Chapitre 8
— Voilà. Autre chose ?
— Non, Rijant, ce sera tout pour ce matin.
— Parfait. Bonne journée.
— À vous aussi.
L'homme s'inclina puis s'en alla avec la pile de parchemin que Clarke venait de lire et de signer en y appliquant le sceau de Heda. Elle posa ses mains sur la table et soupira avant de se lever. Il était dix heures du matin et elle était debout depuis l'aube pour faire le travail que Derek n'était pas encore capable de faire. Celui-ci ne dormait cependant pas, levé aux aurores par Roan pour son entraînement quotidien.
Un rire se fit soudain entendre et la porte de la salle du trône s'ouvrit. Derek apparut en faisant des moulinets avec son épée en bois, Roan à sa suite. Clarke esquissa un sourire. Le Terrien était finalement resté après leur entrevue dans la taverne, une semaine plus tôt, et avait décidé de prendre en mains l'entraînement physique du jeune garçon, ce qui n'était pas du luxe vu la maigreur de ce dernier...
— Clarke ! J'ai battu Roan ce matin ! s'exclama soudain Derek.
— Je t'ai laissé gagner, nuance, rectifia le Terrien.
— Tu as trébuché, en fait, dit Clarke avec une moue amusée. Allez vous débarbouiller et vous changer, vous puez à dix lieues à la ronde.
Roan lui tira la langue puis quitta la pièce en emportant les deux épées d'entraînement. Derek, lui, se servit un peu d'eau et, s'approchant du grand bureau de Clarke, il observa la pile de parchemins avec une moue étrange.
— Oui, mon grand, dans peu de temps, ce sera à toi de faire tout ça, ou bien à ton Second, répondit Clarke en posant une main devant elle.
— Je suis désolé de ne servir à rien, Wanheda, répondit alors Derek. Je pensais ne jamais avoir à devenir Heda un jour, mais...
— Tu n'y es pour rien, répondit Clarke. C'est moi qui ai voulu, parce qu'il faut un Commandant aux Terriens. Dès que Fleimkepa sera à Polis, nous commencerons à organiser la cérémonie de l'Implantation.
— Tu devrais devenir Heda, toi, dit alors Derek en grimaçant. Tu es respectée de tout le monde ici, tout le monde baisse les yeux sur ton passage, alors que moi, ils me regardent comme la petite chose fragile que je suis et même les entraînements de Roan n'y changeront rien.
Les coins de sa bouche s'abaissèrent et tremblotèrent.
— Je suis sûr que même l'Esprit des Commandants n'est pas d'accord avec ton choix... dit-il, la voix chevrotante.
— Oh, Derek...
Clarke contourna le bureau et le prit dans ses bras un instant. Quand il recula, elle posa ses mains de chaque côté de sa tête.
— Ne dis plus jamais ça, d'accord ? Les Commandants du passé sont tous bienveillants lorsqu'ils accueillent un nouveau, tu n'as pas à t'en faire, ils ne te feront jamais de mal.
Elle croisa alors le regard de Roan qui secoua la tête.
— Va te reposer, dit-elle en repoussant le jeune garçon. Je viendrais te voir tout à l'heure.
Derek hocha la tête puis tourna les talons et quitta la salle en reniflant. Quand la porte se referma, Roan posa son gobelet.
— Clarke, je crois qu'on ne peut plus attendre, dit-il. Il faut l'implanter le plus tôt possible.
— Il n'est pas prêt, tu as bien vu... répondit Clarke en croisant les bras. Il est terrorisé !
— Dans ce cas, peut-être que nous pouvons continuer à fonctionner sans Commandant, peut-être que tu pourrais rester Régente et en faire le nouveau système de commandement...
Clarke secoua la tête et retourna s'asseoir derrière son bureau.
— Il n'est pas prêt.
— Il ne le sera peut-être jamais, d'accord ? répondit Roan. C'est pour ça que les Natblidas étaient enlevés à leur parents et éduqués dans le but de devenir Heda un jour !
— Et pour mourir aussi ! Ils le savaient ça ?! répliqua la jeune femme. Dis-moi, Roan d'Azgeda, est-ce que les petits bouts que ta sœur a assassinés de sang-froid savaient qu'ils allaient mourir sous les coups de leurs copains à la mort de Lexa ?!
Le Terrien ne répondit rien. Il ignorait la réponse, en vérité, mais de toute manière, Clarke n'en attendait pas.
— Va-t'en, dit-elle soudain.
— Clarke, s'il te plaît... Cela fait bientôt trois mois que tu es ici, je suis certain que tu te rends parfaitement compte que ce garçon est notre avenir, qu'il...
Elle quitta soudain son bureau et se détourna.
— Clarke, tu n'as pas le choix, il doit être implanté...
— Si, j'en ai un autre, mais je refuse de m'y soumettre car cela signifiera que je ne reverrais jamais ma maison et Bellamy...
Clarke serra les mâchoires. Il la regarda de haut en bas ; même toute petite, elle était impressionnante dans ses atours de Rijant... Quand elle lui indiqua vouloir être seule, il comprit qu'il ne tirerait plus rien d'elle pour le moment et quitta la salle du trône à son tour. Dans le couloir, un homme lui indiqua que Goran, Tylo et Fleimkepa venaient de quitter TonDC et qu'ils seraient à Polis d'ici dix jours. Le Terrien le remercia puis arrête un serviteur et demanda à ce que deux repas soient montés dans la chambre de Rijant, un pour lui et un pour Derek. Il allait lui parler et tant pis si Clarke était ensuite furieuse après lui.
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Les dix jours de voyage entre TonDC et Polis, monotones à souhait sans une seule distraction sinon jouer aux cartes avant d'aller dormir et se raconter des blagues salaces, prirent fin avec un sentiment de soulagement quand Polis apparut entre les arbres, avec l'océan en toile de fond.
Juché sur son cheval, John serra cependant les mâchoires. Un frisson s'empara de lui tandis qu'un flot de souvenirs douloureux refaisait surface. Tylo posa une main sur son épaule et le jeune homme lui coula un regard.
— Les souvenirs, ils sont bien où ils sont, Fleimkepa, dit-il.
— Ce n'est jamais facile de les y laisser...
— Oh, je ne le sais que trop bien, mais...
— Tu n'as sans doute jamais été battu à mort pour une chose que tu ignorais, Tylo, répondit John.
— Non, en effet...
Le jeune homme baissa le nez puis talonna son cheval qui s'éloigna sur le chemin en pente descendant jusqu'à la ville. Goran s'approcha alors et l'observa s'éloigner.
— Ces souvenirs risquent de poser problème ? demanda-t-il.
— Je ne pense pas. On m'a toujours dit que remonter aussitôt à cheval après une chute, ce sera la même chose pour Fleimkepa. Il vivra au Sanctuaire et il fera la paix avec son esprit et pardonnera à Titus qui était ignorant.
— Tout comme nous tous.
Tylo inclina la tête puis ils rejoignirent John qui attendait un peu plus loin à un embranchement.
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Sans grande surprise, les trois cavaliers franchirent les portes de la ville dans l'indifférence générale. Apparement, la nouvelle que Rijant avait envoyé chercher un Skaikru pour devenir Fleimkepa n'avait pas fait le tour de la ville, ou alors les gens s'en fichaient éperdument. Il y eut bien quelques regards lancés ici et là, mais sans aucune forme d'émotion et le trio arriva devant le sanctuaire de Becca Pramheda sans anicroche.
— Je vais prévenir Wanheda, annonça Tylo comme John et Goran mettaient pied à terre.
— Nous te rejoindrons une fois qu'il aura déposé ses affaires et fait connaissance avec les Prêtres.
Tylo opina puis disparut dans les ruelles en ruine de cette partie de la ville. John se tourna alors vers le grand bâtiment et inspira.
— Vous n'avez aucune crainte à avoir, Fleimkepa, répondit l'Intendant. Les Prêtes savent déjà qui vous êtes et ils ont sans doute hâte de vous recevoir. Sans Gardien, ils sont perdus et la Flamme est en danger...
— Espérons... Allons-y.
Goran inclina la tête puis poussa les lourdes portes de bois devant eux qui s'ouvrirent en grondant.
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Debout dans la salle de trône, Clarke était tendue. Assis sur le trône de bois, Derek l'observait ; près de la cheminée, Roan semblait vouloir faire comme s'il n'était pas là. Soudain, il y eut des voix dans le couloir et les deux gardes devant la porte poussèrent les battants, laissant entrer Goran, puis un jeune homme. Clarke se redressa. Quand Murphy la découvrit, il marqua un temps d'arrêt et l'observa de haut en bas.
— Le vache... C'est toi, Princesse ? demanda-t-il.
La jeune femme sourit ; elle tendit ensuite les bras et ils s'enlacèrent une longue seconde.
— Enfin un visage connu ! s'exclama-t-elle en reculant. Vous avez fait bon voyage ? Tout s'est bien passé ?
— À merveille, répondit Goran en s'inclinant. Gaia n'a pas été trop pénible à l'aller, et concernant les négociations avec le Chancelier Kane et John Murphy, les choses se sont passées plutôt rapidement.
— Vous me direz tout cela au dîner ce soir, répondit Clarke.
— Ce sera avec plaisir, répondit l'Intendant.
Il fit un signe de tête à Tylo et tous deux quittèrent la salle. Murphy remarqua alors Roan près de la cheminée et plissa les yeux.
— Qu'est-ce qu'il fout là, lui ? Je croyais qu'il avait demandé après toi parce qu'il était incapable de s'occuper des siens ?
Le ton était mauvais mais Roan ne releva pas.
— Il s'occupe de l'éducation physique de Derek, répondit Clarke en indiquant le jeune garçon sur le trône de bois.
John tourna la tête puis courba le cou.
— Heda...
— Non, Fleimkepa, répondit Derek en se levant. Je ne le suis pas encore et je doute le devenir un jour.
— Ne dis pas ça, grogna Roan. Nous avons besoin de toi.
— J'en doutes, mais ce n'est pas le moment pour parler de cela, répondit le jeune garçon. Bienvenue à Polis, John Murphy, dit-il ensuite en tendant le bras. J'espère que tout ira bien pour vous.
— Je l'espère aussi ; la première rencontre avec les Prêtres a été plutôt positive, même s'ils sont restés en retrait au début avant de s'approcher tels des animaux sauvages.
— Ne t'en fais pas, ils se feront à l'idée, répondit Clarke. Comment ça va, chez nous ?
John inspira.
— Pas trop mal compte-tenu de l'endroit où on vit, répondit-il.
La jeune femme indiqua les canapés élimés et tous les quatre y prirent place. John ne manqua pas le fait que Derek s'était assis à côté de Clarke, bien trop proche d'elle pour que ce soit un hasard, mais il ne dit rien.
— J'imagine qu'Emori a mal pris ma demande ? demanda alors Clarke.
— Non... Elle sait que les Cents passeront toujours avant tout le reste, mais j'ai eu de la culpabilité à répondre à ton appel.
— Oh ? Pour quelle raison ?
John esquissa un sourire un peu contrit.
— Je vais avoir un bébé... ? dit-il presque hésitant.
— Quoi ?! s'exclama Clarke. Emori est...
— Elle est enceinte ?! s'exclama Roan, mais pas sur le même ton. La Wastelander est enceinte ?!
— Eh là, on se calme, intervint Derek. Emori n'est plus une Wastelander, elle a épousé John, si j'ai bien retenu ce que tu m'as dit, Clarke. Cela fait donc d'elle une Skaikru désormais et annule toutes les restrictions concernant les membres de son clan.
— C'est ça, répondit John en fusillant Roan du regard. Reparle encore une fois de ma femme sur ce ton, Azgeda, et je promets que ça ira mal pour toi !
— Ça commence bien, soupira Clarke. Roan, rentre chez toi, s'il te plaît, je voudrais rester en famille maintenant.
Le Terrien serra les mâchoires et ne se fit pas prier. Il quitta la salle sans un mot et la porte claqua après lui. Clarke soupira.
— Depuis quand il est revenu ? demanda alors John.
— Quelques jours... Quand il a appris que j'avais demandé après toi, il a quitté sa capitale et est revenu à Polis aussi vite que possible... Je le cantonne à entraîner Derek au maniement des armes, pour le moment, je ne veux pas qu'il fasse ingérence alors que je tente de redresser les Triges bon an mal an.
John hocha la tête.
— Reprenons, dit alors Clarke en souriant. Elle est enceinte, alors ? De combien ?
— Quelques semaines seulement, trois mois tout au plus, mais elle comprend parfaitement que tu es plus importante qu'elle. De plus, comme elle a dit avant que je parte, elle n'a pas besoin de moi pour le moment, elle est bien entourée avec nos amis qui la couvent et ta mère qui passe son temps à lui demander si tout va bien...
— Je ne connais pas cette femme, juste de nom, dit alors Derek. Mais pourquoi Roan a-t-il réagit aussi violemment sinon à cause du fait qu'elle était une Wastelander ?
— Emori est difforme, répondit Clarke en se levant.
Elle farfouilla dans une commode puis revint avec un calepin et le montra à Derek.
— Elle est très jolie, même avec son tatouage, dit-il en observant le dessin au fusain. Et cette main ne devrait pas la gêner pour s'occuper d'un bébé, si ?
— Tu as dessiné Emori ? s'étonna John en prenant le carnet. Oh, et tout le monde, en fait... Tu es très douée.
— J'ai passé plus d'un an isolement sur l'Arche, alors j'ai eu le temps d'apprendre à dessiner, répondit la jeune femme avec un sourire contrit.
— Ouais, je me souviens de toi, la fille qui passait sont temps à gueuler que l'Arche n'en avait plus pour longtemps, répondit Murphy en fronçant les sourcils.
— C'est ça.
— Comment ça ? demanda Derek.
— C'est une longue histoire, répondit Clarke. Pour faire court, il y a trois ans maintenant, peut-être un peu plus, mon père, Jake Griffin, ma mère et moi, on vivait sur l'Arche, qui flottait en orbite autour de la planète depuis quasiment un siècle. On était plutôt heureux, tous les trois, même je ne les voyais pas souvent à cause de leur travail ; un jour j'ai surpris mon père en train d'enregistrer une vidéo qu'il comptait diffuser dans toute l'Arche, révélant ainsi qu'on nous avait menti, que notre vaisseau spatial allait mourir dans quelques mois et ne durerait pas trois cents ans comme les constructeurs de l'époque l'avaient dit.
— J'imagine que ça n'a pas plu...
— Non, mais le pire est que ma propre mère l'a dénoncé à notre Chancelier de l'époque, Thelonius Jaha...
— Jaha ? L'homme à la peau noire qui prêchait pour ALIE ?
— Lui-même. Mon père a été condamné à mort après ça et jeté dans l'espace... reprit Clarke. J'ai alors décidé de finir ce qu'il avait commencé, mais ma mère m'a surprise et j'ai à mon tour été emprisonnée.
— Condamnée à mort aussi ?
— Non, parce que je n'avais que seize ans à l'époque et qu'il fallait un jugement pour envoyer quelqu'un dans l'espace. Je me suis donc retrouvée en prison avec plein d'autres jeunes qui ne pouvaient pas justifier de l'air qu'ils respiraient, et je passais mes journées à dire à tout le monde que l'Arche mourrait et que nous allions tout y passer si nous ne retournions pas sur Terre rapidement ; les gardes en ont eu marre et m'ont jetée dans une cellule sans vis-à-vis avec juste une fenêtre donnant sur la Terre... J'y ai passé un an, j'ai dessiné partout sur les murs, le sol, tout ce que je pouvais atteindre, jusqu'au jour où ma cellule s'est ouverte...
— Ce jour-là, on nous a tous jetés dans une navette et envoyés sur Terre, enchaîna Murphy. On était cent, cent-et-un en découvrant que Bellamy Blake s'était illégalement introduit dans la navette pour être avec sa sœur Octavia.
— Skairipa ?
— Elle-même... Et dire que nous ne sommes plus qu'une trentaine maintenant, soupira alors Clarke. Tout ça pour dire que oui, j'ai eu largement le temps de perfectionner mon coup de crayon... Tu dois y être aussi, John, je pense.
— Oh ?
Le jeune homme tourna les pages et tomba rapidement sur son portait.
— Oh, whao... J'ai l'air si... mélancolique. Ça date de quand ?
— Quand tu te remettais de cette maladie que les Trikrus t'avaient inoculée en te renvoyant chez nous. Tu étais assis dans ton hamac et j'ignore à quoi tu pensais, mais j'avais mon carnet, alors je t'ai dessiné...
John haussa les sourcils puis baissa le nez et referma le calepin en le rendant à Clarke.
— Tant de choses se sont passées depuis que nous sommes arrivés sur cette planète, dit-il en laissant son regard partir au dehors. On a de la chance d'être encore en vie, même ça a été très juste à de trop nombreuses reprises.
Clarke inspira en hochant la tête puis un silence s'installa. John le brisa rapidement en demandant à Derek comment il avait fait pour se retrouver Heda et surtout, quand aurait lieu l'intronisation pour laquelle il avait été mandé, au final. Le jeune garçon raconta du mieux possible, mais Clarke remarqua rapidement qu'il luttait contre la fatigue et l'envoya se reposer avant le dîner. Une fois qu'il eut quitté la salle de trône, la jeune femme soupira et John haussa un sourcil.
— On est loin de la carrure de Lexa, dit-il en s'appuyant contre le dossier du canapé.
— Oui, je sais, mais je n'ai pas eu le choix, répondit Clarke. Derek est une bonne âme et, de toute façon, il n'y a pas grand monde qui puisse arriver à la cheville de Leksa kom Trikru...
John opina.
— Et sinon, me concernant ? Tu sais déjà combien de temps je vais rester ici ? Je suis une sorte d'imposteur et je n'ai pas envie de me faire encore tabasser...
— Tu es Fleimkepa, John, tu le resteras toute ta vie, répondit Clarke avec un haussement d'épaules. Actuellement, Seiden est trop inexpérimentée, elle ne connaît pas tous les tenants et les aboutissants de cette fonction et je n'ai plus assez confiance en Gaia pour qu'elle finisse la formation des apprentis prêtres et gère les autres prêtres.
— Tu l'a renvoyée chez sa mère, de toute manière...
— Oui, jusqu'à ce qu'elle comprenne que c'est moi qui commande et pas elle.
— Hm, fais-le déjà comprendre à Roan, après tu verras pour Gaia, grimaça le jeune homme.
— Je n'en fais pas pour lui, il sait où sont ses intérêts. Lexa a beau l'avoir réintégré à la tête d'Azgeda en s'arrangeant pour qu'il tue sa propre mère, je peux tout à fait lui retirer ce privilège et mettre quelqu'un d'autre à sa place.
— Il le sait ?
— Oui, il le sait tout à fait, même sans jamais l'avoir formulé à haute voix. Sinon, dis-moi ! Comment ça va, chez nous ? Tu es allé voir Bellamy depuis que je suis partie ?
— Oui, deux fois ; écoute, il va bien, il a l'air de se plaire à vive tout seul dans cette petite maison... Il a fait un joli jardin et la maison est confortable aussi, il a un peu changé la disposition des meubles, mais c'est plus pratique comme ça.
— Je vois. Tant mieux. Je ne risque pas de rentrer de sitôt, malheureusement, donc autant qu'il s'installe. Il voulait venir avec moi, mais je ne sais pas si les Terriens m'auraient autant respectée si je m'étais pointée avec...
— Avec ton mec ? coupa John avec un rictus.
Clarke grimaça.
— J'allais dire, avec un garde personnel. Bellamy n'est pas mon mec, John, tu le sais parfaitement...
— Sérieux ? Eh Princesse, t'es la seule à pas voir qu'il est raide dingue de toi, ou bien ?
— Non, je le sais, et moi aussi je suis amoureuse de lui, mais nous ne pouvons pas être ensemble, nous sommes trop amochés... Nous devons guérir d'abord et laisser les âmes qui nous suivent trouver le repos.
— Ça va prendre des plombes fut le brouillard que vous vous traînez, tous les deux... grimaça John. Non, plus sérieusement, tu aurais dû le laisser venir avec toi et nous laisser la maison, à Emori et moi. Vous êtes les deux faces d'une même pièce, Clarke ; la vie a passé son temps à vous tenir éloignés l'un de l'autre depuis que nous avons atterrit dans cette clairière, mais les choses sont calmes en ce moment, alors pourquoi ne pas en profiter ?
— Parce que ce ne serait pas correct vis-à-vis de Derek.
John souffla par le nez.
— Ne t'attache pas à ce gamin, Princesse, dit-il en secouant la tête. Quand il sera Heda, il ne sera plus le même et tu auras le cœur brisé, encore une fois.
— J'en prend le risque. Tout comme je prends le risque de te mettre à la tête du Sanctuaire des Gardiens de la Flammes.
— C'est ça, change de sujet...
Clarke haussa un sourcil et John soupira.
— Tu sais que je ne suis pas Fleimkepa comme ces apprentis le croient, n'est-ce pas ? demanda John. J'ai tout appris en m'efforçant de ne pas sombrer quand Titus...
— Je le sais, et je te fais confiance, John, je sais que tu ne me tourneras pas le dos. Je n'ai besoin de toi que pendant le temps que Roan finisse la formation physique de Derek, après tu pourras rentrer à Arkadia et retrouver Emori. Cela ne devrait pas prendre plus d'un mois, deux au maximum.
John hocha la tête et souffla par le nez.
— Très bien, dit-il. Maintenant que je suis ici, autant que je fasse de mon mieux, mais je te conseillerai quand même de faire revenir Gaia, quitte à la rétrograder au rang le plus bas de la prêtrise. Je sais qu'elle a été trop loin, Tylo m'a expliqué la situation, mais je pense qu'en la renvoyant chez sa mère, elle va comprendre la leçon. De plus, Roan n'est plus le Régent, c'est toi désormais, Wanheda, et les gens te craignent bien plus que lui.
— Heda a besoin de gens de confiance autour de lui, pas de vipères.
John opina.
— Comment il en est arrivé à demander ton aide ? demanda-t-il ensuite.
— Je pensais qu'en confiant les Triges à Roan, il saurait s'imposer sur eux et faire en sorte qu'ils remontent la pense sans plus de casse, mais en fait, ils ne lui ont jamais fait confiance, répondit la jeune femme. De ce fait, ils se sont rapidement tournés vers Gaia pour avoir des conseils, d'abord, puis obtenir des autorisations pour ci ou ça, choses que normalement seul Heda peut autoriser.
— Genre ?
— Mariage, enfant, déménagement... Les grandes choses de la vie.
John opina et esquissa un rictus.
— C'est la même chose chez nous, dit-il. Tu te souviens quand il fallait demander l'autorisation au Chancelier pour faire un truc ?
Clarke haussa les sourcils.
— Et tu n'étais pas le fils de l'Ingénieur en Chef ou de la Médecin-Chef...
— Non, et heureusement !
Ils se mirent à rire puis Clarke proposa à Murphy de se rendre au Sanctuaire pour passer du temps avec les Prêtres, qu'ils se reverraient pour le dîner. Il la laissa ensuite et deux gardes l'accompagnèrent sans un mot de sa part quand il se retrouva dans le couloir ; cela le surprit, mais il ne dit rien, s'étonnant d'être déjà respecté alors qu'il n'était arrivé que depuis une poignée d'heures...
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