Chapitre 8 : Réunion Sous Tension



Pas bien réveillée, Emma se servit un café avec les yeux à moitié ouverts. Déjà la fin de semaine... Elle allait pouvoir dormir demain matin... Elle n'en pouvait plus, pourquoi avait-elle commencé tout de suite à travailler pour l'été ? Elle aurait dû prendre au moins une semaine de congé... Quoique non, qu'aurait-elle donc fait toute seule dans la maison de Louis ?

Le « bonjour douce Emma » suivi d'une oreille mordillée lui fit pousser un cri de bon matin.

-Louis !

Elle avait renversé du café de partout, en plus ! Sans même le regarder, elle attrapa le torchon sur le plan de travail et se mit à éponger le carnage.

-De mauvais poil ? s'étonna-t-il en passant un bras par-dessus elle, pour saisir une tasse.

-Non, juste fatiguée.

Mince, elle en avait mis sur le sol aussi ! Se baissant jambes à moitié pliées, elle se mit à frotter, non sans entendre le brusque silence derrière elle.

-Quoi ? s'entendit-elle demander en s'appuyant sur ses genoux, pour regarder derrière.

Ah... Son café à la main, Louis regardait ses fesses d'ostensible façon.

-J'apprécie la vue, répondit-il en portant sa tasse à ses lèvres.

Se redressant aussi sec, elle pivota vers lui de façon à dissimuler son derrière.

-Mince, désolée ! Je ne me suis pas rendu compte de...

-Ne t'excuse jamais d'être sexy, Emma. C'est très stimulant de bon matin. Ah, je voulais te dire que je rentrerai dans la nuit, j'ai un... Une réunion et une séance photo, ça va prendre du temps.

-Une séance photo ? Pour tes produits ?

Il grimaça brièvement derrière sa tasse, avant de dire :

-Ouais, on peut dire ça, mes produits. D'ailleurs, tiens, la clé du portail, et voici celle de la maison. Je te donne le code de l'alarme aussi.

-Oh, merci...

-Au fait, tes copines sont mes testeuses, non ? Tu peux les inviter si tu veux, ça me permettra de recueillir leurs avis au passage.

Leur avis ? Bon sang, elles avaient hurlé leur joie quand elle leur avait donné les prototypes de Louis. A priori, ce qu'elle leur donnait était très couteux, plus de cent euros. Du plaisir de luxe, à ce stade ! Mais franchement, Emma n'avait aucune envie de connaitre le ressenti de ses copines vis-à-vis de ce produit.

Ne travaillant pas ce vendredi matin, Louis la conduisit jusqu'à sa voiture. Elle avait récupéré son épave. Le garagiste avait eu du retard, mais bon, elle roulait c'était l'essentiel. Elle faisait tache à côté de celle de son hôte, mais elle ne pouvait pas y faire grand-chose.

Sa journée de travail se passant sans encombre, elle eut largement le temps de réfléchir. Louis travaillait beaucoup, en fait. D'ailleurs, il ne lui avait plus fait de « taquineries », comme il disait, depuis quelques jours, ce qui était passablement étonnant. D'un autre côté, il était épuisé en rentrant du travail. Plus d'une fois, elle l'avait retrouvé endormi soit au bord de la piscine, soit sur le canapé, tout habillé. Comme s'il s'était écroulé dés son arrivée à la maison.

Perdue dans ses pensées, elle ne vit pas tout de suite l'homme qui venait de rentrer dans le Starbique. Son collègue était passé à l'arrière pour gérer les stocks, comme tous les après-midi, aussi se retrouva-t-elle seule face à son client.

Mince.

-Bonjour, Paul, fit-elle d'une voix égale.

-Emma.

Les yeux cernés, un pli dur à la bouche. Elle avait déjà vu ça par le passé. Si elle ne devint pas livide, elle mit la main dans sa poche par réflexe.

-Qu'est-ce que je te sers ?

-Emma... Pourquoi tu m'as fait ça ?

Pardon ? Il se foutait de sa gueule ? Ce discours ressemblait tellement à celui de son père... Derrière le présentoir, Emma s'efforça de rester totalement impassible. Le moindre sourire, le moindre changement, et la violence pouvait commencer. Ce, même si elle restait immobile, en vérité.

-Nous sommes dans un Starbique, Paul. Qu'est-ce que je te sers ?

Quelle poisse qu'ils soient seuls dans la boutique ! Et son collègue qui mettait toujours ses écouteurs quand il était dans la réserve !

-Tu m'as quitté pour un inconnu !

-Tu m'as plaquée, Paul. Tu n'as pas ton mot à dire.

-Tu n'es qu'une salope !

-Tu sais très bien que non, Paul.

-Écoute-moi, bon sang !

Il abattit son poing sur le dessus du présentoir, faisant tout vibrer. Emma fronça les sourcils.

-Je te prierais de respecter le matériel de travail d'autrui, Paul. Contrairement à toi, il y en a qui ont besoin de leur job.

-Tu n'habites pas à l'immeuble en ce moment ! Où es-tu ?

Non, mais franchement, comme si elle allait le lui dire !

-Ça ne te concerne pas. Tu commandes quelque chose ?

-Arrête de me dire de commander un truc !

-Tu es dans un fastfood. C'est le principe de commander quelque chose.

Il plissa les paupières. C'est fou comme il pouvait avoir l'air mauvais. En plus d'être con, il avait la mémoire courte. En fait, quand elle le regardait, elle ne voyait rien d'attirant. Pourquoi était-elle sortie avec lui, à la base ? Parce qu'il le lui avait demandé ? Ou simplement, parce qu'elle avait eu besoin d'un amour différent de celui de ses amies, à ce moment-là ?

Elle se sentait pitoyable en le regardant.

-Tu n'es qu'une sale petite ingrate !

-Ingrate ? Parce que tu baises mal ou parce que tu as eu la bonté de sortir avec une pauvre fille comme moi ?

Oups. Ça allait à l'encontre des règles de survies, ça. D'ailleurs, il craqua un câble à ce moment-là. Fou de rage, il sauta par-dessus le comptoir, pour l'attraper. Pas bête, Emma sortit aussitôt de la zone, pour se retrouver côté clients.

Paul poussa un cri de rage, avant de foncer tel un bulldozer. Oh mince ! Ne sachant pas quoi faire, elle fit un pas arrière... Et buta contre un torse. Son ex s'arrêta net, comme s'il décuvait d'un seul coup sa colère.

-Rassure-moi, mon petit Paul. Tu allais te mettre à genoux pour implorer le pardon d'Emma, n'est-ce pas ?

Louis ! Folle de soulagement, Emma se retint pourtant de le regarder. Elle avait peur de cesser de fixer Paul, comme s'il allait profiter d'un regard détourné pour se ruer sur elle. Néanmoins, elle vit plusieurs personnes se déployer autour de lui, menaçante. C'était qui, ça ? Elle ne connaissait pas autant de personnes !

Pas tout à fait stupide, Paul se jeta à genoux, enfin de demander pardon de façon creuse, avant de passer à côté d'elle et de Louis à la manière d'une personne qui chercherait à prendre sa revanche.

Ses épaules s'affaissèrent lorsqu'il disparut.

-Oh Louis, merci ! J'ai appelé au hasard, mais je suis vraiment contente que tu sois venu !

-Tu as appelé au hasard ? Ah, j'imagine... Il me semblait bien que l'on entendait comme du fond d'une poche.

Emme se retourna. Sa chemise à peine fermée, un bouton en moins à son pantalon de costume, il fronçait les sourcils. Crispé au possible.

-Tu as eu de la chance que nous soyons dans le coin, avec mon équipe, soupira-t-il en caressant sa joue. Tout va bien ?

-Oui, oui. J'ai été imprudente, c'est tout.

-Emma... Tu ne vas pas me sortir que c'est de ta faute si ce connard a cherché à te frapper, quand même ?

-Ben... J'aurais dû être plus prudente dans mes propos. Pourtant je sais bien comment il faut se comporter, dans ce type de situation...

-Emma, Emma... Tu es irrécupérable.

Passant un bras autour de ses épaules, il la serra brièvement contre lui tout en lui embrassant les cheveux. Le front contre torse, elle rougit. Ce geste d'inquiétude si sincère la prit au dépourvu. C'est vrai que son appel avait dû le surprendre et l'alerter.

-Je suis désolée de t'avoir interrompu dans ton travail. Ah, et vous aussi, merci pour tout, fit-elle en se tourna vers les personnes qui l'accompagnaient.

Ils lui sourirent tous. Habillés à la va-vite comme Louis, ils semblaient particulièrement calmes. Tous n'étaient pas en costumes, et les femmes avaient des robes tendues sur une paire de seins plutôt imposante.

-Ne t'en fais pas, gloussa un gaillard roux. C'est bien la première fois que l'on voit Louis aussi paniqué !

-Hé, oh, fit l'intéressé.

-Tu es Emma, n'est-ce pas ? lui demanda l'une des femmes. Enchantée, je suis Claire.

-B... Bonjour. Heu... Pour vous remercier, je vous offre un café de la maison !

Fonçant vers son poste de travail, elle demanda à chacun qui voulait quoi. Louis, lui, sortit son téléphone de sa poche pour additionner les prix des commandes. Cette andouille ne pouvait pas se payer un hôtel, il n'allait quand même pas la laisser se ruiner pour eux !

-Elle est mignonne, la petite, remarqua un de ses amis en avisant Emma.

-Touche-la et tu es mort, fit Louis sans lever les yeux de son téléphone.

La vache, c'était cher le Starbique ! Ils devaient être à une centaine d'euros avec les commandes !

-Hé hé... On craque sur son amie, patron ?

-On habite ensemble et j'ai pas envie de voir ta tronche au réveil.

-Quoi !? Toi, le célibataire endurci, tu vis avec elle !?

-Henry, ta gueule. Emma !

La jeune femme releva aussitôt le nez de sa caisse. Avec ses lunettes qui avaient à moitié glissé sur le bout de son nez, elle était craquante.

-Tu finis à quelle heure, ce soir ?

-Heu... Ah bah, mon heure est passée.

Elle ne s'en était même pas aperçue. Louis soupira en glissant son téléphone dans la poche de son pantalon de costume. Ça lui ressemblait bien.

-Allez, je te ramène à la maison. Les gars, je vous retrouve après. On n'a pas fini.

-Oh ! Mince, c'est vrai, votre réunion !

Ah. Tous ses collègues regardèrent Louis, qui grimaça en rougissant légèrement. Ils avaient tous viennoiserie et café à la main, et ils semblaient s'amuser comme des petits fous.

-J'arrive tout de suite ! Le temps de prévenir mon collègue !

Ce dernier arriva avant qu'elle n'ait eu le temps de finir de se changer. Louis en profita pour régler les consommations de tout ce beau monde, qui ne perdait pas une miette de son attitude. Ah bon sang, il allait en attendre parler, de cet épisode !

Une fois à la maison, il soupira de soulagement. Épuisée, Emma se laissa tomber sur son lit. Sans pouvoir s'en empêcher, il l'avait accompagnée jusque-là.

-Repose-toi, ordonna-t-il. Et ferme à double tour derrière moi.

-Mais... Ce n'est pas nécessaire, Paul ne sait pas où tu habites.

-C'est pas la question ! Bon sang ! Il faut que j'y retourne ! Sois sage, Emma.

Tournant les talons, il voulut s'éclipser, mais elle l'attrapa par la manche de sa chemise. Le regard plongé dans le sien, elle parut soudain indécise.

-Tu... Je suis désolée de t'avoir appelé.

-Je t'aurais passé un savon si tu ne l'avais pas fait, bougre d'âne.

-Tu t'es vraiment inquiété pour moi ?

Sa question le prit tellement au dépourvu qu'il la regarda la bouche ouverte, l'espace d'un instant. Elle était bête ou quoi ? Son cœur avait cessé de battre à l'instant où il avait compris de quoi il en retournait, le téléphone collé à l'oreille ! Il n'avait jamais couru aussi vite de sa vie !

-Oui, je me suis inquiété pour toi, Emma. Maintenant, laisse-moi partir ou je te jure que je t'embrasse sauvagement.

Elle ouvrit son adorable bouche, les yeux légèrement écarquillés. Les joues rouges. Il crut qu'elle allait lâcher sa chemise. Mais non. Son cœur manqua un battement.

Que...

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