11000 (24.1)

 Je dois reconnaître que très vite, je vais tous les soirs chez Elijah, ça devient presque une habitude, même s'il est encore un peu tôt pour que ce soit vraiment considéré ainsi. Et je dois bien avouer que j'aime beaucoup passer mes nuits avec lui, c'est tellement plus agréable que de rester seule dans ma chambre à consulter internet. En plus, la présence d'Elijah est si agréable, c'est juste impressionnant.

Il faut aussi reconnaître que ça a l'avantage incontestable que je peux passer mes après-midi avec ma sœur comme nous le faisons toujours depuis des années et tout en arrivant tout de même à avoir du temps avec Elijah. C'est possible que pour lui ce ne soit pas l'idéal vu le peu de temps qu'il dort la nuit à cause de moi, mais il n'est pas près de s'en plaindre, au contraire. De toute façon, je n'arrive même pas à faire en sorte qu'il aille se coucher plus tôt.

Ce soir-là encore, je le rejoins à nouveau, mais avec encore une fois du retard, ça va finir par être une habitude. Mais j'avais une bonne raison, j'ai passé plus de temps que les autres jours chez moi, pour une fois, mon père est rentré non seulement en avance, mais en plus tôt. Fauve commençant tard le lendemain a décidé de profiter de la présence de son père et j'ai fait de même, pour une fois que nous pouvons passer une vraie soirée en famille, je ne dois pas rater l'occasion, ça vaut bien la peine d'aller se « coucher » à plus de minuit.

Moi par contre, je commence tôt, tout comme Elijah, alors s'il était raisonnable, il devrait dormir à mon arrivée, mais ce n'est absolument pas le cas, il a une capacité ahurissante qui lui permet de ne jamais s'endormir tant qu'il ne le veut pas. Ou alors il se gave de café pour s'empêcher de dormir, mais dans tous les cas, il est insupportable. Je lui ai pourtant dit de ne pas m'attendre, mais il n'en a absolument pas tenu compte.

Je pense très honnêtement qu'il fait partie des rares êtres humains à être capable de dormir cinq heures dans une nuit et être encore debout à minuit, surtout que pour le coup, il est en train de lire allongé dans un lit, il n'est pas assis à regarder un film. Mais il faut reconnaître qu'il n'est pas très attentif à ce qu'il y a d'écrits sur les pages puisqu'il me repère tout de suite à la fenêtre.

— Effectivement, tu es un peu en retard, critique-t-il presque en se redressant et en s'essayant au bord du lit sans prendre la peine de m'ouvrir, il sait bien que je suis très bien capable de le faire toute seule.

— Tu aurais préféré que je te fasse un bilan minute par minute de la situation pour que tu estimes toi-même mon retard ?

— Tu n'es pas non plus obligée de tomber dans l'excès, signale-t-il en rigolant. Vous avez parlé de quoi d'ailleurs avec tes parents pour que ça prenne autant de temps ?

— Tu es bien curieux dans la vie quand même ! remarqué-je en m'installant comme d'habitude sur la chaise de son bureau.

— Tu ne t'y es toujours pas fait ?

— Apparemment non... soupiré-je plus pour rigoler qu'autre chose même si je donne l'impression d'être très sérieuse en disant ça.

Il faut bien que j'avoue qu'au fond, j'aime bien sa curiosité presque maladive, sans ça, je ne serais sans doute pas avec lui aujourd'hui. Mais j'ai quand même bien le droit de lui faire remarquer qu'il est presque trop curieux pour tout et n'importe quoi. Je sais bien sûr que je ne vais pas le changer, même avec mes soupirs, je ne suis pas irréaliste à ce point. Surtout vu comme il est entêté. Surtout aussi parce que je ne veux pas le changer.

— Et pour répondre à ta question, j'ai surtout discuté avec mon père qui a pris des nouvelles de ma sœur et moi, du coup, on lui a donné les dernières nouvelles, dont mes bugs et plusieurs autres choses personnelles.

— Il n'était toujours pas au courant ? Ça fait trois semaines quand même, affirme-t-il presque sur le ton de reproche.

— Je ne l'ai pas non plus vu beaucoup ces derniers jours et l'occasion ne s'est pas non plus présenté, déclaré-je presque amère et en colère contre mon père, pas parce qu'il est trop absent à mon goût, mais parce qu'il n'est pas assez présent pour sa propre fille.

En plus, en ce moment, je le ressens de plus en plus, Fauve commençait vraiment à trouver qu'elle n'avait pas passé du temps avec son père depuis trop longtemps, elle ne m'en parlait pas du tout, mais je voyais bien sa peine par moment.

— Sont-ils au moins au courant pour nous deux ?

J'ai le droit d'être désespérée par son cas parfois ?

— Non et de toute manière, je ne suis pas certaine qu'ils comprennent...

— Qu'ils comprennent notre relation ? s'étonne-t-il ne paraissant pas vraiment comprendre.

Pour le coup, c'est vraiment dur à comprendre surtout avec le peu l'information que je lui ai donnée.

— Non, ce n'est pas vraiment ça. C'est surtout que mes parents ont un peu tendance à m'humaniser, après tout, je suis leur fille et j'ai grandi à leur côté en même temps que leur enfant biologique, alors je ne peux pas leur en vouloir. Mais je sais que parfois, ils en viennent à espérer que je sois plus humaine qu'ils ne le pensent. Du coup, s'ils savaient pour toi et moi, ils voudraient que je reste comme ça le plus longtemps possible, ils essayeraient peut-être même de me convaincre de garder mes bugs jusqu'à ce que je commence à avoir de vrais problèmes. Oui, ils sont presque pires que toi, je le sais, ce n'est pas la peine de me le dire. Mais ce sont des parents, c'est normal.

— Je pense que j'aurais rien dit, affirme-t-il, mais je sens très bien qu'il ment. Bon, peut-être que j'aurais dit un « Ah ouais ? », mais c'est tout, ajoute-t-il en voyant bien que je ne le crois pas.

En vrai, c'est très pratique de pouvoir détecter les mensonges, comme ça, on peut réussir à tout savoir ou presque, surtout quand la personne en face est de bonne composition.

— Mais j'ai une question, ce serait quoi le problème de faire comme ils voudraient et de garder tes bugs plus longtemps ?

Je savais qu'il ne fallait pas que je relance le sujet, je m'en doutais bien, maintenant, nous allons retomber dans un débat que j'aurais préféré éviter.

— Je pense qu'il n'y aurait pas vraiment de problèmes, mais j'ai trop peur des risques que ça implique ! Tu ne te rends pas compte à quel point je suis dangereuse ! Parce que pour l'instant ça va, j'ai juste des émotions que je ne devrais pas avoir, ça passe encore. Mais pour les machines, on sait quand elle commence à buguer, mais on ne peut pas déterminer le moment où elles vont vraiment lâcher et pour mon cas, ça peut faire de grave dégât. Et surtout, mes bugs viennent d'un problème plus important, je le sens bien, je ne suis pas folle. Et avec moi, un problème plus important, ça peut engendrer des conséquences plus graves, vraiment plus graves...

— Comme quoi ?

— Ai-je besoin de te rappeler que je suis une arme meurtrière ? demandé-je plutôt sur le ton de la rigolade, même si ce n'est pas très drôle et que ce n'est pas non plus une blague.

— Est-ce que je vais enfin pouvoir savoir pourquoi exactement tu es si dangereuse ? Juste histoire d'avoir une idée de quoi m'attendre si je t'énerve, s'amuse-t-il n'ayant pas conscience que ce serait dans les premières personnes que je tenterai de protéger en cas de problèmes.

— Normalement, je ne devrais pas t'en parler, tout ça est clairement secret défense... Mais vu que tu ne devrais pas non plus être au courant que je suis un robot, je pense que je peux faire une petite exception, après tout ma sœur est au courant aussi, alors... Il faut juste que tu me promettes que rien de ce que je vais te dire ne quittera cette pièce, parce que quand même, c'est un peu sensible comme conversation...

— Tu es vraiment d'accord pour m'en parler ? Sérieusement ? Comme quoi ça paye d'insister, je n'aurai vraiment jamais cru que j'arriverai à te faire céder. Et évidemment, je ne dirai jamais rien à qui que ce soit ! affirme-t-il presque outré que je puisse supposer qu'il soit capable de faire une chose pareille. De toute manière, je me vois mal parler de ça à quelqu'un d'autre. Je ne vois même pas comment je pourrais en venir à un sujet pareil !

Ça ne change rien au fait que je préfère être excessivement prudente, je suis quand même en train de prendre un assez gros risque, d'autant plus que ce n'est pas un sujet qui lui est indispensable et qu'il n'a pas vraiment besoin de le savoir.

— De toute manière, tu en sais déjà beaucoup trop, alors à un certain stade, ça de plus, ça de moins. Ce n'est pas pour autant que tu doives abuser non plus, là, je t'en parle uniquement parce que ça fait un moment que tu me poses cette question. Pour tout te dire, je trouve moi-même que j'ai trop d'armes, beaucoup, beaucoup trop, alors non seulement je ne veux pas de commentaires du type « tu es plus armée qu'un républicain au Capitole » ou n'importe quelle autre pointe d'humour du genre, je ne veux aucun commentaire.

— Ce ne serait pas mon genre, conteste-t-il sans grande conviction.

Il y a deux mois, j'aurais effectivement trouvé que ce n'est pas son genre, mais en apprenant à le connaître, je commence aussi à découvrir une partie de son humour qui peut parfois être un peu limite.

— On va y croire. En tout cas, ne va pas espérer que je te fasse la liste complète de mes armes, ce serait beaucoup trop long, mais au moins, tu auras l'idée générale. Si tu veux tout savoir, j'ai largement de quoi survivre à l'apocalypse, presque n'importe lequel d'ailleurs, je peux me défendre face à presque toutes les menaces, dans n'importe quelle circonstance, armes d'assauts, armes de poing, armes de précision. Je peux même attaquer quelqu'un sous l'eau et je ne parle même pas des armes surpuissantes en cas de gros problème.

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