Chapitre 15 : Derrière cette porte

Désolée pour l'attente ! Mais voilà enfin la suite ! Que voulez vous ? On a beau avoir l'histoire toute tracée dans la tête, la mettre en mot n'est pas toujours évident. Heureusement, l'inspiration a fini par revenir en espérant qu'elle reste encore un peu. Je tiens à préciser que ce chapitre est peut être à placer en M (même si j'ai du mal à placer les limites de ce genre, au moins vous êtes prévenus en cas). Sur ce, bonne lecture et à bientôt ! ^^

***

PDV Rolf

- Écoute. Parce que je ne me répéterai pas deux fois.

C'est ainsi qu'après plusieurs longues minutes de silence, Zéphyr le brisa d'elle-même. Comme pour se débarrasser définitivement d'un poids qu'elle préférait laisser sur la route pour avancer plus légère, et plus déterminée, comme à son habitude.

En fait, si la vie pouvait être résumé à un chemin qu'il fallait emprunter, un de ceux où l'on ne connaît ni l'arrivée ni même le but de ce voyage, alors celui de Zéphyr serait linéaire. Chacun de ses pas seraient assurément déterminés, vide d'une quelconque hésitation. Elle choisira toujours de se défaire des éléments pouvant freiner ses pas, ou pire les arrêter. Abandonner une part plutôt qu'abandonner le tout. C'était en quelque sorte une philosophie de vie qu'elle avait toujours adopté.

Le mien, au contraire, serait sûrement fait de monts et de collines représentant les hauts et les bas de mon existence. Mon chemin serait défini par une marche lente, et peu assurée, symbole même du doute dont serait emprunt chacun de mes pas. Sans oublier l'aspect précipité d'une démarche ne voulant pas être à la traîne. Une envie, voire un besoin vital qui me conduirait à marcher sur les pas de mes prédécesseurs. Mais aujourd'hui, alors que je ne regarde plus ces traces, je croise le chemin de l'une de ses principales propriétaires qui, elle, pour la première fois, a connu ce doute, qu'elle cachera derrière un élan de gentillesse. Comme si elle me disait que j'avais mis le temps pour signifier qu'elle m'attendait.

Peut-être répartirons nous ensemble sur une route commune ? Pour une fois, pouvoir choisir la direction ensemble pourrait rendre le voyage plus agréable ou moins fastidieux. En espérant que le prochain poids que l'habituelle meneuse laissera de côté ne soit pas ce nouveau compagnon qui l'a enfin rejoint.

Je me plaisais à représenter ainsi nos parcours et à imaginer ce croisement qui nous relierait de manière, je l'espérais plus que tout, définitive. Que cette tristesse ou ce qu'était ce sentiment, elle saurait y faire face avec ou sans moi et qu'un tel obstacle ne se représenterait pas. Mais pour l'heure, il était temps de retirer cette épine de son pied et ainsi de tendre l'oreille. Parce qu'au final, parfois, ce dont une personne a le plus besoin c'est d'être simplement écouter.

Pour autant, elle n'attendit pas de réponse. Après tout, elle n'en avait peut-être pas besoin. Peu importe que quelqu'un l'entende ou non au final. Elle n'allait se replonger qu'une fois, n'en parler qu'une fois, et même si c'était dans le vent, elle espérait que ces mots quittent son esprit.

- Tu parlais d'une odeur. Je ne la sentais vraiment pas, pas du tout même. Du moins, ça, c'était au début. Je n'eus pas besoin de longtemps pour la sentir. Je me souviens avoir à peine poussé la porte, pour qu'elle m'envahisse les narines.. alors qu'après avoir grincé sur ses gonds, seule une petite interstice s'était créée. C'était écoeurant. Ils avaient certainement bu encore et encore, de l'alcool avait sûrement coulé à flot, tout ça dans une simple cale, une simple pièce, bien trop étroite pour contenir cela. J'eus un certain mouvement de recul après ça. Poussant un léger toussotement avant de me retenir, qui sait s'il n'y en avait pas un encore conscient. Si j'avais eu le choix, je n'aurai certainement pas franchis cette porte. Je n'avais pas envie de découvrir l'antre de ces ivrognes. Pourtant, on ne pouvait prendre de risques... et puis, je ne pouvais certainement pas deviner que ce n'était rien, rien du tout.. à côté de ce que j'allais ressentir par la suite. Alors, j'ai ouvert cette porte, en grand. J'avais bien compris qu'aucun n'était même capable de comprendre qu'une intrus se trouverait dans la pièce. Et là, j'ai vu l'horreur. Ce qui avait été brusque, nauséabond, ou repoussant, était si loin de ça. C'était... C'était.. juste.. Ils méritaient.. ils le méritaient.. de mourir.. ils le méritaient, tu comprends ?!!

Sa voix devenue plus grave fut forcé de s'éteindre. Elle tenait mes bras d'une poigne d'acier et surtout tremblante. La douleur commença à irradier mes membres alors que sa transe ne semblait faiblir. Elle devait terminer, elle ne pouvait s'arrêter maintenant. Alors, au risque d'entendre des mots que je n'avais pas envie d'entendre, je la priai de poursuivre.

- Qu'est-ce tu as vu ?

J'eus l'impression que mon calme apparent ait été quelque peu contagieux. Qu'importe. Elle repris son attitude précédente et d'un souffle résigné, continua son récit. Ayant relâché précédemment sa prise sur mes bras, elle reposa sa tête au creux de mon cou.

- L'enfer. J'ai déjà entendu un homme dire qu'avoir l'alcool et les femmes avec soit était le paradis. Alors, si les hommes voient ce genre d'ensemble comme un tel lieu, il ne peut être qu'enfer pour mon genre. Ils étaient une dizaine, avec leur sourire idiot, leur rire grotesque, leurs yeux avides et leurs mains baladeuses et brutales. Elles étaient du même nombre.. je crois, peut-être plus, peut-être moins. Aussi ensanglantées que dénudées, aussi terrifiées qu'inexpressives, et surtout plus mortes que vives ..Sûrement qu'elles n'étaient à leurs yeux que des bouts de chair servant à remplir leurs plus viles instincts, puis la boisson avait fait le reste, leur permettant d'assouvir leur soif de sang tout autant que le reste. Ils étaient tellement pris dans leurs ébats et leurs jeux ignobles qu'ils ne me remarquèrent pas. De mon côté, je ne savais plus vraiment ce que je faisais là, ni ce que j'allais faire. J'avais envie de vomir. Mais même ça, j'en fus incapable. J'étais juste paralysée. Puis mon regard se tourna vers l'une des victimes, l'une d'elles, qui, comme les autres n'avait pas échappé à mon entrée dans ce théâtre macabre. Comme si l'odeur m'avait enivré à mon tour, cette même soif de sang me prit, cet échange entre cette fille et moi n'étant que le déclencheur pour passer à l'acte. Elle n'avait pas été capable de prononcer un mot, sa voix rauque n'en était sûrement plus capable.. peut-être à force de crier, en vain. Pourtant, j'étais sûr d'une chose. Elle me suppliait. Pas de les arrêter. Non, d'arrêter ce supplice. De mettre fin même à leurs jours, comptés très certainement, hantés avec certitude. Je ne sais pas bien ce que j'ai fait après. Ce que je sais en revanche, c'est que le sang avait envahi tout le reste. Ma vision. Mon odorat. Mes sens en général. ..Mes mains. D'écoeurant c'était devenu étouffant. Je suis sortie, du sang désormais sur les mains. Dans le sens figuré je veux dire. Pourtant, je les vois toujours aussi rouge.

Elle semblait regarder fixement quelque chose avant de se reprendre et continuer.

- Je ne regrette pas la mort de ces types.. Mais j'aurai préféré l'éviter et encore plus celle de ces filles n'ayant sûrement commis rien d'autres comme erreurs que de se trouver sur leur chemin. On nous dit toujours que pour pouvoir rejoindre la table des ancêtres, il faut être immolé après notre mort... tu.. tu crois qu'elles vont bien là où elles sont actuellement ? Que ces filles que le destin à transformer en esclave de tels barbares, ont pu obtenir la paix ?

Le silence lui répondit pendant que je cherchais mes mots.

- Je pense qu'on ne pourra en être sûr qu'en les rejoignant lorsque viendra notre heure. Mais aussi que tu as fait tout ton possible pour leur venir en aide. Et qu'elles ne peuvent qu'aller mieux. Si elles le pouvaient, je pense qu'elles te remercieraient, alors permets toi de trouver le repos et la tranquillité d'esprit en récompense, d'accord ?

- Hum.. facile à dire hein.

Un nouveau silence marqua la fin de son récit. Seul le mouvement du vent dans la voile et celui de ma main caressant délicatement le dessus de sa tête venait le rompre.

Elle passa sa main dans mes cheveux, tenant mes pointes noircis entre ses doigts fins mais forts. On n'avait jamais su d'où venait ce changement brutal de couleur si atypique à seulement quelques centimètre de la fin de la chevelure. Pourtant, dès lors qu'elle m'avait dit que cela lui plaisait, il ne m'en avait pas fallu plus pour les apprécier à mon tour.

Ainsi, passant sa main distraitement dans ce qui était à sa portée, son regard finit par détailler son entourage proche jusqu'à atteindre mon visage. D'abord gêné par son regard insistant, je compris à son changement d'attitude qu'elle s'était souvenu d'un détail.

- Oh ! Tes blessures !

Le silence marqua ainsi tout aussi bien la fin de son histoire que de son repos. Il est toujours plus facile d'oublier lorsqu'on s'occupe. Peut-être est-ce pour cela que, de tout ce long chemin qu'est celui de la vie, elle ne s'était pas arrêtée jusqu'à présent, pour s'éloigner de la tentation de regarder en arrière.

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