Chapitre 13 : Il est parti

Enfin un nouveau chapitre ! Je m'excuse pour cette absence de près d'un mois, mon temps fut assez limité durant quelques temps. Mais désormais que mon emploi du temps s'est allégé de nouveaux, je compte reprendre un rythme beaucoup plus régulier. Sur ce, bonne lecture à tous ^^

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Ne laissant même pas cinq minutes s'écouler, Rolf ressorti des cales du navire avant de me tendre une lampe qu'il prit parmi ceux des gardes au sol. Tous deux silencieux, nous placions le nécessaire pour le bûcher, partant aussitôt l'œuvre accompli. Il ne cessait de fixer les flammes qui s'étendaient progressivement à toute l'embarcation. Si j'étais soulagé d'avoir pu accomplir cette tâche aussi horrible qu'elle semblait être, j'espérai que ce choix ne le hantera pas de l'un des pires fléaux qui soit, le regret et plus encore la honte.

***

PDV Rolf

J'observais le navire en proie aux flammes. Avais-je fait le bon choix ? A vrai dire, sur l'instant, j'avais le plus grand mal à le penser. Pourtant, je ne pouvais rien face à sa supplication. A cet instant, je ne pouvais simplement pas lui refuser quoi que ce soit. C'était fou, insensé et peut-être bien ridicule. Un imbécile amoureux qui ne pouvait désobéir à une parole de sa bien-aimée, d'autant plus si elle est empruntée d'un tel sentiment, et ce, quand bien même ce souhait peut être barbare ou destructeur. Donner la mort, c'était bien une chose que je ne pensais jamais offrir à quiconque, et encore moins ainsi, sans réelle raison. En réalité, des raisons, ils y en avaient forcément. Je savais qu'ils y en avaient. Mais tant que moi-même ne les connaissait pas et ne les approuvait encore moins, je ne resterais qu'un homme volant celle d'un autre de manière totalement arbitraire et injuste. Je me détestais. Pas que je me sois adoré un jour, mais sur l'instant c'était bien pire encore. Pourtant, je détestais encore plus la voir ainsi, démuni et faible. Elle ne l'était pas et si jamais ça avait été le cas, elle ne le montrerait pas, mais à ce moment, c'était bien une part de faiblesse que j'avais vu. Et cela, plus que toute autre chose n'était pas admissible. Je voulais des explications et comprendre, mais plus encore, je voulais l'aider.

Mon regard porté vers l'horizon ne fixait en réalité pas que le navire coulant sous les flots, il était surtout à la recherche d'un élément précis, ou plutôt d'une personne. On pouvait aussi dire à la poursuite d'un espoir, celui en quête de mon pardon.

Quelques minutes plus tôt

Je courais. J'avais besoin de courir. Pourquoi ? Pourquoi as-tu autant besoin d'une telle chose ? La mort n'est pas un apaisement. Pourquoi le serait-elle ? Elle ne devrait être souhaitable pour personne. Elle ne devrait pas être souhaitable pour toi. Alors pourquoi ? Qui a fait place à la jeune fille altruiste de d'habitude ? Qu'est-ce que tu as pu voir derrière cette porte ? Alors que j'atteignais celle-ci dans le même temps, mes foulées se rapprochèrent et en un instant je me trouvai face à elle.

Je n'avais pas prévu d'aller ici. Ce n'était pas mon objectif. Pourtant, mes pas m'y avaient menés. Ce n'était que le reflet de ce flot de questions qui me submergeait. Je n'y pouvais rien, je voulais comprendre. Ma main effleura la surface de bois. Il ne manquait qu'une pulsion, qu'un léger mouvement et peut-être que je pourrai entrevoir certaines réponses. Il était évident que ce n'était pas la seule raison de son trouble. Si je ne savais quoi, j'étais sûr que dès notre arrivé sur ce navire les choses s'étaient gâtés. La situation en elle-même n'était pas belle à voir. Mais nos esprits semblaient un cafouillis de bien d'autres choses encore. Cette tempête de pensées et de doutes qui m'empoisonnait l'âme, il fallait que je la démêle. Mais plus que tout, c'était la sienne, peu importe qu'elle soit pleine de haine, peur, dégoût, honte ou regret, que je devais aider à apaiser. Je ne savais pas si je pouvais faire ce genre de chose. Pourquoi aurait-elle besoin de quelqu'un comme moi, elle, la grande Zéphyr Haddock, la digne descendante des Hofferson ? Mais peut-être était-ce cela.

À trop penser les autres admirables et forts, nous oublions qu'eux aussi, ils ne sont que des Hommes, qu'eux aussi ne peuvent pas tout régler par eux-mêmes. Je ne savais pas si j'aidais comme il fallait, n'était pas sûr d'y parvenir simplement, mais je voulais essayer. Je laisserai mes doutes au fond de moi, et n'y toucherai plus. Ils embrouillent, et empêchent d'y voir clair. Si c'était cela la raison, pour une fois, je voulais m'en défaire et foncer.

Oui, fonce ! Je me remettais à courir, laissant derrière moi mes interrogations et peut-être leurs réponses avec l'écart que je créais avec cette porte. J'avais un objectif, je l'accomplirai. Ainsi, quand la honte d'avoir céder m'aura quitté, je me concentrerai sur elle. Elle, rien qu'elle. Quittant l'odeur qui avait envahi mon être, tels ses réflexions empoisonnées, ce mélange de liqueur et de chair s'éloignait enfin de moi. Ce brouillard écœurant ne m'affectait plus. Il était loin, et je ne le laisserai plus venir. Cependant, moi, on m'attendait bien. Alors faisant taire une dernière fois mon esprit qui ne faisait que s'emballer, je me dirigeai vers les cellules.

La porte étant déjà entrouverte, je n'eus qu'à m'engouffrer dans la fente ainsi créer. Mes pas redevenus lents faisaient craquer le bois à chaque avancée. Instinctivement, mon regard se porta sur le seul prisonnier des lieux. Celui qui avait été le premier adversaire de cette longue évasion et au final, celui qui s'en sortait peut-être le mieux. Il n'avait aucune blessure hormis cette légère éraflure là où la lame avait été posé, au niveau du cou. Pour le reste, même le coup l'ayant mené à l'inconscience n'avait pas laissé de marques. Inconscient d'ailleurs, il ne l'était plus. Alors que je me trouvais face aux barreaux de sa cellule, l'homme appelé Gernot par son camarade de garde ouvrit les yeux pour les fixer dans les miens.

- Alors ça y est ? Vous venez vous débarrasser de vos prisonniers ? Ou peut-être avez-vous besoin d'un otage ? Vous semblez futés alors ça ne serait pas étonnant. Si c'est le cas, je tiens à t'avertir tout de suite gamin, c'est parfaitement inutile.

Je fus tenté d'esquisser un fin sourire en l'entendant s'exprimer ainsi mais la situation ne me le permettait pas. Pourtant, un léger air narquois apparu sur mon visage alors que je sortais une de mes lames de couteau. Je les avais retrouvés accrochés à la ceinture du garde que Zéphyr avait maîtrisé seule du haut de son échelle. Si je ne les avais pas remarqués au premier abord, en revenant dans les cales, leur présence m'avait paru une évidence et je n'avais pas hésité à en refaire ma propriété.

- Je m'en doute bien. Je n'essaierai jamais une telle chose contre des énergumènes dans votre genre. Je n'ai absolument pas confiance en votre esprit de camaraderie.

Gernot fronçait les sourcils comme pour se durcir. Son regard exprimait aisément la crainte qui tordait ses entrailles en me voyant brandir cette simple lame. Pourtant, il restait fier. Je ne pouvais qu'imaginer son souhait de se montrer fort et ce jusqu'au bout si la fin devait arriver.

- Ne fais pas cette tête, tu me penses vraiment capable de le faire ?

Il me fixa un instant de plus avant de secouer la tête.

- Moi non plus à vrai dire, je ne pensais pas.

- Ce n'est pas ce que je voulais dire.

Alors que la surprise m'envahissait, il refusait de me regarder à nouveau.

- Je ne fais plus l'erreur de sous-estimer l'Homme, le diable peut se cacher sous une tête d'ange.

Acquiesçant alors, en accord avec ses mots, je repris mon souffle un instant.

- Bien-sûr...

Prenant un léger élan, je lançai mon arme qui atterrit près des mains du garde, éraflant à peine les liens les maintenant accrocher l'une à l'autre.

- ...après tout, il n'est qu'un ange déchu.

Après ce simple geste, je retournai immédiatement sur mes pas, m'éloignant déjà.

- Qu'est-ce que tu fais ? Qu'est-ce que tout ça veut dire ?! Tu ne vas pas juste repartir !

- Si. Je n'ai jamais eu d'autres objectifs que de quitter ce bateau. Ta première impression sur moi était la bonne. Je n'en suis pas capable car je n'en ai simplement aucune envie. Ce navire va bientôt brûler, tu as intérêt à faire vite.

Cette fois ce fut à lui d'être surpris, ce qu'il ne fut clairement pas capable de cacher. Mais encore, il se reprit vite, adoptant une attitude sereine.

- Tu es en train de me dire que tu vas me laisser tranquillement ici... avec une arme !?

Sans me retourner, je haussai légèrement les épaules.

- Pourquoi ? Tu veux la deuxième aussi ?

Cette remarque eu le don de l'énerver à nouveau.

- Tu te fiches de moi c'est ça ?!

Soupirant de mécontentement, je fini par lui faire face à nouveau, passant dans le même temps ma main dans mes cheveux.

- Ce bateau va bientôt couler, je te laisse juste une chance de t'en sortir. Tu ne vas pas en plus te plaindre, non ?

- Conneries ! Personne n'aiderait quelqu'un qui l'a kidnappé et attaqué sans avoir quelque chose derrière la tête.

- Et bien, tu ne m'as pas kidnappé à proprement parler. Tu n'as fait qu'obéir en nous surveillant. Pour ce qui est de l'attaque... tu as jonglé entre tes ordres et ta propre défense. En soit, on ne peut pas t'en vouloir à toi particulièrement mais aux méthodes de ton groupe.

- Et tu n'as pas peur de te faire poignarder dans le dos quand je m'en serais sorti ?

- Tu ne nous feras pas de mal.

- Comment peux-tu en être si sûr ?

Sa colère semblait plus mesurée. En réalité, il ne comprenait pas ma réaction. Peut-être que la compassion était un sentiment qui lui était inconnu ou du moins, qu'il ne voyait que rarement. Son environnement favorisait l'indépendance et l'indifférence alors toute hypothèse comme celle-ci restait plausible.

- Tu ne l'as jamais fait. Tu n'as fait que surveiller nos cellules, sans jamais lever la main sur nous, ni même essayé quoi que ce soit de révoltant. Et même lorsque tu te trouvais dans une situation où tu devais faire parler les armes, tu n'as jamais visé de points vitaux, tu n'as qu'essayé de désarmer Zéphyr. Au final, je n'ai rien à te reprocher. Si tu as agi comme ça par le passé, pourquoi changerais-tu d'attitude maintenant ?

- Parce que je l'aurai décidé tout simplement.

- On ne change pas sa nature. Et je suis convaincu que la tienne n'implique pas de faire du mal à des enfants.

Gernot secouait la tête de dépit, attrapant d'un léger mouvement du poignet le manche du couteau.

- Tu es bien naïf.

- Si je me trompe, je n'aurai qu'à te vaincre à nouveau, avec Zéphyr avec moi, je ne te crains pas.

Le garde commença ainsi à sectionner la corde qui le maintenait non seulement assis mais aussi prisonnier.

- Autant qu'on puisse se croire inséparable, il est impossible de ne pas connaître des chemins différents un jour. Sache qu'elle ne sera pas toujours à tes côtés. En fait, tu ne fais que te créer des problèmes en plus mais tu as raison, je ne vais pas m'en plaindre. Après tout, c'est ton problème gamin !

Une part des cordages céda sous les assauts rapides de la lame.

- Je ne vois pas cela comme un problème... En fait, tu as raison ! Je ne suis qu'un gamin, alors j'ai bien le droit à quelques caprices, tu ne crois pas ?

En concert, la corde rejoignit le sol alors que ma marche reprenait en sens inverse. De même, mon sourire satisfait reflétait le rire tonitruant qui l'envahit. Sans se reprendre, il s'approcha des barreaux de sa cellule, plaquant ses mains contre le fer rouillé. Il m'appela par ce surnom qu'il affectait tant en écho du son produit par le choc.

- Hé, gamin !

Mon pied sur le pas de la porte, j'effectuai une dernière pause en tournant à peine la tête de manière à pouvoir l'apercevoir du coin des yeux.

- Je sortirai de là bien vivant et on se reverra, tu peux me croire !

- Je t'attendrais alors... Gernot ? C'est ça ?

Je n'attendis jamais de réponse, n'adressant qu'un simple salut de la main, le dos tourné dans sa direction. Si je lui avais exposé des raisons, je crois bien que ce semblant de sauvetage n'avait eu lieu que pour apaiser mon âme. Une vie, sa survie serait une vie de moins que j'aurai volé. Je ne pensais pas être aussi bienveillant que j'avais pu sembler l'être. Au final, tout n'était qu'une question de conscience. Je n'étais pas capable de contenir un fardeau plus lourd.

***

Alors que je continuais d'observer le navire se faire envahir par les flammes et les eaux, je sentais le regard de Zéphyr se concentrait sur moi. Me préparant à une conversation qui aurait bientôt lieu, je respirai un grand coup avant de me retourner. C'est à ce moment-là qu'elle dévia son attention vers un point inconnu. Mais avant que je puisse me concentrer également dessus, elle reprit la parole.

- Tu vas mieux ?

Sans savoir de quoi elle pouvait parler, je me retrouvai un peu perdu. Entre les blessures physiques et morales qui s'étaient accumulés durant les quelques heures qui venaient de s'écouler, il était difficile de pointer le doigt sur un élément en particulier. Voyant que je n'avais aucune réponse à lui fournir, elle précisa sa pensée.

- L'orage. Ça va mieux ? Regarde, tu ne trembles plus.

Mon corps fut parcouru d'un choc. En un instant, je me figeai et mes membres partirent dans un tremblement incontrôlable. Cette simple évocation avait ravivé toute cette peur enfouie en moi. De par l'adrénaline et bien d'autres facteurs, j'avais dû la mettre de côté. Mais désormais plus rien ne pouvait l'empêcher de s'exprimer. On pouvait dire qu'elle avait visé juste, le pire point possible sur l'instant. Et alors que ma détresse était apparente sur tous les pores de ma peau, elle se permit de sourire tendrement. Zéphyr n'avait pas attendu pour agir, elle se trouvait désormais face à moi, à moins d'un pas. Elle prit délicatement mes joues entre ses mains et je ne pus qu'être absorbé par la profondeur de son regard. Bercé par le mouvement des vagues et par l'intensité du bleu de ses yeux, mon esprit passa d'une frayeur absolue à une angoisse plus calme.

- Ce n'est pas la mer qui t'effraie mais la colère de Thor, ses éclairs, n'est-ce pas ?

Ma main que j'avais déposé sur la sienne se crispa. L'effet était instantané, rien qu'imaginer d'en être entouré me plongeait dans une torpeur sans précédent. Mais face à son calme olympien et sa confiance, cette peur, je parvenais à la contenir, ne serait-ce qu'un peu.

- Alors, tu n'as pas à t'en faire. Regarde.

Elle souleva mon menton vers les cieux et c'est là que je pus enfin l'apercevoir. Le soleil, ainsi que le ciel bleu, sans nuages ou perturbations. Le navire venait de quitter cette zone de brouillard où nous avions été plongés dès notre départ. Jamais le ciel ne m'avait paru plus clair et plus rassurant. Enfin, mon cœur pu s'apaiser.

- Tu vois, il est parti.

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