Chapitre 6
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... Et j'aperçois la plus belle chose qu'il m'ait été donné de voir depuis mon houleux départ dans la vie.
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Je suis surprise, vraiment surprise. Je ne comprends pas, je ne comprends plus. Je fixe de mes yeux verts cet étranger, cet inconnu qui a posé son regard sur moi.
Il me voit faible.
Faible...
J'oublie mon objectif. Nyal attendra. Cet étranger m'observe, me fixe de ses yeux. De ses beaux yeux rassurants. J'ai l'impression de me perdre dans son regard noisette, je me fraye un chemin dans le labyrinthe qu'est son âme pour m'y lover comme dans un cocon.
Son regard m'apaise. Face à lui j'oublie tout.
Mais comment est ce possible ? Comment peut il me sortir de la douleur comme cela ? Je n'y comprends plus rien. Cet inconnu s'approche de moi et je me recroqueville sur moi même par peur.
Il tend sa main vers moi et au lieu de la lui prendre, je décide de lire son avenir dedans. Ligne de vie plutôt courte, j'ai l'impression... À moins que... Non. Elle est immensément longue. À en croire sa main, sa vie ne s'arrêtera pas avant longtemps.
Puis, je regarde ma main. Ma ligne aussi est longue, tellement longue... Puis soudain, une nouvelle goutte de la pluie de mon âme quitte mon œil. J'ai repensé à ce qu'il ne fallait pas.
Je fixe ma main, puis celle de l'inconnu, et remarque qu'elles sont en tout point semblables. Ma main est bien plus petite et fine, mais les courbes qui y sont tracées sont les mêmes.
Alors je place ma main contre la sienne, et il la serre.
Il me tire ensuite pour me relever délicatement et, sonnée, je suis son mouvement. Je suis debout, face à lui. C'est un homme. Il doit avoir mon âge. Mais je lis dans ses yeux que son âme est plus âgée.
Je serre sa main qui est toujours glissée dans la mienne un peu plus fort, et l'inconnu se rapproche un peu plus de moi.
BOUM !
Je sursaute et l'inconnu aussi. Je sais ce que c'est. C'est la détonation d'une arme à feu. Je lâche précipitamment sa main et attrape mon 9mm. Je relève les yeux vers l'étranger et remarque qu'il me sourit. À sa main, se trouve aussi un 9mm. Je lui rend son sourire.
«Je vais vous laisser... Mademoiselle. Je crois que le destin nous appelle... » fait doucement l'homme.
Sa voix... Mon dieu... Grave, tellement grave. Mais si douce en même temps. Je lui réplique :
«Rendez vous en enfer, mon gars. »
L'homme pouffe puis reprend son son sérieux.
«Je vous y rejoindrai. »
Puis il tourne les talons et s'enfuit à travers la foule, me laissant seule et troublée. Putain, faites qu'on crève tous les deux aujourd'hui !
Je secoue la tête pour reprendre mes esprits, et me rappelle soudain de la raison qui a fait que j'ai fait demi tour il y a de cela quelques dizaines de minutes. Nyal.
Je cours à travers la foule, vers mon objectif, alors que tout le monde part en sens inverse, effrayé par la détonation.
J'arrive enfin, après ce qui m'a paru être une éternité, au comptoir ou se trouve mon frère. Plusieurs Napoli l'encerclent.
Ni une, ni deux, j'envoie une balle dans le crâne d'un des trois. Puis dans l'autre. Puis dans l'autre.
Mon jumeau me sourit et dit :
«Heureusement que t'es... »
Il ne peut pas finir sa phrase. Il s'écroule contre le sol.
Mon frère... Mon frère... Je me jette à ses côtés en hurlant son nom. Je relève sa tête pour regarder ses yeux. Dieu merci, il est toujours en vie.
Soudain, je prend conscience d'une chose : ce n'est pas le seul à être toujours en vie. Je me relève et guette les alentours. Il n'est pas loin. Je le sens.
Un mouvement brusque me fait tourner la tête. Il est derrière moi. Je lui tire immédiatement dessus et il s'écroule au sol, le sang jaillsant de sa tempe trouée.
Je pousse un soupir de satisfaction et reporte mon attention vers ma moitié.
Il saigne abondamment de l'avant bras. Aucun organe vital n'a été touché mais je sais à quel point cela peut être douloureux. Je place mes mains sur sa blessure et la presse très fort dans le but de stopper son hémorragie.
«J'ai si mal, Nahéma... » Murmure mon frère.
Nyal faible ? C'est bel et bien la chose la plus étonnante qu'il m'ait été donné de voir... je lui fais un sourire rassurant et prend mon téléphone.
Fièvreuse et inquiète, je compose au plus vite le numéro de Nolan.
Pitié, faites qu'il réponde !
Au bout de plusieurs 'la' qui me paraissent aussi longs qu'une nuit sans étoiles, j'entends enfin la voix grâce de mon oncle qui soupire en baillant:
«Il t'arrive quoi, Nahéma ? »
Je lui résume la situation en omettant le fait que je me suis enfilé deux vodka rhum de 50cl chacun et que nous sommes partis en douce.
Après m'avoir promis qu'il faisait aussi vite qu'il le pouvait, il raccroche et je m'empresse de lui envoyer l'adresse de la maison. Qu'aurais je fait si Nyal ne m'avait pas demandé de la rentrer plus tôt sur le GPS ?
Je ne sais pas, la seule chose dont je suis sûre c'est que ça nous sauve la vie. J'appuie le plus possible sur la blessure de ma moitié en lui chuchotant des mots rassurants. Il pose sa main sur ma joue et murmure :
«T'es la première chose que j'ai vu quand les lumières se sont allumées et tu seras la dernière chose que je verrai quand les lumières s'éteindront.. »
Désolé mon gars, mais il est hors de question que je laisse la flamme bleutée qu'est ton âme s'éteindre aujourd'hui...
Je stoppe comme je le peux son hémorragie en pressant avec fiévreur mes deux mains sur le trou qu'a fait la balle en le transpercant.
Je plante mon regard dans le sien, et j'ai l'impression d'y voir mon reflet. Le reflet de mon âme inquiétée mais surtout raide bourrée.
Eh merde, ça se voit tant que ça ?
Je n'ai pas le temps de me soucier de mon apparence, à cet instant, tout ce qui compte c'est mon jumeau.
«Nyal, tu restes, hein ? Je souffle, inquiète. Tu me promets que tu restes ? »
Il hoche la tête en grimaçant. Ses yeux s'embuent de larmes et mon cœur se fissure. Je tiens tellement à lui, putain...
«Mon dieu, ne pleure pas, ma moitié... tu es fort, hein ? Après tout ce que tu as traversé, ne laisse pas notre histoire fraternelle se briser en un torrent de larmes, Demi-lune... » je soupire.
Demi lune est le surnom qu'on se donne lorsqu'on veut être sérieux l'un envers l'autre. Nous deux, nous sommes la lune. Nous sommes les deux moitiés du même gâteau et on ne manque jamais de se le rappeler.
Le surnom que je lui donne plus habituellement est NHC. Comme nous avons les mêmes initiales, notre surnom est le même, ce qui est plutôt comique.
Je lutte pour qu'il ne s'évanouisse pas et cela semble porter ses fruits car il presse sa main contre ma joue pour apaiser mon inquiétude.
Il prend une grande inspiration qui lui semble difficile et murmure, presque aphone :
«Je reste, je choisirai toujours de rester, ma Nahé... »
Je plaque un baiser sur son front et me serre contre lui. Son cœur bat à folle allure, comme pour remplir le trou béant qu'a laissé la balle dans son bras.
Une main me secoue l'épaule et je tourne vivement la tête en appuyant toujours sur la blessure de mon frère. C'est mon oncle accompagné de Fred.
«Laisse, Nahéma, Nolan va s'occuper de lui. Quant à toi, il faut que nous ayons une petite discussion... »
Je soupire avant de répondre :
«Bien sur, que veux tu me dire ? »
Mon grand père fronce les sourcils.
«On en parlera à la maison, grogne t il. Mais tu ne paies rien pour attendre, Nahéma Helabak Carborès... »
Sa voix menaçante résonne dans mon oreille pour se muer en un tintement sourd. Je tourne la tête vers Nyal et remarque que Nolan le tient dans ses bras. Je fais signe à ma petite famille de me suivre et je les entraîne jusqu'à l'Aston Martin.
Je prend soudain conscience qu'ils ont du eux aussi emprunter une voiture pour se rendre ici. Nolan semble lire sans mes pensées car il me dit :
«Nous sommes venus en taxi, Nahé. »
Je hoche la tête et ouvre la portière pour me mettre du côté conducteur. Une fois que tout le monde est installé, je démarre et roule aussi vite que possible, direction l'hôpital.
Je me soucie peu des feux rouges et des piétons, je manque d'en écraser quelques uns d'ailleurs, et je vais tellement vite que j'ai l'impression que je vais m'envoler. Elle en a sous le capot, l'Aston...
Lorsqu'enfin le bâtiment blanc qu'est l'hôpital entre dans mon champ de vision, je laisse échapper un soupir de soulagement et accélère encore un peu plus.
Mon grand père lorgne le compteur du coin de l'œil et tout à coup, il s'étouffe. Entre deux toux, il crie :
«Tu vas a 170 km/h en ville ??? Putain de merde Nahéma ralentis !!! »
Ahurie, je le regarde s'étouffer. Parce qu'il appelle ça aller vite ? Surprise, je secoue la tête et reporte mon attention sur les 100 mètres qui nous séparent de la clinique.
Je me gare en double file le plus rapidement possible et nous filons à l'intérieur des urgences.
Nous coupons la longue queue de malades et blessés, car nous savons tous que le temps presse. Nyal va perdre la vie si nous nous arrêtons pour des futilités.
Je fixe la mignonne secrétaire d'une vingtaine d'années qui fixe quand à elle, hébété, le sang de Nyal qui s'écrase sur le sol en une somptueuse flaque pourpre
«Vous devez... Pa-Patienter et faire la queue comme tout le monde, messieurs dames... » bégaie-t-elle.
Oh god, elle est tellement mignonne... je lui fais un magnifique sourire rassurant et lui explique :
«L'homme qui est en train de se vider de son sang à cet instant, c'est mon frère jumeau... Autrement dit, si il meurt ce soir, je me suicide. Sans scrupules. Sans remords. Alors, s'il vous plaît, amenez nous un putain de chirurgien... »
Je tape nerveusement du pied alors que la secrétaire quitte son fauteuil pour courir chercher un médecin.
Nolan me tapote l'épaule et murmure :
«Je savais pas que tu étais bisexuelle, Nahé ! »
Je ris avant de lui répondre en toute honnêteté :
«Je l'ai toujours été. Mais mon dieu, tu as bien vu comme moi que cette femme est canon ! »
«Oh, soupire mon frère de cœur, c'est vrai qu'elle est pas mal... Mais tu es plus jolie ! »
La secrétaire revient, essoufflée, et nous dit rapidement sans prendre le temps de reprendre son souffle :
«Le... chirurgien... est occupé... Je suis désolée...»
Je le mets à trembler comme une feuille et sans pouvoir me contenir plus longtemps, j'abats mon poing résolument fermé sur le comptoir, produisant un vacarme qui en fait sursauter plus d'un.
«C'EST DE MON PUTAIN DE FRÈRE QU'IL S'AGIT !!!! Je hurle, hors de moi. ALORS VOUS ALLEZ BOUGER VOTRE CUL ET NOUS RAMENER UN PUTAIN DE CHIRURGIEN OU ÇA VA FINIR EN TUERIE ! »
La secrétaire me regarde, effarée par tant de violence. Je n'ai qu'une seule envie : lui tirer une balle entre les deux yeux. La seule chose qui m'en empêche ? Elle est innocente, et je ne tue pas les innocents. Fred prend les devants et tend sa main droite à la jeune femme.
«Je suis Frédéric Carborès, parrain du secteur français de la Rosa Morta ainsi qu'ancien premier ministre français. Si vous ne m'obéissez pas, des connaissances à moi pourrait vous le faire payer... mais cela me ferait de la peine d'abîmer votre magnifique bouille d'ange... Alors pliez vous a mes ordres et tout se passera bien. J'ordonne que vous alliez chercher un chirurgien qui a déjà opéré des blessures par balle. S'il vous plaît.»
Les gens derrière nous dans la file ne perdent pas une miette du spectacle. J'ai tellement envie de leur crever les yeux... La secrétaire déglutit avant de répondre, la voix tremblante :
«J'ai déjà opéré une blessure par balle... Mais... Je ne peux pas... Je n'en suis pas capable... »
Elle cache sa tête entre ses mains pour dissimuler ses larmes. Elle a vécu un traumatisme. Je le vois grâce à la lueur qu'elle a dans le regard. Prise de compassion pour cette jeune femme, je lui dis doucement :
«Regardez moi, madame. Aujourd'hui, vous allez sauver la vie de mon jumeau. Je vous en serai éternellement reconnaissante. Mais, pour cela, vous allez oublier vos peurs. C'est d'accord ? Alors nous allons nous rendre dans une salle d'opération et je vais vous aider dans vos gestes. Ça vous va ? »
La secrétaire hoche la tête lentement et, sans dire un mot, nous indique de la suivre.
Nous nous retrouvons bientôt dans une salle d'opération quelque peu à l'écart et la gentille madame (dont je ne sais pas le nom mais appelons la Géraldine tiens ! ) attrape tous les outils nécessaires pour sauver mon frère. Angoissée, je croise mentalement les doigts pour que tout se passe bien. Géraldine tourne le regard vers moi et soupire, stressée :
«Je ne vais pas y arriver, mademoiselle...»
Je me retiens de lui envoyer un coup de poing dans la face et au lieu de ça, je lui sourit en posant une main rassurante sur son épaule.
«Hey ! Je fais doucement. Y'a pas de raisons que tu n'y arrive pas ! Tu ne risques rien, c'est en attendant trop longtemps que tu risquera la vie de mon frère... »
La jeune femme prend une grande inspiration avant de se lancer, les mains tremblantes.
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Hey !
J'ai fini ce chapitre, pfiouuu, j'ai pris du temps à le faire !
À votre avis qui est l'inconnu du début ?
La suite arrivera quand je l'aurai fini 😂😅
Bisous bisous !
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