9. Sourire
"Plus le visage est sérieux, plus le sourire est beau."
François-René de Chateaubriand
⭐️⭐️⭐️
C'était une bonne journée. Evidemment, comme chaque jour, mon travail au centre n'était pas de tout repos mais tout était plutôt calme. Les jours comme ça étaient agréables. Cela faisait du bien de voir la grande majorité des enfants être en forme et souriants. J'aimais ces moments où ils redevenaient réellement des enfants, ces moments où, pendant un instant, ils oubliaient leurs difficultés. J'aimais voir cette atmosphère plus légère et entendre les rires des enfants résonner entre ces murs alors qu'ils étaient d'humeur à échanger des blagues entre eux ou avec les membres du personnel.
Cela faisait du bien, et c'était aussi ce côté-là de ce métier qui le rendait exceptionnel. S'accrocher dans les moments difficiles nous promettait aussi des instants de joie.
Cette ambiance était peut-être liée aux beaux jours qui s'installaient, au soleil qui rayonnait, illuminant les pièces fournies de baies vitrées. La morosité de l'hiver avait disparue depuis longtemps et l'école serait bientôt terminée. Certains enfants auraient la chance de partir en vacances pendant l'été, je savais que nous allions enregistrer pas mal de sorties dans les prochaines semaines. Même si ça me faisait quelque chose de voir ces enfants s'en aller, j'étais extrêmement heureux pour eux. Tous méritaient simplement de reprendre une vie normale, ils méritaient de retrouver leur confort serein et le bonheur.
Les voir heureux me rendait heureux.
Et puis il fallait bien admettre que j'étais de bonne humeur aujourd'hui. Je me sentais un peu plus léger, et je crois que cette sensation avait un lien avec la conversation que j'avais eu la veille avec Axel. Je n'allais pas me voiler la face. Passer ce moment avec le jeune homme, le voir s'ouvrir un peu plus à moi petit à petit, me réchauffait le cœur.
Bien sûr, son histoire, tout ce qu'il m'avait raconté à propos de l'accident dont son frère avait été victime, à propos de leur mère aussi, cela me bouleversait. Et bien que je ne l'aie jamais rencontrée, je ne pouvais m'empêcher de ressentir une profonde colère envers celle qui aurait dû être présente pour ses fils, celle qui aurait dû les soutenir et les aimer convenablement au lieu de les abandonner. J'en savais assez à son propos pour dire que je n'appréciais pas vraiment cette personne.
Et après avoir entendu tout ça, son histoire aussi complète qu'il ne me l'avait jamais permis auparavant, j'avais encore plus envie de l'aider, de le protéger.
Je ne savais pas si Axel se rendait compte d'à quel point c'était important pour moi qu'il accepte enfin de me parler, de me laisser un peu plus entrer dans sa vie. Ça comptait énormément, peut-être plus que ça ne le devrait. Mais le voir assez confortable en ma présence pour me faire confiance, pour accepter de se confier, c'était un immense progrès, et ça me faisait plaisir. Et puis le voir sourire, même après être passé par la douleur qui avait inondé ses yeux lorsque nous avions évoqué la tragédie qui avait frappé sa famille, avait fait battre mon cœur un peu plus fort.
J'étais définitivement fan de son sourire. Qu'il soit timide ou éclatant, il était toujours sincère et illuminait mes journées, tout comme il illuminait son visage. En effet, il n'y avait pas seulement ses lèvres qui se soulevaient, mais aussi ses yeux qui brillaient et ces petits plis qui se formaient aux coins de ses paupières. C'était charmant et absolument captivant, bien trop captivant.
Perdu dans mes pensées, je ne prêtais plus attention à ce qui se passait autour de moi. Je me tenais près de l'entrée, accoudé au comptoir de l'accueil, trop occupé à remplir des papiers pour remarquer les docteurs et autres membres du personnel qui pourraient évoluer à mes côtés.
Ce fut simplement une certaine présence, comme un pressentiment, qui me fit relever la tête. C'était comme si l'atmosphère venait de changer, comme si ma bonne humeur venait encore de s'accroitre, alors même que je ne pensais pas ce phénomène possible.
Mais il fallait croire que voir Axel s'avancer vers moi, d'un pas assuré et accompagné de ce si beau sourire, était visiblement un facteur non négligeable dans la formation de mon humeur. Comment résister lorsqu'il arborait cette expression qui semblait m'être destinée ? Pour une fois qu'il passait les portes de ce centre sans instaurer une distance entre lui et moi, sans prétendre qu'il ne me connaissait pas ou s'entêter à ne pas me connaître. Pour une fois qu'il affichait publiquement et envers moi cette expression joyeuse, je ne pouvais m'empêcher d'apprécier.
Depuis la veille, depuis cette conversation, quelque chose avait changé entre nous. Et cela faisait battre mon cœur un peu plus fort. Peut-être même que mes mains s'étaient mises à trembler alors qu'il s'était avancé vers moi. Si seulement je pouvais contrôler les réactions de mon corps.
Malheureusement, lorsqu'il s'agissait d'Axel, cela était impossible. Mes émotions étaient incontrôlables.
— Salut ! me lança-t-il, détendu et sans trop d'hésitation. Je suis venu voir Noé. Enfin ça tu t'en doutes sûrement mais je... je viens de voir qu'il n'était pas dans la grande salle alors je me demandais si tu savais où il était. Est-ce qu'il a un rendez-vous ce matin ?
Son sourire timide était de retour alors qu'il passait une main sur sa nuque. Il avait baissé les yeux et retrouvé son air embarrassé. Un air que je ne pouvais que trouver adorable.
— Non t'en fais, il est juste dans sa chambre, répondis-je calmement. Allez suis-moi, je vais venir avec toi. Tu tombes bien parce qu'il a une grande nouvelle à t'annoncer.
Je vis Axel froncer les sourcils avant que je ne me retourne pour ouvrir la voie. Evidemment, cela ne l'empêcha pas de me suivre, mais je sentis comme une tension prendre soudainement place dans l'air ambiant. Il resta silencieux pendant notre chemin jusqu'aux escaliers et ce ne fut qu'à quelques marches du premier étage qu'il reprit la parole.
— Est-ce que Noé va bien ? me demanda-t-il soudainement. Il n'y a rien de grave ? Je n'ai pas été prévenu d'autres rendez-vous ou de...
— Axel, calme-toi, lui intimai-je en lui faisant à nouveau face, posant une main sur son épaule. Noé va très bien, il veut juste te dire quelque chose, et c'est une bonne nouvelle. Il a tenu à te l'apprendre lui-même, c'est tout. Il n'y a rien de grave, alors t'inquiète pas.
D'un geste discret, Axel hocha la tête avant de prendre une légère inspiration. Après quelques secondes, je le vis détendre ses épaules et je sus alors qu'il était prêt à continuer notre court chemin sans se monter la tête. Voir à quel point il tenait à son petit frère était toujours aussi touchant et admirable, mais je ne voulais pas qu'il se rende malade à chaque fois qu'on devait lui annoncer quelque chose à propos de Noé. Je comprenais à quel point il l'aimait, et à quel point il était important pour lui, mais je ne voulais pas qu'il se tue la santé en dramatisant simplement parce qu'il était terrifié.
Noé allait bien. Il allait même de mieux en mieux, alors il n'avait aucune raison de s'inquiéter. Surtout que je connaissais déjà cette fameuse annonce, et j'étais absolument certain qu'elle ne ferait que créer un nouveau sourire radieux sur les lèvres du jeune homme. C'était aussi pour ça que j'avais tenu à l'accompagner, je mourrais d'envie d'être témoin de sa réaction. Il n'y avait aucune chance pour que je rate ça !
Les dernières marches jusqu'au premier étage furent gravies rapidement et il ne nous fallut pas longtemps pour atteindre la chambre 129, occupée par Noé. Nous avions à peine franchi le seuil de la porte que le petit garçon souriait déjà après avoir relevé la tête et remarqué la présence de son frère. Une seconde lui suffit pour écarter les bras, faisant aisément comprendre à Axel qu'il voulait un câlin.
L'ainé ne se fit pas prier pour avancer vers lui et enrouler ses bras autour de son corps, déposant par la même occasion un baiser sur le front de Noé. Je ne me lasserai jamais de cette vision, elle m'arrachait un sourire à chaque fois et me faisait fondre. Ils étaient tellement attendrissants.
Je leur laissai une minute pour se saluer tranquillement, ne souhaitant pas envahir leur espace et m'imposer. J'en profitai alors plutôt pour regarder tout autour de moi, laissant mes yeux se poser sur les différentes décorations qui avaient été apporté à cette chambre. Plus qu'une chambre, l'endroit était définitivement devenu le refuge de Noé. Même s'il n'aimait pas y rester trop longtemps tout seul, tout avait été fait pour qu'il s'y sente bien, presque comme chez lui. Et j'étais convaincu qu'Axel n'y était pas pour rien.
Il n'était pas rare de voir les familles apporter des objets familiers et réconfortants aux enfants qui s'installaient ici. Parce que les séjours étaient habituellement longs et que cela leur permettait de se sentir mieux dans un univers qui pouvait leur paraître froid et hostile de prime abord. Et ici, dans l'espace de Noé, nous pouvions avoir une vision nette de tout ce qui lui tenait à cœur. Des peluches toutes plus douces les unes que les autres étaient installées au pied de son lit tandis qu'une seule restait près de son oreiller, toujours la même, un petit chien beige adorablement usé. Ce dernier était accompagné par la fameuse figurine de Spider-Man qu'il promenait souvent partout dans le centre, et je savais qu'elle ne quittait pas non plus ses bras lorsqu'il dormait. Pour rester dans un thème cohérent et finaliser cette décoration faite de super-héros, une couverture à l'effigie de Spider-Man avait été rajoutée sur le lit.
Sur la petite table qui servait aussi aux repas était installée une trousse d'où sortaient quelques crayons de couleur ainsi que trois petits jeux en format voyage. Enfin, des photos étaient scotchées au-dessus du lit, représentant soit des super-héros, encore une fois, soit Noé lui-même, pris sur le vif dans un instant de joie. Il était parfois accompagné d'Axel ou d'autres enfants qui devaient certainement être ses amis. Quant à la table de nuit, deux cadres y étaient posés, le premier contenant une photo de deux adultes dans la quarantaine - ses parents sans aucun doute - et le second contenant le souvenir heureux d'Axel prenant son petit frère dans ses bras, tous les deux semblant rire aux éclats.
La photo était magnifique, mais le souvenir d'un rire aussi sincère provoquait une certaine nostalgie, et cette envie qui prenait place dans mon ventre et dans mon cœur de les voir un jour rire à nouveau de cette façon. En toute insouciance.
— Alors, mon grand, Camille m'a dit que tu avais quelque chose à m'annoncer ? lança soudainement Axel, sa voix me sortant de mes pensées.
Le sourire du petit garçon doubla instantanément de volume et il s'empressa alors d'adresser quelques signes à son frère. Ce dernier resta un instant dubitatif avant de signer en retour, demandant certainement à Noé de répéter puisqu'il se retrouva à faire les mêmes mouvement une seconde fois.
Ce fut à cet instant que je vis cet éclat dans le regard d'Axel, alors qu'il relevait vivement la tête vers moi. Un espoir mêlé à une certaine appréhension, comme s'il n'osait pas encore y croire complètement.
— Est-ce que c'est vrai ? murmura-t-il alors. Noé peut rentrer à la maison pour un week-end ?
Je n'eus qu'à hocher la tête pour que l'immense sourire de mon vis-à-vis ne revienne, plus brillant que jamais. Il laissa même échapper un léger rire, certainement celui qui s'échappe sous le coup d'une émotion, avant de serrer à nouveau étroitement Noé dans ses bras.
— Mais c'est sûr, c'est une réelle décision ? m'interrogea-t-il subitement en se redressant rapidement. Les médecins sont d'accord, ils ne vont pas faire machine arrière ? Et Noé, il est assez en forme pour sortir ?
— Ne t'inquiète pas, Noé est plus que prêt à passer un week-end loin du centre, affirmai-je. Le médecin qui s'occupe de lui a donné son accord ce matin après être passé pour sa visite quotidienne, il a donné son feu vert. Il était censé te mettre au courant mais Noé a insisté pour être celui qui t'annoncerait la nouvelle.
L'attention d'Axel se reporta sur son petit frère alors qu'il s'échangeait un nouveau grand sourire accompagné de quelques signes. L'aîné passa une main dans les cheveux du plus jeune avant de reprendre la parole.
— J'avais demandé si c'était possible que Noé sorte pour un week-end il y a des semaines de ça, m'apprit-il. Et les médecins ne m'ont jamais donné de réponses claires alors, honnêtement, je pensais qu'ils n'accepteraient jamais. Je... je suis juste vraiment surpris pour l'instant, mais surtout vraiment content. Il faut juste que je parle à son médecin moi-même pour m'assurer de tout bien faire. Je veux juste que le retour à la maison se fasse au mieux. Je ne voudrais pas que tout soit précipité.
— Ton frère se porte bien, Axel, affirmai-je une nouvelle fois en me rapprochant des garçons, mon regard planté dans celui du jeune homme. Il va mieux et il mérite de respirer un peu, en dehors de ces murs. Je comprends que tu veuilles bien faire et que tu t'inquiètes mais il n'y a vraiment aucune raison. Noé est plus que prêt et plus qu'heureux de sortir et de passer encore plus de temps avec son frère. Alors tu n'as qu'une chose à faire : profiter.
Dans un élan vif, Axel se rapprocha de moi et enroula ses bras autour de mon corps. Cela ne dura qu'une toute petite seconde avant qu'il ne se recule rapidement, la tête baissée et l'air embarrassé. Une toute petite seconde qui avait pourtant suffit pour que mon cœur ait un sursaut, et je savais pertinemment que ce n'était pas simplement lié à la surprise provoquée par ce soudain mouvement.
Evidemment, je ne m'attendais pas à ce qu'Axel prenne l'initiative d'un tel geste, et à en croire par son expression et le fait qu'il se balançait désormais timidement d'une jambe sur l'autre, il ne devait pas non plus avoir prémédité son propre geste. Mais c'était le genre de petits détails qui le rendait encore plus adorable à mes yeux. Et cette toute petite seconde avait suffi à provoquer cette chaleur bienheureuse qui s'installait dans chaque parcelle de mon corps qui aspirait déjà à un autre contact. Cependant, je refoulais cette sensation et me concentrai sur le présent, mourant d'envie de trouver quelque chose à dire afin de ne pas laisser une atmosphère pesante et gênante s'installer.
La chambre était redevenue silencieuse alors que Noé était le seul à nous regarder avec ce même sourire, comme si rien ne s'était passé. Il gardait cette expression enfantine et semblait être le seul à ne rien trouver à redire de cette situation.
Alors que je m'éclaircissais la gorge, prêt à mettre fin à ce silence, ce fut Axel qui me surprit en prenant la parole en premier.
— Je voulais juste te remercier, souffla-il timidement. Tout ce que vous faites pour Noé, c'est tellement important. Je vois ses progrès et... juste merci.
— Je n'y suis pas pour beaucoup, tu sais, mesurai-je. Je viens d'arriver dans l'équipe qui s'occupe de Noé et je ne suis pas médecin, ce n'est pas moi qui aie donné l'accord pour la sortie de Noé.
— Tu l'aides quand même beaucoup, insista-t-il. Je le vois. L'autre jour il n'arrêtait pas de me dire qu'il avait été content de t'apprendre quelques signes. Ça compte beaucoup pour lui. Pas vrai, mon grand ?
Toute notre attention se reporta sur le petit garçon, assis confortablement sur son lit, qui nous regardait avec de grands yeux. Pour toute réponse, il hocha vigoureusement la tête avant d'échanger quelques signes avec son frère qui souriait tendrement en simple réaction.
— Il dit qu'il t'aime bien, me traduit Axel.
— Moi aussi, je t'aime bien bonhomme, répondis-je alors à Noé.
L'ambiance était devenue plus légère, le nouveau silence plus serein. Cependant, je n'en oubliais pas mes obligations et le travail que j'avais encore à fournir durant cette journée. Alors, après un léger coup d'œil à ma montre, je décidais qu'il était plus que temps pour moi de voir mes autres mini-humains et de laisser les deux frères profiter de la présence de l'autre en toute tranquillité.
— Je vais vous laisser profiter tous les deux, moi je dois retourner travailler, les informai-je en posant sans réfléchir une main sur le bras d'Axel.
Mais la chose la plus irréfléchie que je fis se passa juste ensuite, lorsque je me penchai vers l'oreille d'Axel pour lui souffler quelques mots simples.
— Toutes ces bonnes nouvelles, ça vaut bien un dîner pour fêter ça, tu crois pas ? murmurai-je doucement afin qu'il ne soit le seul à entendre, juste avant de m'éloigner de quelques pas.
Je ne pus m'empêcher de garder un sourire malicieux lorsque je le vis détourner la tête, les joues rosies. Je n'attendis pas de réponse, je savais qu'il ne m'en donnerait pas maintenant, et fit un signe à Noé - auquel il répondit vivement - avant de passer le pas de la porte. Je sortais enfin de la chambre, laissant visiblement un Axel confus derrière moi.
Je n'avais pas pu retenir cette question, remettre cette proposition de diner sur la table avait été plus fort que moi. Oui, j'avais aimé notre moment passé ensemble la veille, oui j'avais aimé qu'il puisse se confier à moi, mais la seule chose qui avait été frustrante était de ne pas avoir reçu de réponse à ma question. Il était resté silencieux longtemps avant de me dire qu'il devait y réfléchir puis me faire comprendre que sa pause déjeuner se terminait et qu'il devait retourner à la boutique.
Je savais que je ne devrais peut-être pas insister autant, mais j'avais beaucoup de mal à résister. J'avais beaucoup de mal à lui résister, plus précisément. Alors, je continuerai probablement à lui poser la question jusqu'à ce qu'il me donne une réponse claire, en espérant qu'elle soit positive.
En attendant, je reportai ma concentration sur mon planning bien chargé du jour. Et ce fut deux heures plus tard, alors que j'étais de retour derrière le bureau d'accueil pour un peu plus de paperasse, que Nicolas arriva vers moi en furie, se penchant contre le comptoir en face de moi pour attirer mon attention.
— Il faut qu'on sorte, lança-t-il soudainement.
Je relevai vivement la tête, confus par cette soudaine idée venue de nulle part, bien que j'aurais dû y être habitué depuis le temps que je côtoyais mon ami.
— Tu m'expliques ? répliquai-je simplement, curieux de connaître les motivations de sa nouvelle lubie.
— J'aimerai qu'on sorte tous les deux un de ces soirs, développa-t-il alors. Déjà parce que ça fait longtemps qu'on ne s'est pas fait de soirée entre potes. Et ensuite parce qu'il faut qu'on te change les idées avant que tu fasses une connerie avec Axel Moreau.
Je poussai un soupir blasé. Evidemment, ça devait être à propos de ça, comme à chaque fois qu'il venait me parler depuis ces deux dernières semaines.
— Combien de fois faut-il que je te répète qu'il n'y a rien entre Axel et moi ? soupirai-je. C'est juste un ami.
— J'y crois pas, trancha-t-il. Et tu n'y crois pas non plus, Camille. Arrête. Je vous vois bien tous les deux. Tu t'impliques déjà beaucoup trop.
— Tu ne veux pas travailler au lieu de m'observer à longueur de journées ? cinglai-je sur un ton plus sec que prévu.
Un silence pesant s'installa soudainement entre nous. Je me sentais presque mal à l'aise, ce qui m'était très rarement arrivé en présence de mon meilleur ami. Ce dernier me regardait désormais d'une manière plus douce, presque désolée, comprenant certainement qu'il finirait par me blesser s'il insistait.
Ce fut alors à son tour de pousser un léger soupir. Il croisa ses mains sur le comptoir et baissa les yeux sur ces dernières, gardant le silence encore quelques secondes.
— Ecoute, reprit-il ensuite d'un ton plus calme, je sais qu'on ne dirait pas mais je ne cherche pas à agir en connard. Et s'il s'avère que quelque chose de sérieux se forme entre toi et Axel, alors je le respecterais, et je te soutiendrais. Toujours, tu le sais ça. Mais tu es mon ami, et c'est pour ça que je m'inquiète autant. Je ne veux pas que tu sois blessé, et je ne veux pas non plus que tu mettes ton travail, ton poste ici, en péril. Tu comprends ?
D'un geste à peine visible, je hochai la tête pour simple réponse. Oui, je comprenais la logique et les actions de mon ami, j'agirais certainement de la même façon à sa place. Mais je voulais aussi qu'il me fasse confiance.
— Et je vois bien que tu es dans ton monde en ce moment, continua-t-il. Alors laisse-moi te changer les idées. Tu peux simplement considérer ça comme un moyen de faire retomber la pression et d'oublier le boulot un instant. Laisse-moi nous organiser une soirée entre amis. Qu'est-ce que t'en dis ?
Je pris le temps de réfléchir un instant avant de tomber dans le regard de chien battu que me lançait mon meilleur ami.
— D'accord, cédai-je finalement.
Nicolas leva légèrement son poing en guise de victoire et m'adressa un de ses éclatants sourires. Décidément, c'était la journée de la bonne humeur.
— Qui sait, peut-être que tu rencontreras un mec, ou simplement un coup d'un soir, lança-t-il soudainement en agitant furieusement ses sourcils. Ça pourrait te détendre.
Je ne perdis pas une seconde pour lui lancer le regard le plus noir que j'avais en stock, alors que lui continuait de rire, amusé. Je savais qu'il ne faisait que de me provoquer, j'étais depuis bien longtemps habitué à sa personnalité et ses remarques.
— Tu sais très bien que ce n'est pas ce qui m'intéresse, dis-je tout de même. Et je n'ai ni l'intention, ni l'envie de rencontrer un mec. J'accepte juste de sortir parce que je sais que tu vas continuer d'insister sinon.
— Je plaisantais de toute façon, tu le sais, précisa-t-il en m'offrant un clin d'œil. Bon je te laisse, il faut que je me mette au travail, visiblement je ne travaille pas assez au goût de certains.
Je levai les yeux au ciel face à son sarcasme mais cela ne m'empêcha pas de garder ce petit rictus au coin des lèvres. Nicolas était un savant mélange de sérieux quand il fallait l'être et de réactions enfantines ou immatures quand il laissait entrevoir sa complète personnalité, lorsqu'il était à l'aise avec les personnes qui l'entourait. Et dans tous les cas, je savais qu'il était un ami précieux, il me l'avait prouvé à maintes reprises. J'avais beaucoup de chance de l'avoir dans ma vie.
Alors, même si le sujet qu'il avait voulu aborder avec moi ne m'enchantait pas, même si la conversation avait mal débuté, je savais qu'il n'avait simplement que de bonnes intentions. Et sa façon d'être avait quand même réussi à me donner le sourire.
Notre légère altercation bien vite oubliée, ce fut donc détendu que je me dirigeai vers l'extérieur, un café en main, pour profiter de ma pause. Cela ne faisait que quelques secondes que j'étais dehors lorsque la porte s'ouvrit déjà sur une autre personne. Attiré par le bruit, je tournai la tête pour voir Axel sortir du bâtiment. Il me remarqua tout de suite et, pour une fois, il n'hésita pas avant de s'approcher de moi.
Nous restâmes un instant à nous observer, sans qu'aucun de nous deux ne prenne la parole. Cela ne dura que quelques secondes mais l'atmosphère entre nous était devenue paisible, et cela ne me dérangeait pas de garder le silence tant que je pouvais me perdre dans ses prunelles. Axel, lui, devint soudainement plus timide, plaçant ses mains dans ses poches avant de prendre une grande inspiration.
— C'est d'accord pour le dîner, dit-il soudainement, dans un murmure.
Il ne me laissa pas le temps de répondre qu'il me tournait déjà le dos, s'avançant vers la grille de sortie. Mais ce qui était certain, c'est qu'à l'entente de ces simples petits mots, mon cœur s'était mis à battre un peu plus fort, anticipant déjà un nouveau moment passé en compagnie d'Axel.
⭐️⭐️⭐️
Hey !
Je suis contente de vous retrouver aujourd'hui pour ce nouveau chapitre, je trouve que j'ai mis moins de temps à vous publier ce nouvel update par rapport aux fois précédentes, donc je suis plutôt fière de moi. Je vais essayer de reprendre un rythme plus rapide. J'espère que tout va bien de votre côté.
J'espère aussi que ce chapitre vous aura plu ! Bon, on a peut-être moins d'informations, moins de confidences que dans le chapitre précédent, mais j'aime bien celui-ci parce que je le trouve plus léger. Je trouve que cette bonne humeur ambiante que j'ai essayé de décrire fait du bien après les lourdes révélations qu'on a vécu auparavant. Et puis il y a cette bonne nouvelle concernant Noé, ce n'est pas rien !
Alors, qu'avez-vous pensé de ce chapitre ?
Camille et Axel qui semblent un peu plus à l'aise auprès de l'autre ? En tout cas Axel qui est moins distant ?
La bonne nouvelle pour Noé, sa future sortie pour un week-end ?
Nicolas ? Toujours là, toujours inquiet ? La sortie entre pote qu'il propose, une bonne idée selon vous ?
Et enfin, Axel qui accepte le fameux dîner ? A votre avis, comment vont-ils envisager ce moment ( je suis juste curieuse de connaître vos éventuelles hypothèses par rapport à ce dîner, si vous en avez ) ?
Je trouve qu'on fait déjà de jolis progrès, notamment du côté d'Axel. J'espère que ça n'avance pas trop vite ou trop lentement pour vous, dîtes-moi si jamais.
Je suis impatiente de vous lire et de découvrir vos avis !
En attendant, je ne vous embête pas plus longtemps, et je vous souhaite une très belle journée. Je vous retrouve au plus vite.
A bientôt, T.
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