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Il faut que je fasse quelque chose, je ne peux pas le laisser continuer alors que j'ai autant de doute. Mais il faut surtout que je trouve une excuse, je ne peux pas m'enfuir en courant sans une bonne explication, sinon, moi aussi, je vais être suspecte. Et si jamais j'ai raison et qu'il me veut vraiment du mal, je vais finir pas m'attirer encore plus de problèmes.
Heureusement, j'ai apparemment encore un peu de chance dans mon malheur puisque la voiture de sa fille aînée arrive dans la propriété et si j'en juge les vidéos de surveillances, elle est avec son mari et sa fille. Dur à dire s'ils viennent d'arriver où s'ils sont allés faire un tour dans les alentours de Seattle, mais chose sûre, c'est que moralement, Bill Gates devrait profiter de sa petite-fille plutôt que s'occuper de moi. Ce n'est pas l'excuse parfaite, mais elle fera tout de même l'affaire, je ne suis pas très exigeante pour le coup.
— Arrêtez, lassez tomber, vous n'aurez jamais le temps de faire tout ça avant ce soir, occupez-vous plutôt de votre famille, je sais que c'est très important pour vous. Je vais rentrer et vous, vous n'aurez qu'à préparer mon nouveau programme et vous me l'importerez qu'une fois qu'il sera prêt, ce sera beaucoup mieux que de le faire dans la précipitation comme ça... Je reviendrai vous voir, sans faute dès que ce sera prêt... Ou alors vous viendrez à San José, après tout, il faudra que Kakalina s'assure de son efficacité, ça ne s'improvise pas un programme pareil, je n'aurais même pas dû vous déranger, c'était idiot.
Je ne suis absolument pas sûre de ce que je suis en train de faire, il y a même de forte chance que ce soit une connerie monumentale. Je ne sais même pas si j'ai pris la bonne décision, après tout, suis-je réellement prête à passer plusieurs jours supplémentaires avec mes bugs ? Sûrement pas, mais ce qui est fait est fait, j'ai suivi mon instinct, maintenant, reste à voir si j'ai bien fait... Impossible à dire. En tout cas, mon petit discours tient la route, j'aurais même pu le faire sans avoir l'excuse de sa famille.
Après, pas sûr qu'il est fonctionné, Bill Gates paraît quand même bien mécontent. Mais en y réfléchissant bien, ce n'est pas totalement insensé, il faut quand même prendre en compte le fait que je suis venue le déranger chez lui et que finalement, j'ai changé d'avis. Je pense que n'importe qui dans la même situation serait un peu énervé par mon comportement. Surtout qu'il faut aussi prendre en compte le risque que je représente en restant quelques jours de plus avec mes bugs.
— Tu es sûre de toi ?
Absolument pas...
— Oui, certaine, il vaut mieux que je rentre, désolée pour le dérangement... C'était une erreur, je n'aurais pas dû venir aussi précipitamment, un simple appel aurait suffi. Encore désolée...
— Ce n'est rien... affirme-t-il, les dents serrées de mécontentement.
Je lui dis en revoir et à une prochaine fois, avant de partir. Je descends les escaliers, veillant scrupuleusement à ne croiser personne et je sors de la maison. Je traverse alors le « jardin » et je n'attends même pas que quelqu'un m'ouvre le portail, je passe simplement par-dessus, c'est vrai qu'il est assez haut, mais ce n'est pas au-delà de mes capacités. Dès que je suis à l'extérieur, je peux enfin regagner ma voiture et rouler jusque chez moi. Même en allant légèrement moins vite qu'à l'allée, j'arrive tout de même devant ma maison un peu après minuit.
Et malgré l'heure tardive, ma mère m'attend de pied ferme et je sens Fauve se réveiller dès que je gare ma voiture, la connaissant, elle ne devrait pas dormir depuis très longtemps. Je n'ai même pas peur du savon que je vais avoir en rentrant, je m'y suis préparée. Ça fait déjà des heures que je reçois des messages de plus en plus paniqués de la part ma tutrice qui se demande ce qui s'est passé et auxquelles je n'ose pas répondre, alors je l'ai bien cherché.
— Où étais-tu passé ? Et que t'est-il arrivé ? m'agresse ma mère dès que je passe la porte.
Elle ne hurle pas, pas encore, mais c'est sans doute uniquement pour éviter de réveiller sa fille et je ne serai sûrement pas celle qui lui signalera que ma sœur l'est déjà, ça me va très bien ainsi.
— Comme je te l'ai dit par SMS, je suis allé voir Bill Gates à Medina, mais il n'a malheureusement pas pu arranger mes bugs, alors je suis revenue.
J'ai à peine fermé la porte que j'entends déjà ma sœur se lever de son lit... Elle est incroyable. Et diablement discrète, c'est quasiment imperceptible, elle ne l'est pas assez pour moi, mais presque. Apparemment, elle ne veut pas rater un mot de ma discussion avec notre mère, elle craint peut-être que je ne lui explique pas à elle aussi, alors que j'en ai bien l'intention pourtant.
— Tu bugues ?! s'inquiète ma tutrice n'étant pas au courant de ça, Fauve le sait, mais elle non...
— Oui, mais ce n'est rien de grave, ne t'en fait pas, c'est juste que je voulais y remédier sans attendre presque un mois.
— Oh, Ronii... ça va aller ?... J'espère pour toi que ça ne va pas s'étendre, tu sais ce que c'est les problèmes informatiques...
C'est exactement pour ça que je n'ai pas voulu lui en parler avant, maintenant elle s'inquiète pour moi... Heureusement, comme j'aurai pu le deviner, elle n'a pas peur, elle ne craint pas pour la sécurité de sa famille, elle s'inquiète seulement pour ce qui peut se passer pour moi... Sans doute une très grande preuve de confiance que je ne suis pas sûre d'encore mériter.
— Merci, maman, tu es très rassurante dans tes paroles. Bon, je vais monter, Fauve doit attendre de mes nouvelles avant de s'endormir, je ne préfère pas qu'elle passe la nuit éveillée par ma faute...
— Mais... oh Fauve... soupire-t-elle. Je compte sur toi pour qu'elle aille en cours demain, il est hors de question qu'elle sèche à cause de toute cette histoire.
— Promis maman, bonne nuit.
Je commence à monter les escaliers, faisant exprès de faire grincer une marche, juste au cas où Fauve veuille faire semblant de dormir. Et ça ne rate pas, je connais bien ma sœur mine de rien, elle est incorrigible. Pourtant, elle sait bien que je l'entends parfaitement. En plus, pour le coup, elle n'est pas discrète, je suis prête à parier que ma mère l'entend sans mal vu comme elle s'est précipitée sur son matelas. Honnêtement, on est presque sur le ressort des faux ronflements, c'est vraiment un réflexe enfantin pour éviter de se faire gronder. Et vu le rouge qui lui monte aux joues quand je rentre dans sa chambre, elle en a conscience et elle en a honte.
— Qu'est-ce qu'il s'est passé ? demande-t-elle faisant comme si de rien été.
Je ne vais pas faire de commentaires, mais à un certain stade, ça ne fonctionne pas... Surtout qu'elle ne fait même pas un peu semblant de dormir alors qu'il est minuit, elle n'a même pas pris la peine de s'allonger, elle est assise sur son lit. Même sans une ouïe ultradéveloppée, je devinerai qu'elle était debout quelques secondes plutôt et je ne parle même pas de son pouls qui est significativement élevé.
— Tu as entendu quoi de ma discussion avec maman ?
— Presque tout, mais je ne me contenterais pas d'avoir si peu de détails, je veux tout savoir. Du comment tu as bugué au pourquoi Bill Gates n'a rien pu faire. Je veux bien savoir aussi pourquoi Elijah est venu me voir en fin de matinée pour me demander où est-ce que tu étais.
— Avoue que tu as deviné une partie de mes bêtises, remarqué-je par principe avant de lui expliquer presque tout.
Je ne lui épargne presque aucun détail, je n'en ai pas besoin, et je pense de toute manière qu'elle en sait déjà trop pour que je puisse lui mentir sans qu'elle le voie. J'essaye tout de même de faire assez court pour qu'elle ne reste pas éveillée jusqu'à deux heures du matin. Elle est assez raisonnable pour éviter de me poser des questions supplémentaires, même si elle semble en mourir d'envie, elle me les dira sans aucun doute demain.
Déjà, problème numéro un, je lui donne quoi comme explication, parce que c'était bien marrant de fuir hier, mais maintenant, je fais quoi ? Il en faut, c'est indéniable, mais quoi ?
Problème numéro deux, et pas des moindres, comment je suis censée me comporter après l'avoir embrassé ? Je peux difficilement faire comme si de rien été et je ne suis de toute manière pas sûre qu'il me le permettrait, ce que je peux très bien comprendre.
Et problème numéro trois, comment je veux réagir, comment je veux me comporter, ce que je veux lui dire. Parce que c'est une chose d'avoir des obligations morales, mais c'en est une autre d'être sincère. Et même pour ça, je ne sais pas quoi faire...
Je ne sais même pas comment il va réagir, je suis peut-être partie juste après, mais il peut ne pas avoir correctement interprété les signes ou avoir tout de même de l'espoir, vu comme il est entêté, ce ne serait pas étonnant. Une part de moi espère très franchement qu'il est laissé tomber, mais une autre part de moi ce serait très déçu que ce soit le cas. Même dans mes espérances, je suis contradictoire.
Comme ça aurait pu être prédit, Elijah m'attend de pied ferme devant mon casier et semble bien décidé à m'empêcher de me dérober une seconde fois.
— Salut... hésité-je en sortant quelques affaires du compartiment. Ça te dirait qu'on ne parle pas du tout de ce qu'il s'est passé ? risqué-je me doutant bien que ce serait un échec cuisant.
On dit souvent que les mecs ont tendance à se défiler après avoir embrassé une fille, mais moi, je suis encore pire. Mais vu le soulagement que je lis sur son visage, ça ne lui pose apparemment aucun problème, tant mieux après tout.
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