9/ Smile

L'homme parut ravi de la prestance de son apparition théâtrale. Dans mes souvenirs, seul son visage agonisant me faisait face. Les images défilaient au ralenti, ses paroles glaçantes me revenant en mémoire. Il n'était donc pas mort. Était-ce mieux finalement ?
Il n'avait pas encore ouvert la bouche pour nous cracher ses insanités mais cela ne saurait tarder.

Et Avril ? Je voulais la protéger, elle, maintenant autant que moi, se trouvait confrontée à la folie de cet homme. A présent, ce n'était plus seulement elle que je voulais préserver de la cruauté de l'espèce humaine, mais aussi notre futur enfant.

J'avais peur mais j'essayais de persuader notre interlocuteur du contraire. « Du calme ! » me dis-je. Nous sommes en pleine rue, il ne devrait pas nous sauter dessus non plus, de plus, il faisait jour, contrairement à la dernière fois...

- So...commença-t-il. I am an information qui peut ruiner your carrière. Outre son anglais plus que déplorable, j'avais très bien compris ce qu'il insinuait, principalement en observant la réaction de ma compagne.

Avril commençait à trembler, plus de colère que de peur. Elle me tira vers elle et s'agrippa à mon bras.

- « Donc, j'aimerais...Continua-t-il, pensif, Un million de dollars pour mon silence ! Disons, demain matin à l'aube. Oh ! Et pourquoi pas là où le crime a failli avoir lieux ? » son air suffisant et fière ne mît pas longtemps à faire sortir Avril de ses gongs.

Avril se détacha de moi à contre cœur et s'approcha de lui. Je ne lâchai pas sa main qui resta tout de même fermement soudée à la mienne.

Toi, là ! Tu sais qu'il nous faudrait plus d'une journée pour sortir un million de dollars ! » Lui hurla-t-elle en français.

Il se redressa, la surplombant de toute sa hauteur, faisant au moins 25 centimètres de plus qu'elle.

- « Démerdez vous ! C'est moi qui ai l'info. Vous n'êtes pas en position de négocier. Sur ce, good bye ! »

Il s'éloigna d'un pas claudiquant. Bouche bées, nous restions là, figés, nous regardant dans les yeux. Nous devions prendre une décision, cela prendrait du temps.

Avril, qui voyait le positif partout, tentait de me réconforter sur le chemin du retour.
-Comment on va retirer un million de dollars sans que ça paresse chelou ? Me lamentai-je.
- C'était du bluff, t'inquiète Dédé.
- Et sa tentative de meurtre, c'était du bluff aussi ? Et...et... arrête de m'appeler DéDé !
Bégayais-je alors qu'elle rit.
- Mais ça te va si bien...elle m'embrassa furtivement. Aller, la nuit porte conseil.

PDV Avril :

Bien sûre que j'étais terrorisée par cet homme. Surtout si on considérait sa barbe mal rasée et son faux air de blessé. Bon, pas si faux que ça pour le coup. Mais visiblement, cela l'arrangeait bien.

Il ne fallait pas céder à la peur, et puis, je ne voulais pas faire sombrer Deryck. C'était quand même un peu traumatisant ce qu'il avait vécu, et il avait besoin, plus que jamais, d'un peu de soutien de ma part.

Je savais qu'il essayait de tout refouler comme si cela ne l'atteignait pas, mais je le connaissais, et je savais pertinemment que si je ne faisais rien, il ne viendrait pas se plaindre au près de moi de lui même. Si je ne réagissais pas, personne ne le ferai.

Après un vague « bonsoir » à tout le monde, je rejoignis ma chambre, celle un étage en dessous de celle de Deryck, d'un pas las.

Une fois munie d'un jus de fruit qui aurait été une bière si je n'avais pas été enceinte, je me dirigeai vers le petit balcon qui surplombait la capitale. Je m'accoudai à la rambarde, le regard perdu dans le vide, à la recherche d'un quelconque monument que je connaissais. Je distinguais les lumières de la Tour Eiffel au loin qui éclairaient toute la ville.

Je souris pour moi-même en voyant le bras de Deryck par dessus la rambarde de son balcon. En tendant un peu l'oreille, je réussis à l'entendre fredonner un air qui me semblait être du « Green Day ».

Ce calme et paisible moment me permit de ressasser tout notre parcours, celui de notre couple, de notre amour. Mon cœur battait à tout rompre lorsque des paroles susurrées dépassèrent la barrière de ses lèvres, me permettant de profiter pleinement de sa voix mélodieuse, même à faible volume sonore.

J'avais presque envie de pleurer et de le rejoindre dans son interprétation de « Good Riddance ». Mes yeux et ma gorge brûlaient et j'étais enjouée du rapprochement que ce moment musical créait entre nous, même si Deryck l'ignorait.

Nous étions réunis sous le ciel de Paris, dans la ville de l'amour, moi-même enveloppée de mon rassurant mutisme. Je pensais à tout cela, profitant de l'instant, mais lui, pensait-il à moi ? Ou pensait-il au moyen de récupérer un million de dollars en une nuit ? J'ignorais ce qui tourmentait son esprit en cet instant, et je mourrais d'envie de le savoir.

Le stresse me captura soudainement. Ma respiration s'accéléra, je commençais à suffoquer, je tentais alors de me focaliser sur la voix de Deryck et inspirai profondément afin de retrouver mon calme et la sérénité.
Mais dès lors qu'il finit sa chanson, la peur enserra mon cœur à nouveau. Et même si je ne souhaitais pas briser ce silence, je murmurai :

- Deryck ?
Quelques secondes s'écoulèrent avant qu'il ne réagisse.
-Avril ? T'es où ? Demanda-t-il aussi doucement.
-À ton avis, nounouille ? Répondis-je gentiment. Baisse la tête. Il s'exécuta.
-Ah, salut ! S'écria mon Dédé en riant. Ses manières enfantines avaient toujours eu le don de me faire rire.

Rien que de croiser son regard réussi à réchauffer mon être.
-Il est tard. Chuchota-il.
- Oui, on ferait mieux d'aller se coucher.
- Tu viens ? Proposa-t-il amoureusement.
-Tu sais que je t'aime ? Lui répondis-je avec engouement, toute sourire.
-Tu sais que je t'aime aussi ? Je souris largement à cette réponse. Et ce fut sur ces belles paroles que nous refermâmes nos portes vitrées.

Quelques minutes plus tard, je me trouvais déjà dans sa chambre, rassurée par sa présence à mes côtés.

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