Chapitre 45 : Elisabeth, ô Elisabeth

Trois jours déjà s'étaient écoulés depuis la dispute entre Jean-Pierre et Gwen. Et pour l'instant, ni l'un, ni l'autre ne semblait disposé à faire le premier pas pour se réconcilier. Alors, ils s'évitaient dans les couloirs, se jaugeaient du regard de temps en temps mais leur lèvres ne se desserraient pas tant qu'ils étaient dans la même pièce. 

Les membres de l'Unità Speciale l'avait bien entendu remarquée, cette ambiance alourdie entre les deux époux. Et si Leone les insultait intérieurement d'être idiots, Bruno soupirait face à la situation et Mista et Trish, parfois aidés de Narancia, essayait de concocter mille plans pour parvenir à les laisser dans une pièce tous les deux pour qu'ils puissent parler. 

Mais les deux français se défilaient en permanence, se fuyant mutuellement. 

— C'est quand même bête.. murmura doucement Trish, regardant à travers la fenêtre l'éclat azuréen de la mer Tyrrhénienne.  

— Mmh ? Pardon, je n'ai pas entendu, répondit Mista, levant les yeux de son livre. 

— Je disais que c'est idiot.

— De quoi ?

— Cette situation. Tu te rends compte qu'ils pensaient tous les deux que l'autre était mort ?! Et maintenant qu'ils sont enfin réunis, au lieu de bénir chaque instant passé ensemble, ils se disputent et refusent de se parler..

— Tu sais, ce n'est pas tellement nos oignons, soupira Mista en refermant son livre et en s'étirant sans grâce sur le sofa où il s'était avachi. Mais je comprends ce que tu veux dire. 

La fille de Diavolo lâcha le rideau de gaze blanche et fixa de ses pupilles vertes le visage mat de Mista. 

— Ils en ont de la chance pourtant.. De s'être trouvés. J'aimerais bien moi aussi.. 

Elle avait à peine murmuré ces derniers mots mais Mista, tendant l'oreille à point nommé ricana avant de murmurer : 

— Tu seras spéciale aux yeux de quelqu'un un jour, je ne m'inquiète pas pour toi. D'ailleurs, c'est déjà probablement le cas.

La jeune femme fronça les sourcils, avant de demander : 

— Qu'est-ce que tu racontes ?! 

 Mista se rassit correctement et appuya ses coudes sur ses genoux en souriant en coin avant de chuchoter, d'un air malicieux : 

— Me fais pas croire qu'il ne se passe rien avec Bruno, Trish.  

Dans la seconde, après un léger air de surprise, le faciès de la jeune femme vira à la même teinte que ses mèches folles alors qu'elle baissait les yeux vers ses pieds. 

— N'importe quoi.. 

Le jeune homme au bonnet esquissa un air amusé, décidant, dans un geste de mansuétude de ne pas insister et s'apprêtait à retourner à sa lecture silencieuse quand la porte de la bibliothèque s'ouvrit toute grande. 

Giorno venait d'entrer et fixa du regard les deux présents. 

— Vous êtes là. Je cherche Gwen, vous l'avez vue ?

— Non. 

— Et les autres ?

— Leone répète je crois, Narancia étudie sa leçon de mathématiques et Bruno.., commença Mista, jetant un coup d'œil à la jeune femme, la regardant se tendre à l'évocation de ce prénom. 

— Oui, je sais, il n'est pas encore revenu de sa mission d'hier, conclut Giorno. 

— Est-ce que ça lui prendra encore du temps ? interrogea timidement la jeune femme tandis qu'en arrière plan Mista riait sous cape. 

— Cela dépendra du temps qu'il mettra pour retrouver la Squadra..

Un silence accueillit ces paroles. La Squadra di Esecuzione se cachait depuis quelques temps, après avoir essayé de kidnapper à deux ou trois reprises Trish pour faire chanter Diavolo. Bien diminuée, elle ne comptait plus que trois membres encore en vie. Chiaccio, Risotto et Prosciutto, les autres ayant perdu la vie soit assassinés par le boss, dans le cas de Sorbet et Gelato, soit par le Bucci-gang qui protégeait Trish à l'époque des attaques.

— Enfin.., reprit le nouveau chef de Passionne, il ne devrait plus trop tarder. J'ai quelque chose à faire donc si vous voyez Gwen, donnez-lui ça. 

Il glissa entre les doigts de la jeune femme une note pliée soigneusement pliée en quatre et sortit de la pièce. 

Trish regarda alors Mista, qui reprenait sa lecture avant de dire : 

— Je vais chercher Gwen. 

Le brun hocha la tête en tournant la page et lâcha brusquement : 

— À toute. 

Amusée, la jeune femme partit à la recherche de la française qu'elle finit par trouver rapidement, tout en haut de la tour d'observation de la demeure. 

— Je me doutais bien que tu serais là, ça te ressemble bien. 

La brune se retourna, esquissant un sourire forcé. 

— Tu trouves ?

— Ouais. J'ai quelque chose à te donner de la part de Giorno. 

— Ah ? Pourquoi ?

— Aucune idée. 

Quand Trish lui remit le papier, Gwen l'ouvrit et fronça les sourcils. 

— Bon je file, il veut me voir séance tenante

Gwen avançait lentement dans les jardins luxuriants du quartier général de Passionne, la note de Giorno serrée dans sa main tremblante. La roseraie se trouvait au fond du domaine, entourée de hautes haies qui formaient un labyrinthe naturel. Le parfum enivrant des roses en pleine floraison l'apaisa légèrement, mais l'anxiété continuait de marteler son esprit. Que pouvait bien lui vouloir le nouveau Parrain ?

Lorsqu'elle pénétra enfin dans la roseraie, ses yeux s'écarquillèrent de surprise. Au milieu des rosiers se tenait une femme à la chevelure blonde, élégante et rayonnante, de dos. Gwen mit quelques lentes secondes à reconnaître la silhouette de sa meilleure amie, Elisabeth. Le choc de la retrouver ici, après tant d'années, lui fit perdre son souffle.

— Elisabeth ? murmura-t-elle, la voix cassée par l'émotion.

La blonde se tourna vers elle, un large sourire illuminant son visage. Elle se précipita vers Gwen et l'embrassa avec chaleur, la serrant fort contre elle.

— Gwen ! s'exclama Elisabeth, les larmes aux yeux. Mon Dieu, tu es en vie !

Gwen, submergée par les émotions, sentit ses propres larmes couler. Elle enlaça son amie de toutes ses forces, savourant ce moment inattendu et précieux.

— Comment... Comment es-tu arrivée ici ? demanda Gwen en s'écartant légèrement pour regarder Elisabeth dans les yeux.

Elisabeth essuya ses larmes et sourit à nouveau.

— Giorno Giovanna m'a contactée il y a quelques jours, expliqua-t-elle. Il m'a annoncé que tu étais en vie et que tu étais ici, chez lui. Je n'ai pas hésité une seconde à venir te voir. il est un peu flippant d'ailleurs, j'ai appris qu'il était le chef de la mafia, ça m'étonne pas qu'il ait fait le lien entre toi et moi.

Elisabeth était souriante, et ressemblait à un rayon de soleil tombé du ciel. Gwen, émue, ne sut que dire pendant les quelques secondes où la mère de Jolyne racontait les péripéties de son voyage en avion et en train pour rejoindre Naples depuis San Francisco.

Les paroles de son amie réchauffèrent le cœur de Gwen. Malgré les années et les épreuves, l'amour et l'amitié semblaient toujours capables de briser les barrières du temps.

— Oh, Elisabeth, tu m'as tellement manqué, murmura Gwen, ses mains enserrant celles de son amie. Toutes ces années, je pensais que je ne te reverrais jamais, que je finirais par mourir et que..

Elisabeth hocha la tête, ses propres larmes roulant sur ses joues.

— Toi aussi, tu m'as manqué, Gwen. Chaque jour, je pensais à toi, croyant que tu étais morte.. Et maintenant te voilà, en vie, et aussi belle que jamais.

Gwen ne put s'empêcher de rire doucement entre ses larmes.

— Je doute d'être aussi belle que jamais, mais merci.

Le regard amusé de la blonde lui arracha un sourire.

Soudain, elle se souvint de Giorno. Pourquoi l'avait-il convoquée ici, et pourquoi avait-il fait venir Elisabeth ? Cherchant à comprendre, elle se tourna vers les bosquets, scrutant les alentours pour voir si le jeune chef de la mafia était à proximité.

C'est alors que Giorno apparut, sortant de l'ombre d'un grand cyprès. Il arborait son éternel air calme et confiant, un léger sourire aux lèvres.

— Giorno, commença Gwen, hésitante. Pourquoi... pourquoi tout cela ?

Le blond s'approcha d'elles, ses yeux verts pétillant de gentillesse.

— Je pensais que tu aurais besoin de soutien, Gwen, dit-il doucement. Après tout ce que tu as traversé, retrouver une amie proche est peut-être ce dont tu avais le plus besoin.

Gwen, touchée par cette attention, acquiesça. Elle réalisa que malgré tout ce qu'elle avait vécu, elle n'était pas seule. Giorno avait vu au-delà de sa façade dure et lui offrait une chance de se reconstruire.

— Merci, Giorno, murmura-t-elle, sincèrement reconnaissante.

Le chef de Passionne hocha la tête.

— Tu te rappelles de l'épisode du parapluie et du croissant ici, il y a quelques années ? Je vous suis aussi redevable pour votre gentillesse ce jour-là. Prenez le temps qu'il vous faut. Vous avez beaucoup à rattraper, toutes les deux.

Puis, avec une élégance discrète, Giorno s'éloigna, laissant Gwen et Elisabeth seules dans la roseraie, entourées de la beauté et du parfum des fleurs.

— Alors, raconte-moi tout, dit Elisabeth en s'asseyant sur un banc de marbre, tirant doucement Gwen à ses côtés. Il y a tant de choses que je veux savoir.

Gwen prit une profonde inspiration, prête à partager son histoire, ses douleurs et ses espoirs avec sa meilleure amie. Dans ce havre de paix, elle sentait que, pour la première fois depuis longtemps, elle pouvait enfin commencer à guérir.

Et ce fut difficile. Très difficile. Elle ne lui cacha rien. Elle commença par lui avouer qu'elle possédait un stand. À la vue du regard dubitatif en face d'elle, elle se lança, racontant tout depuis le début. Le départ de Jean-Pierre pour l'Italie, la nouvelle de sa grossesse, la disparition de son mari, l'attaque de Gelato. L'horreur de la découverte de sa survie dans l'ambulance, alors que Raphaël gisait mort à ses côtés. Sa peine, sa colère et son désir de vengeance, l'abandon de son identité, les débuts de ses recherches, de ses assassinats, les quelques jours en présence du Bucci-gang, leur combat au Colisée et leur victoire contre Diavolo, son réveil et sa dispute avec Jean-Pierre.

Lorsqu'elle eut fini, Elisabeth resta silencieuse un long moment avant de dire : 

— Tout ce que tu as traversé est inimaginable. Je n'arrive même pas à comprendre comment tu as pu survivre à tout ça. Tu es incroyablement forte, beaucoup plus que je ne le pensais. 

— Je ne sais pas si c'est de la force ou de la folie, répondit-elle avec un sourire triste. Parfois, je pense que c'est un peu des deux.

Elisabeth prit une profonde inspiration et serra les mains de Gwen dans les siennes.

Le coeur lourd, elle ajouta : 

— Et je comprends mieux aussi Jotaro. 

— Pourquoi ? demanda Gwen. Il ne va pas bien ?

— Ce n'est pas ça, avoua à demi-mot la blonde, l'air peiné. Nous nous sommes séparés, ça fait trois semaines.

La brune resta coite, surprise avant de murmurer :

— Quoi ?! Mais.. pourquoi ?!

Elisabeth soupira longuement avant de dire : 

— Le jour où il m'a annoncé ta.. mort.. j'ai su que les choses ne seraient plus jamais les mêmes. Jean-Pierre avait disparu, probablement été tué et Raphaël et toi.. aussi. Je pense qu'il en a été véritablement choqué. 

La brune ne disait rien, se contentant d'écouter attentivement sa meilleure amie. 

— Il devait s'en vouloir. Pour son ami, pour toi et pour son filleul. Avec le temps, il se montrait de plus en plus distant. Il partait de plus en plus longtemps et quand il revenait, il restait à peine quelques jours.. Enfin bref.. ça allait de plus en plus mal entre nous, surtout vis-à-vis de Jolyne. À la fin, on faisait même chambre à part. Ne m'en veux pas, Gwen, mais j'en ai eu assez. Je voulais de l'affection, certes, mais surtout, de la stabilité pour Jolyne. Et c'était impossible tant que son père n'acceptait pas de faire des efforts. Je lui ai posé un ultimatum et le lendemain, il était parti de l'appartement, avec quelques affaires. Je ne l'ai pas revu depuis. 

Gwen, touchée par les paroles de son amie, sentit une vague de tristesse l'envahir.

— Tu ne veux pas le retrouver ? 

La blonde leva les yeux vers le ciel bleu. Ce début de mois de juin 2001 était doux et il faisait chaud. 

— Je sais ce que tu penses, Gwen. Mais je ne suis pas comme toi. Je veux dire.. Jean-Pierre et toi, ça a toujours été évident. Fusionnel. Je ne sais pas comment dire ça.. Vous êtes faits l'un pour l'autre. Jotaro et moi.. on était trop différents. Et il n'a jamais été assez sincère avec moi pour me parler à coeur ouvert de ce qu'il était vraiment..

La brune ne trouva rien à dire et Elisabeth reprit : 

— Ne t'en fais pas pour moi. Je m'en remet doucement. C'était un choix réfléchi et je ne regrette rien, Jolyne va beaucoup mieux depuis. 

Les deux amies restèrent un long moment dans la roseraie, profitant de la quiétude du lieu et de la compagnie de l'autre. Dans cette bulle d'approximative sérénité, Gwen commença à envisager l'avenir avec un peu plus d'espoir et de confiance.

— J'ai quand même une chose à te dire, Gwen. 

— Oui ?

— Il est hors de question que toi et Jean-Pierre vous gâchiez votre relation. Après tout ce que vous avez vécu, c'est vraiment puéril de refuser de se parler comme ça.  

La française baissa les yeux sur ses mains dont elle triturait nerveusement les doigts. 

— Il m'a accusé d'être un assassin. Il n'a même pas cherché à comprendre pourquoi j'ai fait ça.. Il ne sait pas ce que ça m'a fait de ne pas avoir pu.. 

Elle ne parvint pas à finir sa phrase et fondit en larmes. 

— Il ne sait pas non plus que j'ai perdu deux enfants ce jour là. Pas seulement Raphaël.

La mère de Jolyne posa une main sur celle de Gwen et assura avec un air sérieux. 

— Tu dois lui dire. Et il doit comprendre aussi que c'est en partie de sa faute si les choses ont dégénéré à ce point. 

Gwen, les yeux baignés de larmes, sentit le poids de ses émotions l'envahir complètement. La confession de sa perte, si longtemps refoulée, lui serrait le cœur. Elisabeth, voyant son amie en détresse, la serra contre elle avec douceur, offrant un réconfort silencieux.

— Je ne sais pas comment lui parler de tout ça, murmura Gwen entre deux sanglots. Il est tellement en colère, tellement fermé...

— Parfois, la colère cache simplement une immense douleur, Gwen, répondit Elisabeth d'une voix douce mais ferme. Vous avez tous les deux souffert, mais vous ne pourrez jamais avancer sans une vraie conversation. C'est difficile, je sais, mais il faut essayer. Crois-moi, je suis bien placée pour te dire ça.

Gwen hocha la tête, essayant de se ressaisir. Elle essuya ses larmes d'un revers de main, inspirant profondément.

— Peut-être que tu as raison. Je dois lui parler, lui expliquer. Peut-être qu'il comprendra.

Elisabeth lui sourit avec bienveillance.

— J'en suis certaine. Et si jamais tu as besoin de soutien, je suis là. Ne l'oublie jamais.

Gwen se sentit légèrement apaisée par ces paroles. La présence d'Elisabeth, sa sagesse et son soutien inconditionnel, lui donnaient la force nécessaire pour affronter Jean-Pierre et tenter de réparer les fissures de leur relation.

— Merci, Elisabeth. Vraiment. Tu n'imagines pas à quel point cela compte pour moi.

Elisabeth serra une dernière fois la main de son amie, puis elles se levèrent du banc de marbre et commencèrent à se diriger vers la sortie de la roseraie.

***

Gwen se tenait devant la porte de la chambre de Jean-Pierre, la main tremblante. Elle avait pris une profonde inspiration avant de frapper doucement. Jean-Pierre, assis sur le lit, leva les yeux vers elle, son visage fermé et indéchiffrable au moment où elle ouvrait la porte.

— Jean-Pierre, commença-t-elle, la voix tremblante. Il faut que nous parlions.

Il resta silencieux un moment, puis acquiesça lentement, l'invitant à entrer. Gwen ferma la porte derrière elle et s'avança prudemment vers lui.

— Je sais que tu es en colère, que tu te sens trahi. Mais nous devons trouver un moyen de nous parler, de comprendre ce qui s'est passé, dit-elle d'une voix douce mais déterminée.

Jean-Pierre serra les mâchoires, son regard sombre fixé sur elle.

— Comprendre quoi, Gwen ? Que tu es devenue une assassin ? Que tu t'es transformée en ce monstre que nous combattons ?! répondit-il avec une froideur qui transperça Gwen.

Elle sentit un frisson lui parcourir l'échine, mais elle ne pouvait pas reculer maintenant. Elle devait lui dire.

— Jean-Pierre, tu ne comprends pas. Tout ce que j'ai fait, c'était pour survivre, pour venger notre fils, pour ne pas devenir folle de chagrin !

— Et moi ? Tu as pensé à moi ? À ce que j'ai ressenti quand je t'ai cru morte ? Quand je t'ai vue devenir quelqu'un d'autre ?

Gwen sentit les larmes monter à ses yeux. Elle s'approcha de lui, tendant une main tremblante.

— Jean-Pierre, je... je voulais te le dire, je pensais aussi que tu étais mort mais...

Il la coupa brusquement, se levant du lit pour se planter devant elle.

— Mais quoi, Gwen ? Tu n'as jamais pensé à moi, à ce que cela me ferait. Tu étais tellement absorbée par ta vengeance que tu m'as oublié, que tu nous as oubliés !

La douleur dans sa voix était palpable, et Gwen sentit son cœur se serrer.

— Je n'ai jamais voulu ça, Jean-Pierre. Jamais. Je t'ai aimé, je t'aime toujours. Mais...

Sa voix se brisa, les larmes coulant librement sur ses joues. Dans un élan désespéré, elle cracha la vérité qu'elle avait si longtemps gardée en elle.

— J'étais enceinte quand tu es parti, murmura-t-elle d'une voix brisée. Cette nuit là.. j'ai perdu Raphaël et... et un autre bébé. Ils sont morts à cause de tout ça. À cause de moi, parce que je n'ai pas su.. les protéger.

Les sanglots dans sa voix s'estompèrent légèrement, laissant la place à une colère sourde. 

— Parce que ce.. putain de stand qui est le mien m'a empêché de mourir, ne m'a pas laissé crever ! 

Jean-Pierre, frappé par la révélation, resta interdit, ses yeux s'écarquillant de surprise et de douleur. Il lui saisit les bras, son regard perçant cherchant des réponses dans le sien.

— Gwen... pourquoi ne m'as-tu rien dit ?

Elle tenta de se dégager de son étreinte, mais il la tenait fermement. Elle se tortilla se dégageant.

— Je voulais te protéger, Jean-Pierre. Mais tu ne me laisses pas t'expliquer, tu ne m'écoutes pas ! Je ne voulais pas te faire souffrir davantage. 

Jean-Pierre, voyant la détresse dans ses yeux, lui saisit à nouveau les bras, resserrant son emprise, tentant de trouver les mots pour se rattraper.

— Gwen, je... je suis désolé. Je ne savais pas...

Mais c'était trop tard. Gwen, blessée par ses accusations et ses mots durs, se dégagea violemment, ses larmes redoublant d'intensité.

— Non, Jean-Pierre. Ne me touche pas. Il est trop tard pour des excuses. Trop de choses se sont passées, et tu n'as pas cherché à comprendre. J'étais venue parler. Et toi tu ne fais que me repousser. Tu ne vois que ce que tu veux voir.

Elle tourna les talons et s'élança vers la porte, laissant Jean-Pierre seul dans la chambre, envahi par la culpabilité et le regret.

***

— Alors, comment ça s'est passé ? demanda joyeusement Elisabeth, quittant un instant des yeux Trish qui jouait avec Jolyne, Narancia et Mista une partie de football qui avait l'air palpitante. La fillette riait aux éclats, essayant de maîtriser à grand-peine le ballon, sous les conseils avisés de Narancia, auto-proclamé entraîneur de foot.

Le visage de Gwen devait être défait pour que la blonde perde immédiatement son sourire. 

— Oh.. Je vois. 

Un silence s'étira avant qu'elle ne dise : 

— On sort ce soir. 

Gwen renifla peu élégamment. 

— S'il y a de l'alcool. 

La blonde sourit, passant son bras sous celui de Gwen. 

— À profusion ! On va boire pour oublier nos nazes de mecs, ajouta-t-elle avec un clin d'œil à la manieuse d'Armonia. 

La brune s'étrangla à moitié dans un rire et essuya du mieux qu'elle put ses larmes tandis que Jolyne sautillait jusqu'à elle. 

— C'est toi ma marraine Gwen ?

Un sourire étira les lèvres fines et pâles de Gwen. 

— Oui, c'est moi. 

Quand Jolyne embrassa la joue de sa marraine pour "lui rendre le sourire" selon ses mots, la brune sourit sincèrement pour la première fois depuis longtemps.  

***


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