trente-six // twitter
TW: dépression et alcoolisme.
Leave Out All The Rest, Linkin Park
JUILLET 2010
Carré dans le fauteuil bleu marine trop petit pour lui — chaque fois qu'il y prenait place, il n'avait guère le choix d'étendre ses longues jambes devant lui plutôt que de les croiser comme il le faisait en temps normal —, Marcus Goldman agitait sa main à la hauteur de son visage luisant de transpiration.
Depuis quelques semaines, une canicule que les météorologues, alarmistes au possible, qualifiaient « d'encore plus intense que les températures actuelles de Phoenix ou d'Albuquerque », s'abattait sur le nord-est du pays, New York compris. À la télévision, on recommandait à la population de rester au frais chez soi (que Dieu bénisse l'air climatisé et le ventilateur!), du coup seuls les touristes osaient s'aventurer à l'extérieur pendant plus d'une heure; et encore, dans neuf cas sur dix, ils battaient en retraite vers le Starbucks le plus près pour commander un smoothie ou un cappuccino glacé.
Il regarda la jeune femme assise en face de lui. Elle aussi transpirait. La pauvre, ses longs cheveux noirs lui mangeaient tout le front et n'aidaient en rien son cas. Elle venait de griffonner quelque chose dans son bloc-notes et de relever la tête vers lui, un petit sourire poli sur ses grandes lèvres. Oui, elle lui souriait. Elle l'encourageait à parler. Comme chaque mardi soir depuis maintenant sept mois.
Marcus fit la moue et détourna le regard vers le ventilateur bon marché qui tournait à plein régime dans un coin du petit bureau. Il se demanda comment elle réagirait si la prochaine fois qu'ils se voyaient, il lui offrait un ventilateur de meilleure qualité à la place du chèque habituel. Ça pourrait être drôle. Et très utile, si les thermomètres new-yorkais affichaient la semaine prochaine encore plus de cent degrés Fahrenheit
— Je ne sais pas, soupira-t-il enfin.
Le sourire de la jeune femme s'agrandit, et une vague de remords le submergea. Il savait qu'elle n'aimait pas quand il gardait le silence longtemps comme ça.
— Vous n'avez pas d'inspiration, Marcus? essaya-t-elle, gentille comme tout.
Il arqua un sourcil. C'était une question fermée, à laquelle il ne pouvait répondre que par oui ou non. Elle se gratta la nuque, elle venait de se rendre compte de sa bévue.
Ce fut au tour de Marcus de lui sourire : qu'elle se rassure, il développerait sa réponse, il ne lui rendrait pas la tâche difficile. Ils avaient fait bien du progrès depuis leur première rencontre, tous les deux. Et puis, il lui faisait confiance, désormais. Ne lui avait-il pas raconté voilà plus d'un mois toutes les frasques du Formidable, surnom dont il avait hérité au lycée, alors qu'il n'avait jamais osé le faire avec personne jusque-là?
Elle avait tâché de conserver son air professionnel, mais s'était retenue — il en aurait mis sa main au feu — d'éclater de rire.
— Je vous amuse, Clara? lui avait-il alors demandé.
Elle l'avait corrigé, avec son éternel sourire :
— Non, Marcus, vous me fascinez. Votre obsession d'être à tout prix le centre d'attention, c'est très intéressant. On dirait que ça s'est retourné contre vous ces dernières années, pas vrai?
Un sourire encore plus inquiétant que celui du chat du Cheshire était apparu sur les lèvres de Marcus avant qu'il ne lâche :
— Oui. Le karma, c'est une salope.
N'y tenant plus, elle avait éclaté de rire, et lui aussi. Ils avaient le même sens de l'humour, c'était génial. Il avait eu de la chance de tomber sur quelqu'un avec qui le courant passait aussi bien.
Après cette séance, il avait cru qu'il progresserait à pas de géant. Peut-être pourrait-il voir Clara non plus chaque semaine, mais chaque mois? Peut-être son médecin l'autoriserait-il à lâcher les médicaments? Ça faisait déjà sept mois, après tout, qu'il prenait une gélule de 75 milligrammes au petit-déjeuner. Hélas, il continua à voir Clara chaque mardi soir et à avaler sa gélule chaque matin : pour une raison qui lui échappait, la vie lui paraissait toujours aussi laide, toujours aussi morne.
C'était vraiment à n'y rien comprendre. Clara aussi semblait perdue. Pendant des heures, il lui avait parlé en long et en large de sa relation avec ses parents et ses amis, et de sa jeunesse marquée par la crosse et les livres. Il avait aussi abordé sa rupture avec Harry — sauf du secret des Origines du mal qu'il se refusait à dévoiler, même sous le sceau de la confidentialité — ainsi que de ses sentiments contradictoires envers lui, l'homme à qui il devait tout et qui avait disparu de la circulation au mois d'août 2008.
La question était donc : pourquoi, après tant d'efforts, n'obtenait-il pas de résultats concrets? Autrement dit, pourquoi n'allait-il pas mieux? En désespoir de cause, Clara l'avait récemment poussé à s'intéresser de nouveau à l'écriture (qu'il avait complètement délaissée suite à sa rupture avec Harry), ce qui lui redonnerait avec un peu de chance le goût de vivre.
Voilà donc où ils en étaient aujourd'hui : à discuter d'écriture, faute d'avoir trouvé la véritable source du malheur de Marcus.
— Vous n'avez pas d'inspiration? répéta Clara, pleine d'indulgence. C'est pour cette raison que vous peinez à commencer votre roman?
Marcus s'excusa avec un sourire contrit, il était dans la lune.
— Sans doute, admit-il. Écrire... Sans lui, ce n'est pas la même chose. C'est plus difficile.
— Sans Harry, vous voulez dire?
Il opina de la tête, la tête à présent enfoncée contre sa paume. Il avait renoncé à s'éventer avec sa main, il gaspillait son énergie.
— Ça va faire deux ans cet automne, murmura-t-il. Deux ans, déjà.
— Vous n'avez jamais songé à refaire votre vie?
Il fronça les sourcils.
— Avec quelqu'un d'autre? Jamais.
— Certaines personnes ont besoin de plus de temps que d'autres pour tourner la page sur une relation, Marcus. Rappelez-vous ce que je vous ai dit l'autre jour : vous n'avez pas à avoir honte de vos sentiments.
— Mais mon état ne s'améliore pas, il doit bien y avoir une raison, s'irrita-t-il malgré lui.
Clara releva la tête de son bloc-notes et l'observa, son regard d'un calme olympien. C'est ce qu'il aimait le plus chez elle : elle le laissait exprimer sa rage comme il le désirait. Lors de leur toute première séance, il était allé jusqu'à l'insulter pour qu'elle sorte au moins une fois de ses gonds sinon qu'elle lui intime de se calmer. À son plus grand désarroi, elle s'était contentée de l'observer comme elle le faisait en ce moment, sans dire un seul mot.
— Désolé, marmonna-t-il pour la forme.
Elle lui sourit.
— Bien sûr qu'il y a une raison, Marcus. Mais comme je ne suis pas dans votre tête, c'est à vous, et à vous seul, de la trouver. Moi, je ne suis là que pour vous guider.
Il roula les yeux sans pouvoir s'en empêcher. Il détestait qu'elle ait raison.
— Oui, je sais.
Elle jeta un œil à l'horloge accrochée au mur derrière lui.
— Je vois que notre heure s'achève bientôt. Que pensez-vous faire cette semaine, Marcus?
— Essayer d'écrire ce foutu roman, je suppose, grogna-t-il sans grand enthousiasme.
Il savait qu'il n'y parviendrait pas. Il ne savait plus comment jouer avec les mots et composer de jolies phrases. Parfois, il feuilletait son tout premier roman, G comme Goldstein, et s'étonnait lui-même d'avoir été capable de l'écrire, pis encore de l'avoir publié.
Devant son défaitisme, Clara lui proposa une tout autre piste :
— Et si vous essayiez plutôt de comprendre ce qui vous manque pour être vraiment heureux?
C'était un exercice absurde et stupide, mais il promit à Clara de s'y pencher avant leur prochain rendez-vous, qu'ils fixèrent de nouveau au mardi soir suivant.
Une fois chez lui, dans son grand appartement du Village doté d'air climatisé, il s'installa devant son ordinateur malgré l'heure tardive. Il ouvrit foutu roman que je n'arrive pas à écrire.docx et soupira devant l'habituelle page blanche. Il avait menti à Clara; il ne manquait non pas d'inspiration mais de bonnes idées.
Il se souvenait du cuisant échec de son dernier roman. Bien sûr, la réaction disproportionnée de ses lecteurs n'avait pas joué en sa faveur. Les ventes de son livre n'avaient jamais décollé, et Barnaski avait été sur le point de déchirer leur contrat quand Douglas, en bon agent littéraire qu'il était, lui avait rappelé que Marcus était tellement bourré de talent qu'il pouvait se rattraper. Qu'il lui donne une seconde chance, et l'enfant prodige leur pondrait un chef-d'œuvre qui rivaliserait peut-être avec les intouchables Origines du mal.
Bien que sceptique, Barnaski avait accepté, et là était peut-être justement tout le problème : la pression était trop forte. Tout le monde le brusquait d'écrire un chef-d'œuvre, tout le monde l'en croyait capable alors que lui-même en doutait.
La tête entre les mains, il regarda d'un air distrait à travers la large fenêtre de son salon, où il travaillait toujours. Peut-être la vue des buildings illuminés l'inspirerait-elle? Hélas, il ne vit que son propre reflet, flou mais bien là. Il détourna vite le regard. Sa bouille déprimée lui faisait peur.
Par pure paresse, il délaissa son document Word pour se perdre dans les méandres de Twitter. L'année passée, Barnaski l'avait forcé à s'y créer un compte pour interagir avec ses lecteurs (ceux qui lui restaient, tout au moins) dans l'espoir de redorer son image publique. Si Marcus avait d'abord vu ce réseau social comme un énième moyen de l'attaquer gratuitement, qui plus est sous le couvert de l'anonymat, il s'était contre toute attente pris au jeu au fil des mois.
Lire chaque jour les tweets qu'on lui envoyait l'amusait. Quand il s'ennuyait, il répondait à quelques-uns d'entre eux. Hier soir encore, il avait expliqué à @falloutgirl qu'en effet, sa vue était très mauvaise à force de passer des heures à écrire derrière son écran d'ordinateur et qu'adolescent, on l'avait condamné à porter des lunettes qu'il avait rapidement troquées pour des lentilles de contact, et à @mypussytasteslikepepsicola, il avait révélé que sa saveur de glace préférée était la vanille.
Ce soir-là, il fit défiler son fil d'actualité sans grand intérêt, puis cliqua sur ses notifications. Comme à l'habitude, plein de tweets l'attendaient, dont l'incontournable marie-moi et le très étrange sois mon papa auxquels il s'était habitué à force de les lire jour après jour, mais aussi beaucoup de questions sur son prochain livre. Même Twitter s'enthousiasmait pour le prochain Goldman, qui n'en était pourtant encore qu'au stade d'embryon sur son disque dur!
Il aurait sans doute fermé son ordinateur sur ces entrefaites si ses yeux ne s'étaient posés sur une vidéo YouTube qu'un de ses abonnés venait de retweeter. La vidéo, de sept minutes, s'intitulait Marcus Goldman a changé ma vie. Son ego flatté, il la fit jouer sans même y réfléchir à deux fois, et une grande brunette de peut-être vingt ans, assise sur son lit, lui sourit de toutes ses dents. Son maquillage était si chargé qu'il lui donnait l'air d'une poupée vivante; néanmoins, il ne pouvait nier qu'elle dégageait un certain charme.
— Salut tout le monde, ici Alma! clama-t-elle, enjouée. Aujourd'hui, ce sera une vidéo très différente de d'habitude, mais je pense que c'est important que j'ose parler d'un tel sujet. Pour m'y aider...
Elle s'interrompit, sourire aux lèvres, et se reprit :
— Enfin, pour me soutenir moralement, j'ai avec moi la femme de ma vie, j'ai nommé la jolie...
À ce moment, une silhouette entra dans le champ de la caméra et enlaça très fort la brunette.
— Oh Daisy, tu devais attendre que je te nomme avant d'arriver! protesta-t-elle en riant.
Si la vidéo se poursuivit, Marcus n'y prêta plus la moindre attention. Il approcha ses yeux si près de l'écran qu'il crut qu'il se brûlerait la rétine. Il s'en moqua. Car sous son regard ébahi se tenait, toute pixellisée mais bien réelle, Daisy Harrison, avec son éternelle crinière de feu et sa voix forte, limite criarde.
— Oh, putain de..., souffla Marcus avant de plaquer ses mains sur sa bouche.
Soudain agité, il ferma la vidéo d'un clic nerveux. Il se prit la tête dans les mains un bref instant et respira profondément, les yeux clos, dans l'espoir de se calmer. En vain. L'image de son visage rieur et candide était ancrée dans sa mémoire, et sa lâcheté, dans son ADN.
Il était parti, elle était restée. Il était parti, et elle était heureuse. Elle était heureuse.
Il se leva d'un mouvement sec et se dirigea à grandes enjambées vers la cuisine. Il se servit un verre d'eau qu'il avala cul sec. À une époque qu'il lui paraissait lointaine, c'est-à-dire quand il avait tourné le dos à Harry, il aurait sans doute vidé ses réserves de gin ou de vodka pour oublier — tout oublier —, mais depuis que Clara le suivait, il faisait des efforts pour ne plus toucher à l'alcool lorsqu'il se sentait déraper.
Ce qui l'avait poussé à prendre cette décision, c'était que l'année passée, à son examen de routine, son médecin lui avait annoncé qu'à même pas trente ans, son foie était déjà en très mauvais état. Pour l'aider à remonter la pente, il lui avait donné deux numéros.
Le premier était celui des Alcooliques anonymes pour qu'il s'inscrive au groupe de soutien le plus près de chez lui. Il n'avait pas franchi cette étape. Non pas par orgueil, mais par réalisme. Il savait que derrière son alcoolisme se cachait un problème beaucoup plus grave et que s'il le réglait, il réglerait tout le reste. Comme une certaine personne n'avait pas cessé de le lui répéter du temps où il vivait encore à Aurora, il avait besoin d'aide.
Il avait donc appelé le deuxième numéro, celui de Clara Rosenbach, psychologue de renom du quartier de Manhattan. Elle lui avait diagnostiqué une dépression majeure, dont il souffrait apparemment depuis l'automne 2008. À la nouvelle, un sourire sans joie était apparu sur ses lèvres.
— Ah? C'est pour ça que j'ai envie de massacrer tout le monde?
— Et que vous vous sentez vide en permanence? Oui, Marcus.
Clara lui avait offert la boîte de kleenex pendant qu'il hoquetait :
— J'ai essayé de... de le combler, le...
— Pas avec de l'alcool, Marcus. Surtout pas, ça ne marche jamais.
La respiration sifflante, il s'accouda au plan de travail. Il avait coupé les ponts avec Daisy sans la moindre explication? Allons, ce n'était pas grave. Elle n'en était pas morte. Au contraire, plus que jamais, elle semblait croquer la vie à pleines dents. Elle n'avait pas besoin de lui. Elle était si forte, si courageuse, la petite Daisy.
Il fit le calcul, elle avait eu dix-huit ans le mois dernier. Qu'était-elle devenue? Vivait-elle encore à Aurora? Avait-elle le permis? Faisait-elle des études supérieures? Et à quoi ressemblait-elle, deux ans plus tard? Il n'avait pas eu le temps de la détailler, il avait fermé si vite la vidéo. Il ferma les yeux. Il sourit. Il se souvenait. Il revoyait sans mal la gamine sauvage telle qu'il l'avait connue.
Seize ans.
Haute comme trois pommes.
Sourire en coin.
Dents croches.
Taches de rousseur.
Boutons mal cicatrisés.
Coups de poing sur l'épaule.
Daisy.
Il revint à son ordinateur. Twitter était encore là. La vidéo aussi. Sur un coup de tête, il cliqua sur le pseudo de la personne qui l'avait publiée la première : la fameuse Alma. Dans sa biographie, elle se présentait comme étant une YouTuber de type lifestyle. S'il ne comprit rien à ce charabia, il comprit qu'elle jouissait d'une bonne notoriété, avec ses près de 7000 abonnés. Il fit défiler ses plus récents tweets et ne tarda pas à tomber sur le profil de Daisy.
Elle avait moins d'abonnés que sa petite amie, moins de 1000, mais tout de même. Il regarda sa photo de profil. Oui, c'était bien elle. Son visage rond, très juvénile, n'avait pas changé, mais son regard — oui, son regard — semblait plus posé, plus songeur. Elle fronçait un peu les sourcils lors de la prise du cliché, ce qui lui conférait un certain air... oserait-il dire mature? Seigneur.
Elle avait tweeté quelque chose voilà trois minutes, elle devait être encore connectée; s'il lui envoyait un message direct, elle le lirait sans tarder. Mais que lui envoyer? D'un côté, il ne pouvait pas faire comme si rien ne s'était passé et revenir vers elle la bouche en cœur; de l'autre, il ne pouvait pas non plus lui écrire un pavé d'excuses minables qu'elle ne prendrait sans doute pas la peine de lire.
Et puis, s'était-elle résignée à ne plus jamais avoir de ses nouvelles ou espérait-elle encore renouer leur amitié? Elle avait laissé sa petite amie le nommer dans le titre de sa dernière vidéo, n'était-ce pas un signe qu'elle n'attendait que cela? Et lui, souhaitait-il seulement s'excuser et tourner la page sur leur histoire, quitte à en ressasser des regrets jusqu'à sa mort, comme il l'avait fait avec Harry?
Avant qu'il ne puisse y réfléchir davantage, il cliqua sur l'icône des messages directs. Quelques minutes plus tard, il lui envoya un message bref mais limpide.
Et attendit.
Il se fit un café malgré l'heure tardive.
Et attendit.
Il relut pour la énième fois Soie de Baricco.
Et attendit.
Une heure du matin.
Et attendait toujours.
Sans même s'en rendre compte, il s'assoupit devant son ordinateur, sa tête au chaud contre ses bras repliés. Ce n'est que vers 3 h du matin qu'il fut tiré du sommeil par la sonnerie de son téléphone, posé à côté de lui. Les lumières de son appartement n'étaient pas éteintes, et on aurait pu croire qu'entre le moment où il avait fermé les yeux et celui où il les avait rouverts, il s'était écoulé non pas quelques heures mais quelques secondes.
À tâtons, il attira vers lui son téléphone et décrocha sans même regarder qui l'appelait; à une heure pareille, il ne pouvait s'agir que d'une seule personne : Daisy. Pendant un très long moment, personne ne parla. Seule la respiration régulière — faible mais bien là — d'un être humain lui confirmait qu'on avait décroché de l'autre côté. Il l'écouta, égoïste. Son plaisir ne dura pas :
— Alors quoi? Même au téléphone, tu fais le mort?
Déception : bien que féminine, ce n'était pas la voix de Daisy. Pourtant, le double sens de la question ne laissait planer aucun doute : on savait qui il était, on savait ce qu'il avait fait. Il choisit de ne pas y répondre et demanda d'un ton ferme :
— J'aimerais parler à Daisy, s'il te plaît.
— Je m'en doute. Autrement, tu ne lui aurais pas balancé ton numéro sur Twitter.
Il fronça les sourcils. La femme, qui qu'elle soit, n'avait vraiment aucune intention de le laisser parler à son amie. Ou devait-il dire ex-amie?
— Excuse-moi, mais qui es-tu?
À sa plus grande surprise, elle éclata de rire.
— Tu ne me reconnais pas?
Mais c'est qu'elle le narguait, la petite garce! Il prit une grande respiration pour se calmer pendant que l'autre rigolait toujours.
— Attends, Marcus Goldman, je vais te donner un indice : tu as entendu ma voix il y a quelques heures. Ça y est, tu me replaces?
Non, pas possible...
— La petite amie de Daisy? Euh... Emma, c'est ça?
— Eh, presque!
Il ne pouvait pas la voir, mais il était certain qu'elle souriait jusqu'aux oreilles. Elle prenait plaisir à le torturer. Il sourit à son tour : il venait de se souvenir de son vrai prénom, voilà qui allait lui en boucher un coin :
— Tu t'appelles Alma! Et tu fais des vidéos sur YouTube. Voilà, je me suis souvenu de ton nom, j'ai gagné. Tu me passes Daisy, maintenant?
Pendant quelques minutes, il y eut un long silence qu'il n'osa pas briser, de peur de tout gâcher. Il crut qu'Alma passait le téléphone à Daisy. Hélas, il se trompait sur toute la ligne. Quand on revint à lui, c'était toujours la même fille.
— C'est bien mignon, tout ça, commenta-t-elle, amusée. Le problème, mon grand, c'est que tu n'as rien gagné du tout. Tu ne m'as pas donné la bonne réponse.
— Écoute, Alma, s'irrita Marcus, je ne suis vraiment pas d'humeur à jouer à tes jeux débiles, surtout pas à 3 h du matin. Passe-moi Daisy. Tout de suite.
Elle souffla dans le combiné et le reprit lentement, comme si elle s'adressait à un attardé :
— Je m'appelle bien Alma, c'est vrai. Mais à l'époque où on s'est connus, je ne portais pas encore ce prénom.
— À l'époque où on s'est connus? balbutia-t-il.
— Oui. À l'époque où je m'appelais Aldous.
🌙
Bon ok, rassurez-moi : l'avez-vous vue venir, cette révélation? J'espère que non, haha. J'espère aussi que le fait que Marcus soit presque devenu un alcoolo et qu'il souffre de la dépression ne vous choque pas trop, je me suis simplement dit que ce serait "logique" qu'il en arrive là suite à sa rupture avec Harry, qui l'a beaucoup ébranlé.
Sinon, changement de plan comme je l'ai annoncé sur Twitter cette semaine : cette histoire aura 40 chapitres, ce qui signifie qu'il reste bel et bien quatre chapitres avant la fin! C'est tout un pavé, c'est génial que vous soyez tous encore là pour le lire, haha! 💛
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