rock + 20

La directrice avait une nouvelle fois soupiré avant d'acquiescer doucement.

- Très bien... Elle commençait en baissant le regard. Compte tenu des événements, je vous offre une permission de dimanche à lundi soir. Vous devrez rentrer à 22 heures, comme pour le samedi. Kim Seungmin a également eu cette permission, il était tellement choqué...

J'avais hoché la tête pour lui demander sans un mot de ne rien dire de plus. Je venais de passer la pire nuit de ma vie, à appeler au moins une centaine de fois Felix jusqu'à que je prenne conscience qu'il ne répondrait pas. Puis ensuite, je m'étais mis à chialer comme une merde devant tous les garçons de la chambre à trois heures du matin. Ma professeur de mathématiques m'avait réconforté durant un long moment avant de m'autoriser à prendre l'air. J'avais pu appeler Chan une fois dehors, j'étais toujours en larmes. Il n'avait rien compris mais je lui avais promis de faire en sorte de pouvoir sortir demain. J'étais complètement perdu, je voulais comprendre ce qui s'était passé dans la tête de Felix. Je voulais savoir ce qui l'avait poussé à faire ça, à vouloir nous abandonner. Je le savais déprimé, oui, mais pas suicidaire. Il avait une phase de tristesse qui arrivait à tous, pour moi il n'y avait aucune raison de s'inquiéter autant. Pourtant, il aurait fallu. Il était toujours à l'hôpital et nous étions toujours sans nouvelle de lui depuis hier soir. Ça me rendait fou, j'avais l'impression de tourner dans une cage et de ne rien connaître en dehors. Je voulais savoir ce que Felix avait tellement traversé pour en arriver là. Une rupture pouvait être douloureuse mais pas au point de vouloir mettre fin à ses jours. J'étais complètement perdu, j'avais besoin de réponse.

Durant cette horrible nuit, je m'étais rendu compte d'une chose : une vie était tellement fragile, un rien peut nous faire basculer dans l'au-delà, il ne faut en gâcher aucune et vivre pleinement. C'était sûrement ridicule comme façon de penser, peut-être avais-je l'air trop naïf mais ça m'avait frappé. Je ne voulais plus vivre loin de mon bébé et de Chan, je voulais nous construire tout un tas de souvenir ensemble. Quelque chose pourrait nous arriver, à nous, ses parents, et il se retrouvera forcé de vivre loin de nous. Mais aujourd'hui, nous allions bien, nous étions en bonne santé. Je voulais vivre avec mon bébé, m'assurer chaque matin et chaque soir qu'il aille bien, lui répéter comme je l'aimais et que j'avais besoin de lui, que je regrettais toutes les mauvaises choses que j'avais pu dire sur lui.

- Si vous allez le voir, vous me donnerez de ses nouvelles ? Elle m'avait discrètement demandé en me tendant la feuille d'autorisation de sortie signée.

J'avais approuvé avant de la remercier pour sortir très vite de son bureau. Je m'étais dirigé vers notre dortoir une fois de plus. Maintenant que j'étais sûr que les autres ne rentreraient pas avant un moment, j'allais pouvoir fouiller un peu dans les affaires de mon ami. Aucun de nous n'avions eu le courage de le faire, c'était glauque. Les professeurs se sentaient mal de nous faire dormir dans cette chambre mais nous n'avions pas eu le choix, il n'y avait plus de places nul part. C'était la pire nuit de ma vie. Je m'étais approché de son lit, les draps étaient froids mais toujours froissés. Je m'étais assis dessus, mon visage figé sur une expression neutre. Je n'arrivais toujours pas à croire que cette nuit, Felix, qui avait l'habitude de dormir à côté de moi, s'était reposé à l'hôpital sûrement branché à des machines comme dans les films. Peut-être qu'il était mort mais que personne n'osait me le dire.

Je déglutissais bruyamment en laissant ma main passer sur son oreiller. Il y avait quelques cheveux blonds, mais rien en dessous. Je regardais un peu partout, il n'y avait rien qui aurait pu trahir son envie de mourir, absolument rien. Pas même une lettre ou des traces de larme. Felix n'avait jamais pleuré devant moi pourtant je savais que ça lui arrivait souvent. Je n'avais jamais eu le courage de le réconforter, après tout on n'était pas de vrais amis avant. Aujourd'hui, je regrettais. Je regrettais tellement, à commencer par mon manque d'attention vers lui. Puis je regrettais de ne pas lui avoir posé plus de questions, d'avoir été si aveugle. J'étais le pire ami du monde, j'avais laissé mon ami crever à petits feux sous mes yeux sans m'apercevoir de quelque chose. Il souffrait devant moi mais j'avais préféré fermer les yeux que d'user un peu de mon temps pour l'aider. J'étais le pire ami du monde.

Tiraillé, j'avais fini par laisser quelques larmes couler de mes yeux livides. Mes mains étaient toujours sur ses draps froids qu'elles serraient forts. Rien ne se passait, personne n'appelait pour le dire comment il allait, il n'y avait rien pour me dire qu'il voulait mourir, rien, il ne se passait rien !

J'avais reniflé avant de sursauter en entendant la porte s'ouvrir furieusement. Seungmin l'avait claqué derrière lui alors que son regard était encré dans le mien. Il avait dégluti bruyamment puis s'était précipité vers son lit sans un mot. Il s'était saisi de ses affaires avant de partir aussi précipitamment qu'il était venu. Mes sourcils s'étaient froncés lorsque j'avais reniflé à nouveau, son comportement était étrange. Il fallait dire qu'il devait être sacrément secoué après avoir découvert le corps d'un mec dans son dortoir.

Après de longues minutes toujours dans un calme monastique, mon téléphone avait vibré dans ma poche. C'était un message de Chan.

"Je suis arrivé."

Je m'étais précipité dans la salle de douche pour ne pas avoir l'air aussi affreux que ce que je voyais face au miroir sale. J'avais juré en essayant de passer plusieurs fois de l'eau sur mon visage puis, maladroitement, j'avais prié pour que Chan ne prenne pas en compte ma sale tête de mec enceinte qui n'avait pas dormi. J'étais ridicule, mais j'espérais que mon cœur brisé me donnerait une bonne excuse.

En arrivant en bas, après avoir montré mon autorisation de sortie à la vieille sourde qui gardait la porte d'entrée, j'avais couru jusqu'à mon petit ami sans me soucier si quelqu'un pouvait nous voir, je me fichais complètement si un mec arrivait à nous apercevoir au dessus du mur par une fenêtre du bâtiment, j'avais juste horriblement besoin des bras de Chan. J'avais besoin de m'y noyer, de sentir son cœur battre, de me réchauffer grâce à son épiderme chaud, de pouvoir respirer à nouveau contre ses lèvres. Dans ses bras, ma taille bien calée entre ses mains, je l'avais serré si fort que l'air venait à lui manquer mais tant pis. Il n'avait pas rechigné, il m'avait serré très fort contre lui aussi. Il était vivant, lui, il allait bien. Lorsque j'avais fini par me détacher pour le regarder dans les yeux, les siens voilés par la tristesse, il avait posé ses mains sur mes joues pour venir caresser mes pommettes avec ses pouces.

- Mon cœur... Je suis tellement mal et désolé...

- Je veux aller le voir, s'il te plaît, j'avais demandé avec une petite voix.

- Tu es sûr ? Tu sais que tu n'es pas dans ton meilleur état, encore moins avec le...

Il voulait dire "bébé". Mais il avait simplement baissé la tête avant d'acquiescer.

- Très bien, allons-y.

En arrivant là-bas, je n'avais d'abord pas bougé de la voiture. J'étais resté assis dans la voiture, toujours à triturer mes doigts. Je ne savais pas comment allait Felix, je ne savais pas si ils allaient me laisser rentrer, je ne savais même pas quoi lui dire. Difficilement, j'avais dégluti alors que mon petit ami posait sa main sur ma cuisse pour me faire un tendre sourire.

- Tu veux que je vienne ? Il me demanda avec une petite voix.

Je l'avais regardé dans les yeux avant d'acquiescer vivement. J'avais terriblement besoin de lui, j'avais besoin de le sentir près de moi, prêt à me soutenir à n'importe quel moment. Je m'étais penché pour l'embrasser amoureusement puis j'ai finalement quitté la voiture, suivi de près par Chan qui m'avait rejoint vite pour venir entrelacer nos doigts. Je n'avais pas très bien suivi tout ce qu'ils disaient a l'accueil entre mon copain et l'infirmier, mais ils nous avaient laissé entrer en nous demandant expressément de rester calme pour ne pas fatiguer Felix. Il était réveillé, il allait bien. Bordel de merde, il allait bien, Felix était vivant.

Devant la porte, j'avais fermé les yeux en soufflant de nombreuses fois. J'étais tellement soulagé de savoir qu'il allait bien, un immense poids se retirait de mon cœur si vite que je m'étais senti presque pleurer. Mais je ne voulais pas que Felix pense qu'il m'ait fait du mal, je ne voulais pas pleurer devant lui. Je voulais poser des questions, comprendre, le prendre dans mes bras et lui faire promettre qu'il restera avec moi et mon bébé pour toujours. Savoir qu'il aurait pu mourir m'avait fait un tel choc, je ne voulais plus jamais qu'il parte loin de moi.

Chan avait finalement décidé d'ouvrir la porte doucement. La chambre était réchauffée, pas de couleur spéciale, juste du blanc. Un grand lit au milieu et Felix qui se reposait dedans, une aiguille dans la main reliée à je-ne-sais-quoi. Il avait la tête tournée vers la fenêtre, il n'y avait aucun bruit. Je le regardais, sa poitrine se levait et s'abaissait lentement, il respirait, il était calme. Quelques rayons de soleil parcourait dans sa chambre mais ils avaient bien vite finit balayé par un autre nuage gris.

Puis, lentement, il avait tourné son visage vers nous pour nous regarder. Un immense sourire était venu orner ses lèvres roses, un nouveau rayon de soleil traversa pour illuminer quelques secondes sa peau hâlée avant de mourir à nouveau à cause d'un nuage.

- Salut, Hyunjin. Oh, tu n'es pas seul. Salut, Chan.

Il continuait de sourire alors que je sentais mes yeux se mettre à pleurer trop soudainement pour que je puisse le cacher.

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l'histoire de Felix depuis le début de l'histoire je voulais trop qu'elle arrive, du coup j'espère que ça ne fait pas trop bâclé...

et désolée pour cette petite absence <3

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