Chapitre 16 : Une dernière nuit


Eren faisait les cent pas devant le bureau du directeur, n'arrivant pas à rester assis. Qu'est-ce qu'Erwin pouvait bien avoir de plus important à faire que le recevoir ?... Mille pensées étaient en train de le traverser quand la porte du bureau s'ouvrit enfin. Il se jeta presque à l'intérieur mais deux mains se posèrent sur ses épaules et l'assirent sans ménagement sur une chaise. Il jeta un coup d'oeil assassin à Mike. Toujours trop zélé, celui-là...

Erwin s'assit en face du détenu, son éternel regard bienveillant posé sur lui.

"Hé bien Eren, que puis-je faire pour toi ?"

"Vous devez relâcher Livaï ! Il ne mérite pas la peine de mort !"

"Et pourquoi ne la mériterait-il pas ? Il a tué deux détenus et il est directement responsable de la mort des cinq autres... Je ne peux plus l'éviter maintenant. Je sais les rapports que vous entreteniez tous les deux mais il va falloir être fort Eren."

"Mais bordel, ils m'ont violé ! D'accord ? Ils m'ont coincé et violé à plusieurs reprises ! Personne ne l'a su, à part Livaï ! Il a fait justice lui-même parce que j'avais pas la force de le faire moi-même ! Vous savez ce que c'est d'être terrifié à chaque fois que vous vous levez le matin ? D'avoir la boule au ventre en vous demandant derrière quelle porte ils vous attendent ?"

Les larmes lui montaient aux yeux comme il se remémorait ces souvenirs pénibles.

"Je comprends bien, mon garçon. Mais tu aurais dû nous en parler. Nous nous en serions occupés."

"Et vous auriez fait quoi, hein ? Vous les auriez mis en isolement ? Et ils auraient recommencé à leur sortie, ils auraient même été capables de faire pire pour me le faire payer !"

"Sache que les viols sont punis très sévèrement ici. On ne se contente pas de mettre les fautifs en isolement."

"Et comment j'étais supposé le savoir ?..."

"Il est vrai que ce point du règlement n'est pas explicité aux détenus à leur arrivée, on va corriger ça. En attendant, monsieur Ackerman reste condamné. Même si l'intention de vous protéger était louable, il n'en reste pas moins un dangereux criminel, psychiatriquement instable. De plus, je ne peux plus revenir en arrière maintenant... Je dois appliquer le règlement, peu importe ce que ça coûte. Je suis désolé."

C'en était trop pour Eren : il se leva d'un bond et asséna un coup de poing de toutes ses forces sur le bureau, faisant sursauter les objets se trouvant dessus.

"MAIS BORDEL ! VOUS AVEZ AUCUN COEUR OU QUOI ??"

Il fut vite rassis de force par les deux mains puissantes de Mike. Il essaya de se relever sans succès. Le grand blond de 1m96 était bien plus fort que lui physiquement, c'était indéniable.

Erwin se contenta de remettre tranquillement ses affaires en place et reprit :

"Crois bien que je comprends ta douleur. J'en suis navré. Mais on ne peut plus reculer. L'acte de condamnation a déjà été signé par les autorités gouvernementales. Livaï Ackerman sera exécuté dans trois jours, au lever du soleil."

Eren pleurait de rage. S'il n'avait pas été retenu sur place par Mike, Erwin serait déjà mort étranglé ou roué de coups.

"Vous pouvez pas me l'enlever... C'est tout ce que j'ai... Je vous l'interdis !!!"

"Tu as tes amis. Mikasa, Armin... et les amis de Livaï qui resteront là pour te protéger, et ce jusqu'à ta sortie."

"C'est pas pareil... vous pouvez pas comprendre."

"Je sais ce que tu croies. Tu penses que Livaï est ton âme soeur et que s'il meurt, tu perdras une partie de toi. Tu es jeune Eren, c'est normal de penser comme ça. De toute façon votre relation n'est pas saine. Tu t'en serais rendu compte un jour ou l'autre."

"Écoutez : vos leçons de morale, vous pouvez vous les mettre au cul. C'EST CLAIR ???"

"Du calme. C'est normal que tu sois énervé mais reprends-toi."

"Rendez-le moi..."

"Je ne peux pas faire ça. J'ai des responsabilités en temps que directeur et je ne peux pas passer outre."

Eren était complètement effondré. Rien à faire, il ne pouvait même pas convaincre le directeur. Il pensait pourtant avoir de bons arguments pour la défense de Livaï...

"Vous ne pouvez vraiment rien faire ?"

Il jeta un regard suppliant à Erwin, qui fut touché par la détresse de ce pauvre gamin complètement paumé et inconsolable.

"Bon écoute, Eren. Je ne peux pas revenir en arrière, mais je peux faire une dernière chose. Je peux t'accorder une nuit avec le condamné. Je déroge à mes droits en faisant ça. Une seule nuit, c'est tout ce que je peux t'accorder. C'est compris ?"

Eren renifla et essuya de sa manche les quelques larmes qui avaient traversé sa joue.

"...Est-ce que j'ai le choix ?"

"Pas vraiment non..."

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Livaï était assis au fond de sa cellule, sur le sol, les genoux ramenés contre sa poitrine. Il était étonnamment calme. Lorsque la porte s'ouvrit, il se préparait à voir entrer les gardiens pour l'amener devant le peloton d'exécution, mais à la place un jeune détenu complètement perdu vint se jeter à son cou.

"Livaï !"

Il resta surpris quelques instants avant de prendre Eren dans ses bras.

"Désolé gamin."

"Pourquoi t'as fait ça ? T'es qu'un abruti !"

"Je devais le faire."

"Et tu vois où ça t'a mené une fois de plus ? Quand est-ce que tu vas arrêter d'être con ??"

"Écoute : dès l'instant où ces deux connards ont posé la main sur toi ils étaient condamnés. Je me suis juré de les tuer. Et je l'ai fait, parce que je t'... parce que je refusais de te voir vivre dans la peur et la honte."

"Tu allais dire autre chose."

"Quoi ? Non."

"Si, tu... Ugh.. laisse tomber."

Ils se levèrent et s'installèrent sur le lit de camp miteux. Eren vint s'assoir sur les genoux du caporal en prenant soin d'enrouler ses jambes autour de sa taille et ses bras derrière son cou. Il colla leurs deux fronts et ferma les yeux.

"Et maintenant ? Maintenant que ta stupide vendetta est achevée, tu es conscient de ce qui va t'arriver ?"

Une boule était en train de se former dans sa gorge. Lui, il le savait.

"Oui... j'en suis parfaitement conscient."

"Et moi, tu as idée de ce que je peux ressentir ? Qu'est-ce que je deviens si tu m'abandonnes ?"

"Tu as Mikasa, Armin... Et tous mes amis. Ils t'aiment beaucoup tu sais. Surtout Hanji."

"Je me fiche de tout ça. C'est pas avec eux que je veux finir ma vie. C'est avec toi."

"Eren... ne rends pas les choses plus difficiles qu'elles ne le sont déjà."

"Parce que c'est moi qui rends les choses plus difficiles ?..."

"Oui... accepte-le."

Eren se dégagea légèrement des bras de Livaï et le regarda quelques instants dans les yeux.

"Tu n'as aucun regret ? Même pas pour moi ?"

"Bien sûr que si... mais je... Je préfère éviter de me disputer sur le sujet, c'est tout."

Eren vit dans le regard de son amant qu'il n'en tirerait rien de plus. Il ne put s'empêcher de venir plaquer ses lèvres sur les siennes. Foutu pour foutu, il voulait au moins profiter au maximum du peu de temps qu'il leur restait ensemble. Après cette nuit il devrait retourner dans sa cellule, de grès ou de force, et la prochaine fois qu'il verrait son caporal serait devant un peloton d'exécution.

Il posa ses mains sur les joues du condamné et approfondit le baiser en le couchant sur le dos. Il vint se mettre à califourchon sur lui. Livaï répondit au baiser quelques instants mais lorsque son jeune détenu commença à ouvrir sa braguette il lui saisit le poignet. Eren lui jeta un regard à la fois interrogateur et pressant.

"Eren... sors de ma cellule."

"Mais..."

"Je suis pas d'humeur à baiser, d'accord ? Si t'es venu pour ça, tu peux partir."

"Hein ? Mais qu'est-ce qui te prend ?"

"Va-t-en, ça vaut mieux pour toi."

Pour illustrer son propos, il posa une main sur le torse d'Eren et le repoussa pour se rassoir. Son comportement laissa Eren perplexe. Le jeune détenu finit par se dire qu'il ne s'agissait que d'un mouvement d'humeur du caporal, lui qui était pourtant toujours d'attaque d'habitude. Sa mort prochaine devait le travailler. Aucun homme ne restait totalement indifférent devant la mort.

Il repartit donc à l'assaut des lèvres de son amant, mais une douleur lui traversa aussitôt la joue. Il recula en se tenant la joue, choqué.

"Est-ce que tu viens de me gifler ?..."

"Et j'hésiterai pas à recommencer. Dégage."

"Mais... pourquoi tu réagis comme ça, je comprends pas ? Dis-le si je t'ai fait quelque chose qui t'a pas plu, mais réagis pas comme ça !"

"Je préfère que tu t'en ailles. Maintenant."

"Mais non ! Dis-moi ce qui va pas !"

Sans dire un mot, Livaï se dirigea vers la porte et frappa. Les gonds grincèrent et la porte s'ouvrit pour laisser entrer un gardien. Livaï désigna Eren du menton, les bras croisés.

"Monsieur Jaeger voudrait sortir."

"Non, c'est faux ! Fermez cette porte !"

"Eren..."


"Non ! Tu vas me dire ce qui te prend ! Je suis pas venu ici pour me disputer avec toi, pas maintenant, je t'en supplie !"

"Bon ça suffit..."

Il vint prendre brutalement le bras d'Eren et l'entraîna de force vers la sortie. Malgré ses mois d'entraînement intensif, ce dernier ne pouvait pas rivaliser en force avec le caporal. Il se retrouva jeté dans les bras du gardien sans avoir le temps de réagir. Livaï jeta un regard noir au gardien qui restait immobile, sans réaction.

"Raccompagnez-le à sa cellule."

Il claqua la porte et retourna s'assoir sur son lit. Une fois seul, il cacha son visage dans sa main et explosa en sanglots.

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