100000 (32.2)

 Nous continuons de parler pendant tout le vol, mais de sujets plus légers. J'essaye bien à une ou deux reprises de l'inciter à se reposer encore un peu, mais, quand il s'y met, il est aussi têtu qu'une mule. Tant pis pour lui, ce n'est pas moi qui aie dormi que quatre heures cette nuit et qui risque de devoir dormir en voiture au moins la nuit prochaine. Vers le milieu du trajet, l'actualité me donne tort par rapport à l'inefficacité des brigades nocturnes de Californie, ils ont peut-être été à la traîne pour ce qui concerne le lancement officiel de l'enquête, mais ils se sont rattrapés. Pour cause, la presse américaine annonce déjà notre présence dans le vol pour l'Italie et le plus embêtant, l'avis de recherches a été reconduit dans le pays. Traduction, nous serons directement des fugitifs à notre arrivée.

Ce n'est pas grave, je coupe scrupuleusement chaque appel de la centrale annonçant notre présence dans l'appareil et il ne nous restera plus qu'à passer inaperçus à notre arrivée, ce qui ne devrait pas être très compliqué. Normalement, la procédure, lorsqu'il y a des criminels dans un avion, c'est de les retenir dans l'appareil jusqu'à ce que les policiers débarquent, donc ils ne s'inquiéteront pas avant plusieurs minutes et d'ici là, nous ne serons plus là, je ne suis pas complètement désorganisée encore. Après un bref repérage, je constate que la photo d'Elijah ne circule pas encore, ça va être à notre avantage, il ne me reste plus qu'à me faire discrète. Afin de ne pas perdre de temps, je nous réserve également une voiture dans l'agence de location de l'aéroport, comme ça, il nous restera plus qu'à la récupérer à notre arrivée. Je n'ai plus qu'à espérer que la situation ne déraille pas trop vite, ce qui n'est pas totalement garanti.

Au cas où, je préviens tout de même Elijah de mon nouveau plan, il ne semble pas totalement convaincu, mais il s'est fait à l'idée d'être en cavale, il paraît prêt, à voir s'il l'est vraiment.

Une fois que l'avion a atterri, je sors de l'un des sacs une paire bonnets, sweats, d'écharpe et je profite du soleil pour des lunettes teintées, rien de tout ça n'a de raison de choquer qui que ce soit, il fait dix degrés dehors et tous les passagers sont en train de se rhabiller. Je passe un de chaque à Elijah et j'enfile le sweat avant de mettre le bonnet en veillant bien à faire disparaître ma masse rousse sous le tissu, je sais bien que c'est ce que j'ai de plus reconnaissable, puis je cache le reste de mon visage avec les autres accessoires. Et dès que l'appareil est à l'arrêt, nous nous dépêchons de descendre, sans pour autant nous faire remarquer, histoire d'être dehors avant que les premières personnes retireront leur mode avion et reçoivent l'alerte enlèvement avec nos visages placardés à la une.

Après avoir marché plusieurs mètres pour rentrer dans l'aéroport, je découvre un peu effrayée qu'il y ait déjà deux policiers qui attendent. Par chance, ils ne pensent pas un instant que nous pouvons sortir de l'appareil, ils sont donc sagement en train de discuter ensemble, mais ils ont quand même toutes leurs chances de nous repérer. Et quand bien même ce ne serait pas le cas, ça signifie que nous aurons beaucoup moins de temps que prévu pour disparaître, impossible maintenant de perdre au moins dix minutes à récupérer une voiture de location alors que les policiers s'attendent à ce que nous fassions ça. À côté de moi, j'entends le cœur d'Elijah battre à tout rompre, il n'a aucune confiance en la situation délicate. Moi non plus, mais je le gère mieux.

Improvisant encore et toujours, j'entraîne Elijah le plus loin possible des policiers, tentant au passage de nous dissimuler au maximum dans le peu de foule qu'il y a devant nous. Heureusement, dans notre malchance, les deux hommes ne semblent absolument pas nous remarquer. Par contre, dans le doute, je ne suis pas près de retirer ce fichu bonnet. Après plusieurs mètres, par contre, je me résigne à enlever les lunettes, ce n'est pas très discret à l'intérieur.

Maintenant, il ne nous reste plus qu'à mettre en action le plan B, celui que je voulais éviter pour ne pas aggraver notre cas, voler une voiture, il n'y a plus beaucoup d'autre choix.

— Mais... ? s'étonne Elijah lorsque je l'emmène à l'opposer de l'agence de location que nous apercevons déjà.

— Changement de plan, si nous louons une voiture, nous allons nous faire choper. Sans parler que nos têtes sont placardées partout, à tout moment, on peut nous reconnaître. On passe au plan B.

— Il y avait un plan B ? s'étonne-t-il.

— Absolument pas, j'improvise complètement.

Nous avons approximativement cinq minutes pour disparaître totalement. Easy... Je n'y crois même pas. Mais je vais bien trouver quelque chose. Je me connecte aux réseaux de surveillance et je récupère au passage le plan de l'aéroport pour tenter d'identifier les angles morts des caméras de surveillance et les points de fuite. Il n'y en a pas beaucoup, l'aéroport est plutôt bien quadrillé, ils ont un bon système de sécurité, même les parkings souterrains sont au point... Par contre, le parking extérieur n'est pas envahi de caméras, il y a plusieurs angles morts. Reste à savoir comment l'atteindre. D'après le plan, il y a une sortie de secours juste à côté des toilettes et aucune des deux portes ne sont visible depuis les caméras et presque par chance, elles n'ont pas non plus de caméras à l'intérieur. Après vérification, l'escalier mène bien à l'extérieur, c'est la sortie parfaite servie sur un plateau doré.

— Viens à côté de moi et ne t'éloigne surtout pas, OK ? Je vais tenter de nous faire disparaître des radars.

Je le conduis à travers le hall en veillant bien à prendre les endroits les plus noir de monde pour que nous nous fondions dans le paysage et que nous soyons plus difficilement repérables. Je tente au passage de nous placer derrière de personnes plus grandes que nous pour qu'elles nous cachent un moins un peu nos visages aux yeux des caméras. Après plusieurs petites minutes et quelques détours, nous finissons par atteindre la cage d'escalier, nous descendons alors deux étages et nous rejoignons l'extérieur où nous sommes peut-être plus remarquables, mais moins surveillés. Une fois dehors, nous ne bougeons plus le temps que je juge les voitures pour savoir laquelle est la plus simple à voler et où nous ne devrions pas nous faire voir par les caméras.

Je finis par en trouver une, une petite mini, ce n'est pas le modèle le plus rapide, mais elle a le mérite d'être accessible dos aux caméras et d'être électronisé, ce qui me permet de la démarrer informatiquement sans avoir besoin de casser le neiman pour remplacer la clef. En plus, je peux la déverrouiller et de la démarrer sans avoir recours à la forcer, ce qui est un gros avantage et un gain de temps.

Je conduis Elijah jusqu'à elle et je lui demande de monter à l'arrière, s'il fait le tour, son visage sera visible, il montera place passagère plus tard, pour l'instant, ce n'est pas la priorité. Je monte et nous partons vers la sortie du parking. Tout en conduisant, je coupe entièrement et définitivement la géolocalisation de la voiture, je n'ai pas envie d'être pistée à la trace, les caméras sont déjà assez contraignantes comme ça. N'étant jamais trop prudente, je prends uniquement les petites routes pour être loin des caméras de surveillances des autoroutes, au moins comme ça, si jamais nous avons été repérés, ils ne pourront pas vraiment savoir où nous allons.

Après quelques détours uniquement par précaution, je prends la route pour rejoindre la grotte de mes parents. Le trajet est un peu long, mais il passe plutôt vite, même si je m'efforce de rester dans les limitations de vitesse, ce n'est ni le moment de se faire flasher ni celui de démarrer une course-poursuite, encore moins dans une voiture volée. Au passage, je guette activement l'évolution de leur recherche... J'ai dû leur donner déjà pas mal de fil à retordre puisque les autorités ont bloqué tout l'aéroport en réalisant que nous n'étions plus dans l'avion. Au moins, ça nous a fait gagner un sacré temps. Sans compter qu'ils mettent encore plus de temps à contacter les propriétaires de toutes les voitures qui ont quitté l'aéroport entre notre arrivée et la fermeture du bâtiment.

Quand nous parvenons enfin à destination, les policiers épluchent scrupuleusement toutes les caméras de surveillances du pays à la recherche de notre véhicule. Je leur souhaite bonne chance, ces trois dernières heures, nous avons dû être enregistrés par cinq caméras, six s'ils regardent vraiment très très bien. Même informatiquement, ça va leur prendre des heures. Une fois dans le village le plus proche de la grotte, je me gare sur un parking, qui est soit un peu éloigné du chemin de promenade qui nous mènera au plus près de la caverne, mais qui a l'avantage indéniable qu'un mini, exactement comme la nôtre, y est déjà garé. Je ne sais pas si ça nous servira, mais au cas où, ça peut être utile.

Nous descendons de voiture et nous faisons le reste du trajet à pied, finissant même par gambader dans la broussaille pour faire le dernier kilomètre. Nous atteignons tout de même sans trop de difficulté le flanc de la montagne aux parois rocheuses creusées par l'eau. Je rentre dans l'une des crevasses, la reconnaissant sans mal grâce à sa forme caractéristique qui a même était représentée sur l'une des œuvres de mon père, Salvator Mundi. Officiellement, je ne suis pas certaine que tout le monde connaisse cette « erreur » au niveau de la boule de cristal, je ne suis même pas certaine que tous les membres du projet RONII soient au courant. La sphère est juste la seule apparaissant sur l'un des tableaux de De Vinci et elle est abordée dans ses écrits à propos de la grotte, le lien est donc évident, du moment qu'on a une intelligence supérieure.

Et maintenant, je suis persuadée que c'est un message laissé pour moi, tout concorde, c'est même Salaï qui a servi de modèle à l'œuvre et les proportions sont remarquablement exactes. Je suis même prête à partie que les trois points lumineux sont des distances pour trouver le lieu où se trouvent leurs lettres. Je reconnais que mon expédition part sur des preuves un peu faibles, mais je suis certaine pour le lieu, alors au pire, j'explorerai toutes les grottes. De toute manière, je ne peux pas m'attendre à mieux que des mystères de la part de l'homme d'art le plus étrange de l'histoire.

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