.

Les yeux verts fixaient le vide derrière la tête du psychologue. Comment Sakura pouvait-elle exprimer à voix haute ce que son cœur criait en la présence de son bébé ? Elle serait traitée de monstre. C'était inhumain de ne même pas être capable d'être en présence de sa progéniture sans se mettre à pleurer ou d'avoir un vague sentiment de dégoût. Pourtant quand elle laissa sortir ces mots outrageants, le professionnel ne fit que la regarder avec considération. Le même air qu'il avait adressé à Hinata Hyuuga lorsqu'elle s'était effondrée en pleurs pour les mêmes raisons que Sakura Haruno.

Des mois passèrent. Des semaines où elle se renseigna sur la dépression post-partum. Des jours où elle travailla sur ses vieilles blessures. Lentement, mais sûrement elle commença à apprécier passer du temps avec sa fille. Petit à petit, Sakura apprit à chérir les rires de l'enfant. Son mari semblait fier de la progression de la relation mère-fille, bien que la kunoichi ne puisse toujours pas croiser le regard d'Astra. Elle ne pensait pas pouvoir le faire un jour. Elle ne guérirait jamais assez pour ne pas penser que c'était la mauvaise couleur dès qu'elle entrapercevait les yeux bruns. Une réflexion semblable flottait aussi dans l'esprit d'Hinata.

Les années défilèrent. Les sessions de thérapie diminuèrent. Astra grandit. Sakura vieillit. Les regrets s'accumulèrent. La tristesse l'emporta un jour sur sa volonté. Sa fille s'éloigna. Son mari la laissa se noyer dans sa misère. Le désespoir l'avala toute entière. Les souvenirs d'un temps heureux avaient disparu. Il ne restait que la douleur. Elle sombrait. Personne ne l'attendait au fond du gouffre. Elle était seule. Une solitude qu'Hinata ressentait également jusqu'à l'os.

Lorsque sa fille revint à la maison, main dans la main, avec une autre fille, Sakura sentit son coeur se serrer. Néanmoins, son organe menaça d'arrêter de battre quand des yeux lilas se fixèrent sur elle pour la saluer. Des cheveux blonds coiffaient la tête comportant les deux billes mauves. Des larmes bordèrent les orbes verts à la vue des prunelles identiques à celles d'Hinata. Peut-être que cette fois ces yeux ne pleureraient pas une séparation. Peut-être que cette fois ces yeux verraient ce qu'une vie joyeuse aurait à offrir. Sakura l'espérait et elle espérait qu'Hinata l'espérait aussi. Toutefois pour la première fois, aucune expérience similaire ne traversa la concernée. Sakura ne le savait pas encore, mais elles n'auraient plus jamais d'épreuves communes.

La pluie drue frappait l'enveloppe fragile que Sakura était. Ses doigts traçaient le nom d'Hinata sur la tombe. Une tristesse usée l'accompagnait. Elle était fatiguée, tellement fatiguée. Pourtant, chaque matin, elle se levait dans cette maison partagée avec un mari dont elle n'avait jamais voulu. Tous les jours, la même question s'imposait à son esprit; pourquoi continuer ? Sa vie n'avait rien d'un livre. Il n'y aurait pas de fin heureuse pour elle, juste l'enlace glaciale de la mort. Pourquoi ne pas rejoindre ces bras plus tôt ?

La faucheuse vint, finalement, la chercher. Un air de tristesse bordait les traits pointus de la mort. Elle n'avait rien de ce squelette effrayant. Elle n'était qu'une ancienne humaine, condamnée à récupérer des âmes. La même fatigue que celle de Sakura se reflétait sur le visage de la faucheuse. Un épuisement qui disparut de la ninja dès qu'elle ferma, pour l'ultime fois, les yeux.

-Je suis désolée de t'avoir fait attendre, Sakura Haruno, souffla la mort.

***Je ne sais pas trop si la fin est correcte, mais je l'aime quand même, donc voilà. Merci d'avoir lu !***