Chapitre 6 - Magnétisme (Part 2)

- Vous êtes un vrai casse-tête, finit-il par murmurer.

Ses mots m'étonnent autant qu'ils m'énervent. Un casse-tête ? Mon français n'a pas besoin d'être parfait pour que je comprenne que ce n'est pas le plus flatteur des compliments.

Et bien que j'aie une idée de ce qui pourrait motiver Luccini à me faire une telle remarque, j'ai besoin de plus de détails. Je veux comprendre pourquoi il a ressenti le besoin de me le faire savoir.

Alors, je ne peux m'empêcher de lui demander :

- Un casse-tête ? Pourquoi dites-vous cela ?

Un nouveau sourire quasi imperceptible fait vibrer les lèvres charnues de Luccini. Je remarque deux petites fossettes qui creusent ses joues, apportant une touche de douceur inespérée à son visage habituellement si froid.

Pourquoi sourit-il comme ça ? Il vient plus ou moins de me qualifier d'emmerdeuse et ça le fait sourire ? Si vous voulez mon avis, c'est plutôt lui, le casse-tête.

Mais au moment où Luccini semble prêt à m'apporter une réponse, un bruit de porte nous interrompt. Un étudiant vient d'entrer dans la salle 424 et je reprends conscience de l'endroit où je me trouve.

Cela semble aussi être le cas pour Luccini car il lâche soudain la fiche de renseignement et recule brusquement, rétablissant une distance décente entre nous. Je comprends que notre conversation est terminée et que je resterai à jamais dans l'ignorance quant à ce qu'il voulait me dire. Merde.

- Rapportez-moi la fiche de renseignement complétée demain, m'indique Luccini, d'une voix ferme. Et maintenant, allez à votre place, le cours va commencer.

En un claquement de doigt, il a retrouvé son attitude distante. Et sans m'adresser un regard supplémentaire, il se dirige vers l'estrade d'un pas rapide, comme si notre échange n'avait jamais eu lieu. Je suis frustrée, de ne pas avoir eu de réponse et de ne pas être parvenue à faire mes preuves.

La mâchoire crispée, je m'exécute et rejoins le fond de la salle, en tentant de maintenir un visage impassible.

Que vient-il de se passer ?

Même si mes jambes tremblent, je m'installe sans faillir au dernier rang. J'aligne sur ma table tout le matériel nécessaire pour le cours en essayant d'oublier l'interaction étrange que je viens d'avoir avec Luccini. Mais c'est bien plus difficile que ça ne le devrait.

Moi, un casse-tête ? Juste parce que j'ai changé d'avis une fois sur un sujet ? Je le trouve bien catégorique... Et que pouvaient bien signifier ces petits sourires furtifs ? J'étais surprise de ne pas y déceler de condescendance ou de suffisance...

Alors que je termine de sortir mes affaires, je sens à nouveau le regard de Luccini brûler ma peau. Je ne saurais dire comment, mais je sais qu'il m'observe et cette simple pensée m'irrite autant qu'elle m'intrigue : pourquoi me fixe-t-il encore ? Avoir un "casse-tête" dans sa classe l'inquiète-t-il à ce point ?

Je fais de mon mieux pour éviter de croiser son regard, bien trop énervée après sa nouvelle remarque dont je ne sais que penser. Je me force à me concentrer sur les bavardages des autres étudiants qui entrent au compte goutte dans la salle et à attendre le début du cours.

Mais ignorer Luccini est plus difficile que cela ne le devrait. Je dois lutter contre l'envie de poser les yeux sur lui. J'ai envie de le défier du regard, de lui montrer qu'il ne me fait pas peur.

Que la Gemma qu'il a vu hier n'était pas dans son état normal. Qu'elle était déstabilisée, un peu perdue, et plus du tout elle-même. J'aimerais qu'il comprenne que je suis loin d'être un casse-tête et que...

- Gemma, c'est bien ça ?

Une voix amicale m'interpelle, me sortant de mes pensées conspiratrices. Je tourne la tête et découvre le garçon qui se tient à côté de ma table. Pendant un moment, je me demande si on se connaît, puis je réalise qu'il s'agit de mon voisin d'hier, qui m'avait accueilli avec un drôle de regard.

Aujourd'hui, il me semble plutôt décontracté. Ses cheveux châtain clair, légèrement ébouriffés, ajoutent une touche de nonchalance calculée à son look. Ses yeux, d'un bleu profond et pétillant, sont empreints de gentillesse. Je suis étonnée de ne pas l'avoir remarqué hier.

Hier, tu étais bien trop remontée pour remarquer la gentillesse de qui que ce soit.

Le garçon porte un pull oversize en tricot crème avec des motifs géométriques de toutes les couleurs. Pour le bas, il a opté pour un pantalon en toile avec des poches latérales, et a complété sa tenue d'une paire de mocassins.

Son style décontracté et joyeux ne pourrait pas être plus éloigné de celui de Luccini, sobre et sans fioriture. Ce contraste me fait sourire et rend ce garçon immédiatement sympathique à mes yeux.

Alors, je lui réponds, avec un sourire timide :

- Oui, c'est bien moi. Et toi, tu es...?

- Max, répond-il, chaleureux. J'étais à côté de toi hier, je crois. Ça te dérange si je m'installe là ?

Il désigne la place à mes côtés et je ne peux qu'acquiescer vivement.

- Bien sûr, avec plaisir.

Max ne perd pas une seconde pour prendre place, rangeant son sac sous la table avant de sortir son matériel.

Tout en préparant ses affaires, il engage la conversation :

- Alors, comment s'est passée ta première journée à l'IELC ? On n'a pas eu l'occasion de parler hier.

- Très bien, répondis-je, ne voulant pas faire la rabat-joie. Je suis super heureuse d'avoir intégré cette école, c'était un rêve pour moi.

- Moi aussi ! Et encore plus d'intégrer ce cours ! Je crois que c'est un accomplissement pour chaque personne présente dans cette salle, il faut dire.

Non, pas chaque personne. Luccini a vu les portes de la salle 424 s'ouvrir devant lui sans avoir à se battre...

- Oui, c'est vrai, acquiescé-je. Même si je dois t'avouer que je suis déçue que Guenièvre de Beaumont ne fasse pas cours cette année.

Max hausse les épaules, les lèvres pincées, ce qui m'indique qu'il partage ma déception.

- C'est comme ça. Mais bon, le principal, c'est que le concours de fin d'année soit maintenu et qu'on ait toujours la chance d'intégrer la maison de couture de Guenièvre à l'issue du master.

Je hoche la tête, essayant de me persuader qu'il a raison.

- Oui, c'est sûr. C'est le plus important, après tout. Tu as déjà commencé à travailler sur ta collection, d'ailleurs ?

Max n'a pas le temps de me répondre, la voix de Luccini retentit dans la pièce, nous intimant au silence tous autant que nous sommes.

- Bonjour à toutes et à tous. Le cours va débuter, veuillez terminer vos conversations et sortir vos affaires pour ceux qui ne l'ont pas encore fait.

Toujours aussi agréable.

J'ose un regard dans la direction de l'estrade et découvre Luccini derrière son bureau, les doigts appuyés sur la surface en bois de celui-ci, dans une posture qui assoit son autorité sur son auditoire.

Il regarde encore dans ma direction. À cette distance, je ne suis pas certaine qu'il me regarde moi précisément, mais mon intuition de me dit que c'est bien le cas. J'ai bien compris que Luccini voulait m'avoir à l'œil, il ne veut pas que le Casse-tête perturbe le bon déroulement de son cours...

- Aujourd'hui, pour bien commencer l'année, reprend-t-il, j'ai décidé de vous mettre sous pression...

Ça commence bien.

Max me lance un petit regard complice, l'air de dire : "Ça va chauffer", ce qui m'arrache un sourire. Avoir un allié en salle 424 ne sera pas de trop pour affronter les six heures de cours hebdomadaires avec Luccini.

- Car c'est aussi ça, la haute couture. Pouvoir répondre aux demandes parfois irrationnelles des clients et respecter des délais très serrés. Quand on travaille dans une maison de couture, l'organisation est la clé. Vous devrez travailler vite et bien, pour répondre à des attentes toujours plus élevées. La plupart d'entre vous a l'habitude de travailler seul, mais sachez que cela ne sera probablement pas le cas quand vous travaillerez en maison. C'est pour cette raison que votre premier exercice sera à réaliser par groupe de deux...

Je détourne soudainement mon attention de Luccini, attirée par la notification d'un e-mail qui vient d'apparaître sur l'écran de mon ordinateur. Je souris en voyant l'adresse mail de l'expéditrice : [email protected].

Valery Taylor est l'une des premières personnes à avoir cru en mes créations et est devenue mon acheteuse la plus fidèle. Elle a découvert mon travail par hasard sur Instagram et a eu un coup de cœur pour les pièces que je partageais avec mes 1 500 abonnés, à l'époque. Quand elle m'a contactée pour travailler avec elle, je n'en revenais pas. Et aujourd'hui, plus de deux ans plus tard, je peine encore à croire en la confiance qu'elle me témoigne.

Depuis, elle commande régulièrement des pièces originales pour sa boutique branchée, The Original, qui se situe à Camden, près de Londres. Pour une raison qui m'échappe, Valery est devenue comme une seconde mère pour moi, s'engageant à soutenir mon travail et à me donner de la visibilité. Résultat, mon compte Instagram a pris près de 10 000 followers en deux ans. Et c'est en grande partie grâce aux commandes de Valery que j'ai pu économiser assez d'argent pour venir étudier à Paris. Alors autant dire que je tiens à cette cliente comme à la prunelle de mes yeux.

Sans attendre, je clique donc sur son mail, ne pouvant contenir mon excitation.

Son contenu me fait battre le cœur plus fort :

Ce mail me remplit de joie et me soulage aussi, je dois l'avouer. Cette nouvelle collaboration avec Valery m'assure des revenus pour les prochains mois et autant dire que ce ne sera pas du luxe.

Si j'arrive à la convaincre de me commander quelques pièces supplémentaires, je pourrais même investir dans des tissus de meilleure qualité pour réaliser ma collection.

- On vous dérange, Mademoiselle Hayes ?

La voix de Luccini explose à côté de moi et je sursaute de surprise.

L'expression sur son visage est si sévère qu'elle efface de ma mémoire les sourires qu'il avait esquissés un peu plus tôt. À voir la rigidité de son visage, je doute même qu'il soit doté de zygomatiques...

- Vous n'avez pas l'air d'être très intéressée par le contenu de mon cours, ajoute Luccini, glacial.

Son regard noisette me foudroie sur place et les quelques mots qu'il ajoute m'achèvent :

- Si c'est le cas, vous auriez mieux fait de laisser votre place à quelqu'un de plus motivé.

Je me redresse, brusquée par cette remarque, l'énième qui insinue que je ne mérite pas d'être ici. Le regard que Luccini me lance est chargé de mépris, et je sens la colère monter en moi. Dans son dos, j'aperçois Blanche, la fille qui minaudait avec lui lors du premier cours. Elle affiche un air moqueur, visiblement satisfaite que je me sois faite topée.

Je lui lance un regard perçant et me murmure intérieurement : "Fais gaffe à toi, Blair Waldorf, toi aussi je vais te prouver de quoi je suis capable."

Je reporte mon attention sur Luccini et tente de me justifier :

- Je suis vraiment désolée. C'était juste un e-mail très important pour moi. Je...

Il ne me laisse pas finir : il coupe ma phrase en levant son index, d'un geste autoritaire.

- Ce n'est pas une excuse valable. Chacun d'entre nous a ses distractions, mais ici, votre seule priorité doit être le cours. Vous devez comprendre que chaque minute compte et que l'engagement est essentiel. Vous êtes tous en compétition les uns contre les autres, vous jouez votre place et votre avenir. Est-ce que je me suis bien fait comprendre ?

Ma gorge se noue et la chaleur de l'humiliation envahit mon visage. Je me contente de hocher la tête, incapable de prononcer un mot.

-Bien. Pour vous rappeler l'importance d'être pleinement engagée dans ce cours, mademoiselle Hayes, et parce que vous êtes un nombre impair cette année, vous serez celle qui sera seule pour réaliser la pièce à rendre demain. Maintenant, à vos crayons, et bonne chance à tous.

Luccini tourne les talons et repart derechef vers l'estrade. Autour de moi, les autres étudiants s'agitent, se mettent en groupe et commencent d'ores-et-déjà à brainstormer. De mon côté, je peine à atterrir.

Je dois réaliser une pièce ? À rendre demain ?

OK, cette fois, je suis dans la merde.

Hello mes Amours ! Qu'avez-vous pensé de ce que Luccini a dit à Gemma ? À votre avis, va-t-elle réussir le défi qu'il lui a lancé ?? 😳 Dites-moi tout ! J'attends vos retours avec impatience !

Si vous aimez Room 424, n'oubliez pas de LIKER ce chapitre, de le COMMENTER et de le PARTAGER à vos amis ! Ça m'aiderait énormément et ça me ferait vraiment super plaisir ! 💕 Merci d'ores-et-déjà pour tous vos retours adorables.

La suite sera postée quand le chapitre aura atteint les 70 likes ! Alors, à vos votes les Roomers 🙈💕

Si tu as lu cette note jusqu'au bout, tu es un petit chou à la crème ! Commente 🧁 pour que je sache que tu as tout lu 👀

Morgane 🧡

PS : Le prochain chapitre prendra peut-être un peu plus de temps à être posté. Comme certains le savent déjà, je suis en train de travailler sur la réécriture du Prequel de PhonePlay, qui sort le 14 Novembre et je dois tout avoir rendu pour le 19 Aout ! 😳 Donc cette semaine, je vais avoir du travail ! Mais je ne vous oublie pas ❤️

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