Chapitre 89

Jour 98 : l'après-midi

Je suis lâche dans mes paroles autant que dans mes actes, car après lui avoir dit qu'il fallait qu'on se sépare, j'ai honte de le regarder droit dans les yeux.

J'imagine sa déception, sa tristesse même, suite à mes propos, mais comment entretenir une relation alors que je pars à des milliers de kilomètres de la France et que lui reste ici ?

C'est tout bonnement impossible.

– Tu sais, Louis, ce n'est pas de gaieté de cœur que je te dis ça, que je te l'impose même si j'ose dire. Néanmoins, je ne veux pas que tu restes enchaîné à moi alors que nous ne serons plus l'un près de l'autre. Ce serait égoïste de ma part de faire ça, alors que tu pourrais passer à autre chose. Je ne veux pas que tu te prives pour moi.

Au fond de moi, j'espère qu'il pourra comprendre et me répondre quelques mots qui puissent me satisfaire dans mon choix, or, il n'en est rien. Louis reste muet comme une carpe et moi, je me morfonds chaque seconde qui passe.

– C'est courageux de ta part, lance-t-il enfin après un temps qui m'a semblé une éternité, d'un ton mesuré, mais tout de même tremblant, mais il y a une chose que tu dois savoir, Heavan.

Curieuse, j'arrive enfin à poser mes yeux sur ce si beau visage que j'abandonne à contrecœur.

– Séparé ou non, mon cœur t'appartiendra toujours, quoiqu'il en soit.

De son côté, le mien manque un battement et se mets à tambouriner fort dans ma poitrine. Pourquoi ne m'en veut-il pas ? Ce serait tellement plus simple pour moi...

– Tu t'es beaucoup plus confié à moi que moi à toi, alors si on se voit pour la dernière fois, autant que je me jette à l'eau.

Non, je ne veux rien entendre ! Pas maintenant ! Pourquoi me rend-il la situation plus compliquée ?

– Louis, s'il te plaît, pas ça...

– Je déteste les discours, alors je vais faire court, Heavan. Je ne veux pas passer pour le garçon crédule et gnangnan, mais je tiens à ce que tu saches que tu as grandement changé ma vie. Tu m'as rendu meilleur à bien des niveaux et j'espère avoir fait de même avec toi, même si notre relation a très mal commencé.

– Elle a plutôt été maladroite au début, je le corrige avec un sourire nostalgique, rassure-toi, tu m'as donné du courage et bien plus d'amour que je l'aurais cru venant d'un garçon. Je suis désolée de te laisser tomber de cette façon, mais...

– Ne t'excuse pas et ne te justifie pas.

– Mais...

– Rendons les choses plus simples, tu veux ?

Oui, c'est ce que je souhaite aussi, toutefois, mon cerveau ne cesse de vouloir donner des explications, bien que je n'en ai pas de très concret.

– J'ai la sensation de t'abandonner avec lâcheté, je continue malgré tout d'ajouter.

– Les belles histoires n'ont pas toutes que des happy-end.

Les larmes aux yeux, je m'attarde sur tous les détails de son visage, même les plus insignifiants, afin d'imprimer chaque parcelle dans ma mémoire. Je ne veux rien oublier de lui.

Même s'il évite de me regarder droit dans les yeux, la chaleur qui émane de son regard est emplie d'amour, mais aussi de peine. Je perçois une profondeur qui le submerge, comme si son âme était mise à nu. Néanmoins, une tendresse infinie se lit aussi dans ses pupilles. Il navigue parmis un maelstrom d'émotions qui doivent le dépasser.

– Nous serons peut-être amené à nous revoir, qui sait ?

C'est vrai ! Il a raison, nous venons tous les deux du même comté, alors tout est encore possible. Un sourire incontrôlable se dessine sur mon visage en sachant qu'il y a peut-être un espoir qu'il revienne habiter dans le Dakota du Nord.

– Tu vois, même en cet instant des plus pénible, j'arrive encore à te faire sourire, se vante ce dernier le sourire aux lèvres, mais avec une voix brisée.

Encore une fois, il tente de dissimuler ses réelles émotions.

– Est-ce que je peux te demander une dernière faveur ?

– Laquelle ? je l'interroge, désireuse d'en savoir plus.

– Pourras-tu me prévenir quand tu partiras. Je veux savoir quand tu prendras ton avion.

– Pourquoi tu...

– Pour que je sache, Heavan. Tout simplement.

J'accepte sa demande, après tout, je ne vois pas en quoi je devrais lui cacher cette information. Je suis même sûre que je le lui aurais communiqué même s'il ne me l'avait pas quémandé.

– Quelle question, Louis. Bien entendu que je vais te prévenir. Tu restes la personne qui compte le plus pour moi.

En temps normal, nous nous serions enlacés, mais la complexité de la situation fait que nous restons enraciné chacun de notre côté, ne sachant pas quoi faire d'autres que d'accueillir les bras grands ouverts un énième silence un peu plus mélancolique encore.

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