Chapitre 16

— Longue vie à Heda.

— Cache ta joie surtout. Cela veut dire que Clarke va rentrer.

Bellamy jeta le courrier sur la table et quitta soudain sa chaise.

— Bell...

— Elle ne rentera pas, O, tu ne l'as pas encore compris ?

La brunette serre les lèvres.

— Pourquoi ? Ils ont un Heda maintenant, son boulot est terminé... Ça fait huit mois qu'elle est partie, huit putains de mois !

— Pas la peine de devenir grossière, hein, je sais compter, marmonna le jeune homme.

— Ouais, désolée, je... Bref. Ils ont un Heda, alors elle peut rentrer.

— Ça ne marche pas comme ça. Elle m'a expliqué cet hiver, que même s'il est intronisé, elle devra rester avec lui pour tout lui enseigner puisqu'il n'y a personne d'autre pour le faire.

— Et les Commandants dans la Flamme, alors ? Ils sont là pour ça, si j'ai bien compris.

Bellamy baissa le nez et passa sa langue sur ses lèvres.

— Je veux tout autant que toi qu'elle rentre, d'accord ? dit-il. Mais ça ne sera pas possible, elle me l'a dit... Et quand bien même Derek serait prêt à voler en solo, elle ne reviendra pas ici.

— Mais pourquoi ?! s'exclama Octavia, surprise. C'est sa maison, c'est...

— C'est ma maison, O, désormais, et Clarke ne reviendra plus y vivre parce que nous ne sommes pas faits pour être ensemble, c'est tout.

— Conneries ! Tu dis de la merde, Bell ! Vous êtes ce qu'il y a de mieux comme couple sur cette putain de planète ! répliqua Octavia avec véhémence en bondissant de sa chaise. Y a vraiment que vous deux pas voir l'évidence !

— Si ! répondit Bellamy en lui faisant brusquement face. Si, on la voit, l'évidence, O, mais on ne peut pas, d'accord ? On n'a pas le droit d'être ensemble !

— Et c'est qui, qui l'a décidé, ça, hein ? Elle, j'imagine ? Tout va parce qu'elle est mieux dans ses fringues de Tri-...

Octavia baissa aussitôt la tête en poussant un petit cri de surprise, levant une main. Quand elle releva une paupière, Bellamy quittait la maisonnette à grande enjambées ; il avait failli la frapper mais s'était arrêté à temps. Oh, cela n'aurait pas été la première fois qu'ils en viendraient aux mains, mais elle préférait éviter d'avoir le visage marqué deux jours avant de rentrer à TonDC... Sans aucun doute que Indra ou Stefan lui feraient quelques réflexions... En songeant à son compagnon, Octavia se mordit la joue. Peu avant qu'elle ne quitte le village des Trikrus pour rejoindre son frère ici, à la Pointe, elle avait refusé la proposition d'union de Stefan et avait annoncé qu'elle y réfléchirait tranquillement une fois sur la côte. Elle avait menti, elle n'y avait pas songé une seule fois avant ce soir et elle n'en avait même pas parlé à son frère alors qu'il devait être le premier au courant... Mais il a tellement de problèmes de cœur en ce moment, avec Clarke qui vit si loin... Je n'ai pas envie de l'assommer avec ma relation amoureuse et encore moins de lui imposer mon bonheur... Avec un soupir, la jeune femme récupéra la lettre de Clarke sur la table et la relut. Elle était arrivée par faucon une heure plus tôt et Bellamy semblait avoir su à l'avance ce qu'elle contenait, car il avait refusé de l'ouvrir. Octavia s'en était chargée et avait été surprise, mais contente d'en lire le contenu, pas comme son frère... Elle sortit alors de la maisonnette et le trouva assis à califourchon sur la clôture des chevaux.

— Bell, je suis désolée... dit-elle doucement.

Elle posa une main sur la cuisse de son frère qui souffla par le nez en baissant la tête.

— Je dois me faire une raison, répondit-il en repassant du bon côté de la clôture. Elle ne reviendra jamais. Tout ce que je lui souhaite, c'est d'être heureuse là-haut, de se trouver quelqu'un et d'élever Derek aussi bien que possible.

— Oh, Bell... Pourquoi ? Pourquoi est-ce que tu renonces comme ça à elle ?

— Ce n'est pas moi, c'est elle, et elle a raison. Nous avons tué trop de monde, O, et ils ne sont pas partis, ils sont toujours là, je les sens, ils me frôlent et m'empêchent de dormir... Ils sont furieux et je les comprends. Clarke fait se son mieux pour se débarrasser de ses fantômes, et d'ici-là, il nous serra impossible d'être semble sans dépérir. Est-ce que tu comprends ?

— Je... Je crois...

Bellamy lui prit la main.

— Nous sommes jeunes, elle et moi, nous avons le temps de voir venir.

— Tu as bien réfléchi, on dirait...

— Oui. O, quand... quand Clarke est repartie pour Polis, on s'est embrassés et...

Bellamy ferma les yeux et déglutit ; une larme glissa sur sa joue.

— Si elle n'avait pas été sur son cheval à ce moment-là, elle ne serait plus jamais repartie... acheva-t-il.

Octavia souffla.

— Oh, je suis désolée... ! Je suis tellement désolée que tu souffres à ce point de son absence ! Et moi qui arrive avec mon histoire toute fraîche avec Stefan et...

— Non, ne mets pas ta relation entre parenthèses pour moi, surtout pas. Tu as eu ton lot de douleurs, O, d'accord ? Lincoln a été tué sous tes yeux, tu auras cette image en tête toute ta vie, alors profites-en pour remettre les pions debout et profite de ta relation avec ton Podakru. Et surtout, surtout ! S'il te demande de l'épouser, fonce ! Fonce, jette-toi à son cou et hurle un oui qui s'entendra jusqu'à Polis ! Tu le mérites.

Octavia se mit à rire malgré les larmes qui ruisselaient sur son visage. Elle lança ensuite ses bras autour du cou de son frère et il l'enveloppa des siens en plongeant son visage dans son cou. Elle recula quelques secondes plus tard et passa ses manches sur ses joues, puis sur les siennes en souriant.

— Il l'a fait, dit-elle alors.

— Quoi ?

— Stefan, il m'a demandé de l'épouser, littéralement deux heures avant que je vienne te rejoindre...

— Et tu as répondu quoi ?

— Que j'allais réfléchir et te demander ton autorisation. Techniquement, ce serait à lui de le faire, mais il l'a demandée à Indra et elle est un peu ma mère de cœur, alors c'est tout comme.

— Oh, Octavia, je suis si content pour toi...

Il la reprit dans ses bras et elle rigola.

— Je repars demain, dit-elle alors. Promis, dès que j'arrive à TonDC, je saute de cheval et je me jette à son cou, tu as ma parole !

Bellamy rigola et l'étreignit à nouveau. Elle recula.

— Et toi, en échange, je veux que tu te trouves quelqu'un en attendant Clarke. Parce que je sais qu'elle va revenir, d'accord ? Elle ne te laissera pas en plan comme ça, pas après tout ce que vous avez vécu ensemble.

— Je sais, elle me l'a dit, mais pas maintenant.

— Les choses peuvent changer, tu sais ? Elle ne sortira avec personne, je le sais, elle a beaucoup trop de choses à penser, et elle ne laissera pas Derek tout seul là-bas.

— Elle ne pourra partir avec lui.

— Non, bien sûr, mais une fois qu'il sera plus âgé et bien installé dans son rôle de Heda, elle pourra rentrer. Il a quoi, treize ans, je crois, donc dans, allez, grosso merdo, quatre ans ? Il aura dix-sept ans, il n'aura plus besoin d'elle.

Bellamy esquissa un sourire.

— On en reparlera d'ici là. Allez, on va manger un morceau et faut aller chercher du bois sur la plage, on n'en a presque plus.

— Je fais faire à dîner, va chercher le bois, mais prend des lampes, j'ai vu des loups, ce matin.

— Ouais, je les ai vus aussi, mais ils ne viendront pas plus près, ils cherchent juste des trucs à manger.

Octavia haussa un sourcil.

— Tu leur donnes à bouffer ?

Bellamy ricana.

— Ils se servent tout seuls dans le compost ! Si tu savais combien de fois j'ai retrouvé mon compost étalé sur cinq mètres à la ronde de bon matin... !

Octavia rigola puis secoua la tête et rentra dans la maison. Elle observa ensuite son frère récupérer le traîneau de bois qu'il avait construit avec l'aide de Nathan Miller, quelques semaines en arrière, pour transporter le bois plus facilement qu'en faisant des aller-retours. Elle se rendit ensuite dans le cellier et récupéra un bocal de légumes et un morceau de viande séchée suspendue à une étagère. Plus les semaines passent et plus cette maison devient un petit paradis, songea-t-elle en regardant autour d'elle. Faudrait vraiment que les Skaikrus songent à se trouver un vrai territoire... Minute, Clarke n'avait pas mentionné ça, il y a quelques mois ? Faudra que je lui en parle... La brunette haussa les épaules puis retourna dans la maison, mis le dîner à chauffer et entreprit ensuite de ranimer la cheminée, mais elle était pensive, un peu inquiète aussi, car son frère semblait être résigné à avoir perdu Clarke alors qu'il lui fallait juste patient quelques années, voire peut-être même quelques mois seulement avant de la retrouver. Je me fiche qu'ils soient amants ou juste des amis qui vivent au même endroit, je veux juste qu'ils ne soient plus séparés, parce que là, Dame Nature commence à me courir sur le haricot à toujours faire en sorte qu'ils soient chacun à un bout du territoire...

.

À l'autre bout du territoire, justement, on dînait. Derek s'était remis de l'intronisation et si Clarke s'occupait toujours des Triges sans rien avoir changé à ses agendas, elle emmenait désormais le garçon partout avec elle ; quand il n'était pas avec elle, il était avec Roan pour s'entraîner, ou avec Goran pour apprendre le métier. Ses journées étaient donc très chargées, bien plus qu'avant, et il tombait souvent raide de fatigue à peine se couchait-il. Cependant, ses nuits étaient loin d'être reposantes...

— J'ai fini, je peux aller me coucher ?

Clarke regarda son fils de cœur et opina.

— Bonne nuit, dit-il en quittant la table.

— À toi aussi, mon grand, répondit Roan.

Le garçonnet quitta ensuite la pièce et quand la porte de sa chambre se fit entendre, l'Azgeda se tourna vers Clarke.

— Qchoi ? lui demanda-t-elle, sa fourchette dans la bouche. Pourquoi tu fais cette tête ?

Roan souffla par le nez.

— J'ai discuté avec Derek, ce matin, après l'entraînement, répondit-il en se redressant. Les Anciens lui mènent la vie dure, il ne peut plus fermer les yeux sans revoir des scènes du passé qui forment des messages destinés à le rabaisser un peu plus à chaque fois...

— C'est normal, il est en apprentissage, il les fera taire rapidement, je ne m'en fais pas.

Le guerrier renifla et posa sa fourchette.

— Lexa est venu lui parler, cette nuit, lâcha-t-il alors.

Clarke manqua s'étouffer avec son verre de vin.

— Lexa... ? Mais...

Elle passa sa main sur sa tunique et son menton ; Roan secoua la tête.

— Selon les dires de Derek, elle désapprouve ton choix le concernant, elle lui a dit qu'il était trop chétif et trop faible pour devenir Commandant. Elle ne l'a pas épargné et il s'est réveillé en sueur et terrifié...

Clarke était pâle.

— Mais pourquoi il ne m'a rien dit, ce matin ? J'ai bien vu qu'il avait l'air absent, mais j'ai mis cela sur le compte de la journée d'hier et...

Murphy inspira. Il dînait avec la jeune femme presque tous les soirs depuis l'intronisation de Derek, avec ou sans Roan, juste pour s'assurer que tout se passait bien avec la Flamme.

— Ne me dis pas qu'il t'en a parlé aussi, répondit la blonde.

— Disons que j'ai eu des échos, de Tylo, d'abord, et de Roan aussi.

Clarke leva les mains en se redressant d'un air abasourdi.

— Et quoi ? Je suis transparente ou bien ? Derek est mon fils, les gars ! Qu'il n'ait pas envie de me décevoir, je peux le comprendre, qu'il vienne vous parler à vous, ok, je comprends, mais que vous ne m'en parliez pas, là, je saisis pas. Ça dure depuis quand ?

Roan croisa le regard de Murphy.

— Depuis l'intronisation, répondit alors celui-ci.

— Quoi ?! Mais ça fait un mois ! Ça fait un mois et vous...

Avec un soupir agacé, la jeune femme quitta la table.

— Clarke, attends, tenta Roan en se levant à son tour.

— N'essaie pas de trouver des excuses, d'accord ? Tu n'es rien pour moi, Roan, sinon un ami et l'entraîneur de Derek.

— Je sais, répondit le Terrien, les sourcils froncés. Et je ne cherchais pas à produire une excuse, je voulais juste... Bon, tu sais quoi ? Ça ne sert à rien de discuter avec toi, de toute manière, tu es tellement sûre de tes décisions que si je te dis que c'était une erreur monumentale d'introniser le gamin maintenant, tu ne vas même pas m'écouter !

— Haihefa... siffla John entre ses dents.

Il se gratta le front du bout des doigts et l'Azgeda lui jeta un regard lourd avant d'apercevoir Derek à l'entrée du corridor menant aux chambres.

— Jok...

Clarke soupira et tenta de retenir le garçon quand il tourna les talons. La porte de sa chambre claqua avec une telle violence que les murs tremblèrent ; la jeune femme serra alors le poing et se retourna vivement vers les deux garçons, mais sa main bouscula une jolie carafe en verre posée sur une petite table où les serviteurs déposaient les plats avant de les enlever tous à la fin du repas. La bouteille bascula et son col se brisa en touchant le bord du plateau.

— Et merde ! jura Clarke.

Elle se baissa alors pour ramasser les morceaux de verre, mais quand elle émit un bruit reconnaissable, John se figea. Il contourna alors vivement la table avec une serviette dans la main et il repoussa Clarke pour lui emballer les doigts entaillés.

— Tu t'es coupée ? demanda Roan en faisant un pas en avant. Ça va ?

— Oui, ce n'est rien... Allez-vous-en, tous les deux, allez, le dîner est terminé, du vent.

Elle se releva alors et se dirigea vers un petit meuble supportant une bassine avec un broc d'eau et une coupelle en fer, qui servait à se laver les mains au cours de la journée ou pour boire. Quand elle repoussa la serviette de table, elle grimaça en voyant la tache noire sur le tissu, puis plongea la main dans l'eau froide et souffla. Elle sentit alors une présence dans son dos et son sang ne fit qu'un tour quand elle vit Roan qui regardait l'eau grise de la bassine avec des yeux ronds, blême. Quand il recula, Murphy tenta de le retenir, mais il manqua prendre une baffe et se baissa juste au moment où le Terrien se retournait pour partir.

— Tylo ! s'exclama soudain Clarke.

La porte s'ouvrit aussitôt sur Tylo qui se planta dans l'entrée. Il campait devant sa porte du matin au soir et dormait dans la chambre d'en face la nuit. Il était donc à portée de voix.

— Laisse-moi passer ! grogna alors Roan.

— Pas si Rijant a ordonné le contraire.

— Elle n'a rien dit de tel.

— Je le fais, répondit Murphy. Et tu sais que j'ai autant de pouvoir qu'elle.

Roan haussa un sourcil puis laissa échapper un son dédaigneux. Il regarda Tylo, puis le sabre à sa hanche, et serra les mâchoires avant de se détourner en levant les mains.

— Je reste devant la porte, dit alors le garde.

— Merci, répondit Clarke.

La porte se referma ensuite et Roan se mit à faire les cents pas autour de l'appartement. Murphy, lui, retourna auprès de Clarke et inspecta ses plaies, mais elles étaient superficielles et n'avaient pas besoin de points.

— Donne-moi mon sac, dit-elle alors en indiquant une besace grise à une patère.

Murphy la ramena et trouve un rouleau de bandages et des tissus absorbants dedans. Il enveloppa la main de la jeune femme avec précaution puis ils s'assirent dans le canapé en silence. Roan les observa un moment avant de s'asseoir à son tour, contre son gré.

— Si tu dis à qui que ce soit ce que tu as vu ce soir, je te fais emprisonner, dit alors Clarke.

— Tu es une Natblida ! répliqua alors l'Azgeda. Tu as le sang noir et tu n'as pas jugé utile de me le dire ! Depuis quand, hein ?! Depuis quand !

— Depuis la mort d'Ontari, répondit Murphy. Quand nous avons branché le corps sans vie de ta sœur à Clarke pour qu'elle puisse accéder à la Flamme ET à la Cité des Lumières pour vaincre ALIE, le sang noir s'est répandu dans ses veines. C'était le seul moyen pour que la Flamme ne la tue pas dans la seconde...

Il regarda alors Clarke qui caressait son pansement en silence.

— Nous pensions que son sang allait naturellement redevenir rouge au bout de quelques heures, mais non...

Roan les regarda tour à tour et secoua la tête.

— Et tu nous as fait tout une histoire pour trouver des Natblidas à introniser alors que tu en étais une depuis des mois ?! s'exclama-t-il alors. Tu te rends comptes, Clarke ? Est-ce que tu rends seulement compte de ce que tu as fait ?

La jeune femme serra les lèvres et inspira.

— Je n'ai aucun compte à te rendre, dit-elle alors en le regardant. Tu m'as demandé de venir, Roan, parce que tu n'arrivais pas à te faire obéir des tiens, alors je suis venue, mais en qualité de Wanheda, et pas de Natblida, parce que je savais très bien que soit vous alliez me tuer, soit vous alliez me mettre sur ce putain de trône. En apprenant que Wanheda était une Sheidjus, les Prêtres m'auraient condamnée à mort, parce qu'ils savent tous parfaitement qu'il est impossible qu'un Skaikru ait le sang noir ! Et peu importe d'assassiner une déesse, vous n'êtes plus à ça prêt, hein, après avoir brûlé vive Rebecca !

Roan blêmit et regarda Murphy.

— C'est vrai ? demanda-t-il.

— Oui, répondit le jeune homme. La fresque sur le mur du sanctuaire raconte l'histoire de Becca Pramheda depuis son arrivée ici, dans cette navette de secours, comment elle a survécu au crash et comment elle a rassemblé les survivants autour d'elle. Cependant, quand ils ont compris qu'elle était différente, parce qu'elle supportait les radiations, parce qu'elle n'était pas malade comme eux, ils ont pris peur et ils ont décidé de... Honnêtement, je ne sais pas comment on peut en arriver à une telle extrémité, mais les années après les bombardements ont été très compliqués et même le sanctuaire n'a pas beaucoup de documents là-dessus ; les gens n'avaient pas la tête à écrire, ou très peu, ils voulaient juste survivre et oublier toutes ces horreurs...

— Si elle a été tuée, alors comment son sang noir est arrivé jusqu'à nous ?

— De la même manière qu'il est arrivé à moi, répondit Clarke. Il a été transfusé. Une simple seringue, quelques centilitres de sang noir injectés directement dans la carotide et c'est terminé. Et apparement, le changement est permanent...

Elle serra le poing malgré le pansement et Roan s'adossa au canapé en passant ses mains sur son visage.

— Si tu avais assumé, dit-il soudain. Toute cette histoire avec Derek n'aurait jamais été, tu en est consciente ? Tu t'es tellement attachée à lui que tu vas rester encore des années ici pour le soutenir alors que ton rôle est terminé depuis des semaines !

Clarke serra les mâchoires.

— Allez-vous-en, dit-elle alors. Rentrez chez vous, je ne veux plus vous voir.

— Et Derek ? Tu vas le laisser souffrir encore longtemps ? demanda John.

La jeune femme le regarda.

— Souffrir ? Il va apprendre, il va s'habituer ; tous les Commandants passent par-là et...

Devant le visage qu'affichaient les deux hommes, Clarke sentit le sang se retirer du sien.

— N-non... Ne faites pas ça... Je ne peux pas... Je ne veux pas... balbutia-t-elle alors.

Les larmes roulèrent sur ses joues et John se leva alors.

— Je t'en prie, dit-elle. John...

— Il souffre, Clarke, répondit celui-ci. Il souffre, l'intronisation a échoué, l'Esprit des Commandants ne veut pas de cette nouvelle recrue, c'est comme ça, ça arrive parfois, et je prefère lui retirer la Flamme avant qu'ils ne décident de le tuer.

Clarke eut un hoquet et porta ses mains à sa bouche.

— Personne n'en saura rien, dit alors Roan en se levant à son tour. Ni pour toi, ni pour lui, tant que toi, tu ne l'auras pas décidé. Ce jour-là, tu prendras tes responsabilités.

— Q-... Non ! Non, jamais je ne monterai sur le trône de Heda !

— Clarke, tu n'as pas le choix !

La jeune femme fondit alors en larmes et Murphy serra les mâchoires.

— Je suis désolé, Clarke... souffla-t-il en se détournant.

— John !

Mais il avait déjà disparu dans le corridor menant aux chambres et il entendait encore les sanglots de son amie quand il toqua contre le panneau de bois. Personne ne répondit alors il entra et s'approcha du lit, baigné dans la pénombre des candélabres. Il y trouva le jeune garçon, prostré sur son lit et il s'assit près de lui en posant une main sur son épaule.

— Je vais t'aider, Derek, dit-il doucement. Tu veux bien ?

Derek leva les yeux vers lui.

— Je vais te retirer la Flamme, reprit Murphy. L'Esprit des Commandants ne veut pas de toi, ce n'est pas grave, cela arrive, d'accord ? Mais tu ne devras le dire à personne et ne pas retirer le symbole, tu as compris ?

Le jeune garçon déglutit.

— Pourquoi elle pleure, Clarke ?

— Roan a découvert qu'elle avait le sang noir et il voudrait qu'elle monte sur le trône, mais elle ne veut pas.

— Elle ne doit pas...

John pencha la tête.

— Pourquoi ?

— Lexa... Lexa m'a dit, une fois...

Il se tut alors et serra les lèvres. John n'insista pas puis enjoignit l'enfant à se mettre sur le ventre. Il repoussa les mèches de cheveux noirs qui lui tombaient sur la nuque, et approcha sa main de la fine cicatrice rose qui y courait.

—  Yu gonplei ste odon, Derek kom Podakru... Gonplei kom Heda kigon feva, souffla-t-il.

Derek eut un hoquet et se mit à pleurer. Il agrippa le matelas tandis que la Flamme rouvrait d'elle-même la cicatrice faites quelques semaines en arrière. Il cria dans son oreiller tant la douleur était épouvantable et normalement, la Flamme n'était extraite que d'un Heda déjà mort, pas vivant...

— Ça va aller, dit alors John. C'est bientôt terminé.

Derek gémit tandis que la puce bleutée s'extrayait des chairs du jeune garçon dans un bruit humide, dressée sur ses filaments argentés. John la prit délicatement entre son pouce et son index.

— Quia nunc vale... souffla-t-il.

Les tentacules sereplièrent et Derek s'évanouit aussitôt. John le regarda, soupira, puis quittala chambre en glissant la Flamme dans la poche de son pantalon avec avoirdéposé un morceau de tissu sur la nuque du jeune garçon.

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